« Le Conseil de sécurité déplore vivement les pertes de vies humaines et
les blessures provoquées par l’emploi de la force durant l’opération déclenchée
par l’armée israélienne dans les eaux internationales contre le convoi faisant
route vers Gaza. Dans ce contexte, le Conseil condamne ces actes ayant
entraîné la mort d’au moins 10 civils et fait de nombreux blessés. Il exprime
ses condoléances à leurs familles.
Le Conseil demande la mainlevée immédiate de l’immobilisation des
navires et la prompte libération des civils détenus par Israël. Il insiste auprès
de celui-ci pour qu’il accorde le plein accès aux autorités consulaires, permette
aux pays concernés de recouvrer leurs défunts et leurs blessés immédiatement,
et assure l’acheminement de l’aide humanitaire transportée par le convoi
jusqu’à destination.
Le Conseil prend note de la déclaration du Secrétaire général de
l’Organisation des Nations Unies sur la nécessité de mener une enquête
approfondie sur la question. Il demande qu’il soit procédé à une enquête
prompte, impartiale, crédible et transparente, dans le respect des normes
internationales.
Le Conseil souligne que la situation à Gaza ne saurait se prolonger. Il
redit toute l’importance que revêt l’application intégrale de ses résolutions
1850 et 1860. Il rappelle dans ce contexte la grave préoccupation que suscite la
situation humanitaire à Gaza et met l’accent sur la nécessité d’instaurer un flux
soutenu et régulier de personnes et de biens vers Gaza et de veiller à la
fourniture et à la distribution sans entrave de l’aide humanitaire partout dans
Gaza.
Le Conseil redit avec force que la seule solution viable au conflit israélopalestinien
réside dans un accord négocié entre les parties et souligne à
nouveau que seule une solution reposant sur deux États, avec un État
palestinien indépendant et viable vivant côte à côte, dans la paix et la sécurité,
avec Israël et ses autres voisins peut amener la paix dans la région.
Le Conseil exprime son soutien aux pourparlers indirects et se dit
préoccupé que ces événements soient survenus alors que les pourparlers
indirects étaient engagés. Il exhorte les parties à faire preuve de retenue, en
évitant toute initiative unilatérale et toute provocation et invite instamment
tous les partenaires internationaux à promouvoir un climat de coopération
entre les parties et dans toute la région.
Procès verbal des deux séances
Le Président (parle en arabe) : J’informe les membres du Conseil que j’ai reçu du représentant d’Israël une lettre dans laquelle il demande à être invité à participer au débat sur la question inscrite à l’ordre du jour du Conseil. Suivant la pratique établie, je propose, avec l’assentiment du Conseil, d’inviter ce représentant à participer au débat, sans droit de vote, conformément aux dispositions pertinentes de la Charte et à l’article 37 du Règlement intérieur provisoire du Conseil.
En l’absence d’objection, il en est ainsi décidé.
Sur l’invitation du Président, M. Carmon (Israël) prend place à la table du Conseil.
Le Président (parle en arabe) : J’informe le Conseil que j’ai reçu une lettre datée du 31 mai 2010, de l’Observateur permanent de la Palestine auprès de l’Organisation des Nations Unies, qui se lit comme suit :
« J’ai l’honneur de demander au Conseil de sécurité d’inviter, conformément à la pratique établie, l’Observateur permanent de la Palestine auprès de l’Organisation des Nations Unies à participer à la séance qu’il doit tenir d’urgence le lundi 31 mai 2010 concernant l’agression israélienne menée le même jour contre une flottille transportant de l’aide humanitaire à Gaza. »
Cette lettre sera publiée comme document du Conseil de sécurité sous la cote S/2010/268.
Je propose, avec l’assentiment du Conseil, d’inviter l’Observateur permanent de la Palestine à participer au débat, conformément au Règlement intérieur provisoire et à la pratique établie.
En l’absence d’objection, il en est ainsi décidé.
Sur l’invitation du Président, M. Mansour (Palestine) prend place à la table du Conseil.
Le Président (parle en arabe) : Conformément à l’accord auquel il est parvenu lors de ses consultations préalables, je considérerai que le Conseil de sécurité décide d’inviter, en vertu de l’article 39 de son règlement intérieur provisoire, M. Oscar Fernandez-Taranco, Sous-Secrétaire général aux affaires politiques.
En l’absence d’objection, il en est ainsi décidé.
Le Conseil de sécurité va maintenant aborder l’examen de la question inscrite à son ordre du jour. Le Conseil de sécurité se réunit en application de l’article 2 de son règlement intérieur provisoire, en réponse à une lettre datée du 31 mai 2010, adressée au Président du Conseil de sécurité par le Représentant permanent de la Turquie auprès de l’Organisation des Nations Unies et à une lettre du même jour, adressée au Président du Conseil de sécurité par le Représentant permanent du Liban auprès de l’Organisation des Nations Unies, qui seront publiées respectivement sous la cote S/2010/266 et S/2010/267.
Je tiens à saluer la présence à cette séance de la Vice-Secrétaire générale, Mme Asha-Rose Migiro.
À la présente séance, le Conseil de sécurité entendra un exposé de M. Oscar Fernandez-Taranco, à qui je donne maintenant la parole.
M. Fernandez-Taranco (parle en anglais) : Très tôt ce matin, les forces navales israéliennes ont abordé un convoi de six navires en route vers Gaza. Ce convoi avait pour objectif déclaré d’apporter de l’aide humanitaire à Gaza et de forcer le blocus imposé par Israël à Gaza. Selon les informations disponibles, le convoi transportait du matériel éducatif et médical, des matériaux de construction, et environ 700 activistes, ressortissants d’un certain nombre de pays, dont, apparemment, des parlementaires de plusieurs pays.
Avant les événements survenus aujourd’hui, les autorités israéliennes avaient signalé publiquement et par voie diplomatique leur intention de ne pas autoriser le convoi à atteindre Gaza. Elles avaient déclaré que, si le convoi poursuivait sa route en dépit de ces avertissements, elles le détourneraient vers un port israélien, en inspecteraient la cargaison, ne faciliteraient que l’entrée des produits autorisés à Gaza, conformément au blocus imposé par Israël, et expulseraient les personnes se trouvant à bord.
Les organisateurs du convoi ont indiqué leur intention de continuer leur route et annoncé qu’ils tenteraient de livrer l’intégralité de leur cargaison à Gaza et de forcer le blocus. Le Hamas, l’autorité de facto à Gaza, a formé un comité chargé de recevoir le convoi.
Plusieurs gouvernements ayant des ressortissants à bord des navires ont exhorté toutes les parties à faire preuve de retenue et ont signalé aux autorités israéliennes l’importance qu’ils accordaient à la protection de ces ressortissants. Vendredi dernier, le porte-parole du Secrétaire général avait recommandé que toutes les parties concernées agissent avec prudence et responsabilité et s’efforcent de trouver une solution satisfaisante.
C’est aujourd’hui que le convoi devait arriver à Gaza. Selon les autorités israéliennes, les forces navales d’Israël ont indiqué directement au convoi très tôt ce matin qu’il ne serait pas autorisé à atteindre le port de Gaza. Mais le convoi a poursuivi sa route en direction de Gaza.
À environ 4 heures du matin heure locale, la marine israélienne a procédé à l’interception du convoi. Cela se serait passé à 14 milles marins de la côte, dans les eaux internationales, où des militaires israéliens, appuyés par des vaisseaux des forces navales et par des hélicoptères, auraient arraisonné les navires. Les forces israéliennes se sont emparées des six navires, mais des violences graves ont éclaté sur le principal bateau de passagers, un navire immatriculé en Turquie du nom de Mavi Marmara. Nous avons vu également des rapports des médias faisant état d’actes de violences sur un navire immatriculé en Grèce, le Sfendoni. En conséquence de ces violences, d’après les dernières informations disponibles, 10 personnes au moins ont été tuées et 30 au moins ont été blessées, tandis que 6 militaires israéliens ont été blessés. À ce stade, le nombre des victimes n’a pas été confirmé.
Compte tenu des circonstances, il n’est pas possible d’indiquer de manière certaine le déroulement ni le détail des événements. Le Gouvernement israélien a déclaré que les manifestants à bord avaient usé de couteaux et de gourdins contre le personnel naval des Forces de défense israéliennes (FDI) et qu’ils avaient peut-être même tiré à balles réelles, et qu’une arme avait été saisie des mains d’un soldat des FDI. Étant donné que les personnes qui étaient à bord des navires sont à présent détenues par Israël, y compris les journalistes qui voyageaient avec le convoi et dont le matériel de transmission a été confisqué par les forces israéliennes qui ont investi les navires, les informations reçues depuis ce matin par les organisateurs du convoi ont été réduites à un minimum. Nous n’avons aucune information de source indépendante sur ce qui s’est passé.
D’après les déclarations israéliennes, les personnes grièvement blessées ont été évacuées par hélicoptère vers des hôpitaux en Israël. Tous les navires sont arrivés sous escorte dans le port israélien d’Ashdod. Un porte-parole du Ministère israélien des affaires étrangères a déclaré que tous les ressortissants internationaux qui étaient sur les navires seraient expulsés.
Les autorités israéliennes ont déploré qu’il y ait eu des victimes mais ont imputé la violence aux activistes. Le Président Abbas a condamné les actions d’Israël et le meurtre des activistes. Il a décrété trois jours de deuil dans le territoire palestinien occupé. Ce carnage a suscité aux niveaux régional et international des réactions généralisées de très grande inquiétude et de préoccupation, ainsi que des démarches diplomatiques demandant des explications complètes aux autorités israéliennes. Il y a eu des manifestations à Gaza, en Cisjordanie, en Israël et dans plusieurs capitales régionales.
Le Secrétaire général a déclaré aujourd’hui à Kampala qu’il était choqué par les meurtres et les violences perpétrés sur les bateaux. Il a condamné ces actes de violence et réclamé une enquête complète afin que l’on puisse déterminer de manière précise comment le massacre s’est produit, et il a insisté pour qu’Israël fournisse sans tarder une explication complète.
Sur les instances du Secrétaire général, le Coordonnateur spécial, Robert Serry, et Filippo Grandi, Commissaire général de l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient, se sont activés sur le terrain depuis le début de la crise, exhortant les parties à faire preuve de retenue et à mettre fin à la violence, et assurant la coordination avec toutes les parties compétentes à la suite de cette tragédie.
Nous tenons, pour terminer, à souligner qu’il importe de mener une enquête complète sur cet incident, comme le réclame le Secrétaire général. Il faut également qu’Israël autorise l’accès aux détenus, conformément aux normes juridiques internationales en vigueur. Et d’une manière plus générale, nous rappelons qu’il importe que toutes les parties respectent de manière rigoureuse le droit international, dont le droit international humanitaire et le droit de la mer. Nous soulignons également le fait que ces événements surviennent à un moment où tous les efforts devraient être axés sur la nécessité d’établir la confiance, de faire progresser les négociations israélo-palestiniennes et d’encourager la coopération régionale en appui à la paix. Il est d’une importance cruciale que les pourparlers indirects se poursuivent.
Enfin, nous tenons à signaler que le carnage d’aujourd’hui aurait été évité si Israël avait tenu compte des appels répétés lui demandant de mettre fin au blocus contreproductif et inadmissible de Gaza. Nous rappelons l’ampleur des besoins non satisfaits de la population civile de Gaza et réitérons que le blocus est inadmissible et contreproductif, et qu’il doit cesser. Le 18 mai, le Coordonnateur spécial, M. Serry, a présenté au Conseil un exposé détaillé de la grave situation dans laquelle se trouve la population civile de Gaza sur le plan humanitaire et socioéconomique et en matière de droits de l’homme, et il a indiqué clairement quelles étaient les interventions à mener d’urgence – dans les domaines de l’eau et de l’assainissement, de l’éducation, de la santé et du commerce – pour répondre aux besoins. La seule façon dont Gaza peut progresser est d’adopter une stratégie différente et plus positive qui permette de mettre en œuvre la résolution 1860 (2009) du Conseil de sécurité, ce qui est désormais plus crucial que jamais.
Le Président (parle en arabe) : Je remercie M. Fernandez-Taranco pour son exposé.
Je donne maintenant la parole aux membres du Conseil de sécurité. Je saisis la présente occasion pour souhaiter la bienvenue au Ministre des affaires étrangères de la Turquie, M. Ahmet Davutoğlu.
M. Davutoğlu (Turquie) (parle en anglais) : Je me retrouve devant le Conseil aujourd’hui en raison d’un événement très triste et tragique au cours duquel un État Membre de cette organisation a commis un crime grave au mépris total de toutes les valeurs que nous nous sommes juré de défendre depuis la création du système des Nations Unies.
Je suis affolé de voir que les Forces de défense israéliennes ont pris d’assaut un convoi civil multinational transportant de l’aide humanitaire vers Gaza dans les eaux internationales, à 72 milles marins de la côte pour être précis, tuant et blessant un grand nombre de civils. Cette action était injustifiée et constitue une violation grave du droit international, qui tient purement et simplement de l’acte de banditisme et de piraterie ; c’est du meurtre perpétré par un État, qui n’est ni excusable ni justifiable. Un État-nation qui s’engage sur cette voie perd sa légitimité de membre respectueux de la communauté internationale.
La flottille civile multinationale, comprenant quelques navires et environ 600 personnes de 32 pays, transportant de l’aide humanitaire vers les populations nécessiteuses de Gaza, a fait l’objet d’une embuscade illégitime aux toutes premières heures de la journée. Le seul objectif de cette mission civile était de fournir des secours fort nécessaires aux enfants de Gaza occupée qui subissent depuis des années le blocus inhumain et illégal d’Israël. Ces navires ne constituaient guère une menace pour l’État d’Israël, ni pour quelque autre État en fait.
Cette aide humanitaire était destinée à des enfants qui ont été privés de vivre une enfance normale et de jouir des éléments de confort minimal que nos enfants considèrent comme allant de soi. Ces enfants ne savent pas d’où viendra leur prochain repas. Ils n’ont pas de logement ou alors, ils vivent dans des conditions d’extrême privation. Ils ne reçoivent aucun enseignement. Ils n’ont pas d’avenir et ne pourront pas contribuer à l’instauration de la paix et de la stabilité en Palestine et dans l’ensemble de la région. Les navires transportaient des équipements et des installations – notamment des aires de jeux – qui auraient permis aux enfants de se souvenir qu’ils sont des enfants. Ils transportaient des produits de première nécessité, en particulier des médicaments contre le cancer et du lait en poudre pour favoriser la croissance des enfants et améliorer leur santé en l’absence de lait véritable.
La communauté internationale est témoin de cette tragédie humanitaire depuis des années et elle ne réagit pas. Voilà où nous en sommes aujourd’hui. Aujourd’hui, nous avons pu observer en direct la perpétration d’un acte de barbarie, au cours duquel un convoi d’aide humanitaire a été puni par une agression en haute mer, à 72 milles des côtes. Aujourd’hui, de nombreux travailleurs humanitaires reviennent chez eux dans des sacs mortuaires et Israël a du sang sur les mains.
Cet événement n’est pas survenu au large des côtes somaliennes ou dans les archipels d’Extrême Orient, où la piraterie continue d’avoir cours. Cet événement a eu lieu en Méditerranée, où de tels actes ne sont pas monnaie courante. Il s’agit d’une région où nous devons faire preuve de bon sens, une région où la civilisation est née et s’est développée, et où les religions d’Abraham ont pris racine. Or ces religions prêchent la paix et nous apprennent à tendre la main à ceux qui sont dans le besoin.
Le recours à la force n’était pas seulement inapproprié, mais disproportionné. Le droit international stipule que même en temps de guerre, les civils ne doivent pas être attaqués ou brutalisés. Le droit à la légitime défense ne saurait justifier les actes commis par les forces israéliennes. Les libertés en haute mer constituent l’un des droits fondamentaux au regard du droit international de la mer, y compris le droit coutumier international. La liberté de navigation est l’une des plus anciennes normes internationales, elle remonte à des siècles. Aucun navire ne peut être arrêté ou arraisonné sans le consentement de son capitaine ou de l’État du pavillon. Le droit stipule clairement que de telles mesures ne sont autorisées que dans des circonstances exceptionnelles. En outre, aucune présomption de violation du droit par un navire et son équipage évoluant en haute mer ne décharge l’État intervenant des devoirs et responsabilités que lui confère le droit international. Le fait d’assimiler l’acheminement d’aide humanitaire à un acte hostile et de traiter les travailleurs humanitaires comme des combattants reflète un état d’esprit dangereux, qui a des effets néfastes sur la paix régionale et mondiale. Par conséquent, les actions israéliennes ne sauraient être considérées comme légales ou légitimes. Toute tentative de légitimer cette attaque est futile.
Cet acte inacceptable a été perpétré par ceux qui, dans le passé, se sont servis de navires pour transporter des réfugiés et des personnes fuyant l’une des pires tragédies du siècle dernier. Ils devraient plus que quiconque être conscients de l’importance que revêt l’aide humanitaire, du caractère inhumain des ghettos tels que celui que nous connaissons actuellement à Gaza occupée et de la menace qu’ils représentent. Je suis fier de représenter une nation qui a par le passé aidé ceux qui en avaient besoin à échapper à l’extermination.
Peu après cet acte d’agression, j’ai entendu des déclarations officielles affirmant que les civils qui se trouvaient à bord des navires étaient membres d’un groupe radical islamiste. Je suis consterné de voir les dirigeants d’un État s’abaisser au point de mentir et de tenter d’inventer des prétextes pour légitimer leurs actions illégales. Quoi qu’il en soit, la flottille compte des ressortissants de 32 pays, tous civils, de confessions très variées – le christianisme, l’islam et le judaïsme – et de convictions et d’horizons multiples. Cet ensemble représente la conscience de la communauté internationale. C’est un modèle de l’ONU.
Par conséquent, cette attaque a été menée contre l’ONU et ses valeurs. Le système international a reçu un coup violent. Il nous incombe à présent de remédier à cette situation et de prouver que le bon sens et le respect du droit international peuvent prévaloir. Nous devons être capables de montrer que le recours à la force n’est pas une option, à moins qu’il ne soit autorisé expressément par le droit. Nous devons honorer nos engagements et punir ceux qui violent les leurs. Le système doit être rectifié, autrement les peuples perdront toute confiance dans le système, mais aussi en leurs dirigeants et en nous.
Aucun État n’est au-dessus des lois. Israël doit être prêt à assumer les conséquences et la responsabilité de ses crimes. À l’heure actuelle, la faible chance qui existait de rétablir la paix et la stabilité dans la région est gravement compromise. Les processus en cours ont été asphyxiés par ce seul acte. Il semble qu’Israël se soit vraiment donné du mal pour empêcher toute évolution positive et anéantir tout espoir pour l’avenir. Il est devenu un défenseur de l’agression et du recours à la force.
Au vu de toutes les considérations exposées aujourd’hui, j’appelle le peuple israélien à exprimer sa consternation face à ce méfait. Les Israéliens ne doivent pas permettre qu’un autre acte éhonté fasse une nouvelle fois d’Israël un agresseur. Ils doivent prendre les mesures nécessaires pour rétablir son statut de partenaire crédible et de membre responsable de la communauté internationale.
La Turquie espère que le Conseil de sécurité réagira aujourd’hui avec fermeté et adoptera une déclaration présidentielle qui condamne fermement cet acte d’agression israélien et demande une enquête d’urgence sur cet incident ainsi que des sanctions contre les autorités et tous les responsables. Je demande au Conseil de se montrer à la hauteur de la situation et de faire ce que l’on attend de lui. Nous voulons que les éléments suivants figurent dans la déclaration.
Israël doit présenter des excuses à la communauté internationale et aux familles des personnes qui ont été tuées ou blessées pendant l’agression. Une enquête doit être entreprise d’urgence. Des mesures juridiques internationales doivent immédiatement être prises à l’encontre des autorités responsables et des auteurs de cette agression. L’ONU doit faire part de sa profonde déception et doit émettre un avertissement. Israël doit être enjoint de se conformer au droit international et de respecter les droits fondamentaux de la personne humaine. Les pays concernés doivent pouvoir récupérer leurs victimes et leurs blessés immédiatement. Les navires doivent être remis en circulation et autorisés à acheminer l’aide humanitaire jusqu’à destination. Les familles des victimes et des blessés, les organisations non gouvernementales et les compagnies de navigation concernées doivent être intégralement indemnisées. Le blocus de Gaza doit être immédiatement levé et l’acheminement de toute l’aide humanitaire doit être permis. Gaza doit devenir un exemple en se transformant rapidement en une région pacifique. La communauté internationale doit être invitée à contribuer à cet effort.
Aujourd’hui est une journée noire dans l’histoire de l’humanité, une journée où la frontière entre les terroristes et les États s’est estompée. Quiconque s’oppose au rétablissement de la dignité et au respect de l’ordre mondial devra en répondre devant l’opinion publique mondiale. Il nous incombe de montrer que tous les États sont tenus de respecter le droit international et les valeurs humaines. La Turquie est prête à honorer ses responsabilités à cet égard. Je suis certain que tel est notre objectif à tous.
Pour terminer, je salue tous les travailleurs humanitaires qui s’efforcent d’apporter des secours. Ils sont en première ligne. Je présente mes condoléances aux familles de ceux qui ont fait don de leur vie pour cette cause, quelle que soit leur origine, leur religion ou la couleur de leur peau. Je partage leur douleur.
Selon la tradition d’Abraham et selon ma propre croyance, tuer un être humain revient à tuer l’humanité tout entière. Hier, l’humanité s’est noyée dans les eaux internationales de la Méditerranée.
Sir Mark Lyall Grant (Royaume-Uni) (parle en anglais) : Malgré les circonstances particulièrement tristes, je souhaite la bienvenue au Conseil de sécurité cet après-midi au Ministre turc des affaires étrangères et je salue la présence de la Vice-Secrétaire générale. Je tiens également à remercier M. Fernandez-Taranco de son exposé.
Le Royaume-Uni déplore vivement les pertes en vies humaines consécutives à l’interception ce matin d’une flottille se rendant à Gaza. Il est extrêmement préoccupant que les actions israéliennes se soldent par un coût si élevé et si tragique en termes de vies humaines. Mon gouvernement est resté tout au long de la journée en contact constant avec le Gouvernement israélien pour suivre l’évolution de la situation.
Le Royaume-Uni a conseillé aux ressortissants britanniques de ne pas tenter de se rendre à Gaza par cette voie du fait des risques que cela comporte. Il est toutefois indispensable qu’Israël agisse avec retenue et conformément à ses obligations internationales. Compte tenu du nombre de victimes causées par cet incident, Israël a maintenant la responsabilité de fournir un compte rendu complet des événements et des efforts exercés pour limiter les pertes en vies humaines, et d’expliquer pourquoi le nombre de morts est si élevé. Il faudra en particulier déterminer si des mesures suffisantes ont été prises pour limiter le nombre de victimes et de blessés.
Ces événements sont évidemment très graves, mais nous ne pouvons pas les envisager de manière isolée. Il convient de les resituer dans le contexte de la situation intolérable et insoutenable qui règne à Gaza. Il est plus évident que jamais qu’Israël doit lever les restrictions à l’accès à Gaza, conformément à la résolution 1860 (2009). Le blocus actuel est inacceptable et contreproductif. Il ne peut y avoir de réaction internationale plus forte face à cette tragédie que de garantir d’urgence un règlement durable de la crise à Gaza. Cet objectif demeurera l’une des priorités internationales absolues du nouveau Gouvernement britannique.
La communauté internationale doit également assumer ses responsabilités. Le Royaume-Uni continue d’œuvrer pour atténuer les souffrances à Gaza. Nous demandons à toutes les parties concernées de continuer de fournir une aide humanitaire et à la reconstruction et de contribuer au développement économique.
Par ailleurs, ces événements mettent en lumière la nécessité de trouver une solution globale et durable au conflit israélo-arabe. Il est essentiel que les pourparlers de proximité progressent et que les parties entament des négociations directes aussitôt que possible.
Il se peut que nous entrions dans une nouvelle période d’instabilité et de colère dans la région. Nous exhortons toutes les parties à agir en toute transparence et avec retenue, pour veiller à ce que cet incident ne provoque d’autres violences et n’entraîne une nouvelle détérioration de la situation à Gaza.
Nous demandons aux autorités israéliennes tout d’abord de donner sans tarder des explications complètes et transparentes sur cet incident qui a causé des pertes en vies humaines et sur les mesures qui ont été prises par la suite, y compris les mesures permettant d’assurer qu’une enquête impartiale et complète sera menée et qu’il n’y aura pas d’autres victimes similaires. Deuxièmement, Israël doit fournir toutes les informations nécessaires et un accès consulaire immédiat aux ambassades de tous les pays dont des ressortissants sont concernés par cet incident. Troisièmement, les autorités israéliennes doivent ouvrir les points de passage pour permettre un accès sans entrave de l’aide à Gaza et prendre des mesures pour répondre aux vives préoccupations relatives à la détérioration de la situation humanitaire et économique et à ses effets sur toute une génération de jeunes Palestiniens. Israël doit permettre le passage sans entrave de l’aide humanitaire, des marchandises et des personnes à destination et en provenance de Gaza, conformément à la résolution 1860 (2009).
Enfin, nous exhortons également le Hamas et toutes les parties à répondre à l’appel de la résolution 1860 (2009) et à redoubler sans plus attendre d’efforts afin de parvenir à une paix globale fondée sur l’ambition d’une région où deux États démocratiques, Israël et la Palestine, vivent côte à côte, en paix, à l’intérieur de frontières sûres et reconnues.
M. Heller (Mexique) (parle en espagnol) : Nous saluons la présence du Ministre turc des affaires étrangères et remercions M. Fernandez-Taranco de l’exposé qu’il a présenté au Conseil.
Nous sommes consternés et stupéfaits par les graves incidents survenus aujourd’hui au large des côtes de la Méditerranée, non loin de la bande de Gaza. Nous condamnons avec la plus grande fermeté l’attaque armée menée par les forces armées israéliennes dans les eaux internationales contre une flottille de navires civils acheminant de l’aide humanitaire destinée aux habitants de la bande de Gaza. Nous déplorons les pertes en vies humaines et les multiples blessés causés par cette attaque. Nous présentons nos condoléances et exprimons notre solidarité aux familles des personnes qui ont trouvé la mort ou qui ont été blessées dans ces tragiques incidents.
Dans les situations de conflit armé, les attaques visant spécifiquement des civils et d’autres personnes ou biens protégés – en l’occurrence, le personnel humanitaire – et les restrictions imposées à la livraison de l’aide humanitaire constituent des violations graves des normes et principes du droit international, en vertu des Conventions de Genève de 1949 et de leurs Protocoles additionnels de 1979 et constituent également des crimes internationaux. Nous estimons en outre que ce genre d’actions contraires au droit international limitent de façon arbitraire le droit à la liberté de navigation légitime.
Pour ces motifs, le Gouvernement du Mexique exige qu’une enquête complète soit menée sur ces faits et que des mesures soient prises pour réduire les tensions dans la région le plus tôt possible en vue de la reprise du processus de paix au Moyen-Orient.
Ces actes regrettables confirment que le blocus de Gaza a non seulement des effets graves pour la population civile sur place mais qu’il est également contre-productif pour Israël, dans la mesure où il favorise des incidents graves tels que ceux qui se sont produits aujourd’hui et qui auraient pu être évités. Par conséquent, nous exhortons une fois de plus le Gouvernement israélien à lever le blocus imposé à la bande de Gaza afin de permettre l’accès de l’aide humanitaire destinée à la population, dont la situation préoccupe vivement la communauté internationale depuis la fin du conflit dans ce territoire en janvier 2009.
Par ailleurs, nous rappelons qu’il est essentiel de respecter pleinement les dispositions de la résolution 1860 (2009) et soulignons à nouveau la pertinence de mettre en place un mécanisme international de surveillance du cessez-le-feu pour permettre le passage de l’aide humanitaire et des matériaux nécessaires à la reconstruction de la bande de Gaza et mettre fin au trafic des armes en direction de cette région.
Étant donné les conditions difficiles actuelles, nous appelons toutes les parties concernées à s’abstenir de toute action susceptible de provoquer une escalade de la violence. Nous appelons également à la reprise du dialogue entre Israël et la Palestine, car c’est la seule façon de parvenir à une paix durable dans la région.
Les incidents survenus ne doivent pas interrompre le processus de pourparlers indirects en cours, dont l’urgence a été démontrée aujourd’hui. L’inverse reviendrait à faire le jeu des groupes extrémistes, qui sont les ennemis de la paix dans la région et s’emploient à empêcher la coexistence de deux États, Israël et la Palestine, à l’intérieur de frontières sûres et reconnues.
Mme Viotti (Brésil) (parle en anglais) : Je voudrais souhaiter chaleureusement la bienvenue au Ministre turc des affaires étrangères, S. E. M. Ahmet Davutoğlu. Je remercie également le Sous-Secrétaire général aux affaires politiques, M. Oscar Fernandez-Taranco, pour son exposé.
Le Brésil a été choqué et consterné d’apprendre qu’Israël avait lancé une attaque aujourd’hui, apparemment dans les eaux internationales, contre des navires transportant de l’aide humanitaire à Gaza, causant la mort de plus de 10 civils et faisant plusieurs dizaines de blessés. Le Gouvernement brésilien condamne ces attaques avec véhémence. Rien ne peut justifier une opération militaire contre un convoi humanitaire. À la gravité de l’incident s’ajoute le fait que cette attaque se serait produite dans les eaux internationales.
Le Brésil présente ses sincères condoléances aux familles de ceux qui ont perdu la vie dans cette attaque. Nous sommes particulièrement préoccupés par les informations, non confirmées, selon lesquelles un ressortissant brésilien se trouverait ou se serait trouvé à bord de l’un des navires. L’Ambassadeur d’Israël au Brésil a été convoqué au Ministère des relations extérieures où il lui a été fait part de l’indignation du Brésil face à cet incident et de nos inquiétudes sur le sort du ressortissant brésilien. Le Brésil estime que toute la lumière doit être faite sur cet incident, en vertu du droit international et du droit humanitaire international, par le biais d’une enquête indépendante.
Les conséquences tragiques de cet incident déplorable démontrent une fois de plus la nécessité de lever immédiatement le blocus imposé à Gaza. Ce blocus est une violation flagrante du droit international. La résolution 1860 (2009) appelait à la fourniture et à la distribution sans entrave dans tout Gaza de l’aide humanitaire, y compris les vivres, le carburant et les traitements médicaux. Cependant, et malgré les appels répétés et quasi universels de la communauté internationale, y compris mon gouvernement, Israël a systématiquement refusé de lever ce blocus. En outre, ce blocus viole les droits fondamentaux d’environ 1,5 million de personnes. Les Palestiniens demeurent contraints de vivre dans des conditions totalement inacceptables, presque un an et demi après la fin de l’opération Plomb durci.
Nous nous joignons à l’ensemble de la communauté internationale pour demander instamment à Israël de mettre immédiatement fin au blocus illégal imposé à Gaza et de prendre les mesures qui s’imposent pour mettre pleinement en œuvre la résolution 1860 (2009). La poursuite des violations du droit international ne fera qu’alourdir le coût humain et politique d’une politique injustifiable.
M. Mayr-Harting (Autriche) (parle en anglais) : Je vous remercie, Monsieur le Président, d’avoir convoqué aussi rapidement la présente séance. Je tiens à saluer la présence du Ministre turc des affaires étrangères, M. Ahmet Davutoğlu. Je tiens également à remercier la Vice-Secrétaire générale de sa présence parmi nous aujourd’hui et à remercier le Sous-Secrétaire général Fernandez-Taranco de son exposé sur l’opération militaire israélienne contre la flottille en route pour Gaza.
L’Autriche est profondément choquée par les pertes en vies humaines et par le nombre de blessés et tient à présenter ses condoléances aux familles des victimes. Nous sommes très inquiets de cette escalade tragique et condamnons le recours à la force qui a entraîné un grand nombre de morts.
Le Ministre autrichien des affaires étrangères, M. Michael Spindelegger, a demandé qu’une enquête indépendante, rapide et détaillée sur cette opération qui a eu lieu dans les eaux internationales soit menée. Nous avons également informé officiellement l’Ambassadeur d’Israël en Autriche de cette position. Par ailleurs, nous demandons aux autorités israéliennes de fournir de toute urgence aux services consulaires des États concernés des informations sur leurs ressortissants détenus en Israël et de leur accorder un droit d’accès.
Le fait que la résolution 1860 (2009) du Conseil de sécurité ne soit pas pleinement respectée est au cœur même des événements tragiques de la nuit dernière. La situation humanitaire à Gaza reste une source de très grave préoccupation.
L’Autriche a toujours reconnu le droit d’Israël de protéger ses citoyens contre des attaques aveugles lancées depuis Gaza. Nous demandons à nouveau la cessation immédiate de telles attaques. Dans le même temps, nous ne pensons pas que ces préoccupations puissent en aucune façon justifier ce qui s’est produit aujourd’hui.
Nous pensons que le blocus en cours est complètement inacceptable et contre-productif. Il ne profite qu’aux fauteurs de trouble et aux apologistes de la violence. Nous renouvelons notre appel à l’ouverture immédiate, durable et sans condition de tous les points de passage pour permettre la circulation de l’aide humanitaire, des marchandises et des personnes en direction et en provenance de Gaza.
Nous demandons à Israël de prendre immédiatement toutes les mesures crédibles nécessaires pour éviter que ce type d’incident violent ne se reproduise à l’avenir et d’agir en plein accord avec les obligations qui lui incombent en vertu du droit international et du droit international humanitaire. Nous demandons à toutes les parties de faire preuve de la plus grande retenue et de s’abstenir de toute action qui pourrait prolonger ou même aggraver les souffrances de la population civile de Gaza.
M. Takasu (Japon) (parle en anglais) : Je tiens moi aussi à souhaiter au Ministre turc des affaires étrangères la bienvenue à la présente séance qui se tient dans des circonstances tout à fait tragiques. Nous tenons également à saluer la présence de la Vice-Secrétaire générale et à remercier le Sous-Secrétaire général, M. Oscar Fernandez-Taranco, de son exposé.
Le Gouvernement japonais est consterné d’apprendre ce qui s’est passé à bord du convoi maritime transportant des approvisionnements à destination de la bande de Gaza. À maintes occasions, notamment dans la résolution 1860 (2009), le Conseil de sécurité a demandé aux États Membres de soutenir les efforts pour améliorer la situation humanitaire à Gaza. Il a demandé à diverses reprises un accès sans entrave à l’aide humanitaire à Gaza. Le Japon condamne les actes violents d’hostilité qui sont à l’origine de ce tragique incident impliquant un convoi humanitaire, alors même que la situation humanitaire à Gaza ne s’est nullement améliorée depuis un an et demi.
Le Japon déplore vivement le grand nombre de morts et de blessés causé parmi des personnes innocentes. Nous présentons nos condoléances les plus sincères aux familles des victimes et nous estimons qu’une enquête approfondie doit être menée de toute urgence. Le Japon demande instamment aux parties de faire preuve de retenue et d’éviter tout acte qui pourrait relancer le cycle de la violence.
Mme Ogwu (Nigéria) (parle en anglais) : Je vous remercie, Monsieur le Président, d’avoir convoqué la séance d’aujourd’hui. Nous tenons à souhaiter la bienvenue au Ministre turc des affaires étrangères. Nous saluons la présence de la Vice-Secrétaire générale et nous remercions le Sous-Secrétaire général, M. Oscar Fernandez-Taranco, pour son exposé net et précis.
La délégation nigériane est consternée par l’attaque de ce matin contre une flottille transportant de l’aide vers Gaza qui a fait plusieurs morts et plusieurs blessés. Nous présentons nos condoléances aux familles des morts et des blessés. Cet incident est tout aussi malheureux que regrettable car il intervient à un moment critique, alors que deux séries de pourparlers indirects entre Israël et la Palestine ont déjà eu lieu. Toutes les personnes de bonne volonté espéraient que les deux parties allaient s’employer assidûment à la reprise des négociations directes.
Le recours massif à la force pour intercepter un convoi d’aide humanitaire internationale est non seulement injustifié, mais a surtout créé une nouvelle situation qui pourrait être à l’origine de nouveaux troubles qui auraient des conséquences graves pour la paix au Moyen-Orient. Nous demandons donc à toutes les parties d’exercer la plus grande retenue et de s’engager de nouveau à honorer les obligations qui leur incombent en vertu de la Feuille de route. Même face à une telle provocation, nous ne devons pas faiblir dans nos efforts pour avancer sur la voie du dialogue et de la réconciliation politique à long terme. Nous demandons qu’une enquête en profondeur sur cette violence injustifiée soit menée d’urgence. Il faut obliger les responsables à répondre de leurs actes.
Nous restons préoccupés par la situation humanitaire déplorable qui règne à Gaza. Les restrictions et le blocus imposés à Gaza doivent être levés pour atténuer les souffrances des innocents.
Il importe de garantir la sécurité de tous les pays et de tous les peuples au Moyen-Orient. Le Conseil doit parler d’une seule voix chaque fois qu’il existe une menace claire à la paix et à la sécurité. À cet égard, nous appuyons le projet de déclaration présidentielle.
M. Wolff (États-Unis d’Amérique) (parle en anglais) : Je tiens à remercier le Sous-Secrétaire général Fernandez-Taranco pour son exposé.
Les États-Unis sont profondément inquiets par les violences récentes et regrettent les tragiques pertes en vies humaines et les blessures subies par ceux impliqués dans les incidents qui ont eu lieu la nuit dernière à bord de navires en route pour Gaza. Nous nous efforçons actuellement d’établir les faits. Nous espérons qu’une enquête crédible et transparente aura lieu et nous exhortons le Gouvernement israélien à enquêter de manière approfondie sur l’incident.
Comme je l’ai déclaré dans la salle du Conseil en décembre 2008 lorsque le Conseil a été confronté à une situation analogue (voir S/PV.6030), des mécanismes sont déjà en place pour permettre aux États Membres et aux groupes qui souhaitent le faire d’assurer le transfert de l’aide humanitaire à Gaza. Ces mécanismes, qui n’impliquent aucune provocation ni affrontement, sont ceux qui doivent être utilisés dans l’intérêt de la population de Gaza. Acheminer l’aide directement par la voie maritime n’est ni approprié ni responsable et encore moins efficace en raison des circonstances.
Les États-Unis restent profondément préoccupés par les souffrances des civils à Gaza et par la détérioration de la situation sur place, notamment sur le plan humanitaire et en matière de droits de l’homme. Nous demeurons convaincus que la situation n’est pas tenable et ne sert les intérêts d’aucune des parties concernées. Nous continuerons de mener un dialogue quotidien avec les Israéliens pour qu’ils augmentent le nombre et le type de marchandises qui peuvent entrer à Gaza afin de répondre à tous les besoins humanitaires et de relèvement de la population.
L’ingérence du Hamas dans l’acheminement de l’aide internationale et dans les activités des organisations non gouvernementales (ONG) compromet nos efforts à Gaza. La poursuite de ses activités de contrebande d’armes et son attachement au terrorisme portent atteinte à la sécurité et à la prospérité des Palestiniens et des Israéliens.
Nous continuerons de travailler en étroite collaboration avec le Gouvernement israélien et l’Autorité palestinienne, ainsi qu’avec les ONG internationales et l’ONU, pour assurer un accès suffisant des articles humanitaires, notamment les matériaux destinés à la reconstruction, par les points de passage de la frontière, tout en gardant à l’esprit les préoccupations légitimes du Gouvernement israélien en matière de sécurité.
En fin de compte, cet incident souligne qu’il est nécessaire de faire progresser rapidement les négociations pouvant déboucher sur une paix globale dans la région. La seule solution viable au conflit israélo-palestinien est un accord négocié entre les parties qui mette fin à l’occupation commencée en 1967 et réponde aux aspirations des deux parties à une patrie indépendante dans le cadre de deux États pour deux peuples – Israël et un État palestinien indépendant, viable et d’un seul tenant –, vivant côte à côte, dans la paix et la sécurité. Nous demandons une fois encore à nos partenaires internationaux, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du Conseil, d’œuvrer à instaurer un climat de coopération entre les parties et dans toute la région.
M. Pankin (Fédération de Russie) (parle en russe) : Nous saluons la déclaration du Ministre turc des affaires étrangères devant le Conseil de sécurité et l’exposé de M. Oscar Fernandez-Taranco sur la situation.
Nous adressons nos condoléances aux familles endeuillées et déplorons vivement toutes les pertes en vies humaines occasionnées par cet incident. Moscou condamne l’incident qui s’est produit dans les eaux internationales et est particulièrement préoccupé que tant de personnes, qui prenaient part à un convoi humanitaire, aient ont été tuées et blessées.
Nous devons faire la lumière sur tous les événements entourant cet incident. De toute évidence, l’usage d’armes contre des civils et l’arraisonnement injustifié d’un navire en haute mer sont de graves violations des normes du droit international. Nous y voyons dans le même temps une confirmation de la nécessité de mettre rapidement fin au blocus imposé par Israël à Gaza et de prendre des mesures réalistes pour que la situation humanitaire et sociale progresse dans l’intérêt de tous les peuples de cette région.
Nous sommes très préoccupés que cet incident se soit produit à un moment où les circonstances étaient réunies pour progresser dans le règlement de la question palestino-israélienne. Nous espérons que les tensions actuelles n’auront pas de conséquences négatives à long terme sur le processus de paix.
M. Mugoya (Ouganda) (parle en anglais) : Nous saluons et remercions le Ministre turc des affaires étrangères de son exposé instructif. Nous nous félicitons également de la présence de la Vice-Secrétaire générale et remercions le Sous-Secrétaire général, M. Fernandez-Taranco, de son exposé.
Nous avons été très choqués d’apprendre ce matin qu’Israël avait attaqué la flottille humanitaire qui se rendait à Gaza dans les eaux internationales. L’Ouganda condamne cette attaque contre le convoi humanitaire qui a occasionné des morts et des blessés, et il adresse ses condoléances aux familles endeuillées. Nous n’avons pas encore tous les faits à notre disposition et nous attendons de connaître tous les détails, mais nous n’en appuyons pas moins l’appel lancé par le Secrétaire général pour que soit menée une enquête approfondie à ce sujet.
Nous sommes préoccupés par la gravité de la situation humanitaire liée à la poursuite du blocus imposé au peuple de Gaza. Cet incident ne servira qu’à aggraver l’impasse politique résultant de l’absence de progrès de fond dans le processus de paix du Moyen-Orient. Il représente également une figure de rappel et nous appelons de nouveau Israël à mettre fin au blocus imposé à Gaza et à autoriser l’acheminement de l’aide humanitaire à sa population. Nous appelons Israël à laisser repartir les navires, à libérer les civils en captivité et à permettre l’acheminement de l’aide humanitaire vers sa destination finale.
Enfin, nous soulignons une fois encore l’importance d’une pleine mise en œuvre de la résolution 1860 (2009) du Conseil de sécurité.
M. Yang Tao (Chine) (parle en chinois) : Nous saluons la présence du Ministre turc des affaires étrangères, M. Davutoğlu. Nous nous félicitons également de la présence de S. E. la Vice-Secrétaire générale. Je tiens également à remercier M. Fernandez-Taranco de son exposé.
La Chine est choquée par l’attaque perpétrée par Israël contre le convoi multinational qui acheminait de l’aide humanitaire à Gaza, et les lourdes pertes occasionnées. Nous condamnons les actes d’Israël ciblant des travailleurs humanitaires et des civils. Nous adressons nos condoléances aux familles endeuillées des citoyens turcs et d’autres nationalités. Nous appelons le Conseil de sécurité à réagir rapidement et à prendre les mesures nécessaires.
À l’heure actuelle, la situation humanitaire demeure très sombre dans les territoires palestiniens occupés, notamment la bande de Gaza. La Chine exprime sa profonde préoccupation à cet égard. Nous exhortons Israël à mettre pleinement et immédiatement en œuvre la résolution 1860 (2009) du Conseil de sécurité, à ouvrir complètement les postes frontière et à lever le blocus de la bande de Gaza de façon à ce que la population locale se relève rapidement et puisse retrouver une vie normale.
M. Araud (France) : Je voudrais naturellement saluer la présence du Ministre des affaires étrangères de la République turque et remercier la Vice-Secrétaire générale de sa présence, ainsi que M. Fernandez- Taranco de son exposé.
Nous avons exprimé notre émotion devant les conséquences tragiques de l’opération israélienne contre la flottille à destination de Gaza, et les autorités de mon pays ont présenté leurs condoléances aux victimes et à leurs proches. Le bilan humain de cette opération laisse supposer un usage disproportionné de la force et un niveau de violence que rien ne justifie et que nous condamnons. Cela étant, avant de tirer des conclusions, il est nécessaire, naturellement, de connaître les faits. C’est la raison pour laquelle nous voudrions que toute la lumière soit faite par le biais d’une enquête approfondie qui devrait être conduite sans délai. Cette enquête devrait être indépendante, crédible et conforme aux normes internationales.
Au-delà de cet incident tragique, cette affaire rappelle la nécessité de rétablir un accès humanitaire à Gaza conformément à la résolution 1860 (2009) et nous appelons à la levée du blocus, qui est insoutenable et illégal.
La France, comme l’Union européenne, demandent qu’un accès consulaire soit accordé immédiatement conformément aux Conventions de Vienne aux ressortissants des pays membres qui sont actuellement détenus en Israël après cette opération.
Au-delà de l’affaire de Gaza, au-delà des questions que nous pose le blocus de Gaza, cet incident nous rappelle la nécessité d’une relance du processus de paix. Nous sommes condamnés, en l’absence d’un processus de paix crédible, à la répétition d’incidents de plus en plus sanglants. C’est la raison pour laquelle la France estime qu’une réunion du Quatuor au niveau ministériel pourrait permettre à la fois de lever le blocus de Gaza et de soutenir la reprise des négociations de paix.
M. Issoze-Ngondet (Gabon) : Je voudrais saluer la présence du Ministre des affaires étrangères de la Turquie ainsi que celle de la Vice-Secrétaire générale et remercier le Sous-Secrétaire général, M. Fernandez-Taranco, de son exposé.
Ma délégation a appris avec de vifs regrets l’attaque des forces israéliennes contre une flottille transportant de l’aide humanitaire à destination de la bande de Gaza qui a occasionné plus d’une dizaine de morts et de nombreux blessés dans les rangs des militants pacifistes voyageant avec la flottille. Le Gabon regrette ces nombreuses pertes humaines et saisit cette opportunité pour exprimer ses profondes condoléances aux familles éplorées. Nous réitérons notre soutien aux organisations humanitaires engagées à Gaza et en Palestine en général.
Ces nouvelles violences, au demeurant inacceptables au regard du droit international, et qui ravivent déjà de vives tensions, risquent de compromettre les pourparlers indirects entre Palestiniens et Israéliens entamés il y a de cela trois semaines. À l’instar de la communauté internationale, ma délégation condamne fermement ces attaques qui constituent un frein au processus de paix israélo-palestinien et soutient à cet effet l’appel du Secrétaire général visant à commettre une enquête internationale pour faire la lumière sur les circonstances de ce raid.
Cette nouvelle situation vient une fois de plus nous rappeler l’urgence de procéder à la levée du blocus de Gaza, conformément à la résolution 1860 (2009). Le Gabon invite les parties à cesser tout acte de provocation susceptible d’entraîner l’escalade de la violence dans la région. Il les invite aussi à se mettre instamment à la disposition de la communauté internationale pour envisager toutes les options possibles de reprise de pourparlers de paix. Ma délégation appuie le projet de déclaration présidentielle devant sanctionner la présente séance.
M. Barbalić (Bosnie-Herzégovine) (parle en anglais) : Je saisis tout d’abord cette occasion pour saluer chaleureusement le Ministre des affaires étrangères de la République turque. Nous souhaitons également la bienvenue à M. Fernandez-Taranco, Sous-Secrétaire général, et le remercions de l’exposé qu’il a présenté aujourd’hui.
La Bosnie-Herzégovine souhaite s’associer aux autres membres du Conseil de sécurité qui ont condamné avec la plus grande fermeté l’attaque menée par les Forces de défense israéliennes contre une flottille de navires transportant des civils non armés et de l’aide humanitaire destinée aux Palestiniens de Gaza. Dix de ces civils non armés ont trouvé la mort et de nombreux autres ont été blessés au cours de cette attaque. La Bosnie-Herzégovine déplore sincèrement cette perte tragique de vies humaines et les blessures infligées. Nous tenons à adresser nos plus sincères condoléances et à exprimer notre profonde sympathie aux familles des victimes.
Cette agression et le meurtre de travailleurs humanitaires innocents surviennent alors que de nouveaux efforts ont été déployés pour créer un climat propice à des négociations. Ces événements ne peuvent qu’accroître les souffrances de la population palestinienne et aggraver la crise. Ces navires civils transportaient des civils non armés et de l’aide humanitaire destinée au million et demi de Palestiniens qui subissent le siège imposé par Israël à Gaza.
Cette agression israélienne contre des civils non armés à bord de navires étrangers navigant dans les eaux internationales constitue une violation grave du droit international humanitaire et de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer. Rien ne peut justifier un tel recours à la violence. La Bosnie-Herzégovine demande qu’une enquête approfondie soit menée immédiatement sur cette attaque afin que ses auteurs et ceux qui l’ont ordonnée soient rapidement traduits en justice, conformément au droit international humanitaire.
Cet épisode tragique souligne la nécessité de lever d’urgence l’interdiction frappant l’aide humanitaire destinée aux civils palestiniens vivant à Gaza. La Bosnie-Herzégovine est extrêmement préoccupée par les souffrances et la tragédie endurées par les civils palestiniens à Gaza. Leurs conditions de vie sont insoutenables. Nous réitérons donc notre appel en faveur de l’ouverture immédiate, durable et inconditionnelle des points de passage pour permettre la circulation de l’aide humanitaire, des marchandises et des personnes en direction et en provenance de Gaza, conformément à la résolution 1860 (2009) du Conseil de sécurité et à l’Accord réglant les déplacements et le passage de 2005.
Israël ne peut pas continuer d’agir comme s’il était au-dessus des lois. Une paix durable au Moyen-Orient ne peut être réalisée que si Israël cesse de violer le droit international et commence à agir avec retenue et en conformité avec ses obligations internationales.
Le Président (parle en arabe) : Je vais maintenant faire une déclaration en ma qualité de représentant du Liban.
Je voudrais tout d’abord souhaiter de nouveau la bienvenue à S. E. M. Ahmet Davutoğlu, Ministre turc des affaires étrangères, et remercier la Vice-Secrétaire générale de sa présence parmi nous. Je remercie également M. Oscar Fernandez-Taranco de son exposé.
Comme le Conseil le sait, l’occupant israélien a mené une attaque maritime aujourd’hui dans les eaux internationales – un acte qui relève de la piraterie –contre une flottille de la liberté transportant des tonnes de fournitures humanitaires vers la bande de Gaza. Cette attaque a causé la mort d’au moins 15 personnes et a fait plusieurs blessés.
Je voudrais, tout d’abord, adresser, au nom du Liban, nos plus sincères condoléances aux familles des martyrs et souhaiter un prompt rétablissement aux blessés, tous victimes de la brutale agression israélienne. Des informations indiquent que les forces israéliennes ont ouvert le feu sur la flottille après que les personnes qui se trouvaient à bord ont hissé le drapeau blanc et avant même que ces forces n’abordent un seul des navires de la flottille. Près de 600 civils non armés originaires de 40 pays différents se trouvaient à bord des navires formant la flottille, dont la lauréate du prix Nobel de la paix en 1976, l’Irlandaise du Nord Mairead Corrigan Maguire, une rescapée de l’Holocauste, Hedy Epstein, et plusieurs parlementaires étrangers et autres personnalités occupant ou non des fonctions officielles. La flottille transportait de l’équipement médical, des matériaux de construction, des logements préfabriqués et 500 fauteuils roulant électriques pour les handicapés physiques.
Malgré son caractère humanitaire, les forces navales d’occupation israéliennes ont déployé trois patrouilleurs lance-missiles pour attaquer cette flottille. Pour le Liban, cette agression s’inscrit dans une série d’attaques répétées menées par Israël contre des civils innocents et constitue une violation grave de la Charte des Nations Unies, du droit international, du droit international humanitaire et du droit de la mer.
Ainsi, premièrement, en vertu du paragraphe 4 de l’Article 2 de la Charte des Nations Unies, les États doivent s’abstenir de recourir à la menace ou à l’emploi de la force, soit contre l’intégrité territoriale ou l’indépendance politique de tout État, soit de toute autre manière incompatible avec les buts des Nations Unies. Je ne pense pas qu’un seul des membres ici présents considère que cette attaque est conforme aux buts des Nations Unies.
Deuxièmement, en vertu de l’alinéa a) de l’article 87 de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, qui établit la pratique internationale, la haute mer est ouverte à tous les États et consacre notamment la liberté de navigation sans ingérence étrangère et à des fins pacifiques. Or, toutes les informations dont nous disposons confirment que l’attaque contre les navires a eu lieu en haute mer. Troisièmement, selon l’article 89 de cette même convention, qui représente la pratique internationale, « [a]ucun État ne peut légitimement prétendre soumettre une partie quelconque de la haute mer à sa souveraineté ».
Quatrièmement, l’article 30 de la quatrième Convention de Genève relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre établit clairement que les Puissances occupantes ont la responsabilité de faciliter les visites que désireraient faire aux personnes protégées les représentants d’autres institutions dont le but est d’apporter à ces personnes une aide matérielle. À Gaza, Israël continue d’imposer, dans un acte de châtiment collectif, son blocus illégal en fermant systématiquement les points de passage, ce qui entrave la liberté de circulation, y compris des malades, et complique davantage l’acheminement de l’aide humanitaire et des biens de première nécessité, notamment les denrées alimentaires, les médicaments, les combustibles et les matériaux de construction.
Israël ne nie pas qu’il s’agit d’un blocus, comme l’a reconnu le Ministre adjoint israélien des affaires étrangères, Daniel Ayalon, lors d’une conférence de presse organisée plus tôt dans la journée. Seulement, il le décrit comme une mesure légale. La loi à laquelle il se réfère est certainement différente de celle que cette Organisation reconnaît et que nous respectons tous. Sa loi est celle de la jungle et l’Organisation des Nations Unies a proclamé la nécessité de la combattre. Le blocus imposé par Israël aux familles vivant dans la bande de Gaza, au motif que le régime en place lui est hostile, ne constitue qu’un aspect des différentes formes que prend le châtiment collectif qui leur est infligé depuis plus de trois ans, et ce, à un rythme accru depuis la dernière guerre menée par Israël contre Gaza à la fin de l’année 2008. Israël ne fait pas la différence entre les personnes armées et les civils.
Enfin, le Liban insiste pour qu’il soit répondu du crime commis aujourd’hui. Nous exigeons que toutes les personnes arrêtées soient immédiatement libérées, que cette agression abominable commise contre des innocents non armés soit fermement condamnée et qu’une enquête soit menée immédiatement pour déterminer les responsabilités afin de punir tous les responsables et de réparer le préjudice causé à toutes les victimes et, bien entendu – et peut-être pour commencer – que le blocus imposé à Gaza soit levé immédiatement.
Le Liban tient à exprimer son appui à la déclaration présidentielle proposée par la délégation turque.
Je reprends à présent mes fonctions de Président du Conseil de sécurité.
Je donne la parole à l’Observateur permanent de la Palestine.
M. Mansour (Palestine) (parle en arabe) : Je tiens tout d’abord à souhaiter la bienvenue à S. E. M. le Ministre des affaires étrangères de la Turquie qui est parmi nous aujourd’hui à cette importante séance. J’ai eu l’honneur d’être avec lui il y a quelques jours à Istanbul, à la réunion internationale des Nations Unies sur la Palestine. Je tiens également à remercier M. Oscar Fernandez-Taranco pour son exposé, et à souhaiter la bienvenue ici parmi nous aujourd’hui à la Vice-Secrétaire générale de l’ONU, S. E. Mme Migiro.
En cette triste journée, M. Mahmoud Abbas a condamné le crime commis dans les eaux internationales, qu’il a qualifié de massacre, et qui est à l’origine du décret par l’Autorité palestinienne de trois jours de deuil national en hommage aux martyrs civils victimes de ce crime. Quelle que soit leur nationalité, nous considérons qu’ils sont morts pour la Palestine, et nous présentons nos condoléances à leur famille et à leurs proches.
Je voudrais d’abord exprimer la profonde reconnaissance de la Palestine au Conseil de sécurité pour la rapidité avec laquelle il a décidé de tenir cette séance extraordinaire à la demande de la Palestine, du Liban et de la Turquie, afin d’enquêter sur l’agression flagrante commise par Israël contre des navires se dirigeant vers Gaza, laquelle a provoqué la mort de plusieurs personnes, fait un certain nombre de blessés et entraîné la détention des personnes se trouvant à bord des navires. Ces personnes étaient des militants de la paix et de la liberté dont le seul slogan était un slogan de paix. Ils ne transportaient que des vivres, du matériel médical et d’autres fournitures destinées à nos civils.
Israël a mis à exécution ses menaces d’empêcher les actes de solidarité contre le blocus de Gaza. Le crime israélien et toutes les menaces qui l’ont précédé n’ont rien de nouveau pour cette Puissance occupante ; et il en est de même pour ses agressions et ses violations flagrantes contre les civils palestiniens et ceux qui les aident. L’Autorité palestinienne a condamné avec force ces actes de piraterie israéliens et considère que cette agression flagrante et cette impunité sont la conséquence directe du silence de la communauté internationale et de son incapacité à faire cesser les actes d’agression flagrants d’Israël et ses violations du droit international, du droit international humanitaire et du droit international des droits de l’homme.
La communauté internationale doit condamner ce crime, qui constitue une violation des normes du droit international humanitaire et du droit international des droits de l’homme. Elle doit mettre fin aux souffrances du peuple palestinien et au blocus effroyable de Gaza, appliquer la justice et le droit international et tenir Israël pour responsable des crimes de guerre qu’il a commis aujourd’hui contre cette flottille, ainsi que des autres crimes de guerre qu’il a perpétrés contre le peuple palestinien. Nous réclamons une enquête internationale indépendante et impartiale, afin d’en punir les auteurs et de libérer et protéger toutes les personnes détenues, immédiatement et sans conditions.
Il est grand temps que le Conseil de sécurité prenne des mesures énergiques contre cette grave escalade de la violence et contre les autres actes commis par Israël, pays qui se comporte toujours comme s’il est au-dessus des lois, n’a pas de compte à rendre ou ne peut être dissuadé de faire ce qu’il fait. Ce qui a mené au crime commis aujourd’hui, c’est le maintien du blocus israélien de Gaza dont le peuple est affamé et privé de son droit de vivre dans la liberté et la sécurité et d’avoir de quoi manger et se loger afin de survivre. C’est ce qui a incité ces centaines de personnes venant du monde entier à nous soutenir. L’une après l’autre, ces flottilles continueront d’arriver jusqu’à ce que cessent ce blocus immoral et les souffrances de notre peuple.
Cette attaque contre des civils non armés sur des navires étrangers dans des eaux internationales est une nouvelle preuve qu’Israël agit comme s’il était au-dessus des lois. La communauté internationale doit donc prendre d’urgence des mesures appropriées. Il est temps que le Conseil de sécurité examine la question de la non-mise en œuvre des nombreuses résolutions qu’il a prises sur la Palestine et la situation au Moyen-Orient. Il est temps qu’il mette fin à ce blocus injuste imposé à 1,5 million de Palestiniens à Gaza et qu’il mette en œuvre la résolution 1860 (2009). Il est temps que le Conseil mette fin au non-respect par Israël de ses résolutions et de la volonté de la communauté internationale, et qu’il prenne les mesures nécessaires pour remédier aux activités de peuplement et autres actions illégales menées dans les territoires palestiniens occupés, y compris dans Jérusalem-Est occupée.
C’est au Conseil de sécurité qu’incombe, en vertu de la Charte des Nations Unies, la responsabilité de prendre les mesures nécessaires au maintien de la paix et de la sécurité internationales et de mettre un terme à l’occupation par Israël des territoires palestiniens occupés depuis 1967. Cette situation n’a que trop duré ; il est temps que l’occupation cesse afin que le peuple palestinien puisse exercer ses droits inaliénables et créer un État indépendant ayant Jérusalem-Est pour capitale.
Le Président (parle en arabe) : Je donne maintenant la parole au représentant d’Israël.
M. Carmon (Israël) (parle en anglais) : Le Conseil de sécurité se réunit cet après-midi à la suite d’un événement grave qui s’est déroulé dans les premières heures de la matinée, heure locale, lorsqu’un convoi de six navires a tenté de forcer le blocus maritime au large des côtes de Gaza. Bien que les médias l’aient qualifiée de mission humanitaire acheminant de l’aide à Gaza, cette flottille était tout sauf une véritable mission uniquement humanitaire. Si cela avait effectivement été le cas, les organisateurs auraient accepté il y a des semaines, durant la phase de planification de leur opération, l’offre faite par les autorités israéliennes d’acheminer cette aide à Gaza par le port d’Ashdod, en passant par les voies terrestres existantes, conformément aux procédures établies.
Nombre d’États et d’organisations, dont l’ONU, ont recours quotidiennement à ces mécanismes, comme nous l’avons déjà entendu. Des quantités importantes de matériel et de marchandises arrivent ainsi chaque jour à Gaza. Et je voudrais souligner qu’il n’y a pas de crise humanitaire à Gaza. Il n’y a pas très longtemps, le Conseil a entendu le représentant du Secrétaire général dans la région, M. Serry, parler de l’évolution positive de la situation. Non seulement les organisateurs de la flottille ont donc refusé cette proposition, mais en plus, ils ont déclaré clairement que cette mission ne consistait pas tant à acheminer des fournitures humanitaires qu’à forcer le siège israélien, selon les mots utilisés la semaine dernière par Greta Berlin, l’une des porte-parole de la flottille.
Quel type de militant humanitaire exige ainsi de contourner les Nations Unies, la Croix-Rouge et les autres organisations reconnues sur le plan international ? Quel type de militant de la paix a recours à des couteaux, des matraques, et fait feu avec des armes volées à des soldats et d’autres armes sur des soldats qui arraisonnent un navire en application du droit international ? Quel type d’activistes humanitaires – certains au passé terroriste connu – peut prendre fait et cause pour le Hamas, organisation terroriste qui élude ostensiblement la solution à deux États et appelle à la destruction d’Israël, au mépris des conditions établies par la communauté internationale et par le Quatuor ? La réponse est claire : nous n’avons pas affaire à des militants de la paix, à des messagers de bonne volonté, mais à des individus qui se drapent cyniquement du manteau de l’aide humanitaire pour envoyer un message de haine et perpétrer la violence. La preuve en est ce à quoi nous avons assisté ce matin.
C’est un triste jour en vérité, triste jour en raison des conséquences de cette fâcheuse provocation. Je rappellerai au Conseil qu’Israël et le régime terroriste du Hamas qui contrôle Gaza sont en état de conflit armé. Je rappelle au Conseil que des tirs de roquettes et de mortiers étaient encore effectués par le Hamas et d’autres en direction du sud d’Israël il n’y a pas même une heure. Telle est la situation à Gaza ; telle est la situation de conflit armé que nous devons endurer au quotidien. Je rappelle au Conseil que Gaza est occupée par des terroristes qui ont chassé du pouvoir l’Autorité palestinienne lors d’un violent coup de force et que des armes sont continuellement passées en contrebande sur le territoire, notamment par la mer. La paix et la sécurité sont actuellement menacées.
Un blocus maritime est une mesure légitime et reconnue en droit international, que l’on peut mettre en œuvre dans le cadre d’un conflit armé en mer. On peut imposer un blocus en mer, y compris dans les eaux internationales. Je tiens à souligner que pour le cas qui nous concerne, Israël a communiqué en temps voulu non seulement des informations sur l’existence du blocus, comme il est censé le faire, mais également la notification appropriée aux gouvernements concernés et aux organisateurs de la flottille de Gaza. Les organisateurs ont rejeté les propositions de transfert de l’aide à Gaza réitérées par Israël parce qu’ils avaient d’autres projets.
Je voudrais citer une déclaration faite avant les événements par l’un des principaux organisateurs : « Ils [les Israéliens] vont devoir user de la force pour nous arrêter ». Ainsi s’est exprimé le chef de l’IHH (Insani Yardim Vakfi), l’un des premiers organisateurs de la flottille. Juste avant le départ de celle-ci, il a ajouté : « Nous allons résister et la résistance vaincra ». En outre, il convient de noter que le groupe à l’origine de cela, Insani Yardim Vakfi, tend à des positions antioccidentales extrémistes : parallèlement à ses activités humanitaires légitimes, il soutient des réseaux islamiques extrémistes tels que le Hamas, et a même soutenu, au moins par le passé, des éléments du jihad mondial tels qu’Al-Qaida.
Tout membres qu’ils étaient d’une mission dite humanitaire, ces champions des droits de l’homme ont également rejeté, lors de la phase initiale de planification de l’opération, la demande faite par Israël d’intercéder auprès du Hamas pour qu’il permette à la Croix-Rouge de se rendre auprès du soldat emprisonné Gilad Shalit.
Lorsqu’il est apparu clairement que la flottille de manifestants avait l’intention de violer le blocus en dépit des avertissements répétés qui avaient été envoyés, les forces navales israéliennes ont arraisonné les navires et les ont déroutés vers Ashdod. Malheureusement, les soldats qui arraisonnaient l’un des navires ont été attaqués de la façon la plus violente par des moyens mettant leur vie en danger : balles réelles, couteaux et matraques ont été utilisés, ainsi que d’autres types d’armes, contre les membres des Forces de défense israéliennes (FDI). Les intentions étaient claires : lyncher les soldats israéliens. Nombre d’informations l’attestent et je suis certain – j’espère – que les médias en feront état. L’intention était de procéder à un véritable lynchage à bord des navires.
Il ne fait aucun doute que les soldats ont agi en état de légitime défense. Selon les informations dont nous disposons, cette malheureuse opération a fait des morts et des blessés au sein des manifestants, en même temps que des blessés graves dans nos propres troupes. Les soldats blessés grièvement ont été évacués et sont actuellement soignés dans des hôpitaux israéliens. Les FDI, dans le cadre de procédures opérationnelles de routine, vont procéder à un débriefing sur la question qui permettra de jeter davantage de lumière sur les faits auxquels nous avons assisté aujourd’hui. Les informations obtenues seront bien entendu communiquées en conséquence.
Je veux être très clair : nous n’avions pas affaire à une manifestation pacifique. Les représentants de l’IHH qui étaient à bord de l’un des navires n’étaient pas des militants humanitaires. L’opération des FDI n’était pas une attaque militaire, comme d’aucuns l’ont dit. L’opération a commencé sous la forme d’une mesure préventive visant à contrer la violation illégale du blocus. Tout gouvernement responsable agirait de la sorte dans les mêmes circonstances. J’ajouterai que les responsables de cela sont les organisateurs – les provocateurs – dont certains sont liés à des organisations terroristes.
Les conséquences des événements de la nuit dernière sont tragiques et malheureuses et Israël regrette profondément toutes les vies innocentes perdues. Mais il ne peut compromettre sa sécurité. Nul ne le ferait. L’enchaînement précis des événements qui ont conduit à ces conséquences apparaîtra peu à peu, comme je l’ai déjà dit, dans les prochains jours. Toutefois, il reste important de ne pas perdre de vue ce contexte général lorsque l’on analyse ce fait particulier.
Beaucoup ici au Conseil ont cité la résolution 1860 (2009), mais je voudrais rappeler aux membres du Conseil que cette résolution porte sur de nombreux autres aspects que les aspects humanitaires. Nous ne pouvons donc pas ignorer la menace à la paix et à la sécurité que représente le Hamas, pas plus que la nécessité et l’obligation fondamentales dans lesquelles se trouve Israël de protéger sa sécurité par des mesures appropriées lorsque celle-ci se trouve menacée.
Ne nous laissons pas distraire de la nécessité de progresser sur la voie politique. Si la situation complexe qui règne à Gaza et alentour persiste – et l’incident d’aujourd’hui n’en est qu’un exemple parmi d’autres –, il nous faut cependant continuer d’appuyer et prolonger les évolutions positives enregistrées dans les quelques dernières semaines de façon à pouvoir, avec l’Autorité palestinienne, nous asseoir à la table des négociations pour des pourparlers directs dans l’intérêt de notre peuple et de l’ensemble de la région.
Le Président (parle en arabe) : Il n’y a pas d’autre orateur inscrit sur ma liste. Le Conseil de sécurité a ainsi achevé la phase actuelle de l’examen de la question inscrite à son ordre du jour. Comme il a été convenu, les membres du Conseil vont maintenant reprendre leurs consultations sur cette question.
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Interruption de séance et changement de présidence
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Remerciements au Président sortant
Le Président (parle en espagnol) : Étant donné que c’est la première séance du Conseil de sécurité pour le mois de juin, je voudrais saisir cette occasion pour rendre hommage, au nom du Conseil, à S. E. l’Ambassadeur Nawaf Salam, Représentant permanent du Liban auprès de l’Organisation des Nations Unies, pour la manière dont il a présidé le Conseil de sécurité pendant le mois de mai 2010. Je suis certain de me faire l’interprète de tous les membres du Conseil en exprimant notre profonde reconnaissance à l’Ambassadeur Salam et à sa délégation pour le grand savoir-faire diplomatique avec lequel ils ont dirigé les travaux du Conseil le mois dernier.
Adoption de l’ordre du jour
Le Président (parle en espagnol) : Conformément à l’invitation qui lui a été faite à la 6325e séance du Conseil de sécurité en vertu de l’article 37 du Règlement intérieur provisoire du Conseil, je salue la présence du représentant d’Israël à la table du Conseil.
Conformément à l’invitation qui lui a été faite à la 6325e séance en vertu du Règlement intérieur provisoire et de la pratique établie, je salue la présence de l’Observateur permanent de la Palestine auprès de l’Organisation des Nations Unies à la table du Conseil.
Le Conseil de sécurité va maintenant aborder l’examen de la question inscrite à son ordre du jour. Le Conseil se réunit conformément à l’article 2 de son règlement intérieur provisoire, en réponse à une lettre datée du 31 mai 2010, adressée au Président du Conseil de sécurité par le Représentant permanent de la Turquie auprès de l’Organisation des Nations Unies, et à une lettre datée du même jour, adressée au Président du Conseil de sécurité par le Représentant permanent du Liban auprès de l’Organisation des Nations Unies, qui seront publiées respectivement sous les cotes S/2010/266 et S/2010/267.
À l’issue de consultations entre les membres du Conseil de sécurité, j’ai été autorisé à faire, au nom du Conseil, la déclaration suivante, dont je donnerai lecture en anglais étant donné l’heure tardive et sachant que le texte n’a pas encore été traduit dans les six langues officielles :
(l’orateur poursuit en anglais)
« Le Conseil de sécurité déplore vivement les pertes de vies humaines et les blessures provoquées par l’emploi de la force durant l’opération déclenchée par l’armée israélienne dans les eaux internationales contre le convoi faisant voile vers Gaza. Dans ce contexte, le Conseil condamne ces actes ayant entraîné la mort d’au moins 10 civils et fait de nombreux blessés. Il exprime ses condoléances à leur famille.
Le Conseil demande la mainlevée immédiate de l’immobilisation des navires et la prompte libération des civils détenus par Israël. Il insiste auprès de celui-ci pour qu’il accorde le plein accès aux autorités consulaires, permette aux pays concernés de recouvrer leurs défunts et leurs blessés immédiatement, et assure l’acheminement de l’aide humanitaire transportée par le convoi jusqu’à destination.
Le Conseil prend note de la déclaration du Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies sur la nécessité de mener une enquête approfondie sur la question. Il demande qu’il soit procédé à une enquête prompte, impartiale, crédible et transparente, dans le respect des normes internationales.
Le Conseil souligne que la situation à Gaza ne saurait se prolonger. Il redit toute l’importance que revêt l’application intégrale des résolutions 1850 (2008) et 1860 (2009). Il rappelle dans ce contexte la grave préoccupation que suscite la situation humanitaire à Gaza et met l’accent sur la nécessité d’instaurer un flux soutenu et régulier de personnes et de biens vers Gaza, et de veiller à la fourniture et à la distribution de l’aide humanitaire partout dans Gaza.
Le Conseil redit avec force que la seule solution viable au conflit israélo-palestinien réside dans un accord négocié entre les parties et souligne à nouveau que seule une solution reposant sur deux États, avec un État palestinien indépendant et viable vivant côte à côte, dans la paix et la sécurité, avec Israël et ses autres voisins peut amener la paix dans la région.
Le Conseil exprime son soutien aux pourparlers indirects et se dit préoccupé que ces événements soient survenus alors que les pourparlers indirects étaient engagés. Il exhorte les parties à faire preuve de retenue, en évitant toute initiative unilatérale et toute provocation et invite instamment tous les partenaires internationaux à promouvoir un climat de coopération entre les parties et dans toute la région. »
(l’orateur reprend en espagnol)
Cette déclaration sera publiée en tant que document du Conseil de sécurité sous la cote S/PRST/2010/9.
Le Conseil de sécurité a ainsi achevé la phase actuelle de l’examen de la question inscrite à son ordre du jour.
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