Phillip B. Agee, l’auteur du livre Inside the Company : CIA Diary, est décédé à La Havane ce lundi 7 janvier 2008, à l’âge de 72 ans, a annoncé le journal cubain Granma. Sa crémation s’est déroulée dans l’intimité.

Cet ancien officier de la CIA, qui avait participé pendant 12 ans aux opérations montées par l’agence d’espionnage des États-Unis dans diverses nations latino-américaines, avait démissionné en 1968, peu après le massacre de Tlatelolco (Mexique), en raison de son désaccord croissant avec les activités clandestines auxquelles se livrait l’agence.

Plus tard, en 1975, Phillip Agee était devenu célèbre dans le monde entier à la suite de la publication de son ouvrage Inside the Company : CIA Diary, où il révélait en détail « les activités terroristes, de déstabilisation et de subversion menées par le gouvernement des États-Unis contre les gouvernements et les personnalités progressistes et révolutionnaires en Amérique latine et dans les Caraïbes », rappelle le quotidien cubain Granma.

Après la publication de son ouvrage, où il décrivait la manière dont la CIA et le gouvernement des États-Unis avaient agi contre des gouvernements démocratiquement élus en Uruguay, en Argentine et au Chili, Phillip Agee s’était vu contraint de quitter son pays pour se rendre en Europe. Il fut successivement expulsé du Royaume-Uni, des Pays-Bas, de France, d’Allemagne de l’Ouest et d’Italie. Son passeport états-unien ayant été confisqué, il obtint un passeport de l’île de la Grenade, jusqu’à l’invasion militaire US, puis un autre du Nicaragua, jusqu’à la chute des Sandinistes.

Agee ayant révélé le nom de plus de 250 officiers de la CIA, incluant les principaux chefs de poste, George Bush père fit adopter en 1982 l’Intelligence Identities Protection Act (IIPA) criminalisant ce type de publication. Une loi qui ne fut appliquée qu’en deux occasions : contre Philip Agee, et plus récemment dans l’affaire Palme.

Malgré la persécution dont l’auteur et son livre avaient fait l’objet de la part des autorités US, Inside the Company : CIA Diary fut publié en 27 langues et constitue encore un ouvrage de référence pour l’étude des modes d’ingérence auxquels les administrations des États-Unis ont eu recours non seulement contre les mouvements populaires et révolutionnaires mais aussi contre divers gouvernements démocratiques à travers le monde et notamment en Amérique latine. Après le Watergate, il constitua la base de travail de la Commission d’enquête du Sénat des États-Unis, présidée par Frank Church, qui déboucha sur une vaste réforme des services de renseignement US et des législations afférentes.

En 1978 et 1979, Phillip Agee s’était consacré à la dénonciation de l’ingérence des États-Unis à travers le monde, notamment par la publication du magazine Covert Action Information Bulletin et de deux autres ouvrages intitulés Dirty Work : The CIA in Western Europe et Dirty Work 2 : the CIA in Africa.

Depuis 1980, Phillip Agee résidait à La Havane où, dans un effort pour briser le blocus économique et commercial que les États-Unis imposent contre Cuba depuis près de 50 ans, il avait ouvert l’agence de voyages Cubalinda afin de faciliter la venue des ressortissants états-uniens désireux de se rendre dans l’île.

Le Réseau Voltaire, Axis for Peace, l’Agence cubaine d’information et tous ses amis rendent hommage à cet exceptionnel militant de la liberté.

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Lire sur notre site :
 « Les États-Unis en guerre de basse intensité contre Cuba », par Philip Agee, Réseau Voltaire, Granma, 10 septembre 2003.
 « La nature de l’intervention de la CIA au Venezuela » entretien de Jonah Gindin avec Philip Agee, Réseau Voltaire, Alia 2, 30 mars 2005.