Liban : très faible mobilisation pour la manifestation anniversaire du 14-Mars / Saad Hariri concentre ses critiques contre les armes du Hezbollah / Nouvel acte d’accusation du TSL / Le faux témoin Mohammed Zouhair as-Siddiq sous protection des proches de Moubarak / Arrestation de collaborateurs de Saad Hariri en Arabie saoudite / Washington veut déstabiliser les banques libanaises / Les missiles livrés au Hezbollah transiteraient par la Syrie /
Israël dans la tourmente des changements arabes / Les Occidentaux donnent à Khadafi le temps de finir le sale boulot / Le Mossad aurait assassiné un ingénieur palestinien en Ukraine.
La tendance générale
Le pétrole et Israël avant les droits de l’Homme
Les événements de ces deux derniers mois, marqués par les révolutions en Tunisie, en Égypte, au Yémen, à Bahreïn puis en Libye, ont levé le dernier doute sur l’attitude des pays occidentaux à l’égard du monde arabe. Une conduite caractérisée par la politique des deux poids deux mesures, et par une schizophrénie chronique. Les gouvernements de ces pays ressassent continuellement leur discours sur le respect des droits de l’Homme, alors qu’ils construisent leurs positions politiques conformément à deux priorités : la « sécurité d’Israël » et l’hégémonie occidentale sur le pétrole arabe.
Cette attitude est très clairement apparue dans la position des États-Unis au sujet de la situation en Libye. Washington a tardé à dénoncer les massacres commis par le régime libyen contre son propre peuple, pour donner au colonel Mouammar Kadhafi le temps qu’il fallait pour écraser le soulèvement populaire. Parce qu’il n’a pas trouvé des collaborateurs sûrs pour prendre la tête de la révolte libyenne, l’Occident, et plus particulièrement les États-Unis, a choisi d’appuyer le régime de Kadhafi. Et ce sont le Royaume-Uni et l’Italie qui ont été chargées de soutenir le colonel libyen, tandis que les services de renseignement états-uniens estimaient, avec enthousiasme, que Mouammar Kadhafi avait de fortes chances d’écraser l’insurrection.
À cette phase, nous étions devant l’image suivante : un soulèvement populaire qui avançait des revendications démocratiques était mis sur un même pied d’égalité qu’un régime qui le réprimait dans le sang et qui n’hésitait pas à bombarder villes et villages à l’artillerie lourde et avec l’aviation. Pendant ce temps, les États-Unis laissaient trainer l’affaire de l’imposition d’une zone d’exclusion aérienne pour donner plus de temps à leur allié Kadhafi. Et les dénonciations des crimes du régime libyen n’auraient pas eu lieu sans la pression de l’opinion publique occidentale qui exigeait qu’un soutien soit apporté aux révolutionnaires.
À présent, tous les scénarios d’interventions militaires en Libye de la part de l’Occident sont construits de manière à assurer le contrôle des régions pétrolières et non pas à préserver les intérêts du peuple et à garantir la victoire de la révolution. Ces scénarios vont du partage de la Libye en deux entités, au cas où Kadhafi ne réussissait pas à trancher la bataille en sa faveur, à l’occupation directe. Dans les deux cas, des torrents de sang seront versés et l’hégémonie sur le pétrole sera assurée pour servir les intérêts économiques et militaires d’Israël.
Israël, dont Kadhafi a sollicité l’aide d’une manière directe, est clairement présent dans les calculs occidentaux sur les moyens de réagir aux révolutions arabes. Les Etats-Unis tentent ainsi de renforcer les influences dans les nouveaux gouvernements, en Tunisie et en Egypte, pour s’assurer qu’ils respecteront les engagements des anciens régimes à l’égard d’Israël, et veulent empêcher la victoire de la révolution libyenne qui a exprimé, dans les discours de ses chefs, son attachement à la cause palestinienne.
La même attitude états-unienne est observée dans les événements du Yémen, de Bahreïn, de Jordanie et d’Arabie saoudite, où Israël reste le principal facteur qui dicte l’attitude de l’Occident, États-Unis en tête, à l’égard des révoltes populaires.
La tendance au Liban
13 mars : d’avantage d’échecs internes et externes
La campagne de mobilisation entreprise ces dernières semaines par le mouvement pro-US du 14-Mars, basée sur un discours de haine, d’exacerbation des instincts sectaires et communautaires et de rejet de l’Autre, pour le rassemblement du 13 mars 2011, n’a pas atteint les objectifs escomptés. Pourtant, Le Premier ministre sortant, Saad Hariri, a dépêché son cousin Ahmad Hariri au Nord et dans la Békaa et des sommes importantes d’argent ont été offertes aux manifestants sous forme de bons d’essence et d’allocations de transport.
Au lendemain du rassemblement commémorant le sixième anniversaire de la « révolution du cèdre », ont peut faire les observations suivantes :
– 1. Toutes les agences de presse internationales ont parlé de « dizaines de milliers de participants », alors que les services de sécurité libanais ont avancé le chiffre de soixante mille à soixante-dix mille manifestants. Un chiffre très en deça du nombre de participants des années précédentes.
– 2. Le leader druze Walid Joumblatt, la Jamaa Islamiya, le Premier ministre désignée Najib Mikati et son allié le ministre sortant de l’Economie Mohammad Safadi, ont appelé leurs partisans à boycotter la manifestation. Résultat : la participation des druzes était insignifiante, celle des chrétiens se limitait aux partisans des Forces libanaise de Samir Gaegea et du parti Kataëb d’Amine Gemayel. Tripoli, la ville natale de Mikati et Safadi, a vu très peu de ses habitants participer à la manifestation, de même que Beyrouth, dont les habitants ont manqué d’enthousiasme. La plupart des manifestants venait du Akkar, au Liban-Nord.
– 3. La manifestation de cette année était l’aboutissement d’un recul enregistré par le 14-Mars qui s’est vu contraint, en raison du rapport de force ambiant, de modifier presque tous les jours le slogan central de la manifestation et le contenu des spots publicitaires télévisés dont certains comportaient des contre-vérités et des montages grossiers. Une famille prise sous le feu des combats en mai 2008 a été présentée comme étant partisane du Courant du futur, alors qu’il s’agissait de partisans du Hezbollah pris sous le feu de miliciens de Saad Hariri. La télévision du Courant du futur a été contrainte de retirer le spot après que la famille concernée eu menacé de porter plainte.
– 4. Sur le plan externe, seul Daniel Bellemare, le procureur du Tribunal spécial pour le Liban, a apporté son soutien au 14-Mars, en annonçant avoir soumis un acte d’accusation amendé au juge de la mise en état, Daniel Fransen. Le timing de cette annonce intervient à la veille de la manifestation, comme celle de la soumission du premier acte d’accusation avait coïncidé avec le début des consultations parlementaires pour le choix d’un nouveau Premier ministre après la chute du gouvernement de Saad Hariri.
– 5. L’immense portrait du roi Abdallah d’Arabie, accroché sur la façade d’un immeuble au centre-ville, lieu de la manifestation, ne cache pas la réalité que Riyad n’est pas satisfait du comportement politique de Saad Hariri. Vendredi, le Conseil de coopération du Golfe (CCG), qui ne prend aucune décision sans le feu vert saoudien, a publié un communiqué apportant un soutien clair et net au nouveau Premier ministre Najib Mikati.
Le 14-Mars est incapable de transformer sa manifestation en levier pour modifier à son avantage les rapports de forces au Liban, tandis que les changements qui se déroulent dans le monde arabe, notamment en Égypte, constituent une grande source d’inquiétude pour ce mouvement qui s’est complètement aligné sur la politique états-unienne et semble prêt, en brandissant le slogan du désarmement de la Résistance, à appliquer aveuglément l’agenda de Washington et d’Israël… dans le seul but de récupérer le pouvoir qu’il a perdu.
Déclarations et prises de positions
Saad Hariri, Premier ministre sortant
« Il n’est pas possible qu’on brandisse des armes face à la volonté démocratique du peuple et face à la vérité (…) Nous voulons placer ces armes sous le contrôle et l’autorité de l’État car c’est l’armée qui nous protège tous. Seule l’Armée libanaise doit détenir des armes et seul l’État doit décider de la guerre ou de la paix. Les armes qui servent à instaurer un État dans l’État doivent disparaître (…) Le Liban que nous souhaitons est celui qui n’établit pas de distinction entre un individu et un autre, un État libre et civil anti-confessionnel et anti-sectaire au sein duquel chaque Libanais se soumet aux lois. »
Michel Aoun, leader chrétien, allié du Hezbollah
« Nous déplorons la décadence du discours politique qui porte atteinte aux constantes nationales, à la coexistence et au respect mutuel entre les communautés. Ce discours politique porte atteinte à des causes nationales dont nous sommes fiers. Nous sommes fiers des armes de la Résistance car elles nous ont relevés la tête partout dans le monde (...). Ces armes préservent notre dignité. Il est honteux de parler de cette façon des armes de la Résistance et des milliers de martyrs qui sont tombés (…) Nous voulons qu’une seule personne parmi eux ait le courage de faire une autocritique. S’ils avaient un peu de conscience, les trois quarts des députés du 14-Mars auraient dû démissionner après les révélations de WikiLeaks. »
Mohammad Raad, chef du bloc parlementaire du Hezbollah
« Le texte adressé par le Tribunal spécial pour le Liban (TSL) au ministère de l’Intérieur demande toutes les empreintes digitales disponibles au ministère de l’Intérieur. Il faut préciser que le ministère de l’Intérieur détient près de 4 millions d’empreintes digitales (…) Concernant la formation du gouvernement, les choses suivent leur cours calmement et normalement. Tout se passe dans une optique qui permettra à terme de répondre aux attentes des citoyens. Nous ne sommes pas encore en retard et nous ne pensons pas que la naissance du gouvernement va connaître du retard car les choses se déroulent normalement. »
Salim Hoss, ancien Premier ministre
« Ceux qui font de l’abolition des armes (du Hezbollah, ndlr) une affaire de principe doivent expliquer aux gens comment ils comptent faire face aux agressions israéliennes. Les armes ont prouvé leur efficacité pour la Résistance. Preuve en est, Israël n’a plus agressé le Liban depuis une période assez longue. »
Presse
As Safir (Quotidien libanais proche de la nouvelle majorité, 12 mars 2011)
Le Tribunal spécial pour le Liban (TSL) a publié un communiqué dans lequel il a annoncé que « le procureur Daniel Bellemare, a remis au juge de la mise en état, Daniel Fransen, un acte d’accusation modifié élargissant la portée de l’acte d’accusation déposé auparavant ».
« A la suite de l’obtention et de l’analyse d’autres éléments de preuve, Bellemare, a déposé un acte d’accusation modifié pour confirmation par le juge de la mise en état », indique le communiqué ajoutant que « cette modification élargit la portée de l’acte d’accusation déposé le 17 janvier 2011, en rapport avec l’attentat perpétré le 14 février 2005 contre l’ancien Premier ministre Rafic Hariri, et d’autres personnes ».
Le texte précise que « la possibilité pour le procureur de modifier un acte d’accusation, sans autorisation, à tout moment avant sa confirmation, est expressément prévue par l’article 71A (i) du Règlement de procédure et de preuve du tribunal ».
« Le procureur a requis du juge de la mise en état que sa décision du 19 janvier 2011 de non-divulgation de l’acte d’accusation confidentiel puisse s’appliquer également à l’acte d’accusation modifié et ses pièces justificatives à l’appui. Leur divulgation non autorisée pourrait donc constituer une entrave au cours de la justice équivalente à un outrage au tribunal du fait de la violation de l’article 60 bis (A) du Règlement », ajoute le communiqué.
Par ailleurs, « comme le procureur l’a souligné dans le rapport annuel 2010-2011, l’enquête se poursuit pour conforter les preuves qui seront présentées au procès et traduire en justice d’autres personnes pouvant être responsables de l’attentat », conclut le texte.
As Safir (10 mars 2011)
Nabil Haïham
La Résistance possède de nombreux facteurs qui contribuent à sa puissance sur la scène libanaise. Le Hezbollah a ainsi réussi à attirer les sympathisants et à établir la confiance avec le peuple car il possède une infrastructure que la nouvelle opposition ne possède pas. Par ailleurs, le 14-Mars n’a pas un commandement capable de diriger et de prendre des décisions et tout ce qui importe à Hariri, c’est de récupérer ce qu’il considère être son droit de gouverner (…) De plus, après le général Michel Aoun, le ralliement du député Walid Joumblatt à la Syrie et à la Résistance augure d’une nouvelle étape politique couronnée par la désignation de Najib Mikati, qui s’est lui aussi placé, avec ses alliés Mohammad Safadi et Ahmad Karamé, aux côtés de la Syrie et des ses alliés. A la lumière de toutes ces données, quelle sera la réaction de Hariri, après l’ivresse [de la manifestation] du 13 mars, quand il sera à nouveau confronté à la réalité : un Premier ministre désigné, Najib Mikati, sur le point de former le prochain gouvernement.
As Safir (10 mars 2011)
Ali Moussaoui
Le roi des faux témoins dans l’affaire Hariri, Mohammed Zouhair as-Siddiq, se trouve en Égypte, et plus précisément dans le village lointain d’el-Mohammadiyya, où il profite de l’hospitalité de Yehya Azmi, membre du Conseil du peuple et frère de Zakariya Azmi, qui était le porte-parole officiel du bureau de la présidence de la République et le bras droit du président déchu Hosni Moubarak. L’annonce de cette nouvelle a conduit le chef des Renseignements des FSI, le colonel Wissam el-Hassan, à se rendre d’urgence en Egypte.
De nombreuses questions se posent au sujet de l’implication du régime de Hosni Moubarak dans la fabrication des faux témoins dans l’affaire de l’assassinat de Rafic Hariri. Un communiqué des FSI défend le déplacement de Hassan en Égypte, « conformément à un rendez-vous fixé d’avance avec le chef des renseignements généraux en Égypte, le général Mourad Mouafi ». Par contre, un communiqué du ministère de l’Intérieur réclame une enquête à ce propos pour faire la lumière sur cette visite secrète.
Avec le chantier en cours en Égypte après le renversement du régime de Moubarak et la victoire de la révolution des jeunes de la Place Tahrir, comment le directeur des renseignements généraux égyptiens trouve-t-il le temps de recevoir le colonel Hassan ? Quelle est l’urgence qui a poussé ce dernier à se rendre en Égypte, qui vit à présent une période de transition exceptionnelle ? Pourquoi Hassan s’est-il rendu au Caire à bord d’un avion de la compagnie égyptienne et en est retourné à bord d’un jet privé loué auprès de la société Open Sky ? Qui en a payé les frais ? Comment expliquer la coïncidence entre le voyage de Hassan en Égypte et les révélations à propos de la présence d’as-Siddiq dans ce pays ? Pourquoi le régime de Hosni Moubarak protégeait-il es-Siddiq ? Pour le compte de qui le faisait-il ? Pourquoi la justice libanaise ne demande-t-elle pas aux autorités égyptiennes de lui livrer as-Siddiq ?
As-Safir (08 mars 2011)
Mazen Sayyed
Au lendemain du retour d’Arabie saoudite du Premier ministre sortant Saad Hariri, une source proche de la compagnie Saudi Oger, gérée par Hariri, a rapporté que cette dernière est impliquée dans une affaire de détournement de fonds publics saoudiens, et que plusieurs de ses employés libanais (sept jusqu’à présent), de ses clients et de ses fournisseurs faisaient l’objet de poursuites judiciaires en Arabie saoudite. Les contacts effectués par Saad Hariri avec les responsables saoudiens en marge de sa visite au Royaume n’ont pas réussi à désamorcer cette affaire qui entame la réputation arabe et internationale de Saudi Oger (…) Près de 400 millions de dollars auraient été détournés de la sorte, alors que les contrats concernés s’élèvent à des milliards de dollars.
Al Akhbar (Quotidien libanais proche de la nouvelle majorité, 12 mars 2011)
Nicolas Nassif
La position des États membres du Conseil de coopération du Golfe (CCG) a constitué une aide supplémentaire au Premier ministre désigné Najib Mikati pour dissiper la confusion qui entoure ses efforts pour la formation du nouveau gouvernement libanais et pour mettre un terme à l’hésitation de certains pays arabes, notamment du Golfe, à prendre une position soutenant sa désignation pour former le prochain cabinet. Certains avaient affirmé que M. Mikati avait pris un risque en acceptant sa désignation sans avoir obtenu, au préalable, un appui significatif qui ferait un équilibre entre son accession au pouvoir et l’éviction de son prédécesseur, Saad Hariri. Le silence des pays du Golfe, brisé seulement jeudi, avait été attribué aux préoccupations des émirats et des royaumes à cause des révolutions et des manifestations de protestations qui secouent le monde arabe. Cependant, la position positive prise par le CCG à l’égard de Mikati et de son gouvernement, et de l’alternance démocratique du pouvoir au Liban, a mis un terme à toutes les spéculations.
Al Akhbar (10 mars 2011)
Ibrahim Al-Amine
Après la grande surprise que fut pour les États-Unis le renversement du gouvernement de Saad Hariri, Washington a mis à profit le retard dans la formation du gouvernement de l’ex-opposition pour reprendre son souffle et échafauder une nouvelle stratégie. Le porte-parole des États-Unis dans le dossier libanais, l’ambassadeur Jeffrey Feltman, conduit la bataille avec une équipe libanaise où l’on retrouve aussi bien Fouad Siniora que Samir Geagea. Une décision politique a d’abord été communiquée au Premier ministre désigné Najib Mikati : Washington se dressera contre son gouvernement s’il ne respecte pas les résolutions internationales, notamment la 1559 et celle relative au TSL. En outre, Feltman a lancé une série de démarches sur le plan financier, en s’appuyant sur de volumineux dossiers préparés par Siniora et son équipe au Liban. Dossiers concernant la position du gouverneur de la BDL Riyad Salamé et certaines banques libanaises qui gèrent, selon Siniora, « l’argent des chiites au Liban et dans la région, lequel profite au Hezbollah, aux dires des Américains », rapporte une source concernée par ce dossier.
Lorsqu’il a été décidé de placer la banque libano-canadienne sur une liste qui la met certainement dans l’embarras, Riyad Salamé, contacté dans cette affaire, a conduit une délégation auprès du ministère des Finances états-unien, où des surprises l’attendaient. Avant son déplacement à Washington, ses interlocuteurs américains avaient déjà reçu des piles de rapports de Beyrouth, le concernant directement. On y retrouve des accusations, que les responsables états-uniens lui ont répercutées : il y a cinq ans, c’est lui qui a aidé le régime en Syrie à faire face aux sanctions US, lui qui a œuvré à faciliter le transfert de milliards de dollars de la Syrie au Liban, et qui a couvert des actions illicites entreprises par le groupe de la Banque du Liban, conduisant à de vastes opérations de blanchiment d’argent dans les banques de Beyrouth, qui ont profité aux organisations terroristes au Liban et dans la région, et plus spécifiquement au Hezbollah.
L’équipe de Siniora, travaillant dans l’ombre, s’est de son côté mise à filtrer des informations à la presse, à propos d’une liste de banques qui subiront le même sort que la libano-canadienne. Toutes de grandes banques qui ne sont pas politiquement acquises au 14-Mars. Selon une source aux États-Unis, le retard dans la formation du gouvernement a permis à Washington de résorber le choc du renversement de Hariri et de plancher sur une stratégie destinée à resserrer l’étau autour du gouvernement de Mikati avant même qu’il ne soit mis en place : encercler Mikati et mettre la pression sur lui personnellement pour l’empêcher de former un gouvernement qui se conforme à la politique de la Syrie et de la résistance ; revigorer les forces du 14-Mars, soit pour obtenir qu’elles participent au Cabinet avec le tiers de blocage, soit pour leur permettre de maintenir la pression sur le futur gouvernement. À en croire la même source, c’est Feltman lui-même qui a proposé que le dossier des armes prenne le dessus sur tout le reste.
La prochaine démarche états-unienne, selon cette source, sera entreprise en coopération avec la France et l’Arabie saoudite, et avec l’appui d’Israël, pour dissuader le gouvernement de Mikati de prendre une décision constitutionnelle qui légitime l’action de la Résistance, et pour l’amener à proclamer l’engagement du Liban en faveur des résolutions internationales, s’agissant plus précisément de la coopération avec le TSL.
An Nahar (Quotidien libanais proche du 14-Mars, 10 mars 2011)
Ibrahim Bayram
Le 14-Mars entend, grâce à la campagne menée contre les armes de la Résistance, faire pression sur Najib Mikati afin d’entraver sa mission ou de le porter à renoncer à la formation du gouvernement. Les milieux du Hezbollah voient dans la montée de la campagne du Courant du futur contre les armes une volonté de la part de la nouvelle opposition de bloquer le gouvernement et de paralyser le pays, d’une part, et de creuser le fossé confessionnel d’autre part. Le Hezbollah a donné à son public et à ses cadres l’ordre de se retenir pour ne pas tomber dans le piège tendu par le Courant du futur. Il trouve aussi que la meilleure manière de répondre aux nouveaux opposants est de contribuer avec Najib Mikati à la formation d’un gouvernement qui prouvera son efficacité et gagnera la confiance du peuple.
L’Orient-Le Jour (Quotidien libanais francophone proche du 14-Mars, 10 mars 2011
Le député Sami Gemayel a saisi le président de la Chambre, Nabih Berry, d’une plainte contre son collègue, Mohammad Raad, chef du bloc parlementaire du Hezbollah, à cause de la conférence de presse qu’il a tenue au Parlement avec, en toile de fond, une pancarte sur laquelle était inscrite l’expression « Tribunal=Préjudice ». Le motif de la plainte : cette mise en scène risque de donner à l’opinion publique libanaise l’impression que la position du Hezbollah est « contraignante pour l’ensemble du Parlement ». Il a ajouté que la pancarte posée derrière le parlementaire ne portait aucun signe montrant qu’elle appartenait au bloc du Hezbollah. « Au contraire, le slogan et le drapeau libanais pouvaient donner l’impression à n’importe quel Libanais ou étranger ainsi qu’à toute personne ignorant tous les tenants et les aboutissants de cette affaire que la conférence de presse reflète le point de vue de tout le Parlement », a-t-il dit.
L’Orient-Le Jour (10 mars 2011)
Une personnalité de la nouvelle majorité estime que l’ampleur de la campagne de mobilisation lancée par le 14-Mars n’a pas seulement pour objectif de pousser le Premier ministre désigné à démissionner. Elle viserait ainsi à permettre au Premier ministre chargé des affaires courantes Saad Hariri de montrer sa popularité et sa capacité à diriger le camp de la nouvelle opposition. En effet, selon cette personnalité, M. Hariri aurait essuyé de nombreuses critiques, notamment de la part de certaines parties arabes et internationales, concernant ce qui a été considéré comme des erreurs commises ces derniers temps, en particulier la « journée dite de la colère » et ses refus répétés de saluer son successeur désigné. Face à ce que certains appellent déjà « la politique douce » de Nagib Mikati, qui lui a permis de gagner des points à Tripoli et même à Dar el-Fatwa, sans parler d’une attitude d’attente positive au niveau de certaines chancelleries, Saad Hariri aurait, selon cette même personnalité, besoin de donner une preuve concrète de son leadership, dans son propre camp d’abord, et auprès de ses alliés locaux, régionaux et internationaux. M. Hariri voudrait donc frapper un grand coup et montrer à tous ceux qui ont des doutes sur la question qu’il reste en mesure de mobiliser les foules, même six ans après le lancement du mouvement du 14-Mars. La personnalité précitée ajoute que M. Hariri voudrait aussi adresser un message au courant saoudien qui doute de lui qu’il reste encore la carte gagnante. Cette personnalité relève ainsi le fait que lors de sa visite en Arabie saoudite, Saad Hariri n’a été reçu que par le ministre des Affaires étrangères et le prince héritier. Ce qui, ajouté à certains articles critiques publiés dans la presse saoudienne, laisse supposer qu’il ne bénéficierait pas d’un appui total en Arabie.
L’Orient-Le Jour (10 mars 2011)
La télévision israélienne a diffusé un reportage montrant des photos de satellite qui, prétend-elle, sont « d’un camp en Syrie, à 50 km à l’est de Damas, où sont stockés des missiles du Hezbollah, et qui fait figure de dépôt d’urgence au cœur de la Syrie ». « Sous couvert d’un calme trompeur au nord, le Hezbollah a recours à un armement d’une intensité sans précédent », poursuit le rapport.
Toujours selon le reportage, « ces missiles sont transportés quotidiennement de Adra dans des camions modernes à travers les routes de contrebande vers le Liban-Nord, la Békaa et le Sud ». « Ces missiles attendent l’heure de décision », ajoute le rapport, soulignant que « la communauté internationale connaît l’existence de ces photos ». Et d’ajouter : « En réalité, l’Iran est venue s’assurer que le Hezbollah ne gaspille pas les cadeaux et l’argent investi dans la reconstruction. Ils veulent préparer tout en vue de l’heure décisive, en cas d’attaque israélienne sur les installations nucléaires de l’Iran. « En constatant l’ampleur de la contrebande et le nombre de missiles, surtout ceux ayant une portée de 300 km, le commandement du Nord de l’armée israélienne ne parle plus seulement de 180 villages chiites au sud du Litani avec lesquels ils devront traiter au cours de la troisième guerre du Liban, mais 230 villages au sud du fleuve Awali, au nord de Saïda, où l’armée (israélienne) devra contrôler des sites de lancement de missiles », conclut le rapport.
La tendance dans le monde arabe
Israël dans la tourmente des changements arabes
Au terme de l’évaluation stratégique des changements dans le monde arabe, le ministre israélien de la Défense, Ehud Barak, a annoncé que son pays allait réclamer 20 milliards de dollars d’aide militaire supplémentaire aux États-Unis. Une aide qui servirait à reconstruire la force de l’armée israélienne en prenant en compte le fait que le front égyptien fait désormais partie des équilibres militaires, surtout si le Caire exigeait l’amendement de l’accord de Camp David ou son abolition. Des craintes alimentées par les déclarations du nouveau ministre égyptien des Affaires étrangères qui a annoncé son refus du maintien du blocus contre la bande de Gaza, qu’il a qualifié de « crime contre l’humanité ».
Pour les Israéliens, la simple levée du blocus par l’Égypte constitue un danger stratégique, car elle libère le territoire palestinien et torpille les tentatives d’étouffement par l’État hébreu qui empêchait les habitants et les résistants de se procurer les ressources et l’approvisionnement qu’ils ramenaient au compte-gouttes à travers les tunnels, en dépit des mesures israéliennes et égyptiennes.
Les dirigeants israéliens craignent que les changements dans le monde arabe aient des répercussions sur l’Autorité palestinienne et sur le système sécuritaire mis en place en Cisjordanie avec la collaboration de Mahmoud Abbas, Salam Fayyad et Mohammad Dahlan. Cette inquiétude s’accompagne de rapports de centre de recherche israéliens affirmant qu’un climat réclamant l’arrêt du processus d’Oslo, la réalisation de l’unité nationale, et la réhabilitation de la lutte armée, commence à se former chez les Palestiniens. L’attaque, samedi, contre la famille de colons en Cisjordanie, qui a fait cinq morts, en est la preuve.
C’est la situation en Égypte qui inquiète le plus Israël. Certes, le Conseil militaire suprême a exprimé son attachement aux engagements de l’Égypte à l’égard de l’État hébreu. Mais la révolution a imposé une réalité désormais incontournable : les grands choix politiques sont tributaires de la volonté populaire. Le démantèlement du régime de Moubarak et les mesures prises contre l’ancien président et sa famille prouvent que personne ne peut plus ignorer ce que souhaite le peuple égyptien.
Des experts israéliens et états-uniens misent sur l’essoufflement ou l’érosion de la révolution ou l’installation d’une contre-révolution, à travers des incidents communautaires entre musulmans et coptes, comme cela s’est produit la semaine dernière. De la sorte, le pays sera trop occupé par ses problèmes internes pour s’intéresser à la politique étrangère. Mais la rapidité avec laquelle le peuple réagit à toute tentative de contre-révolution fausse les espoirs de Tel-Aviv et de Washington.
Israël considère que les changements en cours dans la région marquent la fin de l’époque de la « modération » arabe. L’État hébreu se trouve confronté à un défi stratégique qui s’illustre par une course contre la montre entre les changements qui s’accélèrent dans le monde arabe et la tentative de reconstruire la force de dissuasion israélien gravement endommagée lors de la guerre de 2006 contre la Résistance libanaise. Et les déclarations israéliennes sur la reprise des négociations sur le volet syro-israélien ne sont qu’une manœuvre car toute guerre préventive prendra pour première cible la Syrie, pierre angulaire de l’axe régional de la résistance.
Evénement
Libye
• Les troupes du régime progressent vers Benghazi, le siège de la rébellion dans l’Est du pays, après avoir reconquis de nouvelles villes. La ligne de front s’est déplacée davantage vers l’Est, les villes tenues par les rebelles tombant l’une après l’autre aux mains des troupes du régime de Mouammar Kadhafi. La télévision d’État libyenne a affirmé que Brega avait été « purgée » des insurgés. Samedi, Seif al-Islam Kadhafi s’est dit confiant dans une victoire des troupes gouvernementales, affirmant dans des interviews à des journaux italiens qu’elles avaient déjà repris « 90 % du pays ». Il a promis « une guerre jusqu’au bout », ajoutant : « Bientôt, tout sera fini ». Sur le terrain, un cameraman d’al-Jazira aurait trouvé la mort dans une embuscade près de Benghazi.
• Malgré les gains remportés par le régime dans sa contre-offensive, la communauté internationale semble lente à agir. Après des réunions de l’Otan et l’Union européenne qui n’ont pas abouti à des résultats concrets pour stopper la répression, une nouvelle rencontre ministérielle du G8 est prévue ce lundi. Samedi, les pays de la Ligue arabe réunis au Caire ont estimé que les « crimes graves et les importantes violations » commises par le régime libyen contre son peuple le privaient de toute légitimité. Dans son compte-rendu de la réunion, le secrétaire général de l’organisation panarabe, Amr Moussa, a également affirmé que les participants jugeaient nécessaire de coopérer avec le Conseil national de transition (CNT) regroupant l’opposition libyenne.
Yémen
Un manifestant a été abattu dimanche par la police à Aden (sud), et les manifestants à Sanaa ont subi une attaque en règle de partisans du régime, au lendemain de la journée la plus sanglante dans le pays depuis le début de la contestation contre le président Ali Abdallah Saleh, avec sept morts et des centaines de blessés. La police et des milices proches du président auraient utilisé des gaz toxiques contre les manifestants.
Bahreïn
Des dizaines de personnes ont été hospitalisées après des tirs de gaz de combat par la police dimanche sur des manifestants à Manama. C’est la première fois depuis le 19 février que la police attaque les manifestants qui campent sur la place de la Perle pour réclamer des réformes dans ce petit royaume du Golfe dont la population locale est majorité chiite et qui est gouverné par une dynastie sunnite. Le roi de Bahreïn, Hamad Ben Issa Al-Khalifa, a souhaité un démarrage rapide du dialogue avec l’opposition. Mais le puissant mouvement d’opposition Wefaq a posé des conditions préalables à ce dialogue, dont la démission du gouvernement. À Washington, un porte-parole a annoncé que les Etats-Unis « exhortent le gouvernement de Bahreïn à mener un dialogue pacifique et constructif avec l’opposition plutôt qu’à recourir à la force ».
Territoires palestiniens occupés
• Les autorités israéliennes ont approuvé dimanche la mise en chantier de plusieurs centaines de logements dans les implantations juives de Cisjordanie, au lendemain de l’assassinat de cinq colons. Les forces israéliennes sont toujours à la recherche du ou des auteurs de l’attaque, commise à Itamar, une colonie proche de Naplouse. L’initiative va susciter une vague de réprobation internationale et nourrir l’hostilité des Palestiniens à une relance du processus de paix.
• La police ukrainienne a indiqué vérifier des informations sur la mystérieuse disparition en Ukraine d’un ingénieur palestinien, dont l’épouse estime qu’il a été kidnappé par le service des renseignements israéliens, le Mossad. L’épouse ukrainienne de Dirar Abu Seesi, Veronika, a demandé à la police ukrainienne de l’aider à « établir l’endroit où se trouvait son conjoint », a indiqué un porte-parole du ministère de l’Intérieur, Sergui Bourlakov.
Abu Seesi directeur technique de l’unique centrale électrique de la bande de Gaza et père de six enfants, a disparu le 19 février dans le train reliant Kiev à la ville de Kharkiv (est).
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