Pour désigner sa chronique hebdomadaire, Manlio Dinucci a choisi le titre du classique ouvrage de stratégie militaire de la Chine antique, celui rédigé par Sun Tzu, il y a 2 500 ans : « L’art de la guerre ». Il enseigne que la victoire ne s’obtient pas uniquement sur la champ de bataille, mais aussi dans l’action politique et diplomatique. Justement, son premier billet porte sur les opérations secrètes.
« Simplement incroyable » : voilà comment James Clapper, directeur national du Renseignement états-unien, définit le meurtre de Ossama Ben Laden. Il assure n’avoir jamais vu « un niveau d’excellence professionnelle comme celui démontré aujourd’hui par la Communauté du renseignement ». Communauté très particulière que la sienne. Née en 2005, quand le président Bush, engagé à la Maison-Blanche dans la chasse à « l’ennemi obscur qui se cache dans les coins les plus reculés de la terre », eut l’idée de réunir toutes les agences de renseignement sous l’autorité d’un unique directeur. Le premier fut John Negroponte, fort de son expérience d’ « ambassadeur » en Irak qui venait d’être occupé.
La Communauté du renseignement est formée de 17 organisations fédérales. Outre la CIA (Agence centrale de renseignement), il y a la DIA (Agence de renseignement militaire), mais chaque secteur des forces armées —armée de Terre, de l’Air, Marine, Infanterie de marine (dit les « Marines »), Gardes-côtes— a son propre bureau de renseignement. De même que l’ont le Département d’État et ceux du Trésor, de la Sécurité de la patrie, et de l’Énergie (gardien de l’arsenal nucléaire). Font aussi partie de la communauté, avec leurs bureaux de renseignement, le FBI, la DEA (dont les opérations anti-drogue ont souvent de tout autres objectifs), l’Agence géospatiale (qui espionne avec des satellites), l’Agence pour la sécurité nationale (avec missions de guerre informatique), la National Reconnaissance (qui repère les objectifs humains et matériels à toucher, mais conduit aussi des opérations « humanitaires »).
Pour les actions plus importantes, la Communauté du renseignement se sert du Commandement des opérations spéciales (UsSoCom), engagé dans 75 pays avec environ 60 000 spécialistes. Y compris ceux à qui on vient d’attribuer le mérite de l’exécution de Ben Laden : le « Team Six », élite dans l’élite des Navy Seals (commandos de marine), tellement secret qu’on n’en reconnaît même pas l’existence officiellement. L’UsSoCom, en plus de l’élimination des ennemis, s’occupe de : « guerre non-conventionnelle » menée par des forces externes qu’il entraîne et organise ; « contre-insurrection » pour aider des gouvernements alliés à réprimer une rébellion ; « opérations psychologiques » pour influencer l’opinion publique de façon à ce qu’elle soutienne les actions militaires étasuniennes.
Est-il possible que l’ « opération Géronimo » d’un tel appareil super secret soit celle qu’on a présentée à l’opinion publique ? Outre le fait d’avoir fait disparaître le présumé cadavre de Ben Laden, on nous a dit que la CIA surveillait le compound depuis des mois sans intervenir et que le milliardaire saoudien, réduit à une vie de vieux retraité, était prêt à s’enfuir avec 500 euros en poche (avec lesquels il n’aurait pas pu se payer une traversée même sur le bateau le plus fracassé). Ou bien le meurtre d’un Ben Laden déjà mort ou capturé a-t-il été mis en scène, pour renforcer le président Obama à des fins de réélection et, en même temps, créer le motif pour intervenir un peu plus au Pakistan ? Le président lui-même, dans une interview à la télévision, a parlé d’un « réseau de soutien à Ben Laden à l’intérieur du Pakistan ». À quand la prochaine opération « simplement incroyable » ?
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