Patrick Cohen pour France Inter : On parle d’abord de la situation en Syrie, tout ce qui nous est rapporté de ce pays décrit un épouvantable bain de sang, une répression impitoyable contre les insurgés et les populations civiles, y compris les enfants. Pourquoi avoir choisi de parler, comme vous venez de le faire, de guerre civile en Syrie ?
Laurent Fabius : On peut discuter le terme ! Mais la réalité, comme vous venez de le dire, ce sont des horreurs abominables et les meurtres d’enfants, l’utilisation d’enfants torturés, violés pour protéger l’entrée des militaires dans des villes. C’est quelque chose d’encore plus abominable, et donc un moment vient où il faut non seulement hausser le ton mais prendre des dispositions nouvelles. Nous proposons des sanctions nouvelles - qui n’ont pas encore été prises - et qui vont être discutées la semaine prochaine. Nous proposons que le plan de Kofi Annan, qui est un plan d’interruption des attaques, prenne force obligatoire par la mise sous… ce qu’on appelle sous chapitre 7 de l’ONU.
France Inter : Alors on va en reparler ! Est-ce que, comme Amnesty International, on vous a rapporté des exactions qui relèvent de crimes contre l’humanité ?
Laurent Fabius : Oui. J’ai les mêmes échos exactement, malheureusement.
France Inter : C’est-à-dire le fait que des soldats Syriens aient traîné des civils hors de chez eux, y compris des enfants, pour les tuer, pour les assassiner ?
Laurent Fabius : J’ai exactement les mêmes informations tragiques que vous.
France Inter : Ca pourrait déboucher sur quoi, une saine de la CPI ?
Laurent Fabius : Oui ! Ca peut déboucher sur une saisine de la CPI, de la Cour pénale internationale. Alors je ne vais pas rentrer dans le juridisme, il est difficile de saisir la Cour pénale internationale, car, ou bien c’est l’État concerné, la Syrie - qui ne va pas le faire - ou bien on dit : « c’est le Secrétaire général des Nations unies », mais en fait il n’a pas le droit de le faire. Mais n’entrons pas dans ce détail juridique, il faut à la fois accumuler le maximum d’éléments - et malheureusement ils sont très nombreux en ce sens - et puis avoir en perspective, comme cela a existé pour d’autres dictateurs - on pense à Charles Taylor récemment -, que ceux qui mènent ces exactions doivent le moment venu répondre de leurs crimes.
France Inter : Guerre civile, disiez-vous, on peut en discuter le terme. Certains vous ont reproché cette expression parce qu’elle semble mettre sur le même plan les victimes et les bourreaux ?
Laurent Fabius : Oui ! C’est pour cela que je disais que l’on peut évidemment discuter d’un point de vue juridique. Mais quelle est la réalité et qu’est-ce que j’ai voulu dire ? J’ai voulu dire qu’il y a un régime, j’ai dit un régime d’assassins et de prébendiers, qui en fait a mis le pays en coupe réglée, qui refuse de céder son pouvoir. S’ajoutent à cela évidemment des oppositions religieuses et des oppositions ethniques et, en tout cas, il y a ce risque de guerre civile qui est là très présent en Syrie, et qui risque de s’étendre au Liban et dans les pays voisins.
France Inter : Sur le plan diplomatique, vous venez de citer donc le chapitre 7 de la Charte de l’ONU qui ouvre la voie à un éventuel usage de la force. L’option militaire c’est du sérieux, Laurent Fabius ?
Laurent Fabius : Ce sont deux choses différentes. Le chapitre 7 - et là encore on ne va pas faire de cours de droit - c’est une décision qui est rendue obligatoire, cela ne veut pas dire une intervention militaire, mais cela pourrait vouloir dire que, pour appliquer le plan Annan, il y a le possible recours à la force. Nous discutons actuellement, parce qu’en même temps qu’il faut monter la pression, il y a des discussions - et nous avons des discussions avec les Russes, Hillary Clinton a également des discussions avec les Russes - et puis nous sommes en contact avec l’opposition, que ce soit l’opposition de l’intérieur ou l’opposition de l’extérieur. Et le 6 juillet d’ailleurs, à Paris, nous allons réunir une Conférence des Amis de la Syrie où nous avons invité plus de 150 États ou organisations. Bref, il y a une convergence. Mais ce qui est dramatique - et même je dirais effrayant - c’est qu’évidemment il y a les discussions, il y a les avancées, mais sur le terrain on continue à massacrer une centaine de personnes chaque jour.
France Inter : Analyse du journal Le Monde hier, sous la plume de Nathalie Nougayrède : « l’emploi de la force en Syrie n’est pas une menace crédible ». Est-ce que vous diriez cela, Laurent Fabius ?
Laurent Fabius : Tout dépend de ce qu’on appelle l’emploi de la force. S’il s’agit d’envoyer des militaires dans une guerre, évidemment c’est extraordinairement difficile. En revanche, s’il faut dégager des couloirs humanitaires, le cas échéant avoir un certain nombre d’opérations aériennes, c’est différent.
Mais pour le moment nous avons une double stratégie, qui consiste à la fois à monter la pression - les sanctions, etc. - et, en même temps, à continuer la discussion, notamment avec les Russes, puisqu’ils jouent un rôle déclencheur. Nous aurons des discussions d’ailleurs à Los Cabos, au Mexique, lundi sur ce point et il y a en perspective - je ne sais pas si nous allons y arriver - la possibilité à Genève, le 30 juin, d’une Conférence dans une disposition voisine du Conseil de sécurité mais sans les mêmes contraintes que le Conseil de sécurité ; et puis la réunion du 6 juillet. Donc, nous sommes très, très actifs avec d’autres et, en même temps, pour le moment les massacres malheureusement continuent.
France Inter : Faute d’intervention, faudrait-il livrer des armes aux insurgés ?
Laurent Fabius : Ayons une réponse simple ! Lorsqu’il y a un conflit grave comme celui-là, la logique consiste à ne pas l’alimenter en armes, sinon on augmente encore les risques et la mort.
France Inter : Mais la Russie s’en charge !
Laurent Fabius : Mais, en même temps, il y a des États, des groupes, qui alimentent en armes et donc à la fois il y a l’idéal et puis la réalité, si on ne se voile pas la face, c’est qu’il y a des gens, des groupes, qui alimentent en armes. Pour nous la France, en tout cas, nous ne livrons pas d’armes et nous veillons à ce que les armes que nous pouvons vendre - parce que la France vend des armes - ne soient pas réutilisées dans ce conflit. Si nous avions des témoignages qui l’en est autrement, nous réagirions immédiatement.
France Inter : Plus précisément, pendant que la Russie livre des armes au régime syrien, la France continue de vendre des armes à la Russie. Ce n’est pas un problème, Laurent Fabius ?
Laurent Fabius : Ce serait évidemment un immense problème si ces armes étaient utilisées dans le conflit syrien, tel n’est pas le cas…
France Inter : Vous en êtes sûr ?
Laurent Fabius : En tout cas, j’ai demandé que toutes les vérifications soient faites. Et, s’il y avait des indications en ce sens, nous réagirions immédiatement.
France Inter : Si Bachar Al-Assad finit par tomber, qui le remplacera ?
Laurent Fabius : Eh bien c’est ce dont nous discutons ! Parce que la discussion porte là dessus, il faut être très concret, Bachar El Assad est un tyran, plus vite il sera dégagé, mieux ce sera, nous sommes clairs et nets. En même temps, un pouvoir doit avoir un successeur et, donc, il y a des discussions très précises et très difficiles pour qu’à la fois l’opposition trouve sa pleine place et, en même temps, on comprend bien que dans un régime comme celui-ci on ne passe pas de M. Bachar Al-Assad à une opposition démocratique pure et parfaite en un jour. Il y a donc des différents groupes qui doivent être réunis, qui doivent être rassemblés, qui doivent être représentés et la discussion à la fois des Américains, des Russes, de nous-mêmes et de quelques autres porte là-dessus.
France Inter : Je voudrais qu’on évoque la relation France-Allemagne. (…)
Laurent Fabius : Le président de la République, le Premier ministre et moi-même avons reçu trois dirigeants du SPD dans le cadre de conversations régulières et il n’y a aucune atteinte au couple franco-allemand.
Après cette audience, il y a eu en Allemagne une réunion entre Angela Merkel et son parti, et le SPD, et ils ont décidé d’un commun accord, après cette rencontre, d’un calendrier pour examiner le Pacte de stabilité. Donc, non, il n’y aucune difficulté venant de là.
Pour ce qui concerne la relation franco-allemande, je tiens à dire que c’est une relation qui est à la fois une évidence et une nécessité. Une évidence pourquoi ? Parce que nous sommes l’un et l’autre les premiers partenaires. Une nécessité parce que, pour l’Europe avance, il faut que nous nous mettions d’accord. Cela ne suffit pas ! Parce qu’il faut que cette relation soit égale et il faut qu’elle ne soit pas exclusive, l’Europe ce n’est pas simplement le franco-allemand. Hier, nous étions en Italie, notre deuxième partenaire au monde, avec lequel nous avons des relations excellentes et même exceptionnelles. L’autre jour, nous recevions nos amis espagnols. Mais, il est vrai que le franco-allemand est tout à fait décisif. Alors il peut y avoir sur tel ou tel point des différences d’approche mais j’espère que, dans les jours qui viennent, nous allons réduire tout cela.
France Inter : Donc, une solution à la crise passe par un accord entre Paris et Berlin, toujours ?
Laurent Fabius : Notamment ! Puisqu’on agit par consensus.
France Inter : Notamment mais pas seulement ?
Laurent Fabius : Eh bien il faut que l’ensemble soit d’accord, on agit par consensus.
France Inter : Oui ! Mais…
Laurent Fabius : Je vais vous donner un exemple. Hier, nous étions en Italie, l’Italie est un pays dont le budget est équilibré, et même suréquilibré. M. Monti, qui est un homme de grande qualité, a pris toute une série de décisions extraordinairement difficiles après l’époque Berlusconi, ce qui fait qu’il y a eu des réactions - y compris dans la population - qui sont dures, quand vous baissez toute une série de prestations, etc. Il correspond donc aux canons, si l’on peut dire, de l’économie tels que certains la souhaite, mais il écoute sa radio le matin et il entend que les taux d’intérêt passent de 5,5 à 6,5 % et Mario Monti, qui est un Européen convaincu, dit : « mais qu’est-ce que vous voulez que je fasse par rapport à ça » - et c’est la même chose avec les Espagnols. C’est donc là-dessus que nous travaillons : il faut bien sûr qu’il y ait du sérieux budgétaire - y compris en France. Il faut en même temps qu’il y ait de la croissance, et il faut qu’il y ait des mécanismes de stabilité, et ce sur quoi nous travaillons en ce moment, c’est la dimension croissance et stabilité.
France Inter : En 2005, vous vous êtes opposé au Traité européen, pensez-vous que la position de l’époque soit un avantage ou un inconvénient pour la diplomatie de la France actuellement ?
Laurent Fabius : C’est surtout un avantage. Pourquoi ? Vous me direz, les choses sont derrière nous. En ce qui concerne François Hollande, Jean-Marc Ayrault ou moi-même, nous sommes désormais sur une position unique. Je pense que c’est un avantage qu’à la fois des personnes qui avaient voté « oui » et d’autres qui avaient voté « non » se soient mis d’accord sur une certaine vision de l’Europe et qu’elles travaillent maintenant complètement ensemble.
Je voudrais aller un peu plus loin. À l’époque, vous vous souvenez que le « non » l’avait emporté, et le « non » que j’avais défendu avec bon nombre d’autres personnes était un « oui » pour une autre Europe. C’était tout à fait clair, même si cela n’a pas toujours été compris ainsi. Nous disions à l’époque que l’Europe, la construction européenne ne pouvaient pas se résumer à - rappelez-vous cette expression - « la concurrence libre et non faussée. » Nous disions que ce n’était pas possible d’avoir une Europe qui soit dictée par la règle de l’unanimité alors qu’il faut de plus en plus que l’on vote à la majorité. Nous disions qu’il fallait que la Banque centrale puisse intervenir de façon plus souple que ce qu’elle faisait, et ce qu’elle a fait depuis.
Le débat est derrière nous. Nous nous sommes rassemblés, nous avons vu les évolutions et nous portons aujourd’hui, tous ensemble, au nom de la France, une vision d’une Europe qui soit plus forte vers la croissance, plus stabilisée - on en a absolument besoin - et qui permette de repartir de l’avant. Ce qui est dramatique, c’est que les Américains essaient de faire ce qu’ils peuvent pour faire repartir l’économie. Les émergents eux-mêmes ont des difficultés, mais le continent qui est en grave difficulté aujourd’hui, c’est l’Europe. Cela fait un peu plus de deux années et demie que la crise existe et qu’elle n’est pas résorbée. On a toujours agi trop peu, trop tard.
Maintenant, ce que nous voulons faire avec nos partenaires, c’est redonner une perspective, aller de l’avant et faire en sorte que l’Europe cesse d’être l’« homme malade » du monde.
France Inter : Comment tolérer aujourd’hui qu’il n’y ait pas une rupture des relations diplomatiques avec la Syrie, une fermeture de l’ambassade, comment accepter la présence de l’entreprise russe Rosoboronexport qui vend des armes ? Pourquoi ne pas penser à des mesures de rétorsions contre les économies russes et chinoises ?
Laurent Fabius : Concernant les ventes d’armes, j’ai dit tout à l’heure que notre position était extrêmement ferme et claire en ce qui concerne la France. Nous ne vendons pas d’armes qui, directement ou indirectement, puissent être utilisées en Syrie. Je regrette comme vous qu’il y ait un certain nombre de puissances qui alimentent la Syrie en vente d’armes mais, évidemment, nous ne pouvons décider que pour la France.
Concernant l’ambassade, nous avons décidé l’expulsion de l’ambassadrice. Maintenant, il y a un problème - vous me direz que c’est du droit mais le droit existe aussi. En effet, cette ambassadrice est en même temps la représentante de son pays à l’UNESCO. Il y a un privilège international lorsqu’une Organisation internationale, en l’occurrence l’UNESCO, a son siège dans un pays. Elle est expulsée au titre d’ambassadeur syrienne mais nous ne pouvons pas la faire partir de France manu militari, si je puis dire.
En tout cas et c’est une évidence, je vous rassure, nous n’avons aucun contact d’aucune sorte avec elle et il n’est pas question que nous en ayons.
Concernant votre troisième question, il est évident que nous avons dénoncé, nous continuons de dénoncer l’attitude de ceux qui, au Conseil de sécurité, refusent d’avancer et il y a bien sûr la chine et la Russie. En même temps, se lancer dans une politique de sanctions ou de boycott vis-à-vis de la Chine, cela n’aurait pas grande portée. Je partage tout à fait votre indignation, moi qui suis venu aux convictions qui sont les miennes par le soutien aux droits de l’Homme, je partage totalement votre indignation. Mais, en même temps, ce que je souhaite et ce que nous souhaitons tous, c’est d’être efficaces. Donc, nous renforçons les sanctions et la semaine prochaine, le 25 juin, à l’initiative de la France, de nouvelles sanctions seront prises. Je réaffirme ici que M. Bachar Al-Assad est un assassin et que nous ferons tout pour qu’il quitte le plus rapidement possible le pouvoir.
France Inter : Tout à l’heure, vous avez évoqué une réunion, une conférence possible des grandes puissances le 30 juin à Genève, est-ce distinct du Groupe de contact que constitue Kofi Annan ?
Laurent Fabius : Non, c’est la même chose. Il ne faut pas se perdre dans les appellations mais il y a des discussions, des négociations entre les Russes, les Américains, nous-mêmes, Kofi Annan et quelques autres pour parvenir à trouver une solution.
Concrètement, qu’est-ce que cela veut dire ? Je pense que les Russes eux-mêmes ne sont pas aujourd’hui attachés à la personne de Bachar Al-Assad. Ils voient bien que c’est un tyran, un assassin et qu’eux-mêmes, en s’enchaînant à ce dictateur, vont s’affaiblir. Ce à quoi ils sont sensibles, ils nous le disent, c’est, en admettant que Bachar Al-Assad soit chassé du pouvoir, qui prendrait la place. La discussion porte là-dessus en fait et c’est une discussion qui n’est pas cynique, elle est réelle. Il y a l’opposition, bien sûr, encore faut-il distinguer quels vont être les responsables de l’opposition. Et puis, il y aura probablement, même si cela est déplorable, un certain nombre de gens qui ont appartenu quand même aux anciennes équipes et qui ne sont pas en première ligne.
France Inter : On comprend bien l’idée autour de laquelle tout le monde, les Russes compris, tournent aujourd’hui : remplacer Bachar Al-Assad par un autre homme du régime.
Laurent Fabius : Non, pas par un autre homme du régime, par une alternative qui comportera essentiellement des membres de l’opposition et aussi une transition.
France Inter : Oui d’accord, c’est-à-dire la solution de type yéménite. Dans un premier temps, on cède le pouvoir à un autre homme du régime qui est chargé d’organiser la transition. N’est-ce pas ?
Laurent Fabius : Mais il n’est pas certain que cela fonctionne.
France Inter : Justement, c’est bien l’objet de ma question.
Laurent Fabius : Nous voulons une solution. La priorité absolue, c’est que Bachar Al-Assad s’en aille. Comparaison n’est pas raison, au Yémen, c’était autre chose ; c’est un pays beaucoup plus petit soutenu seulement par l’Arabie Saoudite. C’est très différent.
France Inter : Et en Syrie, quelle est l’idée si ce n’est pas un autre homme du régime ?
Laurent Fabius : L’autre idée, c’est qu’il y ait une victoire claire et nette de l’opposition sur le terrain mais, évidemment, cela passe par des combats extrêmement durs et extrêmement violents.
France Inter : Ils ne gagneront pas tout seul ?
Laurent Fabius : Non, bien sûr et c’est pourquoi il y a à la fois la démarche de Kofi Annan et il est envisagé aussi - les Américains l’ont fait, peut-être le ferons-nous - de donner non pas des armes mais des moyens de communication supplémentaires. Une révolte de plus en plus forte se développe aussi dans la population. Les indications que nous avons montrent que des groupes entiers, très importants, de la population qui au départ n’étaient pas nécessairement hostiles à Bachar Al-Assad le deviennent maintenant comme par exemple à Alep.
France Inter : Dans l’opposition aujourd’hui, il n’y a aucun courant politique qui l’emporte clairement sur les autres. Il y a une très grande confusion.
Laurent Fabius : C’est en effet hétérogène.
France Inter : Comment peut-on parvenir à dégager une personnalité consensuelle dans cette précipitation chimique de l’opposition ?
Laurent Fabius : Vous avez vu que le président de ce groupe a changé, c’est un Kurde qui a été élu. Il y a d’autre part des réunions qui ont lieu en Turquie et dans d’autres pays pour tenter de faire accoucher une solution. Nous aurons aussi cette Conférence des Amis de la Syrie du 6 juillet qui, nous l’espérons, devrait permettre de faire un pas supplémentaire en ce sens.
France Inter : Que comptez-vous faire pour lever le blocus de la Bande de Gaza ? D’une façon générale, que comptez-vous faire pour redonner au peuple palestinien qui malgré tout le mérite et dont il est privé actuellement, sa liberté et sa dignité ?
Laurent Fabius : Nos positions là-dessus sont extrêmement claires et conformes au droit international. Nous pensons que le peuple palestinien a droit à un État. En même temps, il est évident qu’Israël doit voir sa sécurité garantie. Nous condamnons ce qui est à la fois colonisation et blocus. J’ai eu l’autre jour l’occasion de recevoir Mahmoud Abbas, le président de l’Autorité palestinienne. J’avais reçu la veille le conseiller sécurité du Premier ministre israélien de M. Netanyahou. Nous avons dit les choses de façon très nette en particulier sur la question de la colonisation.
Je voudrais aller un peu plus loin, si vous le permettez. M. Netanyahou dispose aujourd’hui d’une majorité extrêmement forte puisqu’il a élargi sa majorité politique à la Kadima. C’est donc l’homme fort de la situation israélienne. En même temps, il y a tout ce qui se passe autour des Printemps arabes et jusqu’à présent, heureusement, les Printemps arabes n’ont pas pris Israël comme bouc émissaire. Mais, à moyen terme et surtout si les difficultés augmentent, il est à redouter qu’une partie de l’hostilité ou de la difficulté du monde arabe se tourne contre Israël.
L’un des arguments que je développe auprès du gouvernement israélien, c’est qu’à la fois par souci de justice vis-à-vis des Palestiniens, et aussi de sécurité d’Israël vis-à-vis d’elle-même, il est nécessaire qu’il y ait un mouvement sur le conflit israélo-palestinien. Il est nécessaire que l’on ne poursuive pas la colonisation, que l’on trouve des solutions et que des discussions aient lieu. Il y a une volonté de négociation, j’espère qu’elle est partagée. En tout cas, la France pousse à des négociations sur ce conflit dont on parle peut-être moins aujourd’hui mais qui est l’un des conflits fondateurs, si je puis dire, de tout une série de tensions dans le monde.
Enregistrement audio consultable sur le site de France Inter.
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