Lettre saoudienne

D’ordre de mon gouvernement, j’appelle votre attention sur ce qui suit :

Le Royaume d’Arabie saoudite a été victime de rebelles houthistes et de forces fidèles à l’ancien Président, Ali Saleh, qui ont commis à la frontière du pays et sur son territoire des attaques aveugles et irresponsables, notamment à la roquette et au missile balistique, tuant des centaines de civils, détruisant des infrastructures civiles et endommageant des écoles et des hôpitaux.

Ces attaques ont frappé plusieurs provinces du Royaume d’Arabie saoudite, notamment celles de Najran, de Jazan et d’Assir. Le territoire saoudien a été la cible de près de 30 attaques au missile balistique. Le 31 août 2016, les rebelles houthistes et leurs partisans ont tiré sur la ville de Najran, dans le sud du pays, un engin balistique à courte portée de type « Zilzal 3 » (« Tremblement de terre 3 »), fabriqué en Iran.

En violation de la résolution 2216 (2015) du Conseil de sécurité, l’Iran a fourni des armes et des munitions aux rebelles houthistes au Yémen. À de nombreuses reprises, plusieurs États Membres et les Forces maritimes combinées ont intercepté des armes illicites iraniennes. Ces saisies en mer, effectuées notamment par l’Australie, la France et les États-Unis d’Amérique, ont permis de découvrir d’énormes cargaisons d’armes illicites dont l’origine iranienne a été confirmée. Le 4 avril 2016, la Ve flotte américaine a publié un communiqué confirmant que « pour la troisième fois au cours des dernières semaines, les forces navales internationales opérant en mer d’Arabie [avaient] saisi une cargaison d’armes illicites [...] qui, de l’avis des États-Unis, provenait d’Iran et était probablement destinée à des insurgés houthistes au Yémen ». De nombreuses interceptions de ce type ont été signalées, lors desquelles de grandes quantités d’armes et de munitions ont été saisies, dont des missiles antichar fabriqués en Iran, des milliers de fusils d’assaut, des fusils de tireur d’élite Dragunov, des fusils d’assaut AK-47, des canons de rechange, des tubes de mortier et des centaines de roquettes, des lance-missiles RBG et d’autres armes illicites. En outre, on estime que la plupart des membres d’équipage des navires interceptés étaient de nationalité iranienne.

Non seulement la contrebande d’armes illicites destinées aux rebelles houthistes et pro-Saleh constitue une violation flagrante des résolutions du Conseil de sécurité, mais elle menace aussi directement et concrètement la sécurité du Royaume d’Arabie saoudite, du Yémen et de la région, ainsi que la paix et la sécurité internationales.

Le Royaume d’Arabie saoudite réaffirme son droit de prendre toutes les mesures voulues pour contrer la menace que représentent les milices rebelles houthistes et pro-Saleh financées et appuyées par l’Iran et ne ménagera aucun effort pour assurer sa sécurité, celle du Yémen, celle de sa population et celle de la région, conformément à la Charte des Nations Unies et au droit international.

Les milices rebelles houthistes et les forces fidèles à l’ancien Président, Ali Abdullah Saleh, et leur allié étranger doivent être amenés à rendre des comptes pour leur comportement irresponsable et criminel persistant. La complaisance ne ferait qu’encourager la poursuite de violations mettant en péril la sécurité de la population du Yémen, du Royaume d’Arabie saoudite et de la région. Elle entamerait en outre la crédibilité des résolutions du Conseil et empêcherait de dégager un règlement politique de la crise au Yémen.

Le Royaume d’Arabie saoudite demande au Conseil de sécurité d’assumer ses responsabilités et de prendre les mesures voulues contre les personnes qui sabotent la transition politique au Yémen et celles qui ont violé les résolutions pertinentes du Conseil, en particulier la résolution 2216 (2015), adoptée par le Conseil en vertu du chapitre VII de la Charte. En outre, nous prions instamment le Conseil de prendre toutes les mesures nécessaires pour exiger que l’Iran respecte toutes les résolutions pertinentes du Conseil et cesse toute activité illégale au Yémen.

Le Royaume d’Arabie saoudite réaffirme son appui aux efforts considérables que déploie l’Envoyé spécial du Secrétaire général pour le Yémen, Ismail Ould Cheikh Ahmed, pour parvenir à un accord général visant à mettre fin au conflit au Yémen, conformément à l’initiative du Conseil de coopération du Golfe, au texte issu de la Conférence de dialogue national et à son mécanisme d’application et aux résolutions pertinentes du Conseil de sécurité.

Je vous serais reconnaissant de bien vouloir faire circuler la présente lettre comme document du Conseil de sécurité.

Le Représentant permanent,
Abdallah Y. Al-Mouallimi

Réponse iranienne

D’ordre de mon gouvernement, et me référant à la lettre datée du 14 septembre 2016, adressée au Président du Conseil de sécurité par le Représentant permanent de l’Arabie saoudite auprès de l’Organisation des Nations Unies (S/2016/786), j’appelle votre attention sur ce qui suit :

Le Gouvernement de la République islamique d’Iran rejette catégoriquement les inventions pures et simples et les allégations infondées qui figurent dans la lettre susmentionnée concernant le transfert présumé d’armes à des combattants Ansarullah yéménites et la violation des résolutions du Conseil de sécurité de l’ONU.

Cette lettre et les allégations qui y figurent sont d’autant plus stupéfiantes que leur auteur représente un gouvernement qui a envahi le Yémen et utilisé contre sa population et ses infrastructures civiles, pendant environ un an et demi, toute une panoplie d’armes meurtrières. De nombreux rapports, établis par l’Organisation des Nations Unies et par d’autres institutions faisant autorité, contenaient un état documenté des crimes perpétrés jusqu’à présent par la coalition dirigée par l’Arabie saoudite à l’encontre des civils yéménites, en particulier les enfants et les femmes, ainsi que les violations du droit international et du droit international humanitaire, notamment de la résolution 2286 (2016) du Conseil de sécurité, commises par cette coalition.

Selon l’enquête la plus récente menée par des militants des droits de l’homme et des universitaires spécialisés dans ce domaine, l’Arabie saoudite a attaqué 3 158 sites non militaires au Yémen entre mars 2015 et la fin août 2016. Les conclusions de l’enquête révèlent en outre que 942 raids aériens ont été lancés sur des zones résidentielles, 114 sur des marchés, 34 sur des mosquées, 147 sur des écoles, 26 sur des universités et 378 sur des sites de transport au cours de la même période .

Les frappes aériennes lancées hier, le 26 septembre, par la coalition dirigée par l’Arabie saoudite sur un hôpital yéménite recevant l’assistance de Médecins sans frontières ont fait au moins 11 morts et 19 blessés. Il ne s’agit là que de la dernière en date d’une série d’attaques incessantes visant des cibles civiles au Yémen. Le bombardement d’une école dans le nord du Yémen, le 13 août 2016, au cours duquel 10 enfants ont été tués et 28 autres blessés, est un autre exemple.

La République islamique d’Iran n’a cessé de dire qu’il ne saurait y avoir de solution militaire à cette guerre et a appelé instamment à la cessation des hostilités et au règlement pacifique de ce conflit par la négociation et le recours à des mécanismes pacifiques.

Je vous serais obligé de bien vouloir faire distribuer le texte de la présente lettre comme document du Conseil de sécurité.

L’Ambassadeur,
Représentant permanent
Gholamali Khoshroo

Sources : S/2016/786 et S/2016/817