Nous allons diviser ce point de presse en deux parties. Une première partie permettra de faire le point sur la situation humanitaire et de lancer une idée - et je vous serais très reconnaissant de nous aider à lancer cette idée - celle d’un bateau pour le Liban. C’est une idée française, pour aider le peuple libanais. Ensuite, je ferai le point sur la situation diplomatique et politique aujourd’hui au sujet de la crise israélo-libanaise.
D’abord, je voudrais vous dire, sur le plan humanitaire, que la situation est de plus en plus inquiétante, voire désastreuse. Le seuil du million de déplacés a été dépassé, et parmi ces déplacés, la moitié sont des enfants. Le seuil des 800 tués a été dépassé, et parmi eux, malheureusement, plus d’un tiers sont des enfants. Le seuil des 3.000 blessés a également été dépassé. Dans le sud du pays, ne demeurent plus que les personnes âgées qui sont restées chez elles. Dans la plaine de la Bekaa, depuis les opérations militaires menées hier, un quart de la population est parti.
Je voudrais dire ici qu’au moment où nous parlons, les produits alimentaires sont de plus en plus chers à Beyrouth. Les médicaments pédiatriques commencent à manquer, les produits pétroliers également. Devant une telle situation, la grande question est, d’abord, celle de la sécurisation des corridors humanitaires qui ne sont pas encore totalement sûrs, et l’ouverture de certains corridors humanitaires vers le sud, en particulier de corridors terrestres. Nous n’avons pas obtenu encore de corridors humanitaires sécurisés au sud du Liban, entre les villes du sud, en particulier Naqoura et Beyrouth.
En matière de santé, la rupture de traitement des maladies chroniques est inévitable. De nombreux cas de maladies psychosomatiques atteignent les enfants. Le manque d’hygiène provoque l’apparition de pathologies dermatologiques. Xavier Bertrand, le ministre de la Santé, est aujourd’hui sur place pour faire le point sur l’aide humanitaire et pour apporter des médicaments. Dans ce contexte, le ministère des Affaires étrangères a décidé de mettre en place une opération, l’opération "Un bateau pour le Liban", en association avec l’UNICEF, le Haut Comité pour les Réfugiés, le CICR, et le Programme d’Alimentation mondiale (PAM). Je voudrais remercier les représentants de ces quatre grandes organisations internationales, nos quatre grands partenaires de ce bateau pour le Liban.
Ce bateau partira le 11 août de Marseille pour aller à Beyrouth. Je voudrais remercier ici la CMA-CGM, qui met gratuitement ce bateau à la disposition de la France. C’est ainsi le peuple français qui va aider le peuple libanais. Au-delà de ces organisations internationales, les organisations non-gouvernementales évidemment, qu’elles soient libanaises ou françaises, ou d’autres pays, pourront ensuite acheminer ce fret humanitaire. Il s’agit de couvertures, de matelas, de médicaments, de groupes électrogènes, de stations d’eau potable, de jerricanes, de citernes d’eau, de produits d’hygiène.
La question de corridors humanitaires sûrs- et toutes les organisations internationales et les ONG le disent- n’est pas la seule qui se pose. Il faut que l’aide humanitaire puisse être acheminée en toute sécurité dans tous les endroits du pays, ce qui n’est pas le cas, comme cela m’a été dit par ces organisations internationales ce matin.
La contribution française sera répartie comme suit :
– un million d’euros au PAM, pour assurer la coordination logistique, qui viendra s’ajouter au million qui vient d’être mis en place pour l’aide alimentaire ;
– un million pour l’UNICEF ;
– un million pour le HCR ;
– un million au CICR.
Voilà ce qui me paraît aujourd’hui important d’être dit. Il est absolument capital de pouvoir aider la population libanaise qui est en train d’être de plus en plus touchée, avec un nombre de personnes déplacées et de victimes civiles de plus en plus important. Je tiens également à dire que nous tenons à examiner ici toutes les demandes des ONG, françaises et libanaises, comme en particulier celles de Médecins du Monde, de Médecins sans Frontières, de l’Ordre de Malte, du Secours populaire, du Secours catholique, de la Guilde du Rail, de la Voix de l’Enfant et de l’Enfance pour la Paix. Enfin, parmi nos partenaires européens à qui nous avons proposé cet acheminement, l’Allemagne, la Suède, la Slovaquie, la Lituanie et Malte devraient joindre leurs dons aux nôtres.
Je voudrais faire une remarque en particulier sur le CICR, à qui nous donnons un million pour les services pédiatriques des hôpitaux.
Pour finir, je voudrais indiquer à tous ceux qui souhaitent contribuer au chargement de ce grand Bateau pour le Liban, qui quittera Marseille dans quelques jours, qu’ils peuvent le faire en adressant leurs dons sous forme d’un chèque à l’ordre du "Trésor Public - Liban", adressé au ministère des Affaires étrangères, Délégation à l’Action humanitaire, 103 rue de l’Université.
Un numéro de téléphone vert, le "0 800 22 22 22" est aujourd’hui même mis à leur disposition.
Parallèlement à la cellule de crise qui gère les rapatriements depuis le début de la guerre, j’ai décidé de mettre en place une cellule d’urgence humanitaire au ministère, dans les locaux de la Délégation à l’Action Humanitaire, dès mon retour de Beyrouth avant-hier matin. Je m’y rendrai à l’issue de ce point presse. Je vous invite à m’y accompagner. Par ailleurs, une antenne humanitaire a été mise en place à Beyrouth pour coordonner sur place notre dispositif, en liaison avec nos partenaires. Je remercie le ministère de la Défense, avec tous ses navires, et l’armée française, qui nous permettent d’acheminer ce fret humanitaire.
Je voudrais maintenant faire un point précis sur la situation politique et sur la situation diplomatique au 23ème jour de ce conflit. Nous devons malheureusement constater qu’au 23ème jour du conflit, les appels lancés par de nombreux pays au côté de la France, n’ont pas été pour le moment entendus. Je le regrette vivement, mais ce constat ne doit pas nous décourager.
Plusieurs convictions doivent au contraire nous inciter à l’action et à la mobilisation. Il n’est tout simplement pas acceptable de laisser le Liban être peu à peu détruit, et ses habitants tués, blessés ou réduits au statut de personnes déplacées. Tout ce que la France a fait depuis si longtemps dans ce pays proche et ami, plaide pour qu’inlassablement nous nous mobilisions en faveur du Liban, et que nous exigions l’arrêt immédiat des combats, le retour à la table des négociations des différentes parties au conflit. D’autre part, la France reste convaincue qu’il ne peut y avoir de solution purement militaire au problème soulevé par la crise actuelle. Nous n’ignorons pas qu’au départ de celle-ci, il y a eu l’action inacceptable du Hezbollah, qui a enlevé deux soldats israéliens, et qui en a tué plusieurs autres. Mais le caractère disproportionné de la riposte, et les destructions massives auxquelles nous assistons depuis le 12 juillet, montrent clairement que l’option militaire ne peut que conduire à l’impasse. Le retour à la paix et à la stabilité du Liban, et au-delà, le retour à la paix et à la stabilité de toute la région, ne pourra être obtenu que par une solution politique. C’est en tout cas pour la France la voie que nous avons choisie et que nous allons continuer à favoriser.
La France plaide pour une sortie de crise autour de trois étapes consécutives. D’abord, une cessation immédiate des hostilités, afin de mettre un terme aux violences en cours, et faire cesser toutes ces morts inutiles et ces souffrances inacceptables, essentiellement chez les civils. Ensuite, parvenir entre les parties au conflit, c’est-à-dire entre le gouvernement du Liban et celui d’Israël, à un accord politique qui permette d’instaurer un cessez-le-feu durable. Cet accord politique doit être inspiré par un double objectif : garantir la sécurité d’Israël, et retrouver la pleine souveraineté du Liban. Cela passe par conséquent par l’application de la résolution 1559 du Conseil de sécurité des Nations unies - c’est-à-dire le désarmement de toutes les milices et le déploiement de l’armée libanaise dans tout le territoire, en particulier dans le sud du pays - la délimitation des frontières du Liban, et donc le règlement définitif de la question des fermes de Chebaa, le respect par tous de la souveraineté et de l’intégrité de chacun des pays concernés, la libération des soldats israéliens capturés au début de cette crise, le règlement de la question des prisonniers libanais détenus en Israël.
J’ai parlé aux différentes parties de tous ces sujets. Ces différents sujets sont au demeurant, ceux-là même qui figurent dans le plan du gouvernement Siniora. Ce plan en sept points, a été approuvé, il y a quelques jours, par l’ensemble du gouvernement libanais, c’est-à-dire par l’ensemble des partis qui forment le gouvernement libanais, y compris ceux qui viennent du Hezbollah. Ce plan libanais a été soutenu et approuvé par la France.
Enfin, à partir de cet accord politique, pourrait être envisagé le déploiement au Sud‑Liban d’une force internationale chargée de contrôler le cessez-le-feu, et d’assister l’armée libanaise. Pour la France, il est clair que cette force devra suivre la conclusion d’un accord politique et non le précéder.
Ce que je constate aujourd’hui, c’est que ce plan en trois étapes rencontre un très large écho. Les autorités libanaises se déclarent en plein accord avec cette approche. Mardi, à Bruxelles, l’Union européenne l’a reprise à son compte à l’unanimité. D’autre part, les travaux en cours au Conseil de sécurité des Nations unis montrent également que nos idées progressent. Là encore, cette évolution confirme ma conviction initiale : rien de durable ne pourra être accompli s’il n’y a pas à la base un processus politique agréé par tous, qui reposent sur des principes fondamentaux.
Israël doit avoir sa sécurité garantie. Le Liban doit avoir sa souveraineté et son intégrité restaurées et respectées. La communauté internationale et les pays les plus influents au Moyen-Orient doivent veiller à la préservation de la stabilité régionale. Ceux de ces pays qui aspirent, en particulier, à un rôle éminent dans la région, qui souhaitent exercer leur influence comme leur statut, leur histoire, ou leur volonté peuvent les encourager à le faire, doivent assumer cette responsabilité dans un esprit de tolérance et d’ouverture. Il appartient à chacun d’entre nous d’être responsable, si nous voulons faire triompher la voix de la raison et la voix de la paix.
Aujourd’hui, c’est donc l’action diplomatique que nous devons privilégier. La France entend y prendre toute sa part et se concerter avec l’ensemble de ses partenaires de la communauté internationale, à commencer par les Etats-Unis, dont on a vu ces derniers jours, combien sa diplomatie a été active, notamment à l’occasion des contacts noués au Proche‑Orient par Condoleezza Rice. Comme vous le savez, la France a déposé à New York un projet de résolution, qui reprend l’essentiel du plan en trois étapes que j’ai détaillé devant vous il y a quelques instants.
A partir de ce projet, nous travaillons sans relâche pour parvenir à un texte qui pourrait être accepté par tous. Ce n’est pas une tâche facile, et le temps presse. Mais la France a la conviction qu’une solution est possible, si chacun est vraiment animé par la volonté de ramener la paix au Liban et dans la région. Il importe donc de se concentrer maintenant sur les efforts diplomatiques, et de respecter la marche logique du processus politique : arrêt des combats, accord politique, force internationale. C’est la raison pour laquelle la France a dit et a répété que les réunions envisagées à plusieurs reprises pour commencer à organiser une force internationale lui paraissait prématurées et de nature à envoyer un mauvais signal aux pays de la région. Aujourd’hui, nous devons être rigoureux dans notre méthode et déterminés à faire triompher l’objectif de la paix. N’ayez pas de doute sur la mobilisation de la France.
Enfin, je termine par un mot sur les rapatriements pour vous dire que nous avons procédé depuis hier à Beyrouth et aujourd’hui à Larnaca, à une nouvelle opération de rapatriement qui concerne près de 1.000 personnes, dont 790 Français. Trois avions ramèneront cet après-midi et au cours de la nuit ces personnes à Paris. Avec cette nouvelle rotation, nous aurons rapatrié plus de 11.600 personnes, dont 9.000 Français et plus de 2.500 ressortissants d’autres nationalités, en majorité européennes. Par la suite, nous entendons maintenir un dispositif qui nous permette de continuer à transporter hors du Liban tous les ressortissants qui en feront la demande. Ainsi, une nouvelle rotation devrait intervenir dimanche et lundi prochains, et plus que jamais nous entendons être à l’écoute de nos compatriotes du Liban.
Je vous remercie, pardon d’avoir été un peu long, mais je voulais faire le point sur ces trois sujets.
Q - Pourquoi le ministère des Affaires étrangères a t-il fait appel à la société AXA pour évacuer certains Français depuis la Turquie ?
R - Il faut rappeler le contexte. Dès les premiers jours de la crise libanaise, le ministère des Affaires étrangères a mis en place un dispositif permettant l’évacuation, par ferry, le IERA PETRA - de Beyrouth à Larnaka puis par avion, de Larnaka à Paris - de 1.200 personnes tous les deux jours. Avec l’aide de la frégate Jean de Vienne, cette capacité a été portée à 1.500 par jour. L’arrivée vers le 24 juillet de deux navires lourds de la Marine Nationale a permis de porter la capacité d’évacuation, au départ de Beyrouth, à 2.500 personnes. Chypre n’était pas en mesure d’accueillir et de traiter un tel nombre sur une seule journée et le gouvernement chypriote, que je remercie du fond du cœur, nous en a d’ailleurs fait part. Il fallait donc nécessairement trouver un second point de débarquement sauf à prendre le risque de laisser mille Français attendre deux jours de plus au Liban avec tout ce que cela comporte lorsque vous êtes déplacés. C’est dans ces conditions que la solution turque s’est imposée.
Pourquoi avoir fait appel à AXA ? Tout simplement parce que la totalité de nos renforts étant déjà engagés à Chypre et au Liban. Il a donc fallu en 48 heures monter une solution d’urgence. Une antenne consulaire mobile a été constituée à partir de renforts venus de Turquie et d’Egypte mais elle n’était pas à même de traiter le débarquement et le transfert de 1.300 passagers. C’est pourquoi mes services ont procédé à une rapide consultation de nos partenaires habituels. Un seul a répondu à nos besoins : AXA. Je précise que depuis quelques mois la société AXA Assistance a pris en charge l’accueil téléphonique de la cellule d’urgence suite à marché qui a été passé pour tenir compte de l’expérience du Tsunami qui avait saturé nos standards téléphoniques. La prestation d’AXA assistance s’est d’ailleurs remarquablement déroulée puisque 23 000 appels ont été traités depuis le 14 juillet. C’est une des conclusions que nous avons tirées des soucis que nous avons eus lorsque les Français avaient téléphoné au moment du drame du Tsunami.
AXA a donc affrété des avions - 5 vols - loué des bus pour transférer les personnes à l’aéroport, mis en place des équipes sanitaires et d’accueil - 54 personnes - et enfin, loué les infrastructures d’hébergement. 9 agents du ministère des Affaires étrangères et vingt personnels de la Sécurité civile et de la Croix Rouge étaient également présents.
Je précise enfin que l’on ne peut parler en aucun cas de privatisation mais d’externalisation d’une toute petite partie de ce que nous avons entrepris pour faire face à l’urgence. L’administration ne peut pas tout faire, surtout dans des situations exceptionnelles. Le recours à des prestataires extérieurs et privés est d’ailleurs une pratique habituelle. Durant la crise libanaise, le partenariat que nous avons eu avec Air France mais aussi avec Aéroports de Paris relève de la même logique et personne n’y trouve à redire. Je vous remercie de m’avoir permis d’apporter ces précisions.
Q - Le Premier ministre israélien a dit aujourd’hui qu’Israël s’approchait de son but au Liban vis-à-vis du Hezbollah et qu’un vote aux Nations unies sera possible sur un cessez‑le‑feu la semaine prochaine. Quel est votre avis là-dessus ? Il a aussi demandé qu’une force internationale se déploie éventuellement dans les heures qui suivraient un cessez-le-feu, il a dit, par exemple, que si l’on cesse le feu à minuit, la force doit se déployer deux heures après. Qu’est-ce qui empêche la mise sur pied d’une force et son déploiement justement une fois que les accords politiques sont conclus ?
R - Il est évident que pour nous, dès l’instant où un accord politique permettant un cessez-le-feu durable est obtenu, il est tout à fait normal qu’une force internationale soit déployée. La France pourrait alors éventuellement participer à cette force. Je voudrais simplement rappeler que nous avons fait une distinction, comme le Secrétaire général des Nations unies l’a faite, entre une cessation immédiate des hostilités et ensuite un accord politique entre toutes les parties, c’est-à-dire le gouvernement libanais et le Hezbollah d’un côté, le Liban, la communauté internationale et Israël, de l’autre Cela me parait extrêmement important. Pourquoi y a-t-il aujourd’hui des discussions en cours avec, par exemple, le ministre des Affaires étrangères iranien ? Pourquoi des diplomates s’entretiennent-ils avec tous les acteurs de la région ? Parce qu’il faut un accord politique durable. Si un accord politique durable est conclu, il est tout à fait normal qu’il y ait une force internationale d’interposition, de surveillance, de respect de cessez-le-feu, pour permettre à l’armée libanaise de se déployer au Sud-Liban. Mais s’il n’existe pas d’accord politique, la France a clairement dit qu’il ne fallait pas compter sur elle pour participer à une force internationale. Car sans accord politique, sans cessez-le-feu durable, ce serait mettre le doigt dans un engrenage qui nous paraît dangereux. Il suffit de regarder ce qui se passe aujourd’hui en Irak.
Q - On a quand même pu constater des désaccords plus ou moins profonds avec les partenaires européens. On vient de parler de l’exemple de Damas, des contacts qu’il y a entre les uns et les autres et, la France a bien dit qu’il fallait absolument, avant cette force internationale, un accord politique plus ou moins stable sinon la France n’y participerait pas. Il y a d’autres positions, aussi bien en Europe que dans les autres Nations unies. On le sait. Comment pensez-vous résoudre ces différences ?
R - C’est vrai que nous avons beaucoup de points communs avec nos partenaires et que nous avons quelques différences. D’ailleurs nous assumons ces différences. Par exemple, nous n’avons pas souhaité participer lundi à la réunion, qui devait regrouper des contributeurs éventuels à la force internationale. Nous nous sommes aperçus d’ailleurs que, ne participant pas à la réunion de lundi, cette dernière avait été annulée. Elle devait avoir lieu ensuite mardi , puis jeudi, mais je me suis aperçu qu’aujourd’hui aussi, il n’y avait pas de réunion. Il existe des différences d’approche.
Mais, je crois qu’on ne peut pas dire qu’au niveau de l’Union européenne, il y ait des différences sur ce sujet. En effet, si vous observez la déclaration de la présidence finlandaise de mardi soir à Bruxelles, vous vous apercevez que trois éléments majeurs issus de la position française ont été repris : cessation immédiate des hostilités, accord politique pour un cessez-le-feu durable et uniquement après, déploiement d’une force internationale. Les Vingt-Cinq pays de l’Union européenne ont signé ce papier, y compris le Royaume-Uni et l’Allemagne. Je sais que l’on a pu dire à sa sortie que c’était une réunion où il n’y avait pas eu d’accord. Pour une fois, l’Union européenne a montré son unité politique sur ces trois sujets. Je tiens à le dire, parce que c’est important. Cette idée du triptyque français- la cessation immédiate des hostilités, le cessez-le-feu durable dû à un accord politique et enfin le déploiement de la force internationale- est en train de s’imposer progressivement au sein de la communauté internationale, d’abord au niveau de l’Union européenne, ensuite au niveau du gouvernement libanais. Je rappelle que cela figure dans les sept points du plan Siniora, accepté par le Hezbollah, en tous cas par les membres du Hezbollah présents au gouvernement. Cette idée est en train de cheminer aux Nations unies, au Conseil de sécurité des Nations unies. C’est dans ces conditions que nous aurons une réunion dans les prochains jours. Nous travaillons aujourd’hui jour et nuit avec nos partenaires, y compris nos partenaires américains, pour obtenir une résolution au Conseil de sécurité des Nations unies. J’espère que nous aurons rapidement une réponse.
Q - Nous sommes rentrés dans la troisième semaine de la guerre. Il y a des massacres pratiquement tous les jours. Que faudrait-il faire de la part des Israéliens pour que la communauté internationale, le Conseil de sécurité décide de dire "arrêtez" ?
R - D’abord il faut dire qu’il n’y a pas que les Israéliens qui doivent agir. Il y a aussi le Hezbollah qui a commencé en prenant en otage deux Israéliens. Nous avons condamné ces actes en premier. Maintenant, c’est ce que j’ai dit au Premier ministre Siniora, au président du Parlement libanais M. Nabih Berry, à mon homologue Mme Livni et au Premier ministre Ehud Olmert, et aussi au ministre des Affaires étrangères iranien. Je crois qu’il y a plusieurs éléments, du côté israélien : indiscutablement, et c’est normal, il doit y avoir un droit imprescriptible à la sécurité. Cela passe par le respect des accords de Taëf, qui sont la version nationale libanaise de la résolution 1559, c’est-à-dire le désarmement des milices, y compris celui du Hezbollah. Nous pensons que pour parvenir à cet objectif, le désarmement du Hezbollah, les moyens doivent être politiques et non pas militaires. Nous le disons aux Israéliens. Les Israéliens ont droit à demander ce désarmement, que nous demandons également. Je vois que dans le plan libanais en sept points, figurent les accords de Taëf, qui ont été acceptés par les membres du Hezbollah présents au gouvernement et cela, c’est un élément très positif que nous devons dire à Israël.
Deuxièmement, il y a, en effet, toujours du côté israélien, la question de la libération des deux soldats israéliens, qui doit se faire sans condition. Il y a la question du déploiement au Sud-Liban de l’armée libanaise et puis il y a, s’il y a un cessez-le-feu durable, la question d’une force internationale qui serait mise en place pour permettre le déploiement de l’armée libanaise. Voilà les questions du côté israélien. Du côté libanais, il faut régler la question des prisonniers libanais qui sont détenus en Israël. Je ne parle pas d’échange, je parle de règlement de cette question. J’ajoute que les fermes de Chebaa doivent aussi être au centre de la discussion. Nous avons proposé, comme d’ailleurs le gouvernement libanais, que les fermes de Chebaa reviennent sous souveraineté libanaise et que cela se fasse en deux temps : d’abord que les fermes de Chebaa reviennent sous juridiction des Nations unies, puis, vers la souveraineté du Liban. Nous avons aussi, du côté libanais, la question de la souveraineté, de l’intégrité territoriale du Liban qui doivent être garanties. C’est la raison pour laquelle nous voulons aider M. Siniora et que nous pensons qu’une force internationale pourrait aider le gouvernement libanais à déployer son armée sur son territoire. Vous me demandez quel pourrait être le déclenchement d’une solution. Je pense que le déclenchement doit être politique. Le gouvernement israélien n’a rien à gagner aujourd’hui à continuer militairement une offensive dont on voit qu’elle n’arrive pas à ses fins.
Nous l’avons toujours dit, la solution purement militaire ne peut pas exister, et je pense que les partenaires, en particulier les Américains, comprendront avec nous rapidement la nécessité urgente d’une résolution au Conseil de sécurité des Nations unies pour faire cesser les violences.
Q - Sur la nécessité d’associer la question palestinienne à la résolution du conflit israélo-libanais ?
R - Vous avez tout à fait raison, je ne voulais pas allonger mon propos mais il n’est pas possible de séparer le conflit israélo-libanais du conflit israléo-palestinien. Il faut dire plusieurs choses. La première c’est qu’il existe une dégradation de la situation dans le conflit israélo-palestinien et que, je l’ai dit l’autre jour au CAG à Bruxelles, nous devrions très vite dépêcher M. Solana pour qu’il apporte tout son soutien au début de règlement de crise porté par un certain nombre de personnes, dont M. Mahmoud Abbas. Nous devons en effet demander à l’Autorité palestinienne de faire cesser l’envoi de roquettes Qassam vers Israël. Nous devons aussi demander à l’armée israélienne de quitter Gaza. Nous devons également encourager les efforts de M. Mahmoud Abbas sur la constitution d’un futur gouvernement d’entente nationale. Il est vrai quelques heures avant l’enlèvement du caporal Shalit, nous avions, à la suite de ce texte co-signé par les prisonniers du Hamas et les prisonniers de l’OLP dans les prisons israéliennes, l’espoir d’une cohérence, d’une cohésion nationale intra-palestinienne. Elle est nécessaire pour la crédibilité de l’Autorité palestinienne et pour les territoires palestiniens en général. Donc, j’espère qu’il pourra y avoir très prochainement une entente nationale./.
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