La quasi non-participation israélienne au sommet célébrant les dix ans du processus de Barcelone a des racines plus profondes que les simples questions de politique intérieure évoquées.
Depuis le début de l’Europe en 1957, l’attitude d’Israël a été schizophrène. D’un coté on admire la culture européenne "classique", gastronomie, littérature, économie, tourisme… et de l’autre on pratique des politiques tièdes, voire agressives et carrément militantes par moment vis-à-vis de l’Europe. De l’autre coté l’Europe chrétienne ne peut cesser sa relation particulière avec la "Terre Sainte" et admire les progrès scientifiques et techniques de l’industrie israélienne… tout en estimant, à 59%, que l’Etat d’Israël est une menace pour la paix dans le monde.
La clé pour comprendre cette relation ambiguë réside dans le fait que le sang juif coule dans toutes les veines européennes et que le refrain "Europe berceau de l’antisémitisme" coule dans les nôtres. Israël a les yeux rivés sur la lointaine Amérique et maintient une distance avec l’Europe toute proche, se comportant plus comme un îlot au milieu de l’Atlantique que comme un pays méditerranéen. Et ce malgré son statut particulier avec l’Union Européenne, qui lui accorde des droits étendus dans les domaines de l’économie, de la recherche et du développement. Il suffit de rappeler que notre balance commerciale penche bien plus du coté de l’Europe que de celle de notre "grand ami et allié" de l’autre coté de l’océan.
Face à l’échec du processus de Barcelone, l’Union européenne a commencé à proposer à ses voisins un nouveau type d’alliance qui invite les pays amis de l’Union - de l’Ukraine au Maroc, à rejoindre le projet européen. Cette nouvelle initiative suscite de nombreuses questions difficiles et émotionnellement chargées chez les Israéliens - à commencer par la question de la nature juive de l’État d’Israël, en passant par l’affaiblissement de notre souveraineté, l’acceptation de législations étrangères et la soumission à des principes juridiques étrangers (et la supériorité de la cour européenne) ainsi que, dans nos relations étrangères, une acceptation plus grande du multilatéralisme des Nations Unies.
Israël doit évaluer si ce nouveau mode de partenariat individuel est bénéfique à ses intérêts. C’est une occasion pour nous de moderniser nos relations avec l’UE et de coopérer sur le plan policier, juridique et environnemental, tout en rejetant d’autres domaines qui pourraient porter atteinte à notre sécurité ou notre stabilité - par exemple la libre circulation des biens et personnes. Le moment est venu de faire le bilan de l’échec du processus de Barcelone, mais aussi de nos propres limitations. Dans le contexte israélien, Barcelone nous a forcés à nous mettre dans le "panier méditerranéen" qui a retardé nos relations avec l’Europe pendant des années. En ce sens, la nouvelle politique européenne de voisinage est un héritage qui vaut la peine.
« Israël should re-think its aggressive policy towards Europe », par Sharon Pardo, Yedioth News, 28 Novembre 2005.
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