L’échec des États-Unis à établir l’ordre en Irak est utilisé par ceux qui s’opposaient à la guerre comme une preuve qu’ils avaient raison depuis le début. À l’opposé, beaucoup de partisans de cette guerre préfèrent nier les problèmes en Irak afin de se convaincre que la guerre est un grand succès. Le récent débat présidentiel a également contribué à une politisation des deux questions irakiennes : la justification de la guerre et ses conséquences.
La guerre était justifiée, non parce que Saddam Hussein avait des armes de destruction massive, mais parce qu’il en avait eu par le passé et les avait utilisées. Il a essayé de construire un réacteur nucléaire en 1981 (heureusement détruit par Israël) et il a utilisé des gaz contre les Kurdes irakiens et l’Iran. Il a attaqué quatre pays (Iran, Koweït, Arabie saoudite et Israël) et a ignoré une douzaine de résolution de l’ONU. Certes, George W. Bush a menti pour justifier la guerre, mais toute personne estimant qu’il ne fallait pas renverser Saddam Hussein en 2003 aurait sans doute trouvé logique de ne pas attaquer Hitler en 1938 si l’occasion s’était présentée. Certes, Saddam n’est pas Hitler, mais Saddam en 2003 avait fait pire qu’Hitler en 1938. Affirmer que la guerre n’était pas justifiée équivaut à affirmer qu’on aurait préféré que Saddam Hussein reste au pouvoir.
Toutefois, les États-Unis ont échoué à imaginer ce qui arriverait après la guerre et ont cru, à tort, qu’il suffisait que Saddam Hussein tombe pour que la démocratie s’installe. Paul Wolfowitz a même pensé que l’Irak serait un modèle démocratique pour le monde arabe. L’Europe a mis longtemps pour devenir démocratique et il a fallu pour cela l’opposition au fascisme et au communism. Rien de tel n’existe en Irak. Washington a cru voir en Ahmed Chalabi un Lech Walesa irakien, mais Chalabi ressemble davantage aux Russes blancs en exil dans les années 20.
Il y a de fortes chances pour que le pays éclate en différentes entités, du fait des oppositions ethniques. Quel que soit le prochain président états-unien, il ne pourra pas faire de l’Irak une démocratie, mais cela ne veut pas dire que la guerre n’était pas juste.
« Just war, failed peace », par Shlomo Avineri, Jerusalem Post, 27 octobre 2004..
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