Sur un sujet dont la complexité ne pouvait que susciter interrogations et hésitations, les nombreuses auditions ont permis un examen progressif et approfondi de tous les aspects du problème du port des signes religieux à l’école.
Les comptes rendus des auditions annexés au rapport attestent de l’intérêt des témoignages, de la participation très assidue des membres de la mission à cette réflexion et de la qualité des débats qui se sont déroulés au cours des six mois de travail.
A partir des constats développés dans le présent rapport et après plusieurs réunions internes, la mission a décidé, le 12 novembre 2003, de faire connaître le souhait de la très grande majorité de ses membres de réaffirmer le principe de la laïcité à l’école en proposant une modification législative clarifiant les règles en matière de port des signes religieux et politiques à l’école.
L’exposé des motifs et le dispositif de cette proposition de modification législative vous sont ainsi proposés.
Proposition de modification législative
Il est apparu nécessaire à tous les membres de la mission d’information, créée le 27 mai 2003 par la Conférence des présidents de l’Assemblée nationale sur la question du port des signes religieux à l’école, de réaffirmer l’application du principe de laïcité dans les établissements scolaires.
En effet, le régime juridique actuel, tel qu’il résulte de l’avis du Conseil d’Etat du 27 novembre 1989 et de sa jurisprudence n’est pas satisfaisant. Il ne permet pas de répondre au désarroi des chefs d’établissement et des enseignants confrontés à cette question qui tend à les accaparer de plus en plus. Surtout, il subordonne les conditions d’exercice d’une liberté fondamentale à des circonstances locales.
Pour la très grande majorité des membres de la mission, cette réaffirmation du principe de laïcité doit prendre la forme d’une disposition législative qui interdira expressément le port visible de tout signe d’appartenance religieuse et politique dans l’enceinte des établissements scolaires. Cette disposition législative prendra la forme, soit d’un projet de loi ou d’une proposition de loi spécifique, soit d’un article de loi ou d’un amendement inséré dans un texte global concernant l’école.
Cette proposition s’est imposée après examen de l’ensemble des autres solutions envisageables : statu quo, nouvelle circulaire, caractère législatif conféré aux règlements intérieurs, disposition législative moins contraignante ou, au contraire, d’un champ d’application plus large que l’école.
L’application de cette interdiction à l’école publique, c’est-à-dire aussi bien dans les établissements primaires que dans les établissements secondaires (collèges et lycées), a recueilli l’unanimité des membres de la mission favorables à l’introduction d’une disposition législative.
Les membres de la mission ont exclu, également de façon unanime, du champ d’application de cette interdiction, les établissements privés hors contrat dans la mesure où ils ne font pas partie du service public de l’Education nationale.
Un consensus n’a pu se dégager sur l’extension de l’interdiction aux établissements privés sous contrat en raison de leur caractère propre dont le principe a été reconnu par le Conseil constitutionnel. C’est pourquoi la mission n’a pas fait de proposition sur ce point.
Un consensus s’est au contraire dégagé pour constater qu’il n’y avait pas lieu de modifier les régimes juridiques applicables aux départements d’Alsace-Moselle et aux collectivités d’Outre-mer.
Les membres de la mission souhaitent que cette interdiction du port visible de tout signe d’appartenance religieuse soit accompagnée de mesures destinées non seulement à favoriser la compréhension, l’acceptation et l’application de cette disposition, mais également à combler les lacunes constatées dans la connaissance des principes liés à la notion de laïcité, comme par exemple :
– la formation obligatoire à la laïcité de tous les personnels enseignants dans les Instituts universitaires de formation des maîtres, ce qui n’est plus le cas,
– l’enseignement de la laïcité, des notions de tolérance, de liberté, de respect, d’égalité des sexes, de même que l’enseignement de l’instruction civique, dès l’école primaire,
– l’élaboration et la diffusion d’un guide à destination de tous les enseignants pour leur permettre de faire face aux entorses à la laïcité auxquelles ils pourraient être confrontés et faire pièce aux arguments déployés par certains groupes de pression,
– le développement de cellules de médiation au niveau des académies, relayant celle qui a été mise en place en 1994 au niveau national,
– des moyens juridiques plus efficaces pour sanctionner le non-respect de l’assiduité aux cours et lutter contre les certificats de complaisance,
– l’amélioration de l’enseignement de l’histoire des religions dans le cadre actuel des programmes d’histoire, de français, d’art, de philosophie,
– l’égalité de traitement des différents cultes.
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Dispositif
Article unique
Au titre V relatif à la « vie scolaire », titre I « Les droits et les obligations des élèves [des établissements publics] », l’article L.511-2 du code de l’Education est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le port visible de tout signe d’appartenance religieuse ou politique est interdit dans l’enceinte des établissements »
Source : Assemblée nationale française
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