La Présidente Mme Ogwu (Nigéria) (parle en anglais) : En vertu de l’article 37 du règlement intérieur provisoire du Conseil, j’invite le représentant de la République arabe syrienne à participer à la présente séance.
Le Conseil de sécurité va maintenant aborder l’examen de la question inscrite à son ordre du jour.
Les membres du Conseil sont saisis du document S/2011/612 [voir ci-dessous], qui contient le texte d’un projet de résolution présenté par l’Allemagne, la France, le Portugal et le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord.
Je crois comprendre que le Conseil de sécurité est prêt à voter sur le projet de résolution dont il est saisi. Je vais maintenant mettre aux voix le projet de résolution.
Il est procédé au vote à main levée.
Votent pour :
Bosnie-Herzégovine, Colombie, France, Gabon, Allemagne, Nigéria, Portugal, Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, États-Unis d’Amérique
Votent contre :
Chine, Fédération de Russie
S’abstiennent :
Brésil, Inde, Liban, Afrique du Sud
La Présidente (parle en anglais) : Le résultat du vote est le suivant : 9 voix pour, 2 contre et 4 abstentions. Le projet de résolution n’est pas adopté en raison du vote négatif de deux membres permanents du Conseil.
Je donne maintenant la parole aux membres du Conseil qui souhaitent faire une déclaration après le vote.
M. Araud (France) : Je veux naturellement d’abord féliciter très chaleureusement le Représentant permanent du Liban qui a assuré la présidence du Conseil de sécurité au mois de septembre avec énormément d’efficacité et beaucoup de courage. Je voudrais également naturellement vous féliciter, Madame la Présidente, pour votre prise de fonctions comme Présidente du Conseil.
Plus de 2 700 victimes civiles, des dizaines de milliers de manifestants détenus dans les prisons syriennes, plus de 10 000 réfugiés syriens en Turquie, au Liban et en Jordanie. Voilà le bilan terrible dont les autorités syriennes peuvent aujourd’hui se targuer depuis le début des manifestations au mois de mars dernier. Voilà le bilan terrible que certains autour de cette table ont aujourd’hui refusé de condamner.
Depuis le mois de mai, nous avons travaillé sans relâche à une réaction du Conseil de sécurité. Notre objectif était simple et il le reste : faire cesser la répression brutale menée par le régime syrien contre son propre peuple qui revendique légitimement l’exercice de ses droits les plus fondamentaux, et permettre ainsi, dans un contexte exempt de violence et d’intimidation, l’émergence d’un processus politique inclusif mené par et pour les Syriens.
Pour ce faire, la France a pris ses responsabilités aux niveau national et européen. L’Union européenne a adopté plusieurs séries de sanctions contre les responsables des violences et des moyens qui permettent à la répression de se poursuivre. Parallèlement, des efforts diplomatiques se sont poursuivis à l’égard du régime de Damas, efforts diplomatiques tous azimuts, y compris en provenance des membres de ce Conseil de sécurité, auxquels les autorités syriennes sont restées sourdes. Face à la violence extrême exercée contre une population réclamant l’exercice de ses droits, face à la surdité des autorités syriennes, face au risque d’instabilité régionale, une réaction unie de la communauté internationale s’imposait et s’impose toujours. Le Conseil de sécurité, qui a la responsabilité principale du maintien de la paix et de la sécurité, en constitue le porte-parole naturel.
Depuis mai, nous avons travaillé sans relâche pour qu’émerge du Conseil un message clair et uni à l’attention des autorités syriennes. Après le massacre intervenu à Hama, ce Conseil a adopté le 3 août une déclaration présidentielle qui condamnait les autorités syriennes et appelait à une cessation immédiate des violences. Sur cette base, nous avons rédigé une résolution. Tous les efforts possibles ont été faits pour entendre les préoccupations de certains membres du Conseil et bâtir une réaction unanime. Chacun sait que nous avons accepté de revoir notre copie à de nombreuses reprises, en retirant notamment les sanctions que nous pensions nécessaires. Chacun sait que nous avons fait de nombreuses concessions. Le texte que nous présentions aujourd’hui était, à beaucoup d’égards, très proche de la déclaration présidentielle que nous avons adoptée le 3 août. Il venait l’actualiser au regard des derniers développements.
On ne peut donc aujourd’hui douter de la signification du veto qui est opposé à ce texte : ce n’est pas une question de formulation, c’est un choix politique, c’est un veto de principe qui signifie le refus de toute résolution du Conseil appliquée à la Syrie. C’est une expression de mépris pour les aspirations légitimes qui s’expriment courageusement en Syrie depuis cinq mois. C’est un rejet de ce formidable mouvement en faveur de la liberté et de la démocratie qu’est le Printemps arabe.
Qu’on ne s’y trompe pas, ce veto ne nous arrêtera pas. Aucun veto ne peut donner blanc seing à des autorités syriennes qui ont perdu toute légitimité en assassinant leur propre peuple. Les appels de la Ligue arabe à faire cesser l’effusion de sang, les déclarations des pays du voisinage, les souffrances du peuple syrien montrent bien que ce veto est à contresens de l’histoire qui se déroule en Syrie et dans toute la région.
Au Conseil de sécurité, au sein de l’Union européenne, avec l’ensemble de ses partenaires, la France ne cessera pas ses efforts pour que les droits du peuple syrien soient reconnus et respectés, pour que les responsables des violences commises soient un jour comptables de leurs actes devant la justice, et ils le seront, et pour qu’un processus politique inclusif et crédible puisse répondre aux aspirations qui s’expriment en Syrie chaque jour.
Pour finir, je tiens à saluer le courage de toutes celles et de tous ceux qui continuent, après ces mois de répression sanglante, à porter haut la voix de la liberté en Syrie. Seule une réponse effective à ces aspirations ramènera la stabilité dans ce pays, stabilité dont dépend la stabilité d’une région fragile. La communauté internationale, et plus particulièrement ce Conseil, du fait de son mandat, ne pourra échapper à la responsabilité de s’en assurer. Nous regrettons qu’il ne l’ait pas fait ce soir.
M. Churkin (Fédération de Russie) (parle en russe) : Madame la Présidente, je vous souhaite plein succès à la présidence du Conseil de sécurité pour ce mois. Nous tenons également à remercier l’Ambassadeur Salam et l’ensemble de la délégation libanaise pour le travail remarquable accompli pendant le mois de septembre dans des conditions difficiles.
Il est évident que le résultat du vote d’aujourd’hui n’est pas tant lié au caractère acceptable ou non du texte qu’à une divergence de vues politiques. C’est le seul élément de la déclaration de mon collègue français avec lequel je suis d’accord. Depuis le début, la délégation russe a entrepris des efforts intenses et constructifs pour préparer une réaction efficace du Conseil face à la situation dramatique en Syrie. Nous avons commencé à en voir le résultat dans la déclaration consensuelle prononcée par le Président le 3 août (S/PRST/2011/16). Sur la base de cette approche, nous avons, avec nos partenaires chinois, préparé un projet de résolution auquel nous avons apporté des modifications en fonction de l’évolution de la situation, et ce en tenant compte des préoccupations de nos collègues du Conseil. Nous tenons à remercier nos partenaires, en particulier ceux du groupe BRICS – à savoir le Brésil, l’Inde, la Chine et l’Afrique du Sud –, d’avoir appuyé notre texte.
Il est essentiel de noter que le projet de résolution préparé par les délégations russe et chinoise était fondé sur la logique du respect de la souveraineté nationale et de l’intégrité territoriale de la Syrie ainsi que du principe de la non-ingérence, y compris militaire, dans ses affaires intérieures ; le principe de l’unité du peuple syrien ; la nécessité de s’abstenir de tout affrontement ; et la nécessité d’inviter tous les acteurs concernés à participer sur un pied d’égalité à une concertation globale en vue de rétablir la paix civile et de favoriser l’entente nationale en réformant la vie socioéconomique et politique du pays.
Le projet de résolution rejeté aujourd’hui est fondé sur une philosophie très différente – celle de l’affrontement. Nous ne pouvons accepter que ce jugement unilatéral et accusatoire soit porté sur Damas. Nous estimons qu’il est inacceptable de menacer les autorités syriennes d’un ultimatum et de sanctions. Cette démarche est contraire au principe du règlement pacifique de la crise sur la base d’un véritable dialogue syrien. Nos propositions tendant à ce que le caractère inacceptable d’une intervention militaire étrangère soit mentionné dans le texte n’ont pas été prises en compte, et, compte tenu des événements bien connus qui se sont déroulés en Afrique du Nord, cela ne peut que nous inquiéter. Nous trouvons également alarmants la faiblesse du texte en ce qui concerne l’opposition et le fait qu’il n’appelle pas les membres de l’opposition à prendre leurs distances vis-à-vis des extrémistes. Sur la base des déclarations de certains politiciens occidentaux concernant la perte de légitimité du Président Al-Assad. Cette approche pourrait déclencher un conflit ouvert en Syrie et déstabiliser l’ensemble de la région. L’effondrement de la Syrie à la suite d’une guerre civile nuirait considérablement à la situation dans tout le Moyen-Orient.
La situation en Syrie ne saurait être envisagée par le Conseil indépendamment de l’expérience libyenne. La communauté internationale est alarmée par les déclarations selon lesquelles la manière dont l’OTAN perçoit le respect des résolutions du Conseil de sécurité portant sur la Libye constitue un modèle à suivre dans le cadre des interventions futures de l’OTAN au titre de la mise en œuvre de la responsabilité de protéger. On constate facilement que le modèle actuel du « Protecteur unifié » pourrait être reproduit en Syrie. Toutes les délégations présentes doivent comprendre que la position russe en ce qui concerne le conflit en Libye n’est aucunement fondée sur d’éventuels liens particuliers avec le régime du colonel Kadhafi, d’autant plus qu’un certain nombre d’États représentés autour de cette table entretenaient des relations plus chaleureuses avec la Jamahiriya arabe libyenne.
Le peuple libyen a exprimé son opinion sur Kadhafi, et il a décidé de son sort. Pour nous, Membres de l’ONU, notamment s’agissant d’un éventuel précédent, il est extrêmement important de savoir comment la résolution a été mise en œuvre et comment une résolution du Conseil de sécurité s’est transformée en son contraire.
La demande d’instauration rapide d’un cessez-le-feu s’est transformée en une guerre civile ouverte dont les conséquences humanitaires, sociales, économiques et militaires ont dépassé les frontières libyennes. L’instauration d’une zone d’exclusion aérienne a débouché sur le bombardement de raffineries de pétrole, de stations de télévision et d’autres sites civils. L’embargo sur les armes s’est mué en blocus naval dans l’ouest de la Libye, blocus qui concernait notamment les produits humanitaires. Aujourd’hui, la tragédie de Benghazi s’est répandue dans d’autres villes de l’ouest de la Libye – Syrte et Bani Walid. Nous devons une fois pour toutes exclure ces modèles des pratiques mondiales.
S’agissant de la Syrie, nous ne défendons pas le régime d’Al-Assad. Nous considérons que la violence est inacceptable, et nous condamnons la répression des manifestations pacifiques. Cependant, le fait que cette tragédie se prolonge ne saurait être imputé uniquement aux exactions commises par les autorités. Les événements récents montrent clairement que l’opposition radicale ne cache plus ses vues extrémistes et s’appuie sur des tactiques terroristes, au mépris du droit et en espérant recevoir un appui étranger. Les groupes armés qui s’appuient sur la contrebande et d’autres activités illégales offrent des fournitures, s’approprient des terres, tuent et commettent des atrocités contre ceux qui respectent les forces de l’ordre.
Dans les universités et les écoles, les représentants de l’intelligentsia et de la fonction publique syriennes ont récemment été victimes des terroristes. Nous présentons nos condoléances au mufti Ahmad Hassoon, qui est bien connu en Orient pour son action en faveur de la tolérance et de la concertation internationale, dont le fils âgé de 22 ans a été tué dimanche au cours d’une attaque terroriste.
Nous ne devons pas oublier qu’un grand nombre de Syriens n’approuvent pas la demande en faveur d’un changement rapide de régime et préféreraient voir des changements progressifs, car ils sont convaincus que ces changements doivent être mis en œuvre tout en maintenant la paix et l’harmonie civiles dans le pays. Ces changements, même s’ils sont tardifs, commencent à être mis en œuvre, et nous ne devons pas l’oublier. Le meilleur moyen de mettre fin à la crise est de refuser de provoquer un affrontement et de réunir tous les membres responsables de la communauté internationale pour encourager les parties à lancer un processus politique syrien sans exclusive. C’est la voie qu’a empruntée le Yémen, où des efforts de médiation intenses sont en cours en vue de rassembler les parties belligérantes.
La Russie continue de collaborer avec Damas. Nous demandons aux dirigeants syriens d’accélérer la mise en œuvre de ces changements. Ils doivent libérer les personnes arrêtées pendant les troubles et qui n’ont commis aucune infraction pénale. Ils doivent instaurer un dialogue plus actif avec l’opposition et donner accès aux médias internationaux. Ils doivent également renforcer leur interaction avec la Ligue des États arabes. À en juger par les mesures adoptées par la Ligue arabe et ce qui est diffusé à la télévision, nos efforts portent leurs fruits. Nous poursuivons notre collaboration avec les groupes patriotes constructifs de l’opposition syrienne qui se préoccupent du sort de leur pays et qui se sont déclarés opposés à toute ingérence étrangère dans leurs affaires intérieures.
Nous estimons que le message envoyé aujourd’hui sera correctement compris par les forces de l’opposition. Il n’existe pas de solution de remplacement au dialogue ; il ne peut y en avoir. Si l’opposition estime que les lois de M. Al-Assad sont imparfaites, elle doit accepter l’invitation du Gouvernement à débattre de la question. Nous ferons part de nos préoccupations aux dirigeants de l’opposition syrienne lorsqu’ils se rendront à Moscou dans un avenir proche. Les changements en vue d’un règlement pacifique de la crise sont possibles, et nous appuierons ces perspectives en coordination avec tous les partenaires de la paix désireux d’agir de manière constructive.
Si nos collègues du Conseil approuvent notre démarche, dont l’objectif est l’instauration d’un dialogue en vue d’une pleine réconciliation nationale en Syrie, nous continuerons de travailler sur le projet russo-chinois afin de parvenir à une résolution équilibrée qui énonce les éléments essentiels du règlement de la situation. Notre projet de résolution est toujours sur la table.
Sur cette base, nous sommes prêts à élaborer une véritable position collective et constructive de la communauté internationale et à ne pas nous immiscer dans la légitimation des sanctions unilatérales adoptées auparavant ou les tentatives de procéder à un changement violent de régime. Le peuple syrien mérite des changements pacifiques, avec l’appui de la communauté internationale.
M. Li Baodong (Chine) (parle en chinois) : La Chine est très inquiète de l’évolution de la situation en Syrie. Nous demandons à toutes les parties en Syrie de faire preuve de retenue, d’éviter de nouvelles effusions de sang et de renoncer à toutes les formes de violence. Nous espérons que le Gouvernement syrien tiendra ses promesses de réforme. Nous espérons aussi qu’un processus politique dirigé par la Syrie et ouvert à tous sera lancé dès que possible, afin d’apaiser rapidement les tensions dans le pays.
La communauté internationale doit aider de façon constructive à la réalisation des objectifs que j’ai mentionnés. Parallèlement, elle doit respecter pleinement la souveraineté, l’indépendance et l’intégrité territoriale de la Syrie. Si le Conseil de sécurité veut prendre d’autres mesures concernant le problème en Syrie, il faut que celles-ci contribuent à apaiser les tensions dans le pays, à aplanir les divergences par le dialogue politique, et à maintenir la paix et la stabilité au Moyen-Orient. Surtout, il faut que ces mesures soient conformes aux dispositions de la Charte de l’Organisation des Nations Unies et respectent le principe de non-ingérence dans les affaires intérieures des États, ce qui est déterminant pour la sécurité et la survie des pays en développement, en particulier les petits pays et les pays de taille moyenne, ainsi que pour la paix et la stabilité dans le monde.
Le Gouvernement chinois a toujours eu une position constante et bien arrêtée sur ces questions. Cela étant, la Chine a toujours participé de façon positive et constructive aux consultations sur les projets de résolution concernés. À l’heure actuelle, le Conseil de sécurité est saisi de deux projets de résolution. Le premier, que la Chine appuie, plaide pour le respect de la souveraineté de la Syrie et le règlement de la crise par le dialogue politique. S’agissant du second projet de résolution, que le Conseil a examiné aujourd’hui, à l’instar de plusieurs autres membres du Conseil, la Chine estime que dans les circonstances actuelles des sanctions ou la menace de sanctions n’aideront pas au règlement du problème en Syrie mais risquent plutôt de compliquer la situation. Il est malheureux et regrettable que cette préoccupation fondamentale et légitime n’ait pas dûment été prise en compte par les coauteurs du texte. Dans sa forme présente, le projet de résolution s’attache exclusivement à exercer des pressions sur la Syrie, menaçant même ce pays de sanctions. Il ne contribue pas à apaiser les tensions en Syrie. Voilà pourquoi la Chine a voté contre.
La Syrie est un pays important du Moyen-Orient. Le maintien de la paix et de la stabilité en Syrie va dans le sens des intérêts communs du peuple syrien et de la communauté internationale. De concert avec la communauté internationale, la Chine est disposée à jouer un rôle positif et constructif pour trouver une solution appropriée au problème en Syrie. Nous continuerons d’appuyer les efforts de médiation entrepris par les pays et les organisations concernés de la région.
M. Moraes Cabral (Portugal) (parle en anglais) : Je tiens tout d’abord à vous féliciter, Madame la Présidente, pour votre accession à la présidence du Conseil de sécurité et à vous souhaiter plein succès. Je souhaite aussi remercier l’Ambassadeur Nawaf Salam et son équipe de l’efficacité et de la sagesse avec lesquelles ils ont dirigé les travaux du Conseil au cours du mois de septembre, souvent dans des conditions délicates.
Nous regrettons profondément que le Conseil de sécurité n’ait pas été en mesure de condamner unanimement et sans équivoque le Gouvernement syrien et d’exiger qu’il mette immédiatement fin à la violente répression qu’il exerce contre sa population, et ce, bien que la situation dans le pays ait continué de se détériorer depuis l’adoption de la déclaration présidentielle du Conseil le 3 août (S/PRST/2011/16).
Comme cela a été souligné tout au long du processus, le projet de résolution avait principalement pour préoccupation et objectif d’éviter toute nouvelle effusion de sang et de veiller à ce que la crise en Syrie trouve une solution pacifique. À ce titre, et dans un effort pour faire en sorte que le Conseil parle d’une seule voix face à une situation aux proportions si inquiétantes, les membres de l’Union européenne ont mené un dialogue ouvert et constructif avec tous les membres du Conseil pour parvenir à l’adoption d’une résolution digne de ce nom afin d’épargner de nouvelles souffrances aux Syriens. Aussi sommes-nous profondément déçus par le résultat du vote d’aujourd’hui.
La situation en Syrie est des plus inquiétantes. La violente répression exercée par le Gouvernement syrien contre sa population et les violations des droits de l’homme et des libertés fondamentales qui sont commises doivent cesser immédiatement. Nous déplorons le nombre élevé de victimes et condamnons avec force les violations généralisées des droits de l’homme. Les responsables de violations des droits de l’homme devront rendre des comptes. Nous exhortons les autorités syriennes à coopérer pleinement avec la commission d’enquête mandatée par le Conseil des droits de l’homme et à lui permettre rapidement un accès sans entrave.
Nous déplorons également le fait que le Gouvernement syrien n’ait à aucun moment répondu aux nombreux appels lui demandant de mettre un terme à la violence et d’engager un processus politique authentique, crédible et sans exclusive. En persistant à ignorer les appels du Secrétaire général Ban Ki-moon, des membres du Conseil, du Conseil des droits de l’homme, de la Ligue des États arabes et de leurs propres voisins, les autorités syriennes ont permis à la situation de s’aggraver et de mettre en péril la sécurité et la stabilité du pays mais aussi d’une région déjà fragile.
Comme il l’a déjà affirmé à maintes reprises, le Portugal reste pleinement attaché à la souveraineté, à l’indépendance, à l’intégrité territoriale et à l’unité nationale de la Syrie. Nous appelons donc de nouveau au lancement d’un processus politique sans exclusive et crédible, conduit par les Syriens, qui réponde véritablement aux aspirations et préoccupations légitimes de la population syrienne. Le dialogue est le seul et unique moyen de garantir une issue pacifique à la crise en Syrie. La violence et la répression ne sont jamais la solution.
M. Hardeep Singh Puri (Inde) (parle en anglais) : Je voudrais commencer, Madame la Président, par vous féliciter pour votre accession à la présidence du Conseil de sécurité pour le mois d’octobre. Nous ne doutons pas que votre présidence sera extrêmement fructueuse. Je saisis aussi cette occasion pour féliciter le Liban, et plus particulièrement l’Ambassadeur Salam, de la manière très sage et avisée avec laquelle il a dirigé les travaux du Conseil en septembre, un mois difficile même lorsque tout va bien.
De tout temps et aujourd’hui encore, la Syrie a été un pays important au Moyen-Orient. On ne saurait trop souligner son rôle pour le processus de paix au Moyen-Orient et pour la stabilité de l’ensemble de la région. Une instabilité et des troubles prolongés en Syrie ont donc indubitablement des répercussions sur la région et au-delà.
L’Inde reste préoccupée par les évènements actuels en Syrie qui ont occasionné la mort de plusieurs centaines de civils et de membres des forces de sécurité. Nous condamnons toutes les violences, quels qu’en soient les auteurs.
Nous savons qu’il incombe à chaque État de respecter les droits fondamentaux de ses citoyens, de répondre à leurs aspirations légitimes et de donner suite à leurs revendications par des mesures administratives, politiques, économiques et autres. Dans le même temps, les États ont aussi l’obligation de protéger leurs citoyens contre les groupes ou les militants armés. Bien qu’il faille impérativement respecter le droit des personnes de manifester pacifiquement, les États n’ont d’autre choix que de prendre les mesures qui s’imposent lorsque des groupes de militants, lourdement armés, recourent à la violence contre l’autorité de l’État et l’infrastructure publique.
Étant donné la complexité des réalités sur le terrain en Syrie, nous estimons que l’ouverture d’un dialogue et l’établissement d’un partenariat de coopération constructifs avec la Syrie est la seule manière productive et pragmatique d’aller de l’avant. Dans le cadre de nos contacts bilatéraux avec le Gouvernement syrien, ainsi que par le biais de l’initiative Inde-Brésil-Afrique du Sud, nous avons prié instamment les autorités syriennes de faire preuve de retenue, de renoncer à la violence et de tenir compte des aspirations de leur population.
La communauté internationale doit laisser au Gouvernement syrien le temps et la latitude nécessaires pour mettre en œuvre les réformes de grande envergure qu’il a annoncées. Pour cela, il est également nécessaire que les forces d’opposition syriennes abandonnent la voie de l’insurrection armée et interagissent de manière constructive avec les autorités. Nous croyons sincèrement que les actions de la communauté internationale doivent permettre au Gouvernement syrien et à l’opposition de s’engager dans un processus politique sans exclusive mené par la Syrie, et non pas compliquer la situation par des menaces de sanctions, un changement de régime, etc.
Le projet de résolution dont est saisi le Conseil ne répond pas à nos préoccupations au sujet de la menace de sanctions. Il ne condamne pas les violences perpétrées par l’opposition syrienne, ni n’attribue la responsabilité à l’opposition d’abjurer la violence et de dialoguer avec les autorités syriennes pour qu’elles répondent à leurs griefs par le biais d’un processus politique pacifique. Nous nous sommes donc abstenus de voter sur la résolution.
Sir Mark Lyall Grant (Royaume Uni) (parle en anglais) : Je voudrais saisir cette occasion pour vous féliciter, Madame la Présidente, de votre accession à la présidence du Conseil de sécurité pour le mois d’octobre, et pour vous souhaiter bonne chance dans cette tâche. Je tiens également à remercier l’Ambassadeur Nawaf Salam, du Liban, et son équipe, qui ont su habilement mener les travaux du Conseil pendant le mois de septembre.
Le Royaume-Uni est profondément déçu de la décision de certains membres du Conseil de bloquer l’adoption du projet de résolution présenté aujourd’hui par les membres européens du Conseil. Il y a deux mois, ce Conseil a adopté une déclaration présidentielle (S/PRST/2011/16) condamnant les violations généralisées des droits de l’homme et l’usage de la force contre des civils par les autorités syriennes. Il a appelé à une cessation immédiate des violences, au respect des obligations découlant du droit international et à la mise en œuvre par le Gouvernement syrien de ses promesses déclarées de réforme.
Depuis cette déclaration présidentielle, la situation s’est encore détériorée. Le régime continue de réprimer brutalement son peuple. Il a tué près de 3 000 civils. Il recourt à une force disproportionnée et détient arbitrairement plusieurs milliers de personnes. Ses actions pourraient constituer des crimes contre l’humanité. Il n’y a aucun signe de réforme ou d’une quelconque tentative véritable de répondre aux préoccupations de la population syrienne. Comment peut-il y avoir un véritable dialogue lorsque le régime prive son peuple de la liberté de réunion et de la liberté de parole ?
L’absence de réaction du régime syrien face aux appels bilatéraux et collectifs de la communauté internationale a suscité l’inquiétude grandissante des voisins de la Syrie et de l’ensemble de la région. Il y a deux semaines, le Secrétaire général de l’ONU a déclaré que c’en était assez, et a appelé la communauté internationale à prendre des mesures cohérentes.
Dans ce contexte, il était temps que le Conseil de sécurité agisse avec force. Nous avons estimé, de même que la majorité des membres du Conseil, que le moment était venu d’imposer des sanctions. Mais une minorité – à savoir deux membres ayant le droit de veto – a déclaré qu’elle s’opposerait à des sanctions.
Afin d’essayer de maintenir l’unité de ce Conseil, ces dernières semaines, nous nous sommes donc engagés dans des négociations intensives pour faire en sorte que le Conseil puisse au moins envoyer un signal fort au régime syrien afin qu’il mette fin à la violence. Au cours de ces négociations, nous avons essayé de répondre aux préoccupations exprimées par les membres du Conseil. Nous avons supprimé les sanctions. C’était encore inacceptable pour la minorité. Nous avons appelé toutes les parties à rejeter la violence et l’extrémisme. C’était encore inacceptable. Nous avons supprimé toute mention du fait que les sanctions suivraient automatiquement dans les 30 jours si le régime manquait à ses obligations, et c’était encore inacceptable. En incluant une référence à l’Article 41 de la Charte des Nations Unies, nous avons indiqué clairement que toute mesure supplémentaire serait de nature non militaire. Et c’était encore inacceptable.
Le texte sur lequel nous avons voté aujourd’hui ne contenait rien à quoi un membre du Conseil quel qu’il soit devrait ressentir le besoin de s’opposer. Pourtant, deux membres ont choisi d’exercer leur droit de veto. Ce sera une grande déception pour le peuple syrien et pour l’ensemble de la région de voir que certains membres de ce Conseil n’ont pas été en mesure d’appuyer leur lutte pour les droits humains fondamentaux, dont jouissent la plupart des populations des pays représentés autour de cette table.
Certains membres du Conseil de sécurité ont tenté sur le plan bilatéral de discuter avec le Président Assad et de persuader le Gouvernement syrien de changer de cap et de mettre en œuvre une réforme. Chaque fois, ils ont reçu de vagues promesses de réforme, et chaque fois le Gouvernement syrien n’a pas répondu aux attentes. Il incombe maintenant aux pays qui ont bloqué cette résolution d’intensifier leurs efforts afin de persuader le Gouvernement syrien de mettre fin à la violence et de poursuivre une véritable réforme.
Si la situation persiste, le Conseil devra assumer ses responsabilités et prendre les mesures difficiles qu’il n’a malheureusement pas pu prendre aujourd’hui.
M. Osorio (Colombie) (parle en espagnol) : Je souhaite m’associer à mes collègues pour vous saluer, Madame la Présidente, et vous féliciter de votre accession à la présidence du Conseil de sécurité. Je vous souhaite plein succès et vous assure de tout notre soutien. Je tiens également à remercier le Président du mois dernier, l’Ambassadeur du Liban, ainsi que toute son équipe, pour la manière extraordinaire dont il a dirigé nos travaux.
Ma délégation a voté pour le projet de résolution proposé par l’Allemagne, la France, le Portugal et le Royaume-Uni. Nous sommes convaincus que c’est le moyen idéal et nécessaire d’appeler les autorités syriennes à cesser immédiatement leur violente offensive contre la population civile, afin qu’une enquête indépendante puisse être ouverte concernant toutes les violations des droits de l’homme commises pendant les manifestations, et de leur demander de punir les responsables d’actes de violence sous toutes leurs formes.
La responsabilité première du Gouvernement syrien est de protéger sa population, et il ne l’assume pas – bien au contraire. Nous sommes conscients du fait que la solution à la crise dans ce pays passera par un processus politique qui prenne effectivement en compte les aspirations légitimes du peuple. Cependant, il est tout d’abord nécessaire que ses libertés et droits fondamentaux soient respectés.
Nous regrettons que le Conseil de sécurité n’ait pas adopté ce texte et que le veto ait été utilisé pour le rejeter. Après plusieurs mois de négociations, l’on a tenté, sans imposer de sanctions – et c’était là une concession – d’appeler les autorités syriennes à progresser dans les réformes, qui n’ont toujours pas été mises en œuvre.
Mme Rice (États-Unis d’Amérique) (parle en anglais) : Avant de commencer ma déclaration, permettez-moi de vous féliciter, Madame la Présidente, de votre accession à la présidence du Conseil pour le mois d’octobre. Nous savons que vous mènerez habilement les travaux du Conseil, et nous nous réjouissons de coopérer avec vous. Je me joins à d’autres pour rendre hommage au Liban et à l’Ambassadeur Nawaf Salam pour le brio avec lequel il a dirigé le Conseil pendant un mois très difficile. Nous lui en sommes reconnaissants.
Les États-Unis sont indignés de que ce Conseil ait totalement échoué à régler un problème moral urgent et à faire face à une menace croissante à la paix et à la sécurité régionales. Plusieurs membres ont cherché pendant des semaines à affaiblir et vider de leur contenu tous les textes qui défendaient la vie de civils innocents contre la brutalité d’Assad. Aujourd’hui, deux membres ont mis leur veto à un texte largement édulcoré, qui ne mentionne même pas de sanctions.
Je tiens à être bien claire. Les États-Unis estiment qu’il est grand temps pour le Conseil d’assumer ses responsabilités et d’imposer des sanctions sévères et ciblées ainsi qu’un embargo sur les armes contre le régime Assad, comme nous l’avons fait de notre côté. Pourtant, actuellement, le courageux peuple syrien peut désormais voir clairement qui, au sein de ce Conseil, appuie ou non ses aspirations à la liberté et aux droits de l’homme universels.
Pendant cette période de changements, les peuples du Moyen-Orient savent désormais précisément quelles sont les nations qui ont choisi d’ignorer leurs appels à la démocratie et préfèrent plutôt soutenir des dictateurs désespérés et cruels. Ceux qui s’opposent à ce projet de résolution en couvrant un régime brutal devront en répondre auprès du peuple syrien et, disons-le, des peuples de la région qui expriment les mêmes aspirations universelles.
Les faits sont clairs. Depuis plus de six mois, le régime d’Al-Assad déchaîne délibérément la violence, la torture et la persécution contre des manifestants pacifiques, des militants des droits de l’homme et leurs familles. La Haut-Commissaire aux droits de l’homme a déjà signalé que les actions abominables du Gouvernement syrien pouvaient être qualifiables de crimes contre l’humanité. Ceux qui critiquent le régime d’Al-Assad se sont joints aux condamnations élevées partout dans la région, y compris au sein du Conseil de coopération du Golfe, qui a exigé un arrêt immédiat de ce qu’il a appelé « la machine à tuer » d’Al-Assad. Cependant, le Conseil de sécurité n’a pas encore adopté de résolution ne serait-ce qu’exhortatoire afin de contrer l’oppression brutale du régime d’Al-Assad.
Les arguments militant contre des mesures de fermeté du Conseil s’affaiblissent de jour en jour. D’aucuns, au Conseil, soutiennent que les abus commis par le régime d’Al-Assad ne sont pas si choquants ou qu’il est nécessaire de laisser plus de temps à ce régime pour qu’il puisse mettre en œuvre ses prétendues réformes. Cependant, les informations émanant de l’ONU elle-même indiquent que les efforts déployés par le Gouvernement syrien pour dissimuler les atrocités qu’il continue de commettre sont aussi transparents que ses promesses de réformes sont vides de sens.
D’autres disent que des mesures de fermeté du Conseil de sécurité à l’égard de la Syrie ne seraient qu’un prétexte à une intervention militaire. Soyons clairs là-dessus : cela n’a aucun rapport avec une quelconque intervention militaire ; cela n’a aucun rapport avec la Libye. Il s’agit d’un bas stratagème utilisé par ceux qui préfèrent vendre des armes au régime syrien que de soutenir le peuple syrien.
Ce dont il s’agit ici, c’est de savoir si le Conseil, dans cette vague de changements au Moyen-Orient, sera aux côtés des manifestants pacifiques qui réclament la liberté ou d’un régime de voyous armés de fusils qui foulent aux pieds la dignité humaine et les droits de l’homme. Telle que la situation se présente actuellement, le Conseil ne va pas même ordonner l’envoi d’observateurs des droits de l’homme en Syrie. C’est là un grave échec, et qui pourrait sonner le glas de toute manifestation pacifique face à un régime qui est capable de tout.
En août, nous avons explicitement condamné la violence et signifié clairement que la répression menée par le régime syrien était absolument inadmissible. Plusieurs d’entre nous, ici au Conseil, ainsi que de nombreux membres de la communauté internationale, ont exprimé leur condamnation et imposé des sanctions à l’encontre du régime d’Al-Assad. Des organisations régionales comme la Ligue des États arabes, le Conseil de coopération du Golfe et l’Organisation de la coopération islamique ont exhorté le Gouvernement syrien à mettre fin aux effusions de sang. En réponse, le Gouvernement syrien a encore intensifié les violences et la répression, tandis que certains membres du Conseil ont préféré détourner les yeux.
Nous exhortons les gouvernements qui n’ont pas permis que le Conseil prenne des mesures à prendre une autre voie et à entendre les appels du peuple syrien. Le régime d’Al-Assad refuse catégoriquement de respecter ses obligations internationales, y compris celles qui sont énoncées dans la déclaration présidentielle du Conseil du 3 août (S/PRST/2011/16). La communauté internationale doit lui en faire assumer les conséquences.
En n’adoptant pas le projet de résolution dont nous sommes saisis, le Conseil a laissé passer une occasion d’assumer ses responsabilités face au peuple syrien. Nous regrettons profondément que certains membres du Conseil nous aient empêchés de prendre une position de principe contre l’oppression brutale de son propre peuple par le régime syrien. Néanmoins, les citoyens qui souffrent en Syrie nous regardent aujourd’hui, comme tout le Moyen-Orient. Le Conseil de sécurité restera saisi de la crise en Syrie et nous ne baisserons pas les bras jusqu’à ce que le Conseil assume enfin ses responsabilités.
M. Salam (Liban) (parle en arabe) : Je voudrais tout d’abord, Madame la Présidente, féliciter le Nigéria de son accession à la présidence du Conseil de sécurité pour le mois d’octobre. Je voudrais également remercier la Présidente et tous mes collègues de leurs mots aimables concernant nos travaux à la présidence du Conseil le mois dernier.
Qu’il me soit permis de dire une fois de plus que compte tenu des événements qui se déroulent en Syrie, le Liban tient à défendre ce pays arabe frère et son droit à la souveraineté et à l’intégrité de son peuple et de son territoire, y compris le droit de veiller à la sécurité et à la sûreté de tous ses concitoyens. Nous voudrions également exprimer une fois de plus notre profond chagrin de voir toutes les victimes qui ont trouvé la mort dans ce pays frère, la Syrie. Par conséquent, conformément à la position qu’il a adoptée le 3 août concernant la déclaration présidentielle (S/PRST/2011/16), et pour protéger l’unité et la stabilité de la Syrie, le Liban s’est abstenu aujourd’hui dans le vote sur le projet de résolution dont nous sommes saisis.
M. Barbalić (Bosnie-Herzégovine) (parle en anglais) : Je voudrais avant toute chose féliciter la délégation nigériane de son accession à la présidence, et féliciter l’Ambassadeur Salam et sa délégation de leur excellente direction des affaires du Conseil pendant le mois de septembre.
Je voudrais, maintenant, exprimer notre profonde préoccupation face à la situation qui règne en Syrie. Au lieu d’assister à un processus pacifique de démocratisation et de réforme, nous voyons au contraire la situation se dégrader constamment. Jour après jour, les Syriens voient s’accumuler le nombre des victimes. Nous tenons à présenter nos condoléances les plus sincères aux familles et amis de ceux qui ont perdu la vie depuis le déclenchement de cette crise dans le pays.
Tout en exprimant tout notre appui à l’égard de la souveraineté, de l’indépendance et de l’intégrité territoriale de la Syrie, nous appelons les autorités du pays à s’atteler immédiatement à trouver les moyens de répondre aux aspirations et revendications légitimes de leur peuple dans le cadre d’un véritable dialogue sans exclusive mené par les Syriens eux-mêmes. Nous sommes persuadés que la mise en œuvre efficace des réformes annoncées peut réellement contribuer à mettre fin aux troubles et à rétablir la paix et l’ordre en Syrie.
Par ailleurs, nous condamnons fermement la poursuite des violences et du recours à la force, qui sont inadmissibles au titre du droit international humanitaire et du droit des droits de l’homme. Nous appelons les autorités syriennes à mettre fin à ces actes immédiatement. Il faut veiller au respect et à la protection des vies humaines. Nous réitérons fermement également notre position, à savoir que tous ceux qui commettent des crimes doivent être traduits en justice et répondre de leurs actes.
La Bosnie-Herzégovine est particulièrement préoccupée par les informations qui nous parviennent concernant les vagues de réfugiés qui fuient la violence. Nous soulignons, par conséquent, l’importance d’un accès sans entrave de l’ONU et des autres organisations internationales humanitaires aux populations touchées.
Nous sommes fermement convaincus que le projet de résolution présenté permettait de répondre à un certain nombre de points essentiels. En outre, nous restons persuadés que seules des mesures rapides et décisives peuvent permettre de stabiliser la situation et de prévenir une nouvelle escalade de la crise en Syrie. Si le projet de résolution avait été adopté, il aurait pu servir les intérêts du peuple syrien et contribuer à la paix et à la sécurité dans la région. La Syrie est un acteur d’importance dans la région, et sa stabilité est déterminante pour le processus de paix au Moyen-Orient.
M. Wittig (Allemagne) (parle en anglais) : Je voudrais commencer par remercier chaleureusement l’Ambassadeur Nawaf Salam et son équipe de la sagesse, de l’efficacité et du courage avec lesquels ils ont dirigé les travaux du Conseil au mois de septembre. Je voudrais également me joindre aux autres orateurs pour vous féliciter, Madame la Présidente, à l’occasion de votre accession à la présidence pour ce mois. Vous pouvez compter sur l’appui de l’Allemagne.
Depuis le début de l’année, nous avons assisté à des changements considérables dans le monde arabe. Nous pouvons voir des manifestants pacifiques exprimer leur désir de liberté, de dignité et d’autodétermination. Nous sommes impressionnés par le courage de ces personnes et par leur promptitude au sacrifice, face à l’oppression et à des régimes autoritaires. Nous félicitons tous ceux qui, dans toute la région, continuent d’exprimer pacifiquement leurs aspirations légitimes. Nous sommes révoltés par ceux qui répriment si brutalement leur propre peuple.
Les forces de sécurité syriennes –militaires et milices – ont écrasé dans la violence, aveuglément, des manifestations essentiellement pacifiques. Les Syriens de toutes les couches sociales revendiquaient leurs droits fondamentaux. Chars, balles, arrestations collectives, meurtres, disparitions forcées, torture, privation de liberté et persécution ont été la réponse apportée à leurs aspirations.
Nous rendons hommage à la mémoire des victimes et avons le plus grand respect pour les centaines de milliers de Syriens qui risquent leur vie afin de s’assurer un meilleur avenir, ainsi qu’à leurs enfants. Des milliers de personnes sont toujours détenues, et bon nombre d’entre elles n’ont aucun contact avec leur famille. Nous exhortons les autorités syriennes à libérer immédiatement tous les prisonniers politiques et les manifestants politiques détenus.
Cela fait maintenant des mois que la communauté internationale appelle les autorités syriennes à cesser toute violence, à respecter pleinement les droits de l’homme et à se conformer à leurs obligations au titre du droit international. Le régime syrien n’a tenu compte d’aucun des appels lancés par le Conseil de sécurité, le Secrétaire général de l’ONU, la Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, le Conseil de coopération du Golfe, la Ligue des États arabes, l’Union européenne et un très grand nombre d’États et de gouvernements. Au contraire, la répression violente s’est poursuivie sans relâche.
Aujourd’hui, le Conseil a enfin eu une chance de décider que les actions des autorités syriennes ne resteraient pas sans réaction. Nous regrettons sincèrement que les membres du Conseil n’aient pas pu s’exprimer d’une seule voix pour apporter la réponse adéquate aux violations systématiques des droits de l’homme commises par les autorités syriennes.
L’enjeu est de taille. Si le régime syrien ne met pas fin à la répression, le pays risque de sombrer dans la guerre civile. La stabilité de la région est en jeu. La paix et la sécurité internationales sont menacées. Ce n’est ni le moment ni le lieu de rester dans l’expectative ; il faut s’engager activement en faveur d’une plus grande stabilité.
Aujourd’hui, le Conseil n’a pas assumé la responsabilité que lui a confiée la Charte des Nations Unies : le maintien de la paix et de la sécurité internationales. Je voudrais cependant que les choses soient bien claires. Mon pays aurait souhaité qu’une résolution bien plus ferme soit adoptée bien plus tôt. Pour que le Conseil envoie un message concerté, les auteurs européens du présent projet de résolution (S/2011/612) se sont employés avec ardeur ces dernières semaines à rechercher un compromis entre les membres du Conseil. Nous avons fait des concessions importantes pour obtenir l’appui du Conseil. Nous sommes profondément déçus que certains membres n’aient pas pu parvenir à un compromis, deux d’entre eux ayant exercé leur droit de veto.
Cela ne doit toutefois en rien contredire le message qu’a déjà envoyé une grande partie de la communauté internationale : nous ne voulons pas rester les bras croisés pendant que des atrocités sont perpétrées. Les chars, les balles et la torture ne peuvent pas être la réponse aux aspirations du peuple syrien. Non seulement les membres du régime devront répondre de leurs actes ; ils doivent également comprendre que le seul choix envisageable pour l’avenir de la Syrie est un processus politique constructif mené par les Syriens.
Tout en encourageant un dialogue politique, nous continuerons, si besoin est, d’appeler à des sanctions contre ceux qui répriment violemment leur peuple et menacent la paix et la stabilité internationales. Nous le ferons dans le cadre de l’Organisation des Nations Unies et de l’Union européenne, et directement. Que le peuple syrien et les peuples du monde arabe sachent que l’Allemagne, ses partenaires et tous ceux qui sont attachés aux valeurs de liberté, de dignité et d’autodétermination ne relâcheront pas leurs efforts pour les soutenir.
M. Sangqu (Afrique du Sud) (parle en anglais) : Madame la Présidente, je voudrais tout d’abord joindre ma voix à celle de mes collègues pour vous féliciter de votre accession à la présidence du Conseil pour ce mois. Nous vous souhaitons plein succès dans votre tâche. Je tiens également à remercier l’Ambassadeur du Liban, M. Salam, pour la façon dont il a dirigé les travaux du Conseil durant le mois de septembre, qui fut chargé.
L’Afrique du Sud est extrêmement préoccupée par la détérioration de la situation politique et humanitaire en Syrie. Nous espérons que cette situation sera résolue de manière pacifique et en respectant la volonté du peuple syrien. Nous condamnons les pertes en vies humaines en Syrie et appelons toutes les parties au conflit à faire preuve de la plus grande retenue. Nous appelons à l’arrêt immédiat de toute violence en Syrie.
Sur le plan humanitaire, nous exhortons les autorités syriennes à faciliter l’accès des organismes humanitaires, y compris ceux des Nations Unies, conformément aux normes internationales relatives aux droits de l’homme et aux dispositions pertinentes du droit humanitaire.
Nous prions instamment les autorités syriennes d’engager un processus ouvert, transparent et sans exclusive avec la population afin de répondre à ses doléances et garantir ses droits et libertés politiques fondamentaux, y compris ses droits à la liberté d’expression et à la liberté de réunion. Nous encourageons également l’opposition à participer à ce processus politique en vue de garantir la paix et la stabilité en Syrie.
Il faut trouver une solution politique globale qui respecte la démocratie, la réforme politique, la justice et les droits de l’homme et réponde aux besoins du peuple syrien en matière de développement socioéconomique afin de garantir une paix et une stabilité durables. Cette solution doit également préserver l’unité, la souveraineté et l’intégrité territoriale de la Syrie.
La Syrie fait partie intégrante d’un règlement global du conflit au Moyen-Orient. Sa stabilité est liée à celle de ses voisins. Toute action de la communauté internationale à l’encontre de la Syrie, y compris une action du Conseil de sécurité, doit donc tenir compte des répercussions régionales. Nous avons constaté dernièrement que des résolutions du Conseil de sécurité ont été utilisées de manière abusive et que leur mise en œuvre dépassait largement le cadre du mandat défini.
S’agissant du projet de résolution (S/2011/612) dont nous sommes saisis, l’intention de ses auteurs d’imposer des sanctions qui auraient préjugé de la mise en œuvre de la résolution préoccupe l’Afrique du Sud. Nous pensons qu’elles préludaient à d’autres actions. Nous craignons que ce projet de résolution ne cache des intentions non avouées visant à imposer un nouveau changement de régime, un objectif dont certains ne se cachent pas. Nous sommes donc préoccupés par le fait que les auteurs de ce projet de résolution aient refusé d’inclure une formulation excluant clairement la possibilité d’une intervention militaire dans le cadre du règlement de la crise en Syrie. Nous continuons d’affirmer que le Conseil de sécurité doit agir avec prudence en ce qui concerne la Syrie afin de ne pas détériorer davantage une situation déjà explosive.
C’est pourquoi ma délégation s’est abstenue dans le vote sur le projet de résolution dont nous sommes saisis.
Mme Viotti (Brésil) (parle en anglais) : Madame la Présidente, je tiens à vous féliciter de votre accession à la présidence du Conseil et vous assure de notre plein appui. Je remercie également l’Ambassadeur du Liban, M. Nawaf Salam, et son équipe pour leur conduite remarquable de nos travaux en septembre.
Le Brésil est solidaire des populations de nombreux pays arabes qui aspirent à une plus grande participation à la vie politique, à des débouchés économiques, à la liberté et à la dignité. Nous n’avons cessé d’appeler les pays concernés à répondre à ces aspirations par le dialogue et de véritables réformes, et à s’abstenir de recourir à la force contre des manifestants pacifiques. Le Brésil condamne sans équivoque les violations des droits de l’homme, où qu’elles soient commises.
Nous sommes extrêmement préoccupés par la situation en Syrie. Le Brésil a fait part de son inquiétude publiquement et dans le cadre de nos échanges avec les autorités syriennes, directement et aux côtés de nos partenaires du groupe Inde, Brésil et Afrique du Sud (IBAS). Nous leur avons demandé avec insistance de mettre fin aux violences et d’autoriser l’accès du personnel humanitaire.
Le Brésil a appuyé la création d’une commission d’enquête par le Conseil des droits de l’homme. Cette commission sera présidée par un Brésilien. Nous espérons que les autorités syriennes coopéreront avec cet organe. Nous prenons acte des initiatives annoncées par le Gouvernement syrien, y compris les mesures visant à réformer le système politique et la libération des prisonniers politiques. Ces initiatives ne peuvent toutefois atteindre leur objectif si les violences se poursuivent.
Nous saluons les efforts déployés par les auteurs du présent projet de résolution (S/2011/612) afin de tenir compte des différents points de vue, mais nous aurions souhaité qu’ils fassent davantage pour obtenir un plus large appui avant de mettre ce texte aux voix. Compte tenu du rôle central de la Syrie dans la stabilité de la région, il est d’autant plus important que le Conseil puisse agir avec prudence et, de préférence, à l’unisson. Nous sommes convaincus qu’un délai supplémentaire aurait permis de surmonter les divergences de vues et de tenir compte des préoccupations légitimes. Nous regrettons que cela n’ait pas été le cas.
Le Brésil est fermement convaincu qu’un dialogue national constructif et sans exclusive, menant à une véritable réforme politique, est le seul moyen de sortir de la crise actuelle en Syrie. Nous encourageons la Ligue des États arabes à continuer de jouer un rôle constructif grâce à ses efforts diplomatiques. Au niveau collectif autant qu’individuel, le Brésil va continuer de plaider en faveur d’un dialogue politique qui puisse véritablement porter ses fruits et ouvrir la voie à une solution pacifique à la crise en Syrie.
La Présidente (parle en anglais) : Je donne maintenant la parole au représentant de la République arabe syrienne.
M. Ja’afari (République arabe syrienne) (parle en arabe) : Pour commencer, je voudrais vous féliciter, Madame la Présidente, pour votre accession à la présidence du Conseil de sécurité pour le mois d’octobre. Nous présentons également nos félicitations à l’Ambassadeur du Liban, pour sa conduite compétente et fructueuse des activités du Conseil au cours du mois précédent.
Le langage d’une agressivité sans précédent utilisé par certains ambassadeurs à l’encontre de mon pays et de ses dirigeants politiques me facilite la tâche aujourd’hui. En effet, la teneur de leurs discours souligne ce que nous et plusieurs ambassadeurs amis avons déjà dit, à savoir que mon pays est attaqué par ses ennemis simplement pour le principe et non pour de quelconques raisons humanitaires. Ce ton agressif révèle les préjugés qui existent à l’encontre de mon pays, la Syrie, et de ses dirigeants politiques dans certaines capitales occidentales. Ces opinions préconçues nous les devons à notre indépendance politique et au fait que notre position ne va pas dans le sens des ambitions de ces mêmes capitales.
Le 3 octobre, un groupe terroriste armé a assassiné Saria Hassoun, le fils du grand mufti Ahmad Badreddin Hassoun, ainsi que Mohammad al-Omar, professeur d’histoire à l’Université d’Alep. Quelques jours auparavant, le 29 septembre précisément, un autre groupe terroriste armé assassinait Aws Abdel Karim Khalil, ingénieur en physique nucléaire et doyen de l’Université de Homs. Deux jours plus tôt, le 27 septembre, un troisième groupe terroriste armé tuait Nael al-Dakhil, doyen de la faculté de chimie de l’Université de Homs, ainsi que Mohammad Ali Akeel, doyen de la faculté d’architecture de l’Université de Homs. Le 25 septembre, un quatrième groupe terroriste armé assassinait le docteur Hassan Eid, directeur de l’unité de cardiologie de l’hôpital national de Homs.
Tous ces meurtres ont été commis la même semaine. Malheureusement, ils sont venus s’ajouter aux quelque 800 membres de l’armée, de la police et des services de sécurité et au nombre équivalent de civils qui ont déjà trouvé la mort. Nous en sommes profondément attristés.
Ces groupes terroristes armés ont inauguré une nouvelle forme de terrorisme, en prenant pour cible les institutions publiques, l’armée et les universités syriennes et en décimant la communauté scientifique, médicale et universitaire ainsi que nos guides spirituels. Malgré la terrible hémorragie dont souffre ma patrie, la Syrie, un pays dont je suis fier, certains États mènent une campagne internationale visant à intervenir en Syrie sous le prétexte des droits de l’homme et de la protection des civils. Ces pays persistent à nier l’existence de groupes terroristes armés en Syrie, pour des raisons que nous connaissons tous.
En outre, ces États continuent de protéger et de parrainer les chefs de ces groupes terroristes, qu’ils accueillent même dans leurs capitales. Ils continuent d’organiser pour eux conférence après conférence, où ceux-ci ne font qu’exprimer leur refus de dialoguer avec mon gouvernement. Il est à noter que ces États sont célèbres pour leurs très mauvaises notes en matière de défense des droits de l’homme et des libertés fondamentales.
Je ne crois pas que qui que ce soit ici puisse oublié les massacres et les violations des droits de l’homme perpétrés au Viet Nam, en République démocratique populaire lao, au Cambodge, en Algérie et dans de nombreux autres pays d’Afrique, de même qu’en Iraq, en Afghanistan ou en Libye, et dans les prisons d’Abu Ghraib et de Guantanamo, ou dans des prisons secrètes en Europe, pour ne citer que ces quelques exemples.
Nous avons déjà expliqué que la Syrie était aux prises avec un problème double. Le premier aspect de ce problème est que mon pays a réellement besoin de réformes économiques, politiques et sociales. Ces réformes sont nécessaires et ont été réclamées par la population. C’est ce à quoi nous nous employons actuellement. Le second aspect du problème a trait au fait que les revendications et les besoins de la population sont exploités à mauvais escient, à des fins diamétralement opposées aux desiderata du peuple syrien. Entre autres, les demandes légitimes de la population servent de tremplin pour promouvoir une certaine opposition agissant de l’extérieur, provoquer des troubles à caractère sectaire et l’insécurité, et ouvrir la voie à une intervention extérieure voire réclamer une telle intervention.
Toutes ces actions sont catégoriquement rejetées par la population syrienne, y compris par les vrais membres de l’opposition dans le pays. À cet égard, certains au sein du Conseil de sécurité continuent d’appeler à une ingérence du Conseil dans les affaires intérieures et le développement de la Syrie, ce qui serait un bien mauvais service à rendre à l’état de droit. Une telle ingérence servirait en fait les intérêts de certaines parties qui s’opposent à la Syrie sur la base de prétextes fallacieux, y compris en arguant du maintien de la paix et de la sécurité internationales. En revanche, elle ne servira aucunement la sécurité et la stabilité de la Syrie. Nous sommes stupéfaits de cette tendance politique, irrationnelle et sans objectivité, à vouloir – absurdement et frénétiquement – saper la stabilité, la sécurité et la coexistence de toute la région en général, et de la Syrie en particulier, en diffamant celle-ci, en même temps que l’importance qu’elle a par sa stature et son rôle politique dans la région arabe et dans le monde.
Ces parties ont à de nombreuses reprises utilisé le Conseil, en l’instrumentalisant à des fins d’ingérence dans les affaires intérieures des États Membres. Et même lorsqu’elles se sont heurtées aux autres États membres du Conseil, qui souhaitaient ne pas céder à ces politiques interventionnistes, nous avons pu les voir recourir à des actions unilatérales ne ressortissant pas au droit international afin de mener à bien leurs desseins politiques et militaires. En conséquence, ces parties ont déployé, en violation du droit international, des forces de l’OTAN dans de nombreux États Membres de cette Organisation internationale, afin d’en saper la stabilité politique, d’en piller les richesses et d’y répandre ce qu’il est convenu d’appeler « anarchie créative ».
Or, ces mêmes parties, paradoxalement, ont recouru avec insistance au véto – 50 fois depuis 1948 –contre les Palestiniens afin de les priver de leurs droits légitimes et d’empêcher la création de leur État. Un État en particulier a usé de son droit de veto 50 fois pour protéger Israël et continue de menacer de l’utiliser. Ce qui précède pourrait être considéré comme une participation à un génocide puisque cela revient à fermer les yeux sur les massacres israéliens dans les territoires arabes occupés et à les appuyer, et nous ne parlons pas de l’utilisation qui est faite des événements et faits nouveaux survenus en Syrie en vue de détourner l’opinion publique internationale des revendications légitimes d’adhésion à l’ONU des Palestiniens, en tant que membres à part entière.
Les dirigeants syriens ont répondu rapidement et immédiatement aux demandes légitimes de la population syrienne. Le Président Bashar Al-Assad a annoncé un vaste programme de réformes que notre gouvernement met actuellement en œuvre en promulguant une série de règlements et de lois destinés à renforcer le processus démocratique et à étendre la participation de nos citoyens aux processus politiques et économiques, et ce tout à fait indépendamment des analyses et prises de position étrangères qui n’ont pas leur place dans nos affaires intérieures. Les réformes menées en Syrie sont désormais réalité, sur le terrain, et on ne saurait les méconnaître. Elles se poursuivent, en dépit des tentatives de certains de les entraver, de l’extérieur, par différents moyens.
Aucun État ne peut prétendre être plus désireux que la Syrie de veiller à la sécurité et à la sûreté de ses concitoyens. Depuis les événements regrettables et pénibles qui sont survenus dans notre pays, nous nous sommes attachés à assurer la sécurité et la sûreté de chacun de nos concitoyens. Nous nous sommes également employés à continuer d’approvisionner notre population, sans retard, en services de base, vivres et médicaments, malgré l’imposition hâtive de sanctions économiques à l’encontre de mon pays, décidée unilatéralement et illégalement, et qui ne repose sur aucun consensus international. Alors que nous nous efforçons de faire front contre les forces israéliennes et hégémoniques occidentales en lutte contre notre pays, ces mesures visent à exercer des pressions sur la population syrienne, par le biais notamment de ses moyens de subsistance, et à la pousser à changer de régime politique. Ce type d’activités constitue une violation du droit d’un peuple à l’autodétermination et de son droit de choisir son propre système politique en dehors de toute pression extérieure. C’est la raison pour laquelle l’invocation de ce qu’il est convenu d’appeler cette situation humanitaire n’est qu’un prétexte pour s’ingérer dans nos affaires intérieures d’une manière qui nuit à nos dirigeants et à notre pays, et ce aux fins d’intérêts politiques étrangers qui n’ont rien à voir avec un désir de défendre des objectifs humanitaires en Syrie.
La Syrie a reçu des délégations du Bureau de la coordination des affaires humanitaires et du Comité international de la Croix-Rouge, présidées par le Président du Comité, qui a rencontré personnellement notre Président, Bashar El-Assad. Elles ont pu constater par elles-mêmes, ainsi que d’autres délégations internationales d’obédience politique, religieuse ou des médias, les actes de provocation, d’incitation et de propagande commis par certains cercles afin de déformer la réalité.
Certains membres du Conseil ont récemment tenté de s’ingérer dans nos affaires intérieures sous le prétexte de la protection des civils. Nous ne pouvons que nous demander ici où ils étaient jusqu’à présent et pourquoi ils n’ont pas protégé les civils en Palestine, dans le Golan syrien occupé, au Liban du Sud, en Iraq, en Afghanistan et en Libye, lorsque les citoyens de ces pays subissaient des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre. Il est intéressant de noter que le représentant de la France a remercié Israël, le 14 juillet de cette année, de son intervention militaire contre la Syrie en 2007. Cela ne devrait-il pas être considéré comme un encouragement et une incitation à l’agression ? Cela n’est-il pas contraire à toutes les règles et normes de la communauté internationale et à tous les principes éthiques qui s’opposent à la solution du recours à la force ?
Le cadre juridique international qui régit les relations internationales est fondé sur le principe de la non-ingérence dans les affaires intérieures des États. Il a été consacré par une myriade d’instruments internationaux, à commencer par la Charte des Nations Unies, au paragraphe 7 de son Article 2. En conséquence, les appels lancés par certains cercles au renversement du Gouvernement syrien légitime sont des provocations irresponsables qui visent à saper la stabilité syrienne. Ils constituent une violation flagrante de la Charte des Nations Unies, qui nuit aux intérêts des gouvernements. Encourager les exigences extrémistes de l’opposition en Syrie afin de renverser le gouvernement par la force des armes, de la violence et du terrorisme revient à commettre un coup d’État avec l’aide de puissances étrangères, et ne saurait certes pas passer pour une réforme.
Les déclarations politiques prononcées par certains dirigeants des États et ministres des affaires étrangères siégeant au Conseil, selon lesquelles le Président syrien a perdu sa légitimité, et devrait donc se retirer, ne constituent-elles pas une violation flagrante du droit international et de la Charte des Nations Unies ? N’a-t-on pas là affaire à une ingérence flagrante dans les affaires intérieures de la Syrie, sujette à caution ? N’y-a-t-il pas là entrave à des réformes nationales avec cette incitation du peuple syrien à descendre dans la rue contre les dirigeants syriens légitimes ? Voilà les questions auxquelles nous invitons les membres à répondre.
Nous espérons que l’Organisation des Nations Unies et ses États membres aideront la Syrie à lutter contre les actes terroristes et extrémistes visant à les déstabiliser. Il ne faudrait pas avoir recours à des positions prises à la hâte pour dissimuler des pressions politiques encourageant les groupes extrémistes armés. À ce sujet, nous voulons affirmer que l’intervention du Conseil de sécurité dans les affaires internes de la Syrie ne fait qu’aggraver la situation et que le message adressé par le Conseil de sécurité aux extrémistes et terroristes est qu’il appuie et encourage leurs actes de sabotage délibéré et de violence – qu’aucun pays ne peut traiter avec indulgence.
La Syrie, comme les autres États Membres de cette Organisation, notamment ceux représentés au Conseil, se heurte à des problèmes qui nécessitent une réforme. Que celui qui n’est confronté à aucun problème et ne requiert aucune réforme nous jette la première pierre. S’il est vrai que les manœuvres de nos ennemis au sein et à l’extérieur du Conseil, inspirées par l’avidité, peuvent aboutir ailleurs, au détriment de la stabilité, la sécurité et la sûreté d’autres pays, j’affirme vigoureusement que la Syrie se dressera avec fermeté contre tout complot visant sa souveraineté, sa sécurité nationale, son indépendance et sa stabilité, ainsi que ses décisions politiques indépendantes.
Nous refusons par conséquent les procédés des auteurs de ce projet de résolution qui vient d’être rejeté. De telles manœuvres politiques et médiatiques s’en prennent à mon pays et à sa réputation sur la scène internationale. La force du prestige est encore plus importante que la force en elle-même. Les auteurs de ce projet de résolution ont perdu la force du prestige, ils ont maintenant recours à la force, car ils ont perdu la confiance de la majorité des États Membres de l’Organisation.
Une telle attitude sape la légitimité internationale et cherche à conduire le monde entier dans une nouvelle ère colonialiste et des actions militaires dans plusieurs endroits, qui sont condamnées à l’échec. Ces mêmes États ont entraîné le monde dans deux guerres mondiales qui ont fait des millions de victimes sur notre planète. Par leur attitude colonialiste et esclavagiste, ils ont provoqué les souffrances indicibles de centaines de millions en Asie, en Afrique et en Amérique latine.
Pour terminer, je souhaite exprimer ma reconnaissance et ma gratitude aux pays amis qui ont rejeté la mauvaise utilisation et l’emploi abusif de ce Conseil, qui a servi à certains d’outil pour porter atteinte aux intérêts de mon pays, à son indépendance
politique, sa sécurité et sa stabilité. Si nous ne désespérons pas du Conseil, c’est parce que nous continuons d’y entendre la voix de la sagesse demandant qu’une main soit tendue à la Syrie pour affronter ses difficultés, pour encourager le Gouvernement syrien à poursuivre les réformes désirées et pour engager l’opposition externe à entamer un dialogue complet au niveau national afin de construire une Syrie pour tous les citoyens sans exception.
La Présidente (parle en anglais) : Il n’y a pas d’autre orateur inscrit sur ma liste. Le Conseil de sécurité a ainsi achevé la phase actuelle de l’examen de la question inscrite à son ordre du jour.
La séance est levée à 19 h 45.
Projet de résolution présenté par l’Allemagne, la France, le Portugal et le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord
Le Conseil de sécurité,
Exprimant sa grave préoccupation devant la situation en Syrie,
Rappelant la Déclaration de son président en date du 3 août,
Se félicitant des déclarations dans lesquelles le Secrétaire général a dit l’inquiétude que continuent d’inspirer les violences qui se perpètrent et les besoins humanitaires, exhorté le Gouvernement syrien à mettre sur-le-champ un terme à sa violente offensive, préconisé une enquête indépendante sur toutes les violations des droits de l’homme commises au cours des récentes manifestations, et soulignant la nécessité d’amener les responsables de ces violences à en répondre,
Prenant acte du rapport du Conseil des droits de l’homme sur sa dix-septième session extraordinaire (A/HRC/S-17/1), notamment la décision de dépêcher une commission d’enquête internationale indépendante pour enquêter sur toutes les violations présumées du droit international humanitaire commises depuis mars 2011 en Syrie,
Rappelant la responsabilité qui incombe au premier chef au Gouvernement syrien de protéger sa population et l’appel adressé par le Secrétaire général au Gouvernement syrien pour qu’il ménage un accès sans entrave et durable à l’aide humanitaire et aux organisations humanitaires, se félicitant de l’envoi par le Bureau de la coordination des affaires humanitaires d’une mission d’évaluation de la situation humanitaire et invitant les autorités syriennes à prêter leur pleine coopération à l’Organisation des Nations Unies,
Soulignant que la seule solution à la crise actuelle en Syrie réside dans un processus politique sans exclusive, conduit par les Syriens, qui réponde véritablement aux aspirations et préoccupations légitimes de l’ensemble de la population et lui permette d’exercer pleinement ses libertés fondamentales, notamment la liberté d’expression, de réunion et de manifestation pacifique, et soulignant en outre qu’un tel processus politique ne prospérer que dans un environnement exempt de toute violence, peur et intimidation,
Prenant acte des promesses de réforme faites par les autorités syriennes et déplorant l’absence de progrès dans leur mise en application,
Réaffirmant son ferme attachement à la souveraineté, à l’indépendance, à l’intégrité territoriale et à l’unité nationale de la Syrie,
Profondément préoccupé par la détérioration constante de la situation en Syrie et le risque d’une nouvelle escalade de la violence, et réaffirmant la nécessité de régler la crise actuelle en Syrie par des moyens pacifiques,
Saluant l’engagement du Secrétaire général et de la Ligue des États arabes et tous les autres efforts diplomatiques visant à remédier à cette situation, notamment ceux déployés par la Turquie, la Russie, le Brésil, l’Inde et l’Afrique du Sud, et déplorant que les autorités syriennes ne répondent pas de manière concrète à ces demandes,
1. Condamne fermement la poursuite des violations graves et systématiques des droits de l’homme commises par les autorités syriennes et l’usage de la force contre des civils par ces mêmes autorités, et déplore profondément la mort de milliers de personnes, dont des femmes et des enfants ;
2. Exige l’arrêt immédiat de toute violence et exhorte toutes les parties à rejeter la violence et l’extrémisme ;
3. Rappelle que les responsables des violences et des violations des droits de l’homme doivent en répondre ;
4. Exige que, sans tarder, les autorités syriennes :
a) Mettent un terme aux violations des droits de l’homme ; se conforment à leurs obligations en vertu des dispositions applicables du droit international et coopèrent pleinement avec le Haut-Commissariat aux droits de l’homme ;
b) Permettent le plein exercice des droits de l’homme et des libertés fondamentales par l’ensemble de la population, y compris le droit à la liberté d’expression et de réunion pacifique, libèrent tous les prisonniers politiques et les manifestants pacifiques mis en détention, et lèvent les restrictions frappant toutes les formes de médias ;
c) Cessent de faire usage de la force contre la population civile ;
d) Atténuent la gravité de la situation humanitaire dans les zones de crise, notamment en ménageant aux observateurs des droits de l’homme et aux organisations et travailleurs humanitaires reconnus à l’échelle internationale un accès rapide, sans entrave et durable, et en rétablissant les services de base, notamment l’accès aux hôpitaux ;
e) Assurent le retour volontaire et en toute sécurité dans leurs foyers des personnes qui ont fui les violences ;
5. Appelle à l’instauration d’un processus politique sans exclusive conduit par les Syriens, dans un environnement exempt de violence, de peur, d’intimidation et d’extrémisme, le but en étant de traiter effectivement des aspirations et préoccupations légitimes de la population syrienne, et encourage l’opposition syrienne et toutes les couches de la population syrienne à concourir à ce processus ;
6. Prie le Secrétaire général de continuer d’exhorter le Gouvernement syrien à appliquer les paragraphes 2 et 4 de la présente résolution, notamment en nommant, le moment venu, un envoyé spécial, en consultation avec le Conseil de sécurité, et encourage tous les États et toutes les organisations régionales à concourir à la réalisation de cet objectif ;
7. Encourage à cet égard la Ligue des États arabes à poursuivre ses efforts pour mettre un terme à la violence et promouvoir un processus politique sans exclusive conduit par les Syriens ;
8. Condamne fermement les attaques contre le personnel diplomatique et rappelle le principe fondamental de l’inviolabilité des agents diplomatiques et les obligations mises à la charge des États hôtes, notamment par la Convention de Vienne sur les relations diplomatiques de 1961, de prendre toutes mesures appropriées pour protéger les locaux des ambassades et prévenir toute attaque contre des agents diplomatiques ;
9. Appelle tous les États à faire preuve de vigilance et de retenue concernant la fourniture, la vente ou le transfert, directs et indirects, à la Syrie d’armes et de matériel connexe de tout type, ainsi que la formation technique, les ressources financières ou services financiers, conseils ou autres services ou aide liés à ces armes et matériel connexe ;
10. Prie le Secrétaire général de lui rendre compte de la mise en œuvre de la présente résolution dans les 30 jours de son adoption, puis tous les 30 jours ;
11. Déclare son intention d’examiner la manière dont la Syrie applique la présente résolution dans les 30 jours et d’envisager les options qui s’offrent à lui, y compris l’adoption de mesures en vertu de l’Article 41 de la Charte des Nations Unies ;
12. Décide de rester activement saisi de la question.
Restez en contact
Suivez-nous sur les réseaux sociaux
Subscribe to weekly newsletter