Bonjour et merci d’être venus. Laura et moi sommes heureux de vous
accueillir tous à la Maison-Blanche. Monsieur le Ministre de la
défense, je vous remercie d’être présent. Des membres de mon Conseil
de sécurité nationale sont présents, ainsi que des membres du
gouvernement, des membres des forces armées et des membres du Congrès
des Etats-Unis. Je vous remercie tous d’être ici. Je tiens
particulièrement à remercier les membres du corps diplomatique, les
ambassadeurs qui sont venus aujourd’hui.

Nous représentons quatre-vingt-quatre pays unis contre un danger
commun et dans un but commun. Nous sommes les pays qui ont reconnu la
menace terroriste et nous sommes les pays qui la vaincront. Chacun de
nous s’est engagé devant le monde à ne jamais céder à la violence de
quelques-uns. Nous ferons face à ce danger mortel et nous le
surmonterons ensemble.

Alors que nous sommes assemblés ici, la violence et la mort aux mains
de terroristes sont encore présentes dans notre mémoire. Le peuple
espagnol enterre ses morts. Ces hommes, femmes et enfants avaient
commencé leur journée dans une ville grande et paisible et pourtant
ils ont péri sur un champ de bataille, tués au hasard et sans remords.
Les Américains ont vu le chaos et la détresse, les manifestations
silencieuses et les funérailles, et nous avons partagé la douleur du
peuple espagnol. Monsieur l’Ambassadeur, veuillez accepter notre
sympathie profonde pour la grande perte que votre pays a subie.

Les assassins de Madrid nous rappellent que le monde civilisé est en
guerre, et dans cette nouvelle forme de guerre, les civils se trouvent
soudainement propulsés aux premières lignes. Ces dernières années, des
terroristes ont frappé l’Espagne, la Russie, Israël, l’Afrique de
l’Est, le Maroc, les Philippines et les Etats-Unis. Ils ont visé des
Etats arabes tels que l’Arabie saoudite, la Jordanie et le Yémen. Ils
ont attaqué des musulmans en Indonésie, en Turquie, au Pakistan, en
Irak et en Afghanistan. Aucun Etat ni aucune partie du monde n’est à
l’abri de la campagne de violence menée par les terroristes.

Chacun de ces attentats dirigés contre des innocents constitue un
choc, une tragédie et une épreuve de notre volonté. Chaque attentat
est destiné à démoraliser la population de nos pays et à nous diviser.
Il convient de faire face à chaque attentat non seulement avec
douleur, mais aussi avec une plus grande détermination et avec des
actes plus audacieux contre ceux qui tuent. Il est dans l’intérêt de
tout pays - et c’est l’obligation de tout gouvernement - de combattre
et de détruire cette menace qui pèse sur la population de nos pays.

Il n’y a pas de ligne de démarcation - il y a bien une ligne de
démarcation dans notre monde, mais pas entre les Etats, pas entre les
religions et les cultures. C’est une ligne qui sépare deux conceptions
de la justice et de la valeur de la vie. Sur la bande d’enregistrement
où une voix revendique la responsabilité des atrocités de Madrid, on
peut entendre un homme dire : "Nous choisissons la mort alors que vous
choisissez la vie." Nous ne savons pas si c’est la voix de l’un des
terroristes, mais nous savons qu’elle exprime la conviction de
l’ennemi. C’est un état d’esprit qui se réjouit du suicide, qui incite
à l’assassinat et qui célèbre toutes les morts que nous pleurons. Nous
qui sommes de l’autre côté de la ligne de démarcation devons également
être certains de nos convictions. Nous aimons la vie, la vie qui nous
a été donnée à tous. Nous croyons aux valeurs qui affirment la dignité
de la vie, la tolérance, la liberté et le droit à la liberté de
conscience. Nous savons que cette conception de la vie est digne
d’être défendue. Il n’y a pas de terrain neutre, je dis bien pas de
terrain neutre - dans la lutte entre la civilisation et le terrorisme,
parce qu’il n’existe pas de terrain neutre entre le bien et le mal,
entre la liberté et l’esclavage, ainsi qu’entre la vie et la mort.

La guerre contre la terreur n’est pas une figure de rhétorique. C’est
une vocation à laquelle notre génération ne peut se soustraire. Ce
n’est pas seulement notre politique qui offense les terroristes, c’est
notre existence même en tant que nations libres. Aucune concession ne
pourra apaiser leur haine. Aucun compromis ne satisfera leurs
innombrables exigences. Leur ultime ambition est de contrôler les
peuples du Moyen-Orient et de faire du chantage au reste du monde au
moyen d’armes de destruction massive. Une paix séparée est impossible
avec l’ennemi terroriste. Tout signe de faiblesse ou de retraite
valide simplement la violence terroriste et invite un regain de
violence dans tous les pays. La seule façon de véritablement protéger
notre peuple, c’est d’agir rapidement, de façon unie et décisive.

Dans cette épreuve de volonté et de détermination, toutes les nations
ne s’associent pas à toutes les missions ni n’y participent de la même
façon. Néanmoins, chaque nation y apporte une contribution capitale,
et l’Amérique est fière de se tenir aux côtés de toutes alors que nous
appliquons une vaste stratégie en matière de guerre contre le
terrorisme.

Nous mettons à contribution tous les outils de la finance, des
services du renseignement, de la police et de l’appareil militaire
pour démember les réseaux terroristes, pour les priver de refuge et
pour trouver leurs chefs. Au cours des trente derniers mois, nous
avons gelé ou saisi pour près de 200 millions de dollars d’avoirs
appartenant à des réseaux terroristes. Nous avons capturé ou tué
pratiquement les deux tiers de tous les chefs d’Al-Qaïda connus, de
même que de nombreux associés d’Al-Qaïda, dans des pays tels que les
Etats-Unis, l’Allemagne, le Pakistan, l’Arabie saoudite ou la
Thaïlande. Nous faisons la guerre à tous les alliés d’Al-Qaïda,
notamment à l’Ansar-al-Islam, en Irak, et à la Jemaah Islamiya, en
Indonésie et en Asie du Sud-Est. Le message que notre coalition envoie
aux terroristes, y compris à ceux qui ont frappé à Madrid, est très
clair : nous remonterons la trace de ces tueurs et les retrouverons ;
ils devront répondre de leurs actions devant la justice.

Notre coalition prend des mesures urgentes pour arrêter le transfert
d’armes et de matériaux meurtriers. Les Etats-Unis et l’Australie, la
France, l’Allemagne, l’Italie, le Japon, la Hollande, la Pologne, le
Portugal, l’Espagne, le Royaume-Uni, le Canada, Singapour et la
Norvège se sont associés à l’Initiative de sécurité en matière de
prolifération qui vise à resserrer les liens et à interdire le
transport par voie aérienne ou maritime de matériaux meurtriers. De
nombreux gouvernements ont coopéré pour mettre à jour et démanteler le
réseau d’A.Q. Khan, qui a vendu des secrets nucléaires à la Libye, à
l’Iran et à la Corée du Nord. Par le truchement de tous ces efforts,
nous sommes déterminés à empêcher que des technologies aux
conséquences catastrophiques ne tombent entre les mains de quelques
aigris.

Notre coalition s’attaque aussi à la conjugaison dangereuse de pays
dévoyés, de groupes terroristes et d’armes de destruction massive.
Pendant des années, les talibans ont fait de l’Afghanistan la base
d’Al-Qaïda. Nous avons donc donné un choix aux talibans : ou bien ils
abandonnaient pour toujours leur appui aux terroristes, ou bien ils
seraient confrontés à la destruction de leur régime. Comme les
talibans ont choisi le défi, notre coalition a agi pour faire
disparaître cette menace. Aujourd’hui, les camps de la terreur sont
fermés et le gouvernement d’un Afghanistan libre est représenté
ici-même en tant que partenaire actif de la guerre contre le
terrorisme.

Le cauchemar des talibans est désormais bien loin pour le peuple
afghan. Les Afghans ont adopté une nouvelle constitution qui garantit
des élections libres et la pleine participation des femmes. La
nouvelle armée d’Afghanistan est en train de devenir une force
essentielle de la stabilité dans ce pays. Des entreprises se créent ;
des centres médicaux s’établissent et les enfants d’Afghanistan,
garçons et filles, retournent à l’école.

Ce progrès est un hommage au courageux peuple afghan et aux efforts de
nombreuses nations. L’OTAN - avec des troupes du Canada, de la France,
de l’Allemagne et d’autres pays - a pris la sécurité en main. Le Japon
et l’Arabie saoudite ont aidé à terminer l’autoroute reliant Kaboul à
Kandahar qui facilite le commerce et l’unification du pays. L’Italie
aide les Afghans à réformer leur appareil judiciaire et à renforcer
l’indépendance de leur pouvoir judiciaire. Il y a trois ans, les
Afghans étaient opprimés et isolés du monde par un régime terroriste.
Aujourd’hui, ils ont un gouvernement démocratique et de nombreux
alliés - et nous sommes tous fiers d’être les amis du peuple afghan.

De nombreux pays représentés ici aujourd’hui ont également agi pour
libérer le peuple irakien. Il y a un an, les forces armées d’une
puissante coalition sont entrées en Irak afin de faire respecter les
exigences des Nations unies, de défendre notre sécurité et de libérer
un pays de la férule d’un tyran. Pour l’Irak, cela a été un jour de
délivrance. Pour les membres de la coalition, cela a été le moment où
des années d’exigences et de promesses se sont transformées en actions
décisives. Aujourd’hui, alors que les Irakiens sont en train de
rejoindre les peuples libres de ce monde, nous célébrons un tournant
pour le Moyen-Orient et une percée fondamentale pour la liberté
humaine.

Il y a eu des désaccords sur cette question entre des amis qui
s’estiment et s’apprécient. Ces divergences appartiennent au passé.
Nous pouvons tous être d’accord sur le fait que la chute du dictateur
irakien a éliminé une source de violence, d’agression et d’instabilité
au Moyen-Orient. Le fait que les exigences des Nations unies soient
respectées et non ignorées en toute impunité est une bonne chose. Le
fait que le développement d’armes illégales par un dictateur ait cessé
est une bonne chose. Le fait que les Irakiens reçoivent maintenant de
l’aide au lieu de souffrir de l’effet de sanctions est une bonne
chose. Et le fait que les hommes et les femmes du Moyen-Orient aient
un aperçu, en regardant l’Irak, de ce que peut être la vie dans un
pays libre, est une bonne chose.

Il y a encore des bandits violents et des assassins en Irak, et nous
nous en occupons. Personne ne peut prétendre que les Irakiens
vivraient mieux avec ces bandits et ces assassins de retour dans les
palais. Qui préférerait que les salles de torture de Saddam soient
encore ouvertes ? Qui souhaiterait que l’on continue de remplir les
charniers ? Qui reprocherait aux Irakiens la libération qu’ils
attendent depuis si longtemps ? Un an après l’entrée des armées de
libération, chaque soldat qui a combattu, chaque employé d’une agence
caritative qui a servi, chaque Irakien qui a rejoint les rangs des
forces de sécurité de son pays peut porter un regard empli de fierté
sur un accomplissement historique. Ils ont servi la cause de la
liberté, et c’est un privilège.

Aujourd’hui, dans le sud de l’Irak, une division dirigée par les
Britanniques assure la sécurité à Bassora. La Pologne dirige toujours
une division multinationale dans le centre de l’Irak. Le Japon et la
République de Corée - la Corée du Sud - ont pris des engagements
historiques de troupes afin d’aider à instaurer la paix en Irak. Des
forces spéciales du Salvador, de la Macédoine et d’autres pays aident
à trouver et à éliminer les assassins baassistes et les terroristes.
Des ingénieurs militaires du Kazakhstan ont éliminé plus d’un
demi-million d’engins explosifs en Irak. La Turquie aide à
approvisionner les forces de la coalition. Tous ces pays, et de
nombreux autres, assument leurs responsabilités vis-à-vis du peuple
irakien.

Quelle qu’ait été son opinion dans le passé, toute nation a
aujourd’hui un intérêt à voir un Irak libre, prospère et stable. Les
terroristes comprennent, eux aussi, leur intérêt vis-à-vis de ce pays.
Pour eux, le lien entre l’avenir de l’Irak et le cours de la guerre
contre le terrorisme est on ne peut plus clair. Ils savent qu’un Irak
libre constituera un revers cinglant de leurs ambitions tyranniques
sur le Moyen-Orient. Aussi ont-ils fait de l’échec de la démocratie en
Irak l’un de leurs objectifs prioritaires.

En attaquant les forces de la coalition - en dirigeant sur des
Irakiens innocents et des civils étrangers leurs visées meurtrières -
les terroristes essaient de réduire notre volonté. Mais au lieu de
faiblesse, ils ne rencontrent que détermination. Il n’y a pas
longtemps, nous avons intercepté un document de stratégie envoyé aux
chefs d’Al-Qaïda par un de leurs associés, un homme du nom de Zarkawi.
Outre les menaces habituelles, ce document contenait aussi une plainte
 : "Notre ennemi, disait Zarkwai, prend de la force et ses données de
renseignement s’étoffent de jour en jour - c’est l’étouffement."
Zarkawi commence à comprendre : nous ne céderons jamais l’Irak aux
terroristes qui veulent notre propre destruction. Nous ne laisserons
pas tomber le peuple irakien, qui a placé sa confiance en nous. Nous
ferons tout ce qu’il faudra, nous nous battrons, nous prendrons de la
peine, afin d’assurer le triomphe de la liberté en Irak.

Un grand nombre de pays de la coalition ont fait des sacrifices tant
en Irak qu’en Afghanistan. Parmi les soldats et civils qui ont péri
figurent des fils et des filles d’Allemagne, d’Australie, de Bulgarie,
du Canada, de république de Corée, du Danemark, d’Espagne, d’Estonie,
de France, d’Inde, d’Italie, du Japon, d’Ouzbékistan, des Pays-Bas, de
Pologne, de Roumanie, du Royaume-Uni, de Suisse, de Thaïlande, de
Turquie, d’Ukraine et des Etats-Unis. Nous saluons leur courage, nous
prions pour leurs proches. Nous défendrons la cause qu’ils ont servie.

La mise en place des institutions démocratiques en Afghanistan et en
Irak est un grand pas sur la voie d’un objectif d’importance durable
pour le monde entier. Nous avons entrepris d’encourager la réforme et
la démocratie dans le Grand Moyen-Orient en lieu et place du
fanatisme, du ressentiment et de la terreur. Nous avons entrepris de
briser le cycle de l’amertume et du radicalisme qui n’a apporté que
stagnation à une région vitale du monde et destruction à des villes
d’Amérique, d’Europe et d’ailleurs. Cette tâche est historique et
difficile ; elle est nécessaire et digne de tous nos efforts.

Dans les années 1970, la montée de la démocratie, à Lisbonne et à
Madrid, inspira des changements démocratiques en Amérique latine. Dans
les années 1980, l’exemple de la Pologne éveilla les feux de la
liberté dans toute l’Europe orientale. Aujourd’hui, sous l’impulsion
de l’Afghanistan et de l’Irak, nous sommes convaincus que la liberté
élèvera les visées et les espoirs de millions de personnes au
Moyen-Orient.

L’un des hommes acquis à notre cause était un diplomate japonais du
nom de Katsuhiko Oku. Il travaillait pour l’Autorité provisoire de la
coalition en Irak. M. Oku a été tué quand sa voiture est tombée dans
une embuscade. Dans son journal intime il parlait de sa fierté
d’appartenir à la cause qu’il avait fait sienne : "Le peuple libre
d’Irak, écrivait-il, avance maintenant avec sûreté sur la voie de la
reconstruction nationale, tout en luttant contre la menace du
terrorisme. Nous devons tendre la main aux Irakiens et les aider à
empêcher leur pays de tomber entre les mains des terroristes." Cet
homme bon et loyal a conclu dans les termes suivants : "Ce combat,
c’est aussi le nôtre, c’est la défense de la liberté."

Mesdames et Messieurs, ce Japonais courageux avait raison.
L’instauration d’un Etat irakien libre est notre combat. La réussite
d’un Afghanistan libre est notre cause. La guerre contre le terrorisme
est notre lutte. Nous sommes tous appelés à partager ensemble la
liberté et ses bienfaits, et à demeurer forts et constants dans leur
défense. De notre époque, on dira sûrement que ce fut un temps de
grandes épreuves. Qu’il en soit également dit que ceux qui la vécurent
connaissaient leur devoir et l’accomplirent jusqu’au bout.

Que Dieu bénisse nos efforts.

Traduction officielle de la Maison-Blanche