Majed al-Majed, le chef d’Al-Qaida au Liban, est officiellement décédé peu après avoir été interpelé en ambulance.

Al-Qaïda et l’alliance Riyahd-Washington

Par Ghaleb Kandil

Les groupes affiliés à Al-Qaïda ont été officiellement consacrés comme outils de l’agression américano-saoudienne contre la Syrie, et les gouvernement de ces deux pays mettent scrupuleusement en œuvre les instructions du chef du réseau, Ayman al-Zawahriri.
Les récents développements en Syrie méritent que l’on s’arrête aux dernières déclaration du chef d’Al-Qaïda, qui a ordonné à l’État islamique en Irak et au Levant (ÉIIL, plus connu sous le nom arabe de Dae’ch) de se retirer de Syrie et de se contenter de la représentation de l’organisation en Irak. Al-Zawahiri a officiellement adoubé le Front al-Nosra, à qui il a attribué le titre de représentant d’Al-Qaïda en Syrie. Al-Nosra est aujourd’hui l’allié du Front islamique, qui comte dans ses rangs des brigades qaïdistes et des branches armées des Frères musulmans. Le Front islamique est dirigé par Zahrane Allouche, l’homme du chef des services de renseignement saoudiens, Bandar Ben Sultan, et jouit publiquement du soutien du Qatar, de l’Arabie saoudite et de la Turquie, avec la bénédiction des États-Unis.
Le démembrement et la disparition de ladite Armée syrienne libre (ASL) a fait fondre le maquillage qui cachait la véritable identité des groupes terroristes qui combattent le peuple et l’armée en Syrie. Le retour de milliers de déserteur dans les rangs de l’armée régulière, profitant de l’amnistie présidentielle, est une manifestation naturelle de l’apparition d’Al-Qaïda et de ses composantes takfiristes, qui se livrent une guerre sanglante pour le contrôle des ressources et des butins du pillage.
Depuis le début des événements, il était clair que les pays qui ont déclenché la guerre utilisent les groupes terroristes et les débris d’Al-Qaïda pour tenter de détruire l’État syrien et ses capacités. L’objectif était de punir la Syrie pour son rôle dans le mouvement de résistance contre les plans hégémoniques d’Israël et des États-Unis, pour lesquels trois guerres totales ont été lancées contre le Liban et Gaza. Ces agressions ont échoué, de même que l’invasion états-unienne de l’Irak, qui n’a pas atteint ses objectifs.
Depuis que le commandement de l’agression contre la Syrie a été confié à Bandar Ben Sultan, le rôle d’Al-Qaïda n’a cessé de s’amplifier et de s’étendre. Et comme partout où elles sévissent, les branches de cette organisation se sont entretuées pour le contrôle des ressources. C’est notamment le cas en Afghanistan, où les terroristes se battent entre eux pour contrôler les filières de la contrebande du pavot et de l’opium.
Derrière le paysage sanglant en Syrie apparait une vérité stratégique dangereuse, qui devrait conduire à une condamnation unanime des États-Unis et de la dynastie des Saoud, responsables, avec leurs alliés qataris et turcs, de ce fléau. Al-Qaïda est non seulement responsable de crimes contre l’humanité en Syrie mais aussi d’actes terroristes en Irak, au Liban, en Libye, en Tunisie, en Égypte et en Somalie. Elle se trouve aujourd’hui aux portes de l’Europe.
Comme le réclament la Russie, la Syrie, l’Irak, l’Iran et le Liban, la priorité doit aller à la lutte contre le terrorisme. Une politique internationale doit être mise en place pour rendre publique les rôles joués par les différents pays dans le soutien et le développement d’Al-Qaïda en Syrie et ailleurs.

Déclarations et prises de positions

Michel Sleiman, président de la République libanaise
« En l’absence d’un accord sur un gouvernement de rassemblement, il y a aura d’ici à dix jours un nouveau cabinet. Des signaux positifs sont parvenus de chez (le chef du Courant du Futur) le président Saad Hariri, dans le cadre des tractations tournant autour de la formule des 3x8. »

Naïm Kassem, secrétaire général adjoint du Hezbollah
« Quelles que soient les accusations et les insultes dont l’autre camp nous abreuve, nous continuerons à lui répondre par la morale et par la détermination à panser les blessures. Nous rejetons un gouvernement neutre ou de fait accompli. Le Liban a besoin actuellement d’un gouvernement dans lequel toutes les parties seraient rassemblées et qui obtiendrait la confiance du Parlement, lui-même élu par les Libanais. Un gouvernement qui n’obtiendrait pas une telle confiance ne pourrait pas diriger le pays, Un Cabinet neutre devrait avoir un Premier ministre neutre. Or les députés ont choisi un Premier ministre membre du 14-Mars pour qu’il forme un gouvernement qui regroupe des représentants de toutes les parties. »

Michel Aoun, leader du Courant patriotique libre
« Les neutres et les technocrates pourraient être des conseillers, mais pas des hommes politiques. Un individu neutre est à nos yeux quelqu’un qui ne veut pas donner son opinion. C’est pourquoi nous invitons le président de la République à ne pas fournir aux gens une occasion de faire preuve de paresse et de refuser de prendre position. Certains affirment que les entraves viennent de l’extérieur, d’un État frère. D’autres répliquent que c’est en raison de la proposition des 9-9-6. Pour notre part, nous cherchons à savoir quels sont les critères de la formation du gouvernement. S’agit-il d’un processus soumis à un bon vouloir ou bien à des règles ? Comment pourrions-nous accepter un gouvernement qui serait le résultat d’une opération d’escroquerie par laquelle on chercherait à remplacer un gouvernement d’expédition des affaires courantes par un autre qui ferait la même chose ? [Le président] Sleiman a une grande responsabilité sur les épaules ces jours-ci. Veut-on nous rappeler l’année 1975, les Kataëb et la guerre civile ? L’expérience des années soixante-dix n’est-elle pas suffisante pour comprendre les effets de certaines décisions politiques qui ont brûlé le pays ? Que signifie donc la menace de former le gouvernement. »

Wiam Wahhab, chef du Parti al-Tawhid
« Tout gouvernement de fait accompli ne jouira pas de la confiance du Parlement. Ceci signifie que le président de la République sera contraint de procéder à de nouvelles concertations pour désigner un nouveau Premier ministre. Le cas échéant, les choix de notre camp politique seront ouverts. Nous pourrions nommer Abdel Rahim Mrad ou Najib Mikati, puisque la partie adverse est incapable de répondre aux efforts visant à former un gouvernement consensuel. »

Mouïn Merhebi, député au Parlement libanais (Courant du futur)
« Refuser de participer dans le même gouvernement que le Hezbollah et rejeter la formule 8-8-8 est un devoir national. La formule gouvernementale du triple 8, actuellement discutée, est un piège et une attaque supplémentaire à l’encontre des Libanais libres. Il faut s’y opposer par les moyens politiques et populaires afin de faire face à l’occupation iranienne du pays à travers les armes du Hezbollah. La crise libanaise n’est pas le résultat d’une mauvaise représentation des Libanais au gouvernement mais de l’implication du Hezbollah dans le bourbier syrien. Tout compromis qui ne stipule pas le retrait du Hezbollah de Syrie est rejeté. »

Événements

• Selon la chaîne de télévision LBCI, le chef des Forces libanaises Samir Geagea a prévenu les forces du 14-Mars qu’il refusait de participer à un « gouvernement du rien ». Le député des Forces libanaises (FL) Antoine Zahra a indiqué que la formule des trois 8 équivaut à un « compromis politique ». Ces compromis « momentanés sapent les bases de l’État libanais », a-t-il déploré, se demandant si les FL pouvaient cautionner un cabinet « qui servirait de cache-sexe au coup d’État contre les institutions du pays ».

• La dépouille du chef des Brigades Abdallah Azzam, affiliées à Al-Qaïda, le Saoudien Majed Al-Majed, a été rapatriée en Arabie saoudite après que le procureur général de la Cour de Cassation, le juge Samir Hammoud, a donné son feu vert.

• L’ambassade états-unienne à Beyrouth a annoncé dans un communiqué que « l’adjoint du chef du département d’État pour le Moyen-Orient, Matthew Spence, a effectué une visite au Liban cette semaine et s’est réuni avec le président de la République Michel Sleiman et le commandant en chef de l’armée, Jean Kahwagi, et de nombreux responsables politiques et militaires ». M. Spencer « a discuté avec ses hôtes du soutien des États-Unis à l’armée libanaise à travers les programmes continus de collaboration sécuritaire, notamment les aides américaines à l’armée et aux forces de sécurité intérieure, évaluées à plus d’un milliard de dollars depuis 2005, afin de protéger les frontières libanaises et défendre la souveraineté et l’indépendance de l’État », indique le communiqué. « Matthew Spence a réitéré l’engagement des États-Unis à empêcher le prolongement de la crise syrienne au Liban », a conclu le communiqué.

• L’ancien commandant de la marine de guerre israélienne, le général Eliezer Marom, a déclaré qu’« il n’existe pas de systèmes défensifs fiables capables de faire face aux missiles russes sol-mer Yakhont. » L’officier a déclaré que « si les rapports états-uniens sur le transfert par le Hezbollah au Liban de certaines parties de ce missile sont confirmées, et qu’il disposerait en Syrie d’un grand stock de missiles, cela signifiera que le parti est désormais capable d’atteindre les plateformes gazières israéliennes en Méditerranée, ainsi que les navires civils et miliaires et les ports ». Le général Marom a estimé que les missiles Yakhont constituent le plus grand défi auquel Israël est confronté, surtout à cause des améliorations introduites sur cette arme. « Il n’existe pas en Israël un système de défense contre ce missile », a-t-il réaffirmé. Par ailleurs, le ministre israélien de la Défense, Moshe Yaalon, a estimé mardi que le Hezbollah ne possède pas de missiles avancés russes de type Yakhont. « Notre ligne rouge concernant les événements en Syrie est claire. Nous ne permettrons pas le transfert de missiles avancés de la Syrie vers le Liban », a lancé le ministre lors d’un point presse. « Si cela ce produit, nous saurons comment répondre », a-t-il ajouté.

Revue de presse

As-Safir (Quotidien libanais proche du 8-Mars)
Malak Akil (9Janvier 2014)
Des navettes secrètes sont effectuées par le 14-Mars auprès de ses alliés et des dirigeants officiels, dans le but de trouver une formule pratique capable de traduire sur le terrain le slogan superflu brandi lors des funérailles de l’ancien ministre Mohammad Chatah par le chef du bloc parlementaire du Futur, Fouad Siniora. Ce dernier a contraint son camp politique, sans consultations préalables avec ses diverses composantes, à s’engager dans une « résistance civile pacifique et démocratique ». Pour le parti Kataëb, la proposition de Siniora en faveur du lancement de la « désobéissance civile » n’exprime que sa position, vu qu’il est nécessaire d’examiner les conséquences d’une telle action ainsi que son impact sur les échéances constitutionnelles, notamment la présidentielle, avant son adoption.

As-Safir (8 janvier 2014)
Marlène Khalifé
Une source politique états-unienne a indiqué que le secrétaire d’État adjoint, William Burns, se penche depuis un certain temps sur le dossier Iran-Arabie saoudite pour essayer de trouver une solution, même partielle, entre les deux pays, qui serait complémentaire de l’accord final sur le dossier nucléaire iranien sur lequel des diplomates spécialisés mettent les dernières touches entre Genève et Oman.
La personnalité politique états-unienne a ajouté que la solution au Proche-Orient commence par un accord avec l’Iran. Le Liban, lui, ne se trouve pas sur les cartes US, c’est-à-dire qu’il ne figure pas parmi les deux principaux dossiers, à savoir la Syrie et la Palestine. Mais il profite d’une manière indirecte de la baisse de la tension entre l’Iran et l’Occident.
Et la même source d’ajouter : « Le Liban est la dernière des préoccupations des États-Unis. C’est pour cela qu’ils ont confié le dossier aux Français. Les États-uniens focalisent leur attention sur les grandes questions, l’Iran, la Syrie et la Palestine. La déstabilisation sécuritaire au Liban fait partie du conflit en cours en Syrie et constitue une des conséquences de l’implication du Hezbollah dans la guerre là-bas. Les déclarations sur l’existence d’une ombrelle internationale protégeant le Liban sont fictives et illusoires. Il existe certes un parapluie français, mais il comporte des trous qui laissent passer l’eau de la pluie. »

An-Nahar (Quotidien libanais proche du 14-Mars)
Samir Tueni, Paris (10 janvier 2014)
Le ministre français de la Défense, Jean-Yves Le Drian, a annoncé que le don promis par l’Arabie saoudite à l’Armée libanaise lors de la visite du président François Hollande au royaume les 29-30 décembre a été adopté. Des sources diplomatiques indiquent que la décision saoudienne d’accorder un don visant à armer l’Armée libanaise a été prise sur la base d’une proposition mise en avant par la France à Riyad dans le cadre de la réunion des pays donateurs consacrés à l’armée qui devrait avoir lieu le 15 de ce mois et qui a été reportée jusqu’au mois de mars.
Selon les mêmes sources, l’Arabie saoudite a approuvé immédiatement la proposition française et les autorités françaises ont été prises de court par le montant du don saoudien. Des consultations tripartites réunissant le côté libanais, mené par le président Michel Sleiman, le président français, François Hollande, et le roi saoudien Abdallah Bin Abdel Aziz, ont eu lieu voici plus de trois mois en vue de discuter des aides à accorder à la troupe. Le chef de l’État libanais avait eu un entretien téléphonique dernièrement avec son homologue français portant sur cette question, lors de son déplacement en France pour des raisons médicales, et avec le monarque saoudien durant sa visite en Arabie saoudite. Il semble que Riyad et Paris se sont entendus à ce qu’une société française, chargée de la gestion des contrats d’armement entre la France et l’Arabie saoudite, prenne en charge la gestion de ce programme de soutien.
Le comité conjoint franco-libanais devrait se réunir afin de discuter des besoins qui seront présentés par le côté libanais et pour déterminer les priorités. Les sources précitées ont souligné qu’il n’y a aucune condition exigée en contrepartie des demandes de l’Armée libanaise. Toutefois, en étudiant les demandes formulées par le côté libanais, les négociateurs français devraient prendre soin de ne pas fournir à l’Armée du matériel ou des armes qui pourraient affecter la sécurité d’Israël, au vu des craintes que ces armes ne tombent aux mains des combattants du Hezbollah. Les sources précisent en outre que la proposition française est basée sur une étude exhaustive, à laquelle ont participé des officiers haut-gradés tant libanais que français, portant sur la situation dans laquelle se trouve l’Armée libanaise ainsi que sur les développements survenus sur le terrain depuis le début des évènements en Syrie. L’étude est parvenue à la conclusion que « l’armée a réussi tout au long des années à rester soudée sur le plan professionnel et à maintenir sa tendance occidentale », son commandement ayant refusé dans le passé des propositions de la part de l’Iran, de la Russie, et de la Chine de lui fournir des armes. L’étude a jugé que c’est le moment propice à renforcer les capacités de l’armée et à l’aider à étendre son autorité sur tout le territoire libanais.

Al-Akhbar (Quotidien libanais proche du 8-Mars)
Jean Aziz (9 janvier 2014)
Le train du gouvernement rassembleur a bel et bien quitté la gare bien qu’il soit réaliste de reconnaître qu’il pourrait ne pas arriver à destination. Mais Michel Sleiman n’a pas arrêté de parler d’un gouvernement de technocrates. Il faudra absolument que quelqu’un explique au président de la République qu’un gouvernement de fonctionnaires serait une véritable calamité, voire une trahison constitutionnelle et une atteinte flagrante à la démocratie. Il faudrait rappeler à Michel Sleiman et à Tammam Salam la chose suivante : « Au lieu de vous mettre dans l’embarras en vous engouffrant dans l’impasse que représente un gouvernement de fonctionnaires, pourquoi ne pas mettre plutôt les autres dans l’embarras ? Pourquoi ne pas annoncer que vous êtes dans l’obligation de former un gouvernement de pôles politiques, et non un gouvernement d’enfants ? Pourquoi n’agiteriez-vous pas la menace d’un décret portant les noms de Michel Aoun, Fouad Siniora ou Saad Hariri, Walid Joumblatt, Talal Arslan, Mohammed Raad et un représentant de Nabih Berry ainsi que des représentants des autres pôles politiques dans le pays ? Pourquoi ne pas les inviter à tenir les rênes du pouvoir, à gérer le vide, le dialogue, la recherche d’une solution, puis toutes les élections nécessaires aussi ? S’ils refusent, ils se retrouveront, eux, dans l’embarras, et vous auriez évité, vous, la mascarade que serait le gouvernement de fonctionnaires. »

Al-Akhbar (9 janvier 2014)
Amal Khalil
Si vous êtes en Côte d’Ivoire et que vous possédez un compte sur Facebook signalant que vous parlez l’arabe, vous pouvez recevoir une annonce dans un arabe bourré d’erreur, indiquant que des sociétés israéliennes de hi-tech sont à la recherche d’individus pour leur proposer divers emplois et qu’il leur est possible de travailler en Europe. Les annonces précisent que ces sociétés préfèrent embaucher des personnes ayant la possibilité d’obtenir des visas pour des pays européens, et soulignent que l’environnement du travail et les salaires sont intéressants.
À ce stade, cette annonce ne parait pas étonnante dans un pays où la présence israélienne dans les domaines économique, social, politique et du renseignement est importante. Mais ce qui attire l’attention, c’est la remarque inscrite sur ces annonces : « Nous préférons des personnes qui ont un accent libanais et une bonne expérience du marché libanais ». Le texte n’explique pas pourquoi les sociétés ont ces préférences et ne fournit aucune adresse ou moyen de communication. Il est seulement demandé à ceux qui sont intéressés d’inscrire leur nom, leur adresse électronique et leur numéro de téléphone, ils seront contactés par la suite.
Ces annonces sont postées via Google ou Facebook et sont destinées à des pays bien déterminés et des personnes ayant un profil bien défini. Des émigrés libanais dans d’autres pays d’Afrique ont indiqué n’avoir pas reçu cette annonce. En Côte d’Ivoire, les Libanais affirment que ce type d’annonce est uniquement envoyé sur les pages Facebook des membres de la communauté libanaise.
Il est à noter que les communautés libanaises installées en Afrique sont la cible, depuis des années, d’une campagne sécuritaire et économique de la part des services de renseignements israéliens et états-uniens pour miner leur influence et porter atteinte à leurs intérêts.

Al-Joumhouria (Quotidien libanais proche du 14-Mars)
Tony Issa (11 janvier 2014)
Si c’est réellement l’État islamique en Irak et au Levant (EIIL) qui a pris pour cible la banlieue sud pour riposter à l’implication du Hezbollah en Syrie, qu’est-ce qui l’empêcherait de modifier son agenda et de passer des attentats suicides contre les quartiers résidentiels à un ciblage de dirigeants et de cadres supérieurs du 8-Mars. L’assassinat, il y a quelques semaines, du responsable du Hezbollah, Hassan al-Lakkis, ne s’inscrit-il pas dans cette perspective ? Dans le cas irakien, lorsque la situation est sortit de tout contrôle, personne n’était plus en mesure de comprendre ce qui se passait et qui assassinait qui. Sans doute que beaucoup ont tiré profit de cette situation chaotique pour liquider des adversaires, même entre les alliés. Il n’est donc pas étonnant que les dirigeants du 8-Mars se sentent eux aussi menacés physiquement, d’autant que des rapports de sécurité ont à maintes reprises fait état de menaces entourant certains d’entre eux, comme par exemple le président du Parlement, Nabih Berry, le leader du Courant patriotique libre (CPL), le général Michel Aoun, ou le secrétaire général du Hezbollah, sayyed Hassan Nasrallah. Toutes la classe politique libanaise se meut donc dans un champ de mine. Saad Hariri se protège en pratiquant l’absentéisme, comme beaucoup d’autres. Certains pratiquent l’absentéisme au Liban même, comme Berry, Nasrallah, (Samir) Geagea, Aoun, (Amine) Gemayel et d’autres. Walid Joumblatt, quant à lui, préfère se protéger à travers ses fluctuations politiques.

Al-Hayat (Quotidien à capitaux saoudiens, 10 janvier 2014)
Randa Takieddine, Paris
Des sources diplomatiques occidentales ont affirmé que les États-Unis, la Grande-Bretagne et la France, en coopération avec la Russie et la Chine, exerceront des pressions sur les protagonistes libanais durant le mois de mars prochain en vue de l’élection d’un président de la République, et d’éviter le vide à la tête de la Magistrature suprême, insistant que l’élection d’un nouveau chef d’État est plus importante que la formation d’un gouvernement, vu le symbole qu’incarne cette fonction. Surtout que ce sera la première fois depuis longtemps qu’un président aura élu par les différentes parties libanaises.
Les membres permanents du Conseil de sécurité envisageraient d’exhorter les principales formations adverses au Liban à parvenir à une entente dans l’optique de couper court au vide à la présidence de la République. Les mêmes sources ajoutent que seul Paris est en train de dialoguer avec le Hezbollah.
Ces démarches, affirment ces sources, sont motivées par la situation dangereuse que traverse le Liban, surtout qu’il n’y aura pas un nouvel accord ni à Doha ni ailleurs, afin de donner un élan à l’élection présidentielle. Ces pays œuvreront à apporter un plus grand soutien à l’Armée libanaise ces trois prochains mois, afin de contrecarrer, dans la mesure du possible, les risques qui pèsent sur le pays. Les mêmes sources enchaînent que ces pays ont perçu une amélioration considérable dans la prestation de l’Armée libanaise sur le plan local durant les trois dernières années, en dépit des incidents sécuritaires survenus dans le pays.
Les sources estiment que l’élection d’un nouveau président est susceptible de résoudre les problèmes politiques qui sévissent dans le pays, d’autant que les différentes formations sont paralysées et resteront attachées aux cartes qu’elles tiennent en main jusqu’à cette échéance. L’élection d’un nouveau président et la formation du gouvernement doivent s’inscrire dans le cadre d’un deal qui devra être conclu entre les divers protagonistes au Liban et non pas à Paris, à Doha ou ailleurs, ajoutent les sources précitées.
Les sources ajoutent que la France n’a jamais était en faveur de la prorogation du mandat du président de la République en dépit des rumeurs qui ont circulé à cet égard, soulignant que lorsque le président décidera de signer le décret de la formation du gouvernement, il s’agira d’une décision libanaise. Et si le gouvernement n’obtiendra pas la confiance au sein de l’hémicycle, il deviendra un gouvernement d’expédition des affaires courantes et remplacera le gouvernement démissionnaire actuel. Les sources poursuivent que ce scénario est rejeté par le 8-Mars. Elles précisent toutefois que Paris n’a pas dit de son côté approuver une telle éventualité, soulignant que la France approuve la formation d’un gouvernement capable de prendre des décisions, et qu’il serait mieux si le nouveau cabinet bénéficierait de l’approbation de toutes les parties. « Telle sera la meilleure formule », soulignent les sources qui ajoutent cependant que la France ne pourra pas dire aux Libanais « de faire ceci, ou de faire cela », car il s’agit d’une décision purement libanaise et que ceci relève d’une position constante. Pour Paris, les éléments qui déterminent la position des uns et des autres au Liban peuvent être réduits à l’échéance présidentielle, car dans l’hypothèse où le vide s’emparerait de la présidence de la République, le gouvernement sera appelé à combler la vacance. Et de se demander : « Quel gouvernement est-il à même de garantir la poursuite du fonctionnement des institution ? Il y a une grande probabilité dans les circonstances actuelles à ce qu’il n’y ait pas de président ».
Toujours selon les mêmes sources, les États intéressés par le Liban souhaitent œuvrer ensemble dans le cadre d’un réseau international concerné par la situation au Liban et ce en vue de l’élection d’un nouveau président. La meilleure solution est pour Paris à ce que l’Arabie saoudite et l’Iran contribuent à ces efforts, en encourageant la tenue des élections présidentielles, sans toutefois intervenir dans le choix des candidats, poursuit la source, qui fait état de la volonté de Paris à voir les rangs des chrétiens au Liban resserrés à cet effet.
Il est prévu qu’une délégation française de haut niveau se rende ce mois à Beyrouth afin de discuter avec les dirigeants chrétiens de ce sujet et pour les appeler à ne pas être les victimes du conflit sunnite-chiite. Les sources précitées ajoutent que Paris considère que si les dirigeants chrétiens se rallient pour insister sur la nécessité d’élire un nouveau président les choses seront différentes. Par ailleurs, la France œuvrera auprès des membres permanents du Conseil de sécurité pour attirer l’attention des dirigeants libanais aux dangers qui pèseront sur le pays dans l’hypothèse où le scrutin présidentiel n’aura pas lieu. Pour Paris, le nouveau président devra être élu au sein du Parlement et il sera possible d’assurer la majorité si les chrétiens se réunissent au sein de l’hémicycle. Voilà le conseil que la délégation française qui visitera le Liban dans les semaines à venir portera aux chrétiens afin d’exhorter les différentes parties à ne pas renoncer à l’élection d’un Président.

Al-Raï (Quotidien koweitien, 8 janvier 2014)
Une source proche du commandement militaire du Hezbollah assure que les forces déployées par le parti en Syrie ne dépassent pas les 5 % de ses effectifs et une partie infime de ses capacités militaires. La source ajoute que la plus grande partie des troupes d’élite reste au Liban pour faire face aux différents défis, notamment ceux qui viennent d’Israël, qui multiplie les menaces et les opérations secrètes, auxquelles le Hezbollah ripostera par des frappes encore plus puissantes.
La source précitée poursuit que le parti observe sans y accorder d’intérêt la tempête médiatique déclenchée par Israël au sujet des armes qualitatives qui serait en sa possession. « Le Hezbollah ne se laisse pas entrainer dans des polémiques médiatiques qui pourraient profiter à Israël, déclare la source. Le secrétaire général sayyed Hassan Nasrallah avait ouvertement indiqué que le parti a les capacités militaires suffisantes pour imposer un équilibre de la terreur. Aussi, le Hezbollah possède-t-il tout ce dont il a besoin en armes défensives et offensives pour occasionner les plus grosses pertes à l’ennemi s’il osait attaquer le Liban ».
La même source précise que le Hezbollah ne se confine pas à des limites géographiques bien déterminées dans la confrontation contre l’ennemi intérieur, c’est-à-dire les takfiristes, ou extérieur, Israël. « Nous savons que la possibilité qu’Israël soit en train de préparer une importante opération de renseignement existe, déclare la source. Il fait tout ce tapage médiatique et profère ces menaces pour dissuader le Hezbollah de riposter. Mais les stratèges du parti savent qu’ils doivent faire face simultanément à tous les défis car Israël et les takfiristes sont sur la même longueur d’onde. C’est pour cela que les plans élaborés se basent sur le principe que tous les fronts peuvent être activés en même temps ».

L’Orient-Le Jour (Quotidien libanais francophone proche du 14-Mars)
Scarlett Haddad (9 janvier 2014)
Dans le cadre de leur analyse des attentats-suicide qui ont eu lieu récemment dans diverses régions libanaises, les services de renseignement libanais estimaient que le pire scénario serait que les kamikazes soient de nationalité libanaise. Avec le dernier attentat à la voiture piégée à Haret Hreik, il n’y a plus de doute sur le sujet. Le kamikaze a été identifié et il est originaire du Akkar. Il s’appelle Qouteïba al-Satem et son père s’est spontanément rendu auprès des SR de l’armée pour confirmer son identité. Même si des versions plus farfelues sont avancées par le député Khaled Daher et véhiculées par certains médias, les services de renseignement sont formels : le jeune Qouteïba al-Satem est effectivement le conducteur de la voiture qui a explosé la semaine dernière à Haret Hreik. L’information est grave parce qu’elle met en évidence ce que des parties libanaises n’ont cessé de vouloir nier, à savoir qu’al-Qaida n’a pas seulement au Liban des cellules dormantes qui peuvent se réveiller à la demande. Elle bénéficie aussi d’un environnement favorable qui permet à ses thèses de se propager dans la société libanaise pourtant mélangée et, par tradition, peu perméable aux thèses extrémistes d’où qu’elles viennent. Il ne s’agirait donc plus seulement de cas isolés, ou de groupes importés étrangers à la société libanaise, mais d’un climat général dans certains milieux imprégnés de l’idéologie d’el-Qaëda et convaincus du bien-fondé de ses agissements.
Indépendamment des opinions divergentes sur la cause de l’implantation de plus en plus profonde d’al-Qaida au Liban, au point de se sentir assez libre pour se déplacer et agir dans des endroits divers, cette présence signifie deux choses : d’abord que le périmètre du danger s’élargit au Liban et même si les services compétents ont multiplié leurs mesures de vigilance, la menace y est plus grande et ensuite qu’il sera plus difficile de l’éradiquer. D’autant qu’avec la tension confessionnelle exacerbée, les services d’ordre peuvent difficilement agir sans essuyer des critiques les accusant de pencher vers un camp aux dépens de l’autre.
Il ne faut donc pas être un voyant illuminé pour affirmer que la situation est grave et qu’elle l’est encore plus à cause du conflit régional déclaré entre l’Arabie saoudite et l’Iran, qui prend inévitablement une tournure confessionnelle. Mais le plus dur est de constater que depuis deux décennies au moins, al-Qaida a choisi de s’incruster au Liban dans l’indifférence et l’inconscience quasi générales.

Stratfor (Institut de recherche états-unien, 9 janvier 2014)
La mort mystérieuse d’un chef jihadiste saoudien à Beyrouth (Majed al-Majed, ndlr) soulève des questions au sujet des réseaux de plus en plus compliqués de Riyad dans la région. L’Iran et l’Arabie saoudite sont enfermés dans une lutte d’influence au Levant, et des groupes comme les Brigades Abdallah Azzam sont pressés d’exploiter cette dynamique. Cependant, la stratégie de l’Arabie saoudite de soutenir sélectivement les jihadistes dans cette zone de combat aura un prix.
Majed al-Majed était particulièrement connu pour ses capacités à restructurer les jihadistes en sous-unités décentralisées et pour la mise en place de réseaux régionaux. Alors que la guerre civile syrienne s’est intensifiée au cours des deux dernières années, il a transporté ses activités en dehors du camp d’Aïn el-Héloué, avant de déménager en Syrie, en 2012, où il a travaillé avec le Front al-Nosra. Aïn el-Héloué est un terrain de recrutement actif pour les militants sunnites et les agences régionales de renseignement. L’Arabie saoudite, en particulier, garde un œil sur les groupes en dehors des camps palestiniens du Liban.
La dernière revendication majeure des Brigades Abdallah Azzam était le double attentat suicide du 19 novembre contre l’ambassade d’Iran dans la banlieue sud de Beyrouth. Un signal clair que les jihadistes opérant au Liban sont prêts à intensifier leur campagne sectaire contre le Hezbollah, soutenu par l’Iran. Peu de temps après l’attaque, al-Majed, qui souffrait d’insuffisance rénale, est retourné au Liban et se sentait visiblement suffisamment en sécurité pour subir une dialyse dans un hôpital de Beyrouth, avant de retourner dans la vallée de la Bekaa. En route, les renseignements de l’Armée libanaise l’ont cueilli et son arrestation a été officiellement annoncée le 1er janvier.
L’affaire al-Majed a rapidement tourné en un bras de fer entre l’Iran et l’Arabie saoudite, avec un Liban impuissant juste au milieu. L’Arabie saoudite a réclamé son extradition, vu qu’il est un ressortissant saoudien recherché par les autorités de son pays. Mais l’Iran, après avoir été la cible de son groupe quelques semaines plus tôt, a assuré qu’il avait le droit de l’interroger en premier. Riyad a refusé la demande de l’Iran, mais Téhéran a quand même envoyé une délégation au Liban pour l’interroger. Les responsables libanais ont essayé d’éviter de prendre partie pour l’un des deux pays, affirmant que Majed était trop malade pour être entendu. Le 4 janvier, sa mort a été annoncée à l’hôpital de Beyrouth, où il était traité.
Al- Majed était malade, mais les circonstances de sa mort sont très suspectes. L’Iran a déjà exprimé ses soupçons que l’Arabie saoudite a joué un rôle dans sa mort. Stratfor a également reçu des indications avant son décès selon lesquelles les autorités libanaises étaient sous pression pour lui refuser un traitement médical afin que le problème soit, pour ainsi dire, réglé de lui-même. La question qui s’impose est celle de savoir pourquoi al-Majed était-il tellement dangereux pour rester en vie. L’Arabie saoudite parraine un réseau élaboré de militants sunnites qui sont particulièrement actifs en ce moment au Levant, en particulier en Syrie et au Liban, où l’Iran et l’Arabie sont engagés dans une intense bataille par procuration. Le soutien des Saoudiens aux factions militantes peut varier d’une aide financière directe, aux armes et aux combattants, ou en fermant simplement les yeux sur des activités qui servent des intérêts sectaires plus larges. On ne sait pas quel est le niveau du soutien que le groupe d’al-Majed pourrait avoir reçu de Riyad, mais il est clair que les Saoudiens souhaitaient le faire taire.
Le problème historique avec la stratégie de l’Arabie saoudite est que la plupart des factions jihadistes qui gagnent du terrain dans la région sont tout aussi capables de se retourner contre la Maison des Saoud, une fois que le champ de bataille actuel perd de son attrait. La politique saoudienne dans la région est donc pleine de contradictions.

Source
New Orient News