La séance est ouverte à 10 h 10.
Le Président (parle en russe) : En vertu de l’article 37 du règlement intérieur provisoire du Conseil, j’invite le représentant de l’Ukraine à participer à la présente séance.
En vertu de l’article 39 du règlement intérieur provisoire du Conseil, j’invite les intervenants suivants qui feront un exposé au Conseil à participer à la présente séance : M. Tayé-Brook Zerihoun Sous-Secrétaire général aux affaires politiques, et M. Ivan Šimonović, Sous-Secrétaire général aux droits de l’homme.
Au nom du Conseil, je souhaite la bienvenue à M. Šimonović, qui participe à la présente séance par visioconférence depuis Zagreb.
Le Conseil de sécurité va maintenant aborder l’examen de la question inscrite à son ordre du jour.
Je donne maintenant la parole à M. Zerihoun.
M. Zerihoun, Sous-Secrétaire général aux affaires politiques (parle en anglais) : Je vous remercie, Monsieur le Président, de me donner cette possibilité d’informer le Conseil de sécurité sur les faits survenus récemment en Ukraine. En grande partie grâce à l’initiative prise par le Président Petro Poroshenko depuis sa prestation de serment le 7 juin afin de trouver une solution pacifique et durable à la crise en Ukraine et grâce aux efforts inlassables de la communauté internationale, des signes encourageants indiquent une désescalade du conflit en Ukraine, et des mesures politiques et diplomatiques commencent à être prises en vue de régler cette crise.
Le 20 juin, l’Ambassadeur de l’Ukraine, Yuriy Sergeyev, a fourni au Secrétaire général une copie officielle du plan de paix du Président Poroshenko, qui comprend des mesures d’apaisement telles que l’amnistie pour les personnes qui n’ont pas participé à des crimes graves, le désarmement, la décentralisation du pouvoir et la tenue d’élections locales et législatives anticipées, ainsi qu’un programme visant à créer des emplois dans la région.
Simultanément, sur les conseils de ses commandants militaires, qui l’ont informé que la frontière avec la Fédération de Russie avait été sécurisée, le 20 juin, le Président Poroshenko a annoncé le début d’un cessez-le-feu unilatéral d’une semaine dans le but de donner aux milices armées la possibilité de rendre les armes. Les forces gouvernementales ont reçu l’ordre de se retirer de leurs positions, pour donner aux rebelles une chance de déposer les armes. En vertu de ce plan, tous les rebelles qui se rendent de manière pacifique et qui n’ont pas commis de crimes graves se verraient accorder l’amnistie. En outre, en vue d’établir des contacts dans les régions de l’est de l’Ukraine, le Président s’est rendu le 19 juin dans le Donbass, où il a rencontré des personnalités de la société civile, des chefs d’entreprise et des personnalités locales. Le jour suivant, il s’est rendu dans des zones de conflit à Donetsk et à Lougansk.
Le 21 juin, le Secrétaire général s’est entretenu avec le Président Poroshenko par téléphone. Il s’est dit encouragé par le plan de paix et en particulier par le début du cessez-le-feu unilatéral. Dans le même temps, le Secrétaire général a fait part de sa préoccupation quant au fait qu’il pourrait être difficile de mettre fin à la violence sans la participation active des groupes armés. Le Secrétaire général a depuis noté avec satisfaction que des pourparlers de paix auraient démarré avec des représentants des groupes armés dans l’est de l’Ukraine, sous la conduite de l’ancien Président ukrainien, Leonid Kuchma, et avec la participation de l’Ambassadeur russe en Ukraine et de responsables européens. Le Secrétaire général a insisté sur le fait que de tels pourparlers sont essentiels aux efforts visant à apaiser les tensions.
Le Secrétaire général a également pris note du fait que les milices armées ont accepté de décréter elles aussi un cessez-le-feu, bien qu’elles aient auparavant rejeté l’offre du Président et poursuivi leur offensive. Dans l’ensemble, le cessez-le-feu est observé. Le Secrétaire général attend de toutes les parties qu’elles respectent le cessez-le-feu et laissent la porte ouverte à des négociations et une médiation efficaces en vue de trouver une solution pacifique à cette crise.
Aujourd’hui, d’après les informations fournies, une nouvelle mesure encourageante qui pourrait non seulement contribuer à apaiser les tensions mais également améliorer les chances de parvenir à un règlement négocié a été prise, le Président Poutine ayant demandé au Parlement russe de revenir sur sa décision d’autoriser le déploiement de contingents en Ukraine.
Le Cabinet du Président Poroshenko a accueilli avec satisfaction cette initiative en tant que première mesure concrète prise depuis que le Président Poutine a exprimé son appui au plan de paix. Même s’il s’agit de mesures importantes pouvant apaiser la situation, le Secrétaire général demeure extrêmement préoccupé par la réalité sur le terrain, qui reste grave et très inquiétante.
Jusqu’à ces nouveaux faits politiques survenus récemment, des combats violents, en particulier dans l’est de l’Ukraine, ont fait rage, coûtant la vie à des centaines de personnes et en blessant un nombre encore plus grand, y compris des civils. Des armes et des combattants ont passé la frontière ukrainienne, ce qui a rendu la situation encore plus complexe et plus violente. Divers groupes rebelles ont fait leur apparition, de manière non coordonnée, et ne combattraient pour aucune cause politique claire.
Même après le cessez-le-feu annoncé par le Président Poroshenko, les groupes armés avaient publiquement rejeté cette offre et poursuivi leur attaque contre les forces ukrainiennes dans la nuit du 20 au 21 juin, et auraient blessé six soldats. D’autres informations indiquent que, durant cette même période, les forces ukrainiennes ont également poursuivi leurs opérations de sécurité, bien que l’on ne sache pas au juste si elles se défendaient simplement contre des attaques. La Fédération de Russie a signalé que des obus provenant de ces échanges avaient traversé sa frontière et causé des dégâts matériels.
Le 14 juin, un aéronef ukrainien de transport militaire, un Iliouchine-76, a été abattu alors qu’il approchait d’un aéroport à Lougansk. Cet aéronef a été pris pour cible par des milices armées à son approche de l’aéroport de Lougansk et s’est écrasé à 00 h 50 (heure locale). Les 49 personnes qui se trouvaient à bord, y compris 40 parachutistes, ont été tuées.
Les observateurs de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe enlevés il y a près d’un mois, les 26 et 29 mai, sont toujours retenus en captivité. Le Secrétaire général a de nouveau appelé à leur libération immédiate et sans conditions.
Les combats ont entraîné des pertes en vies humaines et causé de nombreuses souffrances à des personnes innocentes. C’est pour le bien de ces innocents qu’il faut déployer des efforts pour faire fond de toute urgence sur les progrès faits dans les domaines politique et diplomatique.
Le Secrétaire général insiste depuis le début sur le fait que la communauté internationale ne peut se permettre de trahir la confiance de l’Ukraine et du peuple ukrainien. Il a réaffirmé que la communauté internationale doit œuvrer de concert sans attendre pour mettre un terme aux hostilités et contribuer à garantir une paix durable. Le plan de paix du Président Poroshenko a reçu l’appui d’acteurs clefs dans le pays, la région et au-delà.
Cependant, il y a encore de lourds défis à relever. La communauté internationale doit aider l’Ukraine à surmonter la crise actuelle et à trouver une solution pacifique et durable aux problèmes auxquels le pays est confronté. L’ONU est prête à appuyer tous les efforts déployés à cette fin.
Le Président (parle en russe) : Je remercie M. Zerihoun de son exposé.
Je donne maintenant la parole à M. Šimonović.
M. Šimonović, Sous-Secrétaire général aux droits de l’homme (parle en anglais) : Je vous remercie, Monsieur le Président, de cette occasion de faire un exposé au Conseil sur la situation des droits de l’homme en Ukraine. Le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme vient de publier le troisième rapport mensuel de la mission de surveillance des droits de l’homme de l’ONU en Ukraine. Ce rapport couvre la période du 7 mai au 7 juin 2014. Dans cet exposé, j’évoquerai également certains faits récents survenus depuis le 7 juin, date butoir du rapport.
Le rapport fait état d’une évolution positive de la situation au cours de la période considérée, grâce à un certain nombre d’initiatives et de changements législatifs. Il s’agit notamment de changements législatifs visant à lutter contre la discrimination et la corruption. En outre, il y a eu des amendements législatifs ayant trait à l’amnistie, à la lustration des juges, aux droits linguistiques, à la politique ethnique, à la torture et aux mauvais traitements, aux médias et à la réforme des services de maintien de l’ordre. Toutes ces lois sont importantes et contribueront considérablement à mettre en place les garanties juridiques nécessaires pour remédier à certaines des causes profondes de cette crise.
Le Gouvernement a également pris des mesures en vue de la mise en œuvre de la Déclaration de Genève du 17 avril, en organisant des tables rondes sur l’unité nationale. Les résultats de ces tables rondes ont contribué à l’adoption par le Parlement, le 20 mai, d’une résolution intitulée « Mémorandum pour la
paix et la concorde ». Ce mémorandum envisage une réforme constitutionnelle prévoyant la décentralisation du pouvoir et un statut spécial pour la langue russe ; une réforme du système judiciaire et de la police ; et une loi accordant l’amnistie aux manifestants anti- gouvernementaux dans l’est du pays qui accepteraient de déposer les armes, à l’exception de ceux qui ont commis des crimes graves constituant des atteintes à la vie et l’intégrité physique des personnes.
Le rapport indique que l’élection présidentielle s’est tenue le 25 mai et qu’il y a eu relativement peu de violations des droits de l’homme sur la plus grande partie du territoire national. Toutefois, des violations graves des droits de l’homme ont été commises dans ce contexte dans les régions de Donetsk et de Lougansk à l’est du pays où les commissions électorales et les commissaires électoraux ont fait l’objet d’attaques avant et pendant les élections, ce qui a perturbé le bon déroulement des élections et a empêché de nombreux résidents d’exercer leur droit de vote.
Les progrès demeurent lents en ce qui concerne le processus de responsabilisation en cours pour les violences commises à Maidan et les incidents survenus le 2 mai à Odessa. Certains éléments des unités Berkut ont été arrêtés, mais des poursuites n’ont toujours pas été engagées relativement aux 113 personnes qui ont été tuées entre novembre 2013 et février 2014 pendant les événements de Maidan.
Au moins six enquêtes ont été lancées concernant les événements tragiques survenus le 2 mai à Odessa. Notre rapport fait état, jusqu’à présent, d’inaction grave et de préoccupations liées au comportement des policiers et des pompiers qui auraient pu prendre les mesures nécessaires pour prévenir ces incidents et éviter qu’il n’y ait des victimes. En raison de ces multiples enquêtes, il y a un risque élevé de problèmes de communication et de contamination des éléments de preuve. Le manque de transparence dans la conduite des enquêtes suscite également des préoccupations. Il faut impérativement que ces enquêtes soient menées rapidement, en toute impartialité et de façon approfondie.
J’en viens maintenant à l’est du pays, où se posent les défis les plus graves en matière de droits de l’homme.
Le rapport attire l’attention sur la situation dans l’est du pays, qui se dégrade rapidement. Cependant, la situation s’est détériorée davantage depuis la date butoir du rapport. Selon des estimations qui se fondent sur des informations recueillies auprès de sources officielles, 423 personnes, des militaires et des civils, ont été tuées entre le 15 avril et le 20 juin. Il y a eu une augmentation du nombre d’armes et une intensification de recrutements au sein des groupes armés. Les représentants de la République populaire autoproclamée de Donetsk ont reconnu la présence, au sein de leurs groupes armés, de citoyens de la Fédération de Russie, y compris de personnes originaires de Tchétchénie et d’autres républiques du Nord-Caucase.
Les enlèvements et les détentions par les groupes armés constituent toujours une tendance préoccupante. L’anarchie prend de plus en plus d’ampleur. Les violations des droits de l’homme commises par les groupes armés se multiplient et le nombre de crimes de droit commun augmente. Les observateurs ont relevé 222 cas de personnes qui ont été enlevées et détenues par des groupes armés depuis le 13 avril. À la date du 7 juin, quatre de ces personnes avaient été tuées, 81 étaient encore en détention et 137 avaient été remises en liberté.
Il y a de plus en plus d’informations faisant état d’une augmentation de cas de disparitions forcées et d’usage excessif de la force dans le cadre des opérations de sécurité menées par le Gouvernement. Il y a eu des victimes au sein de la population suite à ces agissements. En dépit des contraintes de sécurité, nous continuons à suivre de près ces incidents et à les porter à l’attention du Gouvernement. Nous n’avons pas reçu d’informations selon lesquelles la population aurait été délibérément prise pour cible, mais nous sommes en train de vérifier des allégations selon lesquelles les forces de sécurité auraient pu prendre des mesures pour prévenir les pertes civiles. Le Gouvernement doit faire en sorte que ses forces armées s’abstiennent de tout usage excessif de la force et que ses opérations de sécurité soient menées conformément aux normes internationales des droits de l’homme, en tout temps.
Les membres de la population se déplacent, en partie parce qu’ils ont peur mais aussi en raison des conditions économiques et sociales qui se dégradent. Au cours des deux dernières semaines, le nombre de déplacés dans le pays a doublé, suite à des déplacements massifs d’environ 15 200 personnes dans les régions de Donetsk et de Lougansk. En date du 23 juin, le Haut- Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés avait recensé plus de 46 100 déplacés, dont 11 500 sont venus de Crimée et près de 34 600 de l’est du pays. En l’absence d’un système officiel d’enregistrement et compte tenu du fait que nos partenaires humanitaires ont un accès limité à certaines zones, le nombre de déplacés est probablement plus élevé.
Le Gouvernement a été invité à répondre aux besoins humanitaires des personnes déplacées, notamment en mettant en place un système d’enregistrement, en adoptant des lois et des règlements destinés à faciliter l’accès à des droits sociaux et économiques importants et en mettant en place des programmes d’assistance publique. La mobilisation et la coordination des efforts de secours lancés par la société civile, ainsi que la coopération avec les donateurs internationaux et les programmes d’assistance technique, sont également de la plus haute importance.
Le rapport indique qu’il a fallu suspendre les études dans plusieurs villes de l’est en mai, une décision qui touche 21 700 élèves. Les hôpitaux sont toujours surpeuplés et n’ont pas suffisamment de personnel ni de fournitures médicales. D’après le Ministère de la santé, au moins 10 hôpitaux ont fermé leurs portes dans les régions de l’est du pays. Les prix des denrées alimentaires ont grimpé en flèche. Les légumes de saison sont maintenant quatre à cinq fois plus chers qu’avant. Par ailleurs, il devient de plus en plus difficile pour les entreprises de fonctionner et pour les gens de se rendre au travail. Par exemple, des attaques armées ont été lancées contre les compagnies minières, qui sont les principaux acteurs économiques de la région.
Environ la moitié de la population de la région de Donetsk est confrontée à des difficultés s’agissant de l’accès à l’eau. Depuis la semaine dernière, il n’y a pas d’eau courante à Slovyansk. Près de 90 % de la ville n’est plus alimentée en électricité. Les téléphones ne fonctionnent pas la plupart du temps, tandis que les transports publics ne fonctionnent pas du tout.
La situation des journalistes est également alarmante. Le Conseil a condamné à juste titre le meurtre récent de deux journalistes russes tombés sous des tirs de mortier, qui a fait suite à celui d’un photographe de presse italien et de son interprète russe survenu le 24 mai. Les auteurs de ces récentes attaques n’ont pas encore été identifiés, mais l’établissement de ces responsabilités revêt une grande importance.
Le rapport décrit la situation en Crimée comme un vide juridique. Alors que la législation ukrainienne est censée rester en vigueur, conformément également à la résolution 68/262 de l’Assemblée générale, les institutions juridiques en Crimée sont déjà tenues de se conformer aux dispositions législatives de la Fédération de Russie. Tout cela a des conséquences bien concrètes, comme le fait que quelque 15 000 affaires judiciaires se retrouvent prises dans un vide juridique entre les législations et les systèmes juridiques ukrainiens et russes.
La population tatare de Crimée a vu limiter de façon préoccupante sa liberté d’expression, de réunion pacifique, d’association et de religion.
La mission de surveillance des droits de l’homme de l’ONU en Ukraine a jusqu’à présent joué un rôle important pour désamorcer les tensions en rendant compte en toute impartialité de la situation des droits de l’homme. Elle peut jouer un rôle tout aussi utile en appliquant des mesures de confiance dans les domaines humanitaire et des droits de l’homme. La mission a déjà facilité la libération de nombreuses personnes détenues par les groupes armés. Cependant, ces mesures doivent se fonder sur la réciprocité, et les personnes arbitrairement détenues par les autorités doivent elles aussi être libérées dans le cas où il n’existe aucun fondement juridique solide à leur maintien en détention. La mission ayant des contacts de tous les côtés, elle continuera d’encourager et de faciliter ces initiatives.
Le plan de paix et le cessez-le-feu unilatéral annoncés récemment par le Président Poroshenko constituent une étape positive dans la bonne direction. Il est également encourageant d’apprendre que les groupes armés ont annoncé hier qu’ils allaient observer un cessez-le feu jusqu’à vendredi. Cela nous ouvre la possibilité de mettre en œuvre des mesures de confiance sur les plans humanitaire et des droits de l’homme.
Au-delà de la réponse immédiate à la crise, le respect de la totalité des droits fondamentaux de toute personne vivant en Ukraine est un préalable à une paix durable. La mission de surveillance des droits de l’homme de l’ONU est prête à apporter son appui au Gouvernement ukrainien, de même qu’à la société civile et aux différents groupes sociaux et nationaux, à cette fin.
Avec votre permission, Monsieur le Président, je vais maintenant me déconnecter de cette session de visioconférence : en raison d’un changement imprévu dans mon horaire de vol, je dois en effet partir de suite prendre un avion pour Bujumbura.
Le Président (parle en russe) : Je remercie M. Šimonović de son exposé. M. Šimonović m’ayant demandé la permission de partir, je ne saurais le lui refuser, car il a présenté son exposé au Conseil de sécurité. Étant donné qu’il a une raison urgente, nous lui accorderons en effet cette autorisation. Je saurais cependant gré à l’un de ses assistants de bien vouloir suivre notre débat.
Je vais maintenant donner la parole aux membres du Conseil de sécurité.
Mme Power (États-Unis d’Amérique) ( parle en anglais) : Maintes et maintes fois – au moins 17 depuis le mois de février –, nous nous sommes réunis ici pour discuter de la situation en Ukraine. Et maintes et maintes fois, nous nous sommes vus dans l’obligation de passer un temps considérable à examiner les efforts déployés par la Russie pour déstabiliser son voisin et à réfuter la désinformation la plus totale et la fiction pure et simple qui sont tissées autour de ce qui se passe sur le terrain en Ukraine.
La rhétorique russe est inexacte, incendiaire et autojustificatrice. Le 17 juin encore, c’est-à-dire la semaine dernière, le Ministre des affaires étrangères russe, M. Lavrov, a accusé les autorités militaires ukrainiennes de procéder à un nettoyage ethnique. Quelques jours plus tôt, un responsable de la Douma avait accusé l’Ukraine de perpétrer un génocide massif. Mon gouvernement, le Conseil de sécurité et l’ONU prennent très au sérieux toute information tendant à indiquer qu’il y a eu nettoyage ethnique ou génocide. Mais des allégations infondées comme celles-ci ont pour effet de radicaliser les séparatistes russes, de provoquer l’escalade de cette horrible crise et de vider encore davantage de toute crédibilité les comptes rendus russes faits depuis la région.
Nous devons examiner ces allégations en regard des faits réels sur le terrain, comme, par exemple, la situation de la communauté tatare de Crimée après l’annexion qu’est censée avoir opérée la Russie, et que la communauté internationale ne reconnaîtra jamais. Les dirigeants tatars ont subi des fouilles arbitraires à leur domicile et les rédacteurs en chef de leur principal journal ont été menacés de poursuites. Les Tatars qui ont participé à des manifestations pacifiques ont été mis par dizaines sous les verrous, et un plus grand nombre d’entre eux encore s’est fait insulter et harceler pour avoir parlé sa langue en public. Ils ont également été informés qu’ils devaient, à l’instar de tous les habitants de Crimée, renoncer à leur citoyenneté ukrainienne au risque, sinon, d’être traités comme des étrangers sur leur propre territoire.
Pendant ce temps, dans les zones contrôlées par les groupes séparatistes illégaux, dans le sud- est de l’Ukraine, nous continuons de voir la Russie soutenir avec force la campagne de violence et de terreur séparatiste. Les crimes commis par ces groupes sont méthodiquement répertoriés dans les rapports de la mission de surveillance des droits de l’homme de l’ONU, et suivent un schéma établi par l’intervention illégale de la Russie en Crimée. Ils comprennent la prise de contrôle et l’occupation violentes d’édifices publics et gouvernementaux, des attaques meurtrières non provoquées contre les forces ukrainiennes de sécurité et des arrestations arbitraires, des actes de torture, des passages à tabac, des menaces de mort, des disparitions, des meurtres et d’autres graves violations commises par des combattants russes et des séparatistes pro-russes.
Nous n’avons pas besoin d’aller chercher très loin pour en trouver des preuves. Nous les avons dans les trois chars russes T-64 qui se sont tout à coup retrouvés aux mains des séparatistes dans l’est de l’Ukraine. Nous les avons dans le lance-roquettes BM-21 retrouvé brûlé, parmi les nombreux lance-roquettes qui ont soudain fait surface dans l’est de l’Ukraine au cours des dernières semaines, et dont des photographies montrent qu’ils appartenaient encore récemment à la dix- huitième brigade d’infanterie motorisée russe, basée en Tchétchénie. Nous les avons dans les missiles sol- air récemment saisis par les forces ukrainiennes après un affrontement avec des séparatistes ; ils comportaient toujours leurs papiers d’identification officiels, qui ont révélé qu’il y a deux mois seulement, ces missiles étaient conservés sur une base de défense aérienne russe de la région de Krasnodar. Je fais observer qu’il s’agit précisément du type de missiles sol-air qui a été utilisé pour abattre un avion de transport militaire ukrainien la semaine dernière, tuant à cette occasion la totalité des 49 passagers. Enfin, nous les avons dans le redéploiement alarmant de milliers de soldats et de matériel militaire russes le long de la frontière avec l’Ukraine, au point le plus proche depuis l’invasion de la Crimée en février.
La Russie a tenté – erronément – de dépeindre les événements qui se déroulent dans l’est de l’Ukraine sous les traits d’une crise humanitaire. Elle a fait l’erreur de se poser en défenseur des droits et en justicier des plus vulnérables, l’armée russe et ses hommes figurant en organisation d’aide humanitaire. Mais cette opération de secours de la Russie déploie des soldats, et non des médecins. Elle manoeuvre des véhicules blindés de transport de troupes, et non des tentes de secours. Elle fournit des missiles sol-air, et non pas des plats préparés.
La Russie affirme que 100 000 personnes ont fui l’Ukraine pour se réfugier en Russie. Or, Mme Amos, la Secrétaire générale adjointe aux affaires humanitaires, a informé le Conseil dans une séance d’information, la semaine dernière, que leur nombre réel était d’environ 4 600. Je n’ai nullement l’intention de minimiser les très réelles conséquences humanitaires de la crise que connaissent l’est de l’Ukraine et la Crimée, et notamment le fait que des dizaines de milliers de personnes sont déplacées à l’intérieur des frontières ukrainiennes. Mais nous devons être objectifs, nous appuyer sur des faits concrets, et dire ce qui est quant à ce qui a provoqué ces conséquences humanitaires désastreuses, à savoir l’appui politique et militaire que la Russie continue de fournir à la violence des séparatistes armés.
Or, il est remarquable que, alors même qu’ils essuient les attaques des séparatistes et cette propagande incendiaire, le Gouvernement et le peuple ukrainiens font montre, en paroles et en actes, d’une volonté sans faille de trouver une solution pacifique. Les Ukrainiens ont élu un dirigeant, Petro Poroshenko, qui a fait campagne en faveur de l’instauration d’une Ukraine pacifique, démocratique et unifiée. Depuis qu’il a pris ses fonctions, le Président Poroshenko s’efforce constamment d’atteindre cet objectif par la voie du dialogue et de la réconciliation, y compris face aux provocations et à la violence. Il a lancé l’idée – qu’il a appliquée – d’un cessez-le-feu unilatéral afin de permettre aux séparatistes de déposer les armes. Il a proposé de garantir un libre passage aux combattants russes pour qu’ils puissent rentrer dans leur pays. Et il a proposé une amnistie aux séparatistes soutenus par la Russie qui n’ont pas commis de crimes graves.
Nous nous félicitons des informations reçues hier selon lesquelles des représentants des Gouvernements russe et ukrainien et des groupes séparatistes se sont réunis, à la suite de quoi certains dirigeants séparatistes ont annoncé qu’ils respecteraient le cessez-le-feu. Le Président Poroshenko et son gouvernement ont pris des mesures de décentralisation du pouvoir, de renforcement de la transparence, de lutte contre la corruption et de protection des droits des minorités. Et il a proposé un plan de paix juste et global. En somme, le peuple ukrainien et le Président ont fait tout ce qu’on pouvait attendre d’eux pour essayer de faire la paix conformément au droit et aux normes internationaux.
Ces derniers jours, la Russie a continué d’avoir un comportement contradictoire. D’un côté, le Président Poutine exprime son appui au cessez-le-feu décrété par le Président Poroshenko et son intention d’œuvrer à un règlement pacifique de la situation. Nous nous en félicitons. Cependant, d’un autre côté, la Russie a récemment redéployé un nombre important de militaires à la frontière et intensifié ses envois d’armes et de matériel aux séparatistes, dont un nombre croissant sont des citoyens russes qui n’ont aucun lien personnel avec l’est de l’Ukraine.
Le Président Poutine a également mis des troupes russes en alerte et lancé un nouvel exercice militaire inattendu. Ses déclarations récentes sont bienvenues, mais il est difficile de prendre au sérieux quelques paroles de réconciliation lorsqu’elles s’accompagnent d’actes qui visent clairement à attiser les tensions. Il est encore plus difficile de prendre ces paroles au sérieux compte tenu du fait que la Russie a déjà violé plusieurs fois ses engagements en faveur du dialogue et de la paix, notamment après la déclaration de Genève en avril et les promesses faites par le Président Poutine au Président Obama en Normandie au début du mois. Ainsi, si nous nous félicitons des déclarations plus conciliantes faites par le Président Poutine ces derniers jours, ces paroles doivent maintenant se concrétiser par une évolution véritable de la réalité sur le terrain. Cette réalité sera déterminée plus efficacement par des acteurs objectifs, notamment des missions internationales d’observation. Néanmoins, les Russes et les séparatistes armés qu’ils soutiennent ne semblent pas accepter les faits ou la présence d’observateurs.
En ce moment même, huit observateurs de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe sont en captivité, leur crime étant d’avoir été témoins des faits et d’avoir recueilli des données factuelles, des actes qui ne sont dangereux que pour ceux qui voudraient déformer ces faits. Les observateurs sont détenus depuis près d’un mois – un mois – par des séparatistes à Donetsk et Lougansk, sans justification. Pour ces crimes, il doit y avoir des conséquences. Il doit également y avoir des conséquences pour les violations persistantes par la Russie des principes fondamentaux énoncés dans la Charte des Nations Unies et pour le non- respect de ses engagements, ainsi que pour les crimes et sévices généralisés commis par les séparatistes armés soutenus par la Russie – d’une part, parce que les victimes de ces crimes méritent que justice leur soit rendue, et, d’autre part, parce que nous avons constaté qu’à moins que la Russie ressente une pression véritable en faveur d’une désescalade de la situation, elle continuera d’opter pour l’escalade de la crise.
Nous avons exhorté la Russie à contribuer à un règlement politique de la crise en Ukraine, mais si elle persiste dans sa tactique d’escalade, elle doit en subir les conséquences.
M. Wilson (Royaume-Uni) (parle en anglais) : Je remercie le Sous-Secrétaire général, M. Zerihoun, et le Sous-Secrétaire général, M. Šimonović, des exposés que nous venons d’entendre et des travaux minutieux entrepris par la mission de surveillance des droits de l’homme de l’ONU en Ukraine.
Je vais commencer par le positif. Le Royaume- Uni appuie fermement le plan de paix présenté par le Président Poroshenko le 20 juin. Ce plan fait fond sur les mesures récentes prises par le Gouvernement ukrainien aux fins de la mise en œuvre de la déclaration de Genève du 17 avril. Le Gouvernement a notamment organisé trois cycles de dialogue national et présenté un projet de loi d’amnistie pour les personnes qui choisiront de rendre leurs armes illégales et de quitter les bâtiments occupés illégalement. Le Gouvernement ukrainien a également lancé une réforme constitutionnelle et un processus de décentralisation, et il a garanti que la langue russe serait protégée et qu’un statut spécial lui serait octroyé. Le plan de paix contient une série de propositions sincères de vaste portée, qui ouvrent la voie à une désescalade de la situation. Il est maintenant temps que les autres acteurs y répondent positivement.
Nous nous félicitons que le plan de paix du Président Poroshenko a au moins reçu un certain appui de la part de la Russie. Le Président Poutine a décrit la déclaration de cessez-le-feu comme constituant une avancée indéniable vers le règlement de la crise, et il a déclaré que la Russie appuierait certainement ces plans. Nous prenons également acte des informations en provenance de Moscou selon lesquelles le Président Poutine a demandé au Parlement russe de révoquer le droit d’intervention militaire en Ukraine. Même si nous rejetons avec insistance toute suggestion selon laquelle la décision du Parlement russe conférerait la moindre légitimité à l’annexion illégale de la Crimée par la Russie, cela enverrait un signal positif qui doit être renforcé par des mesures constructives.
La Russie doit maintenant joindre les actes à la parole en mettant en place des mesures de lutte contre l’instabilité dans le sud et l’est de l’Ukraine. Elle doit notamment, premièrement, mettre en place des mesures efficaces de prévention du flux continu de combattants, d’armes et de matériel illégaux depuis la Russie vers l’Ukraine ; deuxièmement, faire jouer son influence sur les groupes séparatistes pour les amener à renoncerà la violence, à déposer les armes et à s’engagent à défendre leurs revendications par l’intermédiaire des mécanismes démocratiques pacifiques qui s’offrent à eux ; et, troisièmement, poursuivre le retrait des forces militaires présentes près de la frontière ukrainienne.
La Russie a créé une situation de fait sur le terrain en fournissant un appui direct aux groupes séparatistes armés. Elle doit maintenant inverser la dynamique qu’elle a créée en prévenant l’arrivée d’armes et de combattants en Ukraine et en usant de son influence sur les groupes séparatistes armés afin qu’ils mettent un terme à leurs activités illégales. Sinon, comme ils l’ont notamment réitéré durant la réunion du Conseil des affaires étrangères qui s’est tenue hier, les pays de l’Union européenne adopteront de nouvelles mesures à l’encontre de la Russie.
J’en viens maintenant au dernier rapport sur la surveillance des droits de l’homme. Le Gouvernement ukrainien collabore de manière constructive avec la mission, et il a manifesté son attachement à la transparence et au respect des droits fondamentaux de ses citoyens. Il est décevant qu’une fois de plus, des sources du Gouvernement russe aient décidé de critiquer le rapport et de remettre en question le professionnalisme et l’intégrité des observateurs et du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme dans son ensemble. Nous encourageons le Gouvernement ukrainien à répondre aux préoccupations soulevées dans le rapport de la mission concernant l’absence de coopération entre les six enquêtes sur les événements tragiques survenus le 2 mai à Odessa, que M. Šimonović vient de qualifier « d’inaction grave ». Nous exhortons également le Gouvernement à garantir la sécurité de toutes les missions diplomatiques. Nous condamnons sans réserve l’attaque perpétrée contre l’Ambassade de Russie à Kiev le 14 juin. Il est essentiel de rétablir la confiance dans l’état de droit en Ukraine. Le Royaume- Uni, de même que ses partenaires, est disposé à apporter son appui au Gouvernement ukrainien dans les réformes entreprises dans ces domaines.
Le dernier rapport de la mission souligne le rôle joué par les groupes armés illégaux à Donetsk et Lougansk pour empêcher de nombreux électeurs de participer à l’élection présidentielle du 25 mai dans ces régions. Les tactiques des séparatistes consistant à menacer, battre et enlever des membres du personnel de la Commission électorale, à détruire des listes électorales et des urnes et à prendre le contrôle de bureaux de vote démontrent un mépris certain de la démocratie et une détermination à empêcher la population de ces régions de se prononcer sur l’avenir de l’Ukraine.
Comme le souligne le dernier rapport, les agissements des groupes armés illégaux ont provoqué une détérioration de la situation des droits de l’homme à Donetsk et Lougansk. Après une prise de contrôle violente, ces groupes ne fournissent aucun service public et endommagent les infrastructures vitales. Nous sommes profondément préoccupés par les conclusions de la mission, qui signale des enlèvements, des détentions, des mauvais traitements, des cas de torture, des pillages et des meurtres commis par ces groupes contre la population civile.
La mission de surveillance a signalé 222 cas d’enlèvement et de détention par les groupes armés illégaux. Elle a également enregistré de nombreuses allégations de mauvais traitements et de torture, de privation de nourriture des prisonniers, de passages à tabac, d’électrocution et même d’amputations, pratiques qui seraient toutes imputables à des groupes pro-russes. Il n’est pas surprenant que le rapport de la mission conclue qu’une atmosphère de peur et d’intimidation règne dans les zones qui sont sous le contrôle des séparatistes.
Le rapport de la mission de surveillance cite des preuves indéniables du recours à la propagande ou à la désinformation pour générer un climat de crainte et d’instabilité en Ukraine. À cette fin, les médias russes utilisent notamment des photographies retouchées et des vidéos utilisées à mauvais escient. Le rapport note, par exemple, que des images ont été utilisées pour étayer des allégations selon lesquelles l’Ukraine utiliserait des hélicoptères arborant des symboles de l’ONU, allégations que la Fédération de Russie a elle-même présentées dans cette salle, mais que ces hélicoptères ont été filmés précédemment et dans d’autres pays. Par exemple, la photographie d’un hélicoptère présentée par la Russie comme preuve à l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) a en fait été prise en Côte d’Ivoire en 2011. Il y a de nombreux autres exemples de désinformation, notamment des images – qui ont été filmées en novembre 2004 en Iraq – qui prétendent montrer que l’armée ukrainienne utilise des armes incendiaires. Récemment, le Représentant permanent de la Russie nous a tous exhortés à suivre les médias russes pour avoir un aperçu exact de la situation en Ukraine. Sur la base des preuves présentées dans ce rapport, il me semble que la plupart d’entre nous auraient un avis différent sur la question.
Le dernier rapport de la mission confirme également que l’introduction de lois russes en Crimée compromet l’exercice des libertés et des droits fondamentaux des citoyens ukrainiens.
Les pro-Ukrainiens sont ciblés et intimidés par des mesures croissantes de discrimination, en particulier dans les domaines de l’éducation et de l’emploi. Nous rappelons que le Royaume-Uni ne reconnaîtra et n’acceptera pas l’annexion illégale de la Crimée par la Russie.
Au cours de plusieurs séances successives du Conseil de sécurité, nous avons pu constater une détérioration de la situation sécuritaire dans certaines parties de l’Ukraine, provoquée par des groupes séparatistes armés illégaux. Nous avons vu des preuves grandissantes de violations des droits de l’homme, dues en grande partie aux actions de ces groupes armés. Et nous avons été les témoins d’une situation humanitaire de plus en plus difficile. Le plan de paix présenté par le Président Poroshenko offre une chance de sortir de cette spirale. Les pourparlers tenus hier à Donetsk par l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe semblent avoir créé un climat propice à ce plan. Le Royaume-Uni exhorte le Conseil à apporter un soutien fort et uni à ce plan. Il prie instamment le Gouvernement ukrainien de favoriser sa mise en œuvre, et il engage la Fédération de Russie à donner suite à ses déclarations positives par des actions positives qui mettent fin à l’octroi de tout appui politique et pratique aux groupes armés séparatistes et permettent le lancement d’un processus de dialogue et d’engagement démocratique.
M. Lamek (France) : Je remercie moi aussi M. Zerihoun pour sa présentation ainsi que M. Šimonović pour le troisième rapport de la mission de surveillance des droits de l’homme conduite en Ukraine.
Je comprends que les autorités ukrainiennes ont accepté le renouvellement du mandat de la mission pour les trois prochains mois. On ne peut que s’en réjouir. Cette mission est une source d’informations inestimables en termes de vision globale de la situation enUkraine.
Le rapport présenté par M. Šimonović couvre un évènement important dans l’histoire du pays : l’élection de Petro Poroshenko comme nouveau Président de l’Ukraine. En dépit des opérations d’obstruction à l’exercice de la liberté d’expression des populations à l’est, le scrutin s’est déroulé de manière régulière sur le reste du territoire ukrainien. Les normes internationales ont été respectées, comme cela a été souligné par l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE). M. Poroshenko est ainsi le nouveau Président légitime de l’Ukraine et il a été reconnu comme tel. Ses échanges en Normandie lors des cérémonies commémorant le débarquement du 6 juin 1944 ou bien sa cérémonie d’investiture en témoignent. C’est une étape importante, car avec cette élection un processus de normalisation politique a vu le jour.
Ce troisième rapport de M. Šimonović met en lumière les pas importants accomplis par le Gouvernement ukrainien, notamment dans le cadre de la mise en œuvre de l’Accord de Genève du 17 avril. Des tables rondes incluant diverses composantes de la société ukrainienne ont été organisées ; un projet de loi, intitulé « Mémorandum sur la paix et la concorde » et prévoyant des mesures de décentralisation et des garanties sur le statut de la langue russe, a été adopté par la Rada.
Le rapport relève par ailleurs que des enquêtes sont en cours sur les graves violations des droits de l’homme commises durant les évènements de la place Maïdan, ainsi que celles survenues le 2 mai à Odessa. Si toute la lumière sur ces tragiques évènements n’a pas encore été faite, il convient de souligner que des efforts ont été accomplis dans ce domaine également. La coopération de l’Ukraine sur ce sujet avec la mission d’observation des droits de l’homme est également importante. Ces éléments prouvent que, malgré les nombreuses difficultés rencontrées, l’Ukraine est en train d’accomplir sa transition politique.
Malgré ces développements positifs, l’est de l’Ukraine – Donetsk et Lougansk – a connu une dégradation générale de la situation sécuritaire et des droits de l’homme, ainsi que de la situation humanitaire, du fait des groupes armés séparatistes illégaux qui y sévissent. Ce troisième rapport souligne ainsi que les arrestations arbitraires, les enlèvements, les tortures et les meurtres ne touchent plus seulement les journalistes, les agents publics ou les militants des droits de l’homme, mais maintenant la population en général. M. Šimonović vient de nous dire que cette situation s’est encore dégradée ces dernières semaines. À cet égard, je rappelle que les huit observateurs de l’OSCE sont toujours détenus depuis la fin mai par les séparatistes. Cette entrave à la mission de l’OSCE est inacceptable.
Ces violences sont, comme cela est désormais avéré, alimentées et entretenues de l’extérieur. La présence de ces éléments étrangers doit cesser, de même que doit cesser tout soutien extérieur qui leur est apporté. Le contrôle des flux transfrontaliers est indispensable. Dans ces conditions, il est de la responsabilité du Gouvernement ukrainien de prendre les mesures adéquates et proportionnées, dans le respect des normes internationales, pour combattre ces groupes armés, protéger les populations et assurer le contrôle de ses frontières. Ces opérations ont des répercussions sur l’accès des populations aux services de base. Certaines sont contraintes de fuir les zones d’affrontement et se rendent dans d’autres régions d’Ukraine ou en Fédération de Russie. Des besoins humanitaires existent, nul ne le nie. C’est pourquoi les acteurs humanitaires sur le terrain sont actifs afin d’y répondre. La coordination de l’ensemble de ces réponses, entre les agences mais également avec les autorités ukrainiennes, est primordiale.
En effet, le Gouvernement ukrainien a pris lui aussi toutes les mesures nécessaires pour organiser l’accueil des populations chassées de leurs foyers. Je relève que toutes les régions d’Ukraine ont répondu à cet appel à la solidarité, sans distinction est/ouest. Le sentiment d’unité et d’appartenance à un destin commun existe bel et bien en Ukraine.
Comme le souligne le rapport de la mission de surveillance, l’imposition de la loi russe en Crimée, illégalement annexée par la Russie, a créé une situation d’instabilité juridique qui entrave l’exercice des droits de l’homme et des libertés fondamentales des populations locales. Des discriminations à l’embauche sont courantes. Les dirigeants et les défenseurs des droits de la communauté tatare sont poursuivis. Il est de plus en plus difficile de conserver deux nationalités, et refuser de le signaler aux autorités russes est maintenant passible de poursuites criminelles. Les droits fondamentaux de ces personnes sont bafoués.
Face à la crise très grave que l’Ukraine traverse, les autorités de Kiev ont consenti de nombreux gestes de bonne volonté. Nous nous félicitons ainsi de la décision du Président Poroshenko de proposer un plan de paix en 15 points et d’instaurer un cessez-le feu pour une semaine. Nous notons avec satisfaction que la trêve proposée par le Président Poroshenko a été acceptée hier par les groupes armés dans le cadre des rencontres tripartites Ukraine-Russie-OSCE lancées après les rencontres de Normandie. Nous encourageons la poursuite de ce dialogue et nous réitérons notre appel à ce que les groupes armés dans l’est de l’Ukraine déposent les armes, évacuent tous les bâtiments publics occupés illégalement et s’engagent franchement dans le processus de dialogue politique leur permettant d’exprimer de manière légale et pacifique leurs revendications.
Dans ces conditions, tout doit être fait pour favoriser le retour au calme, condition sine qua non au lancement d’un dialogue politique. Cela implique, je le répète, de contrôler la frontière russo-ukrainienne afin que les infiltrations illégales de matériels et d’hommes armés cessent. L’ensemble de la communauté internationale et tous les membres de notre Conseil doivent œuvrer en ce sens et appuyer les efforts de Kiev. Nous notons avec satisfaction que l’annonce d’un cessez-le-feu a ainsi été soutenue par le Président russe. I1 est crucial que ce soutien se traduise également sur le terrain au moment où on entend parler, et c’est préoccupant, de nouveaux exercices militaires de grande amplitude. Dans cet esprit nous considérons comme encourageante l’annonce ce matin d’une demande du Président russe adressée au Conseil de la Fédération de Russie d’annuler l’autorisation du recours à l’armée russe en territoire ukrainien.
Aujourd’hui, pour l’Ukraine, il n’y a pas d’autre chemin à suivre que celui de l’unité et de la réconciliation. L’Union européenne et la France se tiennent prêtes à lui apporter tout leur soutien dans ses efforts, comme l’ont rappelé les chefs d’État et de gouvernement lors de leur sommet du 27 mai dernier.
M. Laro (Nigéria) (parle en anglais) : Je remercie les intervenants pour leur mise à jour sur l’évolution de la situation politique et des droits de l’homme en Ukraine. S’agissant de l’évolution de la situation politique, nous notons avec satisfaction qu’après des mois de conflit et de tensions croissantes, le peuple ukrainien a désormais la possibilité de résoudre par la voie pacifique la crise qui a déstabilisé son pays.
Nous avons étudié avec soin le plan de paix en 15 points du Président Poroshenko. Il nous semble constituer la meilleure manière d’aller de l’avant, dans les circonstances actuelles, pour régler les diverses questions qui ont abouti au conflit dans l’est de l’Ukraine. Nous exhortons le peuple ukrainien et la communauté internationale à appuyer ce plan. Les éléments particulièrement importants dudit plan sont le cessez-le-feu d’une semaine, les mesures visant à décentraliser le pouvoir, la protection de la langue russe et la réforme constitutionnelle.
Nous nous félicitons de l’appui au cessez-le-feu exprimé par le Président de la Russie, Vladimir Poutine. Nous sommes convaincus que cela a joué un rôle dans la décision des séparatistes pro-russes de respecter le cessez-le-feu. C’est un développement positif qui fait naître l’espoir de voir la fin des combats qui ont causé des dégâts majeurs, fait des centaines de morts et de blessés, déplacé des centaines de milliers de personnes et compromis leurs moyens de subsistance. Nous constatons avec satisfaction que le cessez-le-feu est respecté, puisque le Gouvernement a annoncé qu’il n’y avait pas eu de combats dans l’est de l’Ukraine depuis hier.
Nous prenons favorablement acte de la promesse faite par les rebelles de libérer les observateurs de l’Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe (OSCE) qui sont retenus en otage depuis mai. C’est un fait important. Selon les informations fournies par les médias, un représentant des rebelles aux négociations qui se sont tenues hier à Donetsk, conformément au plan de paix du Président Poroshenko, a affirmé que la libération des observateurs de l’OSCE serait « l’une des mesures qui permettraient d’améliorer la compréhension mutuelle des deux parties ». Nous souhaitons que les observateurs de l’OSCE soient libérés sans conditions ni délai.
En définitive, les perspectives d’un règlement pacifique de la crise en Ukraine sont désormais meilleures. Nous espérons que le peuple ukrainien saura tirer parti de la dynamique et du climat de bonne volonté créés par le plan de paix du Président Poroshenko. Nous avons systématiquement encouragé au dialogue, seul moyen de régler la crise en Ukraine, et nous sommes heureux de constater que ce dialogue a maintenant commencé.
S’agissant des droits de l’homme, nous nous sommes penchés avec attention sur le troisième rapport de la mission de surveillance des droits de l’homme de l’ONU en Ukraine portant sur la période allant du 7 mai au 7 juin. Nous prenons acte du fait que la période considérée dans ce rapport est antérieure à l’annonce du plan de paix du Président Poroshenko. Le rapport établit un lien entre la détérioration de la situation des droits de l’homme dans les régions de Donetsk et Lougansk et le conflit dans l’est de l’Ukraine. Nous condamnons toutes les violations des droits de l’homme, notamment les enlèvements, les actes de torture, les disparitions forcées et les détentions illégales. Les auteurs de ces violations doivent être traduits en justice, afin de faire savoir haut et fort que l’impunité ne sera pas tolérée. Nous espérons que, grâce au cessez-le-feu actuel et, à terme, à l’arrêt des hostilités, la situation des droits de l’homme dans l’est de l’Ukraine commencera à s’améliorer.
Pour terminer, nous soulignons qu’il est nécessaire que toutes les parties concernées respectent la souveraineté, l’intégrité territoriale et l’indépendance de l’Ukraine, conformément aux principes consacrés par la Charte des Nations Unies.
Mme Lucas (Luxembourg) : Je remercie à mon tour le Sous-Secrétaire général aux affaires politiques, M. Tayé-Brook Zerihoun, et le Sous-Secrétaire général des Nations Unies aux droits de l’homme, M. Ivan Šimonović, pour leurs exposés.
Le Luxembourg se félicite de l’action déterminée engagée par le Président ukrainien démocratiquement élu, Petro Poroshenko, afin de rétablir la paix et la stabilité dans l’est de l’Ukraine. Nous saluons sa décision de faire un premier pas essentiel en vue d’une désescalade en annonçant un plan de paix en 15 points, très complet, et en mettant en place un cessez-le-feu unilatéral pour permettre la mise en œuvre du plan de paix. Cette décision a déjà eu un effet positif puisqu’elle a amené hier soir un dirigeant des séparatistes de la région de Donetsk à répondre à cette initiative présidentielle en s’engageant de son côté à observer un cessez-le-feu d’ici à vendredi prochain. Nous saluons le rôle constructif joué par la Présidence en exercice de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) dans ce contexte.
Un rôle particulier pour parvenir à une désescalade durable de la situation revient à la Russie. Nous l’appelons à utiliser toute son influence sur les séparatistes afin que ceux-ci cessent la violence, déposent les armes une fois pour toutes et relâchent les observateurs de l’OSCE. Nous appelons également la Russie à prendre des mesures efficaces afin d’interrompre le flux continu d’armes et de combattants vers l’Ukraine et à créer ainsi des conditions propices à la mise en œuvre du plan de paix annoncé vendredi par le Président Poroshenko.
Une solution politique est essentielle pour améliorer les conditions de vie des Ukrainiens vivant dans les zones contrôlées par les groupes armés séparatistes dans les régions de Lougansk et de Donetsk. Le Luxembourg partage la préoccupation du Sous-Secrétaire général aux droits de l’homme face à l’effondrement de l’ordre public et du respect de la loi dans ces zones. Nous sommes très préoccupés par le nombre croissant d’enlèvements, de détentions, de cas de torture et de meurtres commis par les séparatistes. Les crimes et abus de droits de l’homme ne ciblent plus seulement des hommes politiques locaux, des activistes et des journalistes indépendants ; ils concernent désormais également la population de ces régions en général.
L’effet combiné de la présence de groupes armés commettant des actes illégaux et de l’intensification des échanges de tirs entre les séparatistes et les forces armées ukrainiennes a eu un impact négatif sur les droits de l’homme des populations vivant dans les régions sous le contrôle des séparatistes. Les services publics sont fortement perturbés. Nous sommes de même préoccupés par le nombre de personnes déplacées internes qui ne cesse d’augmenter.
La situation en Crimée est elle aussi préoccupante. Les rapports mensuels du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme démontrent que la situation des droits de l’homme s’est gravement détériorée depuis la tenue du référendum illégal du 16 mars et l’annexion par la Russie. Les habitants de Crimée qui sont favorables à l’unité de l’Ukraine sont intimidés et font l’objet de discriminations. Les libertés fondamentales garanties par la loi ukrainienne sont remises en cause, et les minorités vivent dans une atmosphère de peur.
Le Luxembourg reste fermement attaché à la souveraineté, à l’indépendance politique, à l’unité et à l’intégrité territoriale de l’Ukraine à l’intérieur de ses frontières internationalement reconnues, principes fondamentaux qui ont été affirmés par l’Assemblée générale des Nations Unies, dans sa résolution 68/262 adoptée le 27 mars dernier. En attendant la restauration de l’intégrité territoriale de l’Ukraine, nous appelons les autorités contrôlant la Crimée à permettre l’accès aux observateurs internationaux, notamment à la mission de surveillance des droits de l’homme de l’ONU en Ukraine.
Le troisième rapport du Haut-Commissariat aux droits de l’homme met en exergue les mesures concrètes prises par le Gouvernement ukrainien pour remplir ses obligations en vertu de la déclaration conjointe adoptée le 17 avril à Genève par l’Ukraine, la Russie, les États-Unis et l’Union européenne. Un deuxième pas essentiel a été fait avec la présentation du plan de paix et la mise en place d’un cessez-le-feu.
La communauté internationale attend de la Russie qu’elle envoie elle aussi un signal clair démontrant sa volonté d’arriver à une véritable désescalade. Outre un meilleur contrôle de sa frontière et la condamnation de la violence des groupes armés dans l’est de l’Ukraine, nous appelons la Russie à poursuivre le retrait de ses troupes de la frontière ukrainienne et à s’abstenir de procéder à des concentrations de troupes à la frontière. Nous appelons également à l’annulation du mandat du Conseil de la Fédération autorisant l’utilisation des forces armées russes sur le territoire de l’Ukraine. Nous prenons note de la démarche qui a été engagée en ce sens aujourd’hui par le Président de la Fédération de Russie.
L’élection d’un Président dont la légitimité est incontestable, le dialogue qui s’est instauré entre Kiev et Moscou depuis l’élection du Président Poroshenko, son annonce d’un plan de paix et la déclaration d’un cessez-le-feu sont des éléments encourageants. Nous espérons qu’ils constitueront un tournant décisif en vue de trouver une solution politique à la crise en Ukraine. Nous espérons qu’ils constitueront un tournant décisif en vue de trouver une solution politique à la crise en Ukraine. Il faut maintenant mobiliser toutes les bonnes volontés pour saisir cette opportunité et mettre un terme à une crise qui a déjà causé trop de victimes et de souffrances parmi la population civile dans l’est et le sud de l’Ukraine.
M. Wang Min (Chine) (parle en chinois) : Je remercie les Sous-Secrétaires généraux Zerihoun et Simonović de leurs exposés.
Ces derniers temps, certaines régions de l’Ukraine ont été continuellement en proie à l’agitation, au conflit armé et à la violence, faisant de nombreuses victimes et d’importants dégâts matériels. La Chine est profondément troublée par cette situation. Le conflit et la violence ont entraîné un accroissement du nombre de personnes déplacées en Ukraine et provoqué une pénurie d’eau, d’électricité et de vivres. Nous espérons que l’Organisation des Nations Unies et les institutions internationales des droits de l’homme et les organismes humanitaires adhèreront au principe de neutralité et d’objectivité dans le cadre de leur travail.
S’agissant de la question ukrainienne, je voudrais souligner les points suivants. Premièrement, une solution politique est le seul moyen de régler la crise en Ukraine.
Nous prenons acte de l’annonce d’un plan de paix et d’un cessez-le-feu unilatéral par Président Poroshenko, et de la déclaration d’ un cessez-le-feu par les groupes armés. La Chine se félicite de toutes les initiatives destinées à apaiser les tensions en Ukraine et espère que toutes les parties garderont le calme, feront preuve de retenue et saisiront cette occasion pour instaurer la confiance mutuelle et appliquer concrètement le cessez-le-feu dans les régions en proie au conflit, afin de créer les conditions favorables à un règlement politique.
Deuxièmement, la crise en Ukraine a des racines historiques et est d’une extrême complexité. Un règlement global de la crise appelle un examen de la situation dans son ensemble. La solution doit être durable et équilibrée, tenir compte des droits légitimes et des intérêts de toutes les populations en Ukraine, répondre aux préoccupations légitimes de tous et maintenir un équilibre entre les intérêts de toutes les parties.
Troisièmement, les acteurs pertinents de la communauté internationale collaborent activement sur la question ukrainienne. Cela est susceptible de répondre aux préoccupations de toutes les parties concernées, de régler leurs désaccords par des moyens politiques pacifiques et d’éviter le conflit et l’affrontement. Cette dynamique doit être maintenue. La déclaration conjointe adoptée par les diplomates de quatre pays à Genève et la feuille de route de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), qui reflètent la sagesse et la bonne volonté de toutes les parties, doivent être effectivement et intégralement mises en œuvre.
Quatrièmement, un règlement rapide et approprié de la crise en Ukraine n’est pas que dans l’intérêt du pays et de son peuple mais aussi dans celui de la paix et de la stabilité régionales. La Chine respecte la souveraineté et l’intégrité territoriale de tous les pays, y compris l’Ukraine, et nous continuerons d’avoir une position juste et objective et de participer activement à l’examen de toute proposition et initiative aux fins de l’apaisement des tensions et de la recherche d’un règlement politique. Nous jouerons un rôle constructif dans ce processus.
M. Oh Joon (République de Corée) (parle en anglais) : Je voudrais remercier les Sous-Secrétaires généraux Zerihoun et Simonović de leurs exposés.
La République de Corée se félicite du dévouement avec lequel la Mission de surveillance des droits de l’homme de l’ONU en Ukraine s’acquitte de ses tâches, ainsi que de son rapport instructif et détaillé.
Le dernier rapport de la mission de surveillance des droits de l’homme de l’ONU en Ukraine identifie un certain nombre de violations inquiétantes des droits de l’homme en Ukraine, particulièrement dans l’est du pays. Nous notons avec une vive préoccupation que la situation des droits de l’homme à Donetsk et à Lougansk n’a cessé de se détériorer, avec une recrudescence de la violence et des activités criminelles des groupes armés illégaux. Nous sommes particulièrement découragés d’apprendre que le chaos et la violence, notamment les enlèvements, les détentions arbitraires, la torture, le harcèlement et les meurtres touchent maintenant l’ensemble de la population de cette partie du pays. En outre, les affrontements qui se poursuivent entre les groupes armés et les forces ukrainiennes aggravent davantage la situation, et se soldent par un accroissement du nombre de victimes et de personnes déplacées et la destruction d’infrastructures vitales.
Eu égard à cette situation explosive, nous saluons les efforts faits par le Gouvernement ukrainien pour stopper l’escalade de la violence et chercher un règlement pacifique de la situation, comme l’atteste le plan de paix du Président Poroshenko. Nous appelons les groupes armés illégaux à faire preuve de réciprocité face à ces efforts en cessant immédiatement tous les actes de violence et en déposant les armes. Il importe de veiller à la pleine mise en œuvre du plan de paix en vue d’un règlement durable de la crise. À cet égard, nous nous félicitons du soutien apporté au plan de paix par le Président Poutine, de la Russie, et réaffirmons dans le même temps qu’un processus politique inclusif est le fondement essentiel d’un avenir stable et démocratique pour tous les Ukrainiens. Nous encourageons le Gouvernement ukrainien, s’appuyant sur la légitimité du Président démocratiquement élu, à mener des réformes globales en réponse aux vœux de tous les Ukrainiens. La protection de toutes les minorités ethniques et linguistiques devrait être une priorité de ce processus.
Enfin, nous sommes encouragés par les efforts diplomatiques en cours en vue de la stabilisation de l’Ukraine, en particulier ceux faits par l’Organisation des Nations Unies, l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, l’Union européenne et les partenaires bilatéraux. Nous encourageons toutes les parties à poursuivre ces efforts en vue de trouver un règlement politique pacifique.
Mme Perceval (Argentine) (parle en espagnol) : Je remercie M. Tayé-Brook Zerihoun et M. Ivan Simonoviç de leurs exposés sur la situation en Ukraine.
L’Argentine va axer sa déclaration sur le thème central de la séance d’aujourd’hui, à savoir l’analyse du rapport de la mission de surveillance des droits de l’homme de l’ONU en Ukraine.
À cet égard, comme nos collègues, nous sommes préoccupés par la détérioration de la situation dans l’est de l’Ukraine. Les conditions de vie de la majorité de la population, les actions menées par les groupes armés, le nombre accru de personnes armées et d’armes, les actions unilatérales, l’intensification des affrontements et des violations des droits de l’homme semblent se répandre. Il n’y a pas de doute que l’on a réalisé qu’il faut de toute urgence y remédier.
Le nombre de victimes humaines augmente au fil des affrontements violents, et la vie et les droits des habitants des régions concernées sont menacés d. Il n’y a donc pas lieu d’être optimistes, mais je reste persuadée que nous sommes face à un scénario dans lequel on est conscients qu’il faut accorder la priorité à l’ouverture d’un dialogue franc et à la recherche d’un règlement politique de la crise.
Toutefois, nous ne saurons ignorer les violations des droits de l’homme décrites dans le rapport du Haut- Commissariat aux droits de l’homme.
Les meurtres, la torture, les enlèvements, le harcèlement, les détentions illégales et l’intimidation sont injustifiables. Toutes les allégations doivent donner lieu à une enquête et les auteurs de tels actes doivent être traduits en justice. Il faut prendre toutes les mesures qui s’imposent pour protéger les droits de l’homme de tous les Ukrainiens et garantir leur plein exercice, quelle que soit l’appartenance ethnique, linguistique, culturelle, religieuse ou la situation géographique des personnes concernées.
Nous constatons une recrudescence de la violence et pouvons voir ses effets sur les habitants des zones touchées par les combats, ce qui a clairement pour conséquence directe une forte augmentation du nombre de personnes fuyant la région, notamment à Donetsk, et de personnes déplacées. L’accès à l’eau potable à Sloviansk et dans d’autres parties de la région de Donetsk, de même que l’accès limité aux services de santé, les coupures d’électricité et de gaz, ainsi que les problèmes d’approvisionnement en denrées alimentaires et articles médicaux, rendent très difficiles les conditions de vie pour la population – ce qui, je le répète, impose d’adopter une attitude positive afin de trouver une solution à la crise.
Cette situation impose également – et je conclurai ici mes observations sur le plan en 15 points présenté par le Gouvernement ukrainien, que l’Argentine apprécie et appuie – que les discussions sur ce plan, en particulier celles concernant les points 14 et 15, ne portent pas seulement sur le dialogue entre l’État, les régions, les groupes armés et les différentes minorités mais également sur le comportement du marché. En effet, d’après ce que vient de nous dire M. Šimonović, qui nous a parlé d’une très grave crise humanitaire qui inflige des souffrances énormes à de vastes groupes de population, il apparaît, et le rapport qui nous a été distribué le confirme, que les prix des denrées alimentaires ont connu une hausse vertigineuse, avec notamment des fruits et légumes de saison qui sont désormais quatre à cinq fois plus chers.
On sait bien qu’il y a toujours des acteurs du marché peu scrupuleux qui profitent des crises, qu’elles soient géographiques, économiques, sociales ou de sécurité. Ces acteurs, qui ne sont pas assis parmi nous alors que nous essayons de concilier nos différences, nous ne savons pas où ils sont, mais ce que nous savons c’est qu’ils spéculent sur la hausse des prix des denrées alimentaires. Ni l’action de Valerie Amos, ni celle du Bureau de la coordination des affaires humanitaires ne suffiront si nous restons les bras croisées face à de telles attitudes parfaitement condamnables du point de vue moral. Nous devons en débattre dans les instances appropriées, c’est-à-dire dans d’autres organes de l’ONU.
Nous estimons qu’il est indispensable de tout mettre en œuvre pour faire efficacement face à cette situation, en veillant à ce que l’aide parvienne à ceux qui en ont vraiment besoin, y compris dans les zones qui échappent actuellement au contrôle du Gouvernement, et en mettant en place les conditions permettant aux civils qui le désirent de quitter les zones touchées par les affrontements.
Enfin, je voudrais faire les brèves observations suivantes. L’Argentine insiste sur la nécessité pour toutes les parties de redoubler d’efforts afin de faire montre de la volonté politique requise et de prouver qu’elles sont convaincues que la seule voie acceptable est celle du dialogue et que le recours à la violence n’est pas une option.
Deuxièmement, l’Argentine appuiera toutes les initiatives qui contribueront de manière véritable à mettre fin à la violence et à ouvrir la voie à des négociations constructives et à un règlement politique entre les parties.
Troisièmement, les mesures convenues à Genève et la feuille de route de l’OSCE doivent continuer de nous guider et leur mise en œuvre effective par toutes les parties permettra de calmer la situation et d’évoluer vers un processus de dialogue national qui favorise la confiance entre les différentes communautés et garantisse à tous les Ukrainiens que leurs principales revendications seront entendues et leurs droits respectés.
Quatrièmement, nous accueillons avec satisfaction les mesures définies par le Gouvernement ukrainien, démocratiquement élu, pour un règlement pacifique de la crise dans le pays et les pas consentis par les autorités russes dans le même sens.
Cinquièmement, il faut absolument combattre les discours qui alimentent la haine, la discrimination, l’agressivité et la violence. L’Argentine réaffirme sa conviction que la communauté internationale, et donc chacun de ses membres, doit agir dans le respect du droit international et de la Charte des Nations Unies.
À l’instar du Nigéria, nous espérons que les insurgés tiendront leur promesse de libérer les observateurs de l’OSCE qu’ils ont enlevés et nous exigeons une nouvelle fois que cette libération intervienne immédiatement et sans condition.
M. Cherif (Tchad) : Je tiens à remercier M. Zerihoun, Sous-Secrétaire général aux affaires politiques, et M. Simonović, Sous-Secrétaire général aux droits de l’homme, pour leurs exposés.
Le rapport produit par le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme sur l’Ukraine, couvrant la période du 7 mai au 7 juin, confirme malheureusement la dégradation continue de la situation des droits de l’homme dans ce pays, particulièrement dans le sud-est. Le Tchad note avec préoccupation que des groupes armés bien entraînés et équipés se renforcent et continuent à occuper la plupart des bâtiments publics et administratifs dans de nombreuses villes et localités, notamment dans les régions de Donetsk et Lougansk. Nous notons également la multiplication des enlèvements, des détentions, des mauvais traitements et actes de torture, des homicides et même des exécutions sommaires par des groupes armés, dont les attaques ne se limitent plus à des journalistes, des élus, des officiels locaux, des fonctionnaires ou des militants de la société mais affectent directement la population civile.
Nous condamnons l’enlèvement et la détention de huit observateurs de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe et exigeons leur libération immédiate et sans condition.
L’intensification des combats met de plus en plus les civils entre le feu croisé des groupes armés et des militaires ukrainiens. Cela génère un nombre croissant de civils tués et blessés, en particulier des femmes et des enfants. Le Tchad lance à toutes les parties en présence un appel au calme et à la retenue, et exhorte les pays ayant une influence sur les parties au conflit à les aider à privilégier le dialogue et la réconciliation entre Ukrainiens.
Dans cet environnement d’insécurité, associé à des difficultés socioéconomiques, la population civile fuit les zones de conflit et on dénombre déjà plus de 15 000 déplacés, dont 64 % sont des femmes et des enfants, notamment dans les régions de l’est. Le Tchad invite les belligérants à faciliter l’accès des organisations internationales aux zones touchées par les opérations militaires afin que les besoins de la population puissent être évalués et pris en compte.
La crise en Ukraine est une menace constante à la liberté d’expression. Plusieurs journalistes ont été tués, kidnappés, torturés et poursuivis. Les discours de haine sur les réseaux sociaux continuent à alimenter les tensions et à creuser les divisions entre les communautés. À cet égard, le Tchad appelle toutes les parties prenantes à s’abstenir d’utiliser des messages d’intolérance qui incitent à la discrimination, à la haine et à la violence.
En dépit de ce sombre panorama des droits de l’homme en Ukraine, le Tchad se félicite des efforts déployés par le nouveau Gouvernement pour restaurer l’ordre public, rétablir le dialogue politique et stabiliser le pays. Dans le respect de la souveraineté, de l’intégrité territoriale et de l’unité de l’Ukraine, le Tchad appuie et encourage la mise en œuvre du plan de résolution pacifique de la situation, sous la conduite du Président Petro Poroshenko, et en particulier la décision unilatérale prise par le Gouvernement de cesser le feu dans l’est de l’Ukraine, du 20 au 27 juin.
En outre, nous saluons le vote par le Parlement ukrainien de la résolution sur le mémorandum d’entente et de paix, qui prévoit un ensemble de réformes constitutionnelles comprenant la décentralisation du pouvoir et un statut pour la langue russe, la réforme du système judiciaire et de la police, et l’adoption d’une loi d’amnistie pour les manifestants anti-gouvernementaux dans l’est qui accepteraient d’abandonner les armes. Le Tchad demande à la justice ukrainienne de garantir les droits des victimes et d’engager des poursuites contre les responsables des violations des droits de l’homme. Ces poursuites concernent les auteurs des événements liés aux manifestations de la place Maidan, aux meurtres de janvier et février 2014, et aux incidents du 2 mai à Odessa.
Pour terminer, le Tchad pense que les causes profondes de la crise en Ukraine sont structurelles et la sortie de crise doit comprendre des solutions qui tiennent compte de ces réalités. Pour ce faire, la réconciliation et le développement des communautés doivent se faire par des moyens pacifiques et démocratiques, dans le respect et la garantie des droits fondamentaux de tous. Pour relever ces défis et ceux qui sont liés à son intégrité territoriale, sa souveraineté et sa stabilité, l’Ukraine a besoin d’être soutenue par toute la communauté internationale.
Mme Murmokaitė (Lituanie) (parle en anglais) : Je voudrais remercier les Sous-Secrétaires généraux Ivan Šimonović et Tayé-Brook Zerihoun de leurs exposés. Le plan de paix du Président Poroshenko offre un fragile espoir de solution à cette crise artificiellement induite, alimentée par l’insistante propagande anti-ukrainienne de la Russie ainsi que par un afflux continuel d’activistes et d’armements provenant de l’autre côté des frontières de l’Ukraine avec la Russie. Un retour à la normale est terriblement nécessaire après les mois de destructions et d’anomie causées par les séparatistes armés illégaux, qui ont conduit à une inquiétante dégradation de la situation humanitaire et des droits de l’homme dans l’est de l’Ukraine, comme en témoigne le troisième rapport de la mission de surveillance des droits de l’homme de l’ONU.
Le rapport apporte là encore une preuve que c’est une insurrection d’activistes pro-russes qui est la cause, et non l’effet, des graves violations des droits de l’homme et de la rupture de l’ordre public dans les régions orientales de l’Ukraine, tout comme l’occupation russe de la Crimée était la cause, et non l’effet, des graves violations des droits fondamentaux et des droits des minorités dans cette région. Le rapport détaille les cas d’enlèvements, de détentions illégales, de meurtres, de tortures, de mauvais traitements, de disparitions forcées, d’intimidations et de harcèlement perpétrés par les séparatistes armés dans l’est de l’Ukraine. La criminalité et les pillages ont considérablement augmenté dans les zones détenues par les séparatistes.
Des exécutions sommaires perpétrées par les insurgés, qui évoquent les méthodes stalinistes, ont également été signalées, y compris au sein de leurs propres rangs, ou à titre de revanche contre ceux qui appuient les forces gouvernementales. Dans l’un de ces cas, évoqué dans le rapport, un agriculteur a été exécuté devant sa famille parce qu’il avait apporté de la nourriture aux forces ukrainiennes.
Les séparatistes ont perpétré des attaques de plus en plus osées à l’aide d’armes toujours plus perfectionnées. Ils possèdent des armements anti- aériens et antichars, des fusils d’assaut automatiques, des systèmes portables de défense anti-aérienne et d’autres armes. La semaine dernière, trois chars T-64, des lance- roquettes multiples de type BM-21 Grad et d’autres véhicules militaires ont été passés illégalement depuis la Russie en territoire ukrainien et ont été vus dans les villes de Snijné, de Torez et de Makiivka. Le 14 juin, des activistes ont abattu un avion de transport militaire ukrainien, faisant ainsi 49 morts, dans ce qui constitue un acte criminel qu’ils n’ont fait aucune difficulté à reconnaître. Il y a encore quelques minutes, alors que nous avions pris la parole au Conseil, les séparatistes ont abattu un nouvel hélicoptère militaire, faisant neuf morts supplémentaires. Nous sommes en pensées avec tous ceux qui ont perdu des proches et qui ont eu à subir les déplacements, les privations, les intimidations et les menaces engendrées par cette crise.
Nous réaffirmons notre position de longue date, à savoir que l’Ukraine a le droit et le devoir de se défendre et de chercher à rétablir l’ordre public à l’intérieur de ses frontières. Le recours légitime à la force doit s’accompagner de la retenue nécessaire, éviter tout dommage inutile aux infrastructures civiles et toute perte civile. La meilleure façon de faire pièce au mélange létal de violence, de haine et d’anomie qui est le moteur de l’insurrection pro-russe est de respecter la légalité et l’état de droit.
Le troisième rapport de M. Šimonović contient un certain nombre de recommandations à l’attention du Gouvernement ukrainien. La Lituanie et tous les membres de l’Union européenne se tiennent prêts à apporter leur concours à l’Ukraine dans la réforme de son secteur de la sécurité, de la police et de l’État de droit. Nous saluons les mesures prises jusqu’à présent par le Gouvernement ukrainien pour mettre en œuvre la déclaration de Genève du 17 avril, dans le cadre d’un certain nombre de tables rondes, d’initiatives et de changements législatifs, visant notamment à une décentralisation du pouvoir. D’autres importantes mesures législatives sont en voie d’être promulguées, comme nous l’a expliqué en détail M. Šimonović. Le Gouvernement ukrainien a proposé à maintes reprises d’accorder l’amnistie à ceux qui déposent les armes. Il y a juste quelques jours, le Président Poroshenko s’est rendu dans l’est de l’Ukraine pour dialoguer directement avec la population et les autorités locales.
Des mesures à saluer ont également été prises pour garantir le respect des droits des minorités ethniques. Dans un saisissant contraste avec la situation en Crimée occupée, où l’enseignement des langues ukrainienne et tatare est actuellement de plus en plus marginalisé, Kiev a amendé le 30 mai le cursus type afin d’améliorer l’enseignement de langues minoritaires aussi variées que l’arménien, le bulgare, le tatar, le gagaouze, le grec, l’allemand, l’hébreu, le hongrois, le coréen, le moldove, le polonais, le roumain, le russe et le slovaque.
La dernière initiative en date du Président Poroshenko, un plan en 15 points en vue du règlement pacifique de la situation dans l’est de l’Ukraine, que mon pays approuve pleinement, pourrait changer totalement la donne. Si cette initiative a malheureusement été accueillie par de nouvelles attaques d’insurgés, des pourparlers trilatéraux sont en cours et quelques gestes ont d’ores et déjà été faits, d’échanges de prisonniers et de rétablissement des services d’utilité publique.
Le Gouvernement ukrainien apporte sa pierre pour mettre en œuvre l’accord de paix. Il revient maintenant aux séparatistes et à la Russie de faire de même. Nous notons que mercredi, le Conseil de la Fédération de Russie est censé abroger une résolution autorisant l’emploi des forces armées russes en territoire ukrainien, et nous espérons que cela implique la totalité du territoire ukrainien. Il faut, toutefois, faire davantage. La Russie a encore à se dissocier clairement du séparatisme militant dans l’est de l’Ukraine et à appeler tous les insurgés à déposer les armes. Elle n’a pas encore assuré un contrôle suffisant de ses frontières avec l’Ukraine ni mis fin à l’afflux d’armes de fabrication russe et de mercenaires dans l’est de Ukraine, ainsi que de combattants étrangers.
Il importe en particulier que la Russie mette un terme à la campagne incendiaire contre l’Ukraine, qui a alimenté l’insurrection des activistes dans l’est du pays. L’indépendance de l’Ukraine, sa souveraineté et son intégrité territoriale ne sont pas négociables et doivent être respectées de tous. Nous réitérons notre condamnation de l’occupation de la Crimée et soulignons qu’une redémarcation par la force de frontières internationalement reconnues n’a pas sa place au XXIe siècle.
La Lituanie apprécie le travail qu’effectuent la mission de surveillance des droits de l’homme déployée par l’ONU et la mission d’observation spéciale de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) afin de fournir régulièrement des informations actualisées sur la situation en Ukraine. Nous nous félicitons de ce que le Gouvernement ukrainien ait invité l’ONU à autoriser la prorogation de sa mission pour trois mois supplémentaires. Comme l’ont fait observer les orateurs précédents, l’impartialité des informations communiquées sur les violations des droits de l’homme et l’évolution de la situation sur le terrain est une condition indispensable pour garantir qu’il n’y a pas manipulation des faits.
L’attitude d’ouverture continue de l’Ukraine face aux missions d’observation internationales témoigne de son esprit constructif et offre un saisissant contraste avec les agissements des séparatistes, qui font tout ce qu’ils peuvent pour empêcher l’information de circuler depuis les zones qu’ils maintiennent captives. N’oublions pas qu’ils détiennent encore huit observateurs de l’OSCE. Nous appelons à leur libération immédiate ainsi qu’à celle de tous les otages se trouvant aux mains des séparatistes. Le plan de paix ukrainien offre une possibilité de percée dans le sens d’un rétablissement de la paix et de la stabilité qui soit conforme aux principes internationaux de respect de la souveraineté, de l’intégrité territoriale et de l’indépendance de l’Ukraine. Nous espérons que toutes les parties sauront saisir cette occasion, même si les événements survenus il y a quelques minutes suscitent à bon droit quelques doutes quant à la volonté des séparatistes à cet égard.
M. Quinlan (Australie) (parle en anglais) : Je voudrais remercier les Sous-Secrétaires généraux, MM. Zerihoun et Šimonović, de leurs exposés de ce matin.
L’Australie accueille avec satisfaction le plan de paix du Président Poroshenko, dans lequel elle voit une importante occasion de parvenir à une désescalade de la situation en Ukraine. Nous nous réjouissons également de la déclaration par l’Ukraine d’un cessez-le-feu unilatéral et de l’appui dont bénéficie apparemment celui-ci dans les rangs des dirigeants séparatistes. //Le plan de paix, et son appel au dialogue avec les autorités légitimement élues dans l’est...
Le plan de paix, qui appelle au dialogue avec les autorités élues dans la légalité dans l’est et prévoit des garanties en matière de sécurité pour toutes les parties qui prennent part aux négociations, la libération des otages ainsi que de nouveaux efforts de décentralisation du pouvoir, y compris dans le cadre d’élections locales, offre une chance, appréciée, de répondre aux doléances et de mettre un terme à la crise. Il s’agit d’initiatives courageuses que nous devrions appuyer.
Nous exhortons les séparatistes dans l’est de l’Ukraine à observer le cessez-le-feu et à ne pas en profiter. Les attaques qu’auraient menées des séparatistes contre des postes frontière ukrainiens après que le cessez-le-feu a été décrété doivent être condamnées. Les informations reçues au cours de la dernière demi- heure selon lesquelles un hélicoptère ukrainien aurait été abattu près de Slaviansk, faisant neuf morts, sont très négatives. Les engagements à observer le cessez-le- feu doivent être respectés. L’Australie croit comprendre que les forces armées ukrainiennes emploieront la force pour se défendre en cas d’attaque. Elles en ont le droit. Bien entendu, le Gouvernement ukrainien doit continuer de veiller à ce que toute opération menée par ses forces armées soit conforme aux normes internationales.
Les informations relatives à la circulation incessante de combattants illégaux, d’armes et d’autres équipements militaires, y compris des armes lourdes telles que des chars, entrant en Ukraine depuis la frontière russe sont inquiétantes. Le Conseil ne doit pas tolérer ces violations continues et déstabilisantes de la souveraineté de l’Ukraine. Il est essentiel que la Russie exerce un contrôle sur ses frontières. Nous sommes également préoccupés par les informations selon lesquelles la Russie aurait de nouveau redéployé des milliers de soldats près de la frontière ukrainienne dans ce qui semble être un nouvel acte de provocation calculé. Toutes ces actions déstabilisent l’est de l’Ukraine. Nous exhortons à nouveau la Russie de retirer ses contingents de la frontière, de prévenir l’arrivée constante d’armes et de combattants illégaux en Ukraine et d’appeler publiquement les séparatistes en Ukraine à renoncer à la violence.
Sur une note plus positive, nous nous félicitons que le Président Poutine ait demandé aujourd’hui à la Douma de revenir sur sa décision qui visait à autoriser la Russie à employer la force en Ukraine. Un tel emploi de la force n’est ni légal, ni légitime mais, si cette demande aboutit, l’initiative prise par M. Poutine pour que cette décision soit révoquée constituerait au moins un signe d’avancée vers une désescalade. Nous saluons également l’engagement soutenu du Secrétaire général concernant cette situation et la détermination de l’ONU à travailler avec les autorités ukrainiennes pour venir en aide aux personnes déplacées à l’intérieur du pays.
Le troisième rapport de la mission de surveillance des droits de l’homme de l’ONU en Ukraine dresse un tableau accablant des effets du séparatisme violent dans l’est de l’Ukraine. La majorité des atteintes aux droits de l’homme ont lieu à Donetsk et à Lougansk, où des groupes séparatistes sont actifs. Dans d’autres régions de l’Ukraine, contrôlées par le Gouvernement, des efforts concertés sont déployés pour veiller à ce que les droits de l’homme soient respectés. Les efforts de l’Ukraine visant à répondre aux doléances et à bâtir une société qui respecte l’état de droit sont salués dans le rapport.
L’Ukraine s’attaque à la réforme constitutionnelle, en mettant l’accent sur la décentralisation du pouvoir, a annoncé la tenue d’élections législatives plus tard dans l’année, s’emploie à réformer les services de maintien de l’ordre, et prend des mesures pour lutter contre la corruption. Les autorités ukrainiennes ont commencé à enquêter sur les manifestations de Maïdan et l’incident survenu le 2 mai à Odessa. Il est essentiel d’établir les responsabilités en temps voulu et il est donc important que ces enquêtes progressent rapidement.
À la différence de ces mesures positives, la situation dans l’est de l’Ukraine continue de se détériorer. Les actions musclées des groupes séparatistes ont des répercussions négatives sur la situation des droits de l’homme dans des régions de l’Ukraine qu’ils contrôlent. Comme il est indiqué dans le rapport, « avec la disparition de la sécurité, de l’état de droit et de la gouvernance, l’écart en matière de protection se creuse ». Des civils ont été tués par des groupes armés. Les enlèvements et les détentions touchent maintenant l’ensemble de la population à Donetsk et à Lougansk, qui vit dans un climat de peur et d’intimidation. Nous sommes outrés de ce que les observateurs de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe restent détenus dans l’est de l’Ukraine, et nous appelons de nouveau à leur libération immédiate. Les journalistes s’exposent, dans l’est de l’Ukraine, à des attaques, des enlèvements et des détentions. Cinq journalistes ont été tués au cours de cette crise. Nous accueillons avec satisfaction la déclaration à la presse du Conseil concernant le meurtre de journalistes dans l’est de l’Ukraine. Dans une situation où la désinformation abonde, il est essentiel que les journalistes soient en mesure de rendre compte des faits, librement et sans peur.
Les violences à l’est, comme nous le savons, ont perturbé les services sociaux. Des écoles sont fermées, des hôpitaux sont surchargés et manquent de personnel, l’eau courante et l’électricité sont rares dans certaines zones et le prix des denrées alimentaires a augmenté rapidement. Il est clairement de plus en plus difficile pour les civils vivant dans l’est de l’Ukraine de mener une vie normale, mais nous prenons également note de l’évaluation réalisée par l’ONU selon laquelle la situation dans l’est de l’Ukraine, aussi inacceptable soit-elle, ne constitue pas une crise humanitaire. Bien entendu, le risque est qu’elle pourrait se détériorer et devenir une crise humanitaire si les séparatistes armés ne renoncent pas et qu’ils continuent de recevoir l’aide de la Russie.
Je dois signaler que la situation des droits de l’homme en Crimée s’est nettement détériorée depuis l’annexion illégale de la péninsule par la Russie. La liberté de réunion et de croyance religieuse est menacée. Certains habitants de Crimée auraient été contraints de renoncer à leur nationalité ukrainienne. Il est inquiétant que seul un petit nombre d’habitants de la Crimée ait pu voter lors de l’élection présidentielle en Ukraine et ait dû le faire en se rendant dans la partie principale de l’Ukraine.
Le rapport contient des propositions utiles sur la voie à suivre, qui méritent notre appui. Il y est souligné, et c’est crucial, que tous les groupes armés doivent cesser immédiatement leurs activités violentes et déposer les armes. Le plan de paix et le cessez-le-feu décrétés par le Président Poroshenko donnent la possibilité de le faire – de mettre fin à la violence séparatiste – et toutes les parties doivent saisir cette occasion. L’incapacité de régler la situation par des moyens pacifiques détruira la vie et les moyens d’existence d’un nombre encore plus important d’Ukrainiens. Aucun d’entre nous au Conseil ne devrait permettre que cela se produise.
M. Barros Melet (Chili) (parle en espagnol) : Nous apprécions les exposés présentés par le Sous- Secrétaire général Šimonović et le Sous-Secrétaire général Zerihoun, et nous sommes reconnaissants des efforts que le Secrétaire général continue de déployer pour mettre un terme à la situation que connaît l’Ukraine.
Le récent rapport de la mission de surveillance des droits de l’homme de l’ONU continue de préoccuper notre pays pour ce qui est de la situation des droits de l’homme dans les régions de l’est et du sud de l’Ukraine, en particulier à Donetsk et à Lougansk. Ma délégation est particulièrement préoccupée par la multiplication alarmante des violations des droits de l’homme et atteintes à ces droits, dont sont principalement victimes des journalistes, des personnalités politiques et des militants. Nous déplorons vivement la mort de deux journalistes russes et d’un journaliste italien à Lougansk la semaine dernière.
Les violations accrues du droit à la vie, à la liberté et à la sécurité, qui touchent actuellement les civils dans ces régions et se manifestent par des attaques, des enlèvements ainsi que des actes de torture et de harcèlement, soulignent la nécessité de rétablir l’état de droit et de respecter la souveraineté, l’indépendance et l’intégrité territoriale de l’Ukraine, conformément à la Charte des Nations Unies, à la résolution 68/262 de l’Assemblée générale et au droit international. Nous demeurons également préoccupés par la situation des personnes déplacées en Ukraine, qui seraient, d’après le rapport, plus de 12 700, principalement des femmes et des enfants. Il s’agit d’un signe manifeste de la gravité de cette crise.
Le Chili tient à prendre acte des efforts déployés par le Gouvernement ukrainien pour mettre un terme à la situation que connaît son pays et met l’accent sur le plan de paix et la déclaration unilatérale de cessez-le- feu annoncés récemment par le Président Poroshenko. Le fait que des groupes séparatistes ont annoncé qu’ils observeraient ce cessez-le-feu est un signe encourageant qui doit se traduire dans les faits, sur le terrain. La réforme constitutionnelle proposée dans le mémorandum de concorde et de paix est tout aussi importante. Ce mémorandum a été élaboré dans le cadre d’une table ronde sur l’unité nationale et adopté le 20 mai par le Parlement ukrainien dans le but de décider de l’avenir de l’Ukraine de manière démocratique et transparente, et sans exclusive.
Nous appelons les parties à rechercher une solution pacifique à cette crise, par un dialogue politique direct, en faisant preuve de retenue, en s’abstenant de prendre des mesures unilatérales risquant d’exacerber les tensions, et en prenant part aux initiatives internationales de médiation telles que le groupe de contact trilatéral composé de l’Ukraine, de la Russie et de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe et la déclaration de Genève du 17 avril. De même, il faut garantir d’urgence le plein respect de l’état de droit, de la démocratie et des droits de l’homme en Ukraine, y compris les droits de toutes les minorités.
Le Gouvernement ukrainien a la responsabilité et l’obligation de maintenir l’ordre public sur tout son territoire, conformément à ses normes constitutionnelles et juridiques, et ce, dans le plein respect des droits et des intérêts de tous les citoyens ukrainiens. Le monopole de l’usage de la force dont jouit le Gouvernement ukrainien sur son territoire, comme tout gouvernement au sein de la communauté internationale, doit s’exercer dans le plein respect des droits de l’homme et de façon proportionnelle à la situation.
Le Chili réitère son appui à l’appel lancé par M. Šimonović pour que les auteurs de violations des droits de l’homme en Ukraine rendent des comptes, notamment pour les cas de détention illégale concernant 222 personnes, parmi lesquelles 81 dont on ne sait toujours pas ce qu’il est advenu d’elles, et pour la mort de plus de 400 personnes dans les régions de l’est, y compris des enfants, ainsi que des membres des forces de sécurité nationales et des groupes armés.
Il est également indispensable que les autorités poursuivent leurs enquêtes afin d’établir le plus rapidement possible les responsabilités s’agissant des 48 personnes qui ont trouvé la mort à Odessa le 2 mai et pour traduire les auteurs de ces crimes en justice. Les autorités doivent également procéder à une analyse pour déterminer pourquoi les forces de sécurité n’ont pas agi de façon plus opportune et décisive pour prévenir cette tragédie.
Nous réitérons notre appui aux travaux de la mission de surveillance des droits de l’homme de l’ONU en Ukraine et de la mission d’observation de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe. Nous sommes confiants que ces mécanismes internationaux indépendants continueront à contribuer à la recherche d’une solution à cette crise.
M. Gasana (Rwanda) (parle en anglais) : Monsieur le Président, je vous remercie d’avoir convoqué la présente séance. Je voudrais également remercier les Sous-Secrétaires généraux, M. Tayé-Brook Zerihoun et M. Ivan Šimonović, de leurs exposés respectifs sur la situation politique et des droits de l’homme en Ukraine. Nous félicitons le Secrétaire général pour ses bons offices et pour ses efforts inlassables visant à trouver une solution politique et diplomatique durable à la crise ukrainienne.
Alors que nous sommes réunis ici aujourd’hui, nous sommes encouragés par les différentes mesures prises par les parties dans la région pour désamorcer la situation. Le Rwanda appuie le plan en 15 points du Président Petro Poroshenko visant à mettre fin à la crise et se félicite du cessez-le-feu unilatéral qu’il a annoncé le vendredi 20 juin. Nous espérons que ce plan encouragera toutes les parties concernées à s’engager à trouver une solution pacifique à long terme à cette crise et à mettre fin aux souffrances des Ukrainiens. À cet égard, nous nous félicitons des décisions prises par les groupes séparatistes d’observer un cessez-le feu jusqu’à ce vendredi, le 27 juin. Nous estimons que ces cessez-le-feu parallèles imprimeront un nouvel élan aux négociations politiques prévues dans le cadre du plan de paix présenté par le Président Poroshenko. Dans le même temps, nous saluons la décision prise aujourd’hui par le Président Vladimir Poutine, de la Fédération de Russie, de demander au Conseil de la Fédération de révoquer son droit de recourir à la force dans l’est de l’Ukraine et son appel à toutes les parties au conflit ukrainien à cesser les hostilités et à s’asseoir à la table des négociations.
Malgré ces développements, nous sommes préoccupés par le niveau alarmant de l’escalade, en particulier des activités criminelles, et par des informations faisant état de violations graves des droits de l’homme. Nous condamnons les enlèvements, les détentions, les mauvais traitements, les actes de torture, les arrestations arbitraires et les actes de harcèlement sexuel qui se poursuivent. Les cas signalés de disparitions forcées sont extrêmement préoccupants. Nous prions la mission de surveillance des droits de l’homme de l’ONU en Ukraine et le Mécanisme national de prévention, en collaboration avec le Médiateur, de poursuivre leurs efforts pour s’assurer que les droits de l’homme des personnes qui sont toujours en détention sont respectés.
Nous appelons en outre à la libération immédiate des observateurs de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe qui sont en détention depuis le 26 et le 29 mai. Nous sommes préoccupés par les informations faisant état de l’augmentation du nombre de déplacés, mais surtout par celles ayant trait à l’accès limité des acteurs humanitaires, qui ne peuvent pas atteindre les personnes déplacées dans les régions de Donetsk et de Lougansk. Nous exhortons tous les acteurs à garantir l’accès à l’aide humanitaire à ceux qui en ont besoin. Nous invitons également le Gouvernement ukrainien à établir un corridor pour garantir le passage des civils en toute sécurité et à assurer leur sécurité. Les conséquences de la violence dans le sud et l’est de l’Ukraine ont eu des répercussions sur une situation économique déjà catastrophique, caractérisée par un taux de pauvreté de 24,7 %, le chômage des jeunes et le manque d’accès aux services médicaux. La livraison de médicaments et d’autres produits de première nécessité s’avère difficile en raison de l’instabilité.
Pour terminer, je tiens à souligner que le Conseil doit faire preuve d’unité et appuyer le peuple ukrainien. Nous devons lui montrer que nous sommes attachés à l’unité, à la souveraineté et à l’intégrité territoriale de l’Ukraine, ainsi qu’à notre propre responsabilité de maintien de la paix et de la sécurité internationales. Je voudrais réitérer notre appel aux groupes armés à déposer les armes et à respecter le cessez-le- feu, à s’engager dans un dialogue constructif et à appuyer les efforts en cours visant à désamorcer la crise.
M. Omaish (Jordanie) (parle en arabe) : Tout d’abord, je voudrais remercier M. Šimonović et M. Zerihoun de leurs exposés de ce matin. Nous avons pris note des conclusions et des recommandations figurant dans le troisième rapport du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, en date du 15 juin, formulées sur la base des conclusions de la mission de surveillance des droits de l’homme de l’ONU en Ukraine.
Ma délégation exprime ses vives préoccupations devant à la détérioration de la situation dans l’est de l’Ukraine, en particulier à Donetsk et à Lougansk, suite à la prolifération d’armes et l’augmentation du nombre d’éléments armés, ce qui à son tour a entraîné une augmentation du nombre d’enlèvements, de cas de détention forcée et de torture, et de la criminalité dans cette région. Cette situation a également conduit à une augmentation du nombre de messages incitant à la haine et de campagnes médiatiques de propagande par ces groupes.
Par conséquent, une fois de plus, la Jordanie condamne tous ces actes et invite tous ceux qui ont une influence en Ukraine à tout mettre en œuvre pour désamorcer la situation et parvenir à une solution permettant de rétablir la stabilité dans l’est de l’Ukraine, garantissant ainsi le retour des personnes déplacées dans leurs foyers, et pour éviter que cette situation n’entraîne des conséquences socioéconomiques néfastes en Ukraine.
La Jordanie salue les progrès réalisés par le Gouvernement ukrainien s’agissant de mettre en œuvre les recommandations figurant dans les deux rapports précédents. Nous appelons le Gouvernement à poursuivre et à intensifier ses efforts pour mettre en œuvre toutes les recommandations figurant dans le dernier rapport. Nous saluons également l’engagement des autorités ukrainiennes à mettre en œuvre la déclaration de Genève du 17 avril.
Nous rappelons la nécessité de respecter les normes internationales dans toutes les opérations qui pourraient être engagées en vue de rétablir l’autorité de l’État sur l’ensemble du territoire ukrainien.
L’élection démocratique d’un nouveau Président en Ukraine le mois dernier représente une lueur d’espoir pour les Ukrainiens. La Jordanie salue les mesures que le Président Poroshenko a entrepris de prendre afin de rétablir la stabilité dans son pays, à commencer par sa visite dans les régions de l’est de l’Ukraine, ainsi que sa proposition d’un plan de paix visant à mettre un terme à la rébellion dans l’est. Le Président a également proposé une amnistie générale aux séparatistes qui choisissent de rendre les armes, ainsi qu’un droit de libre passage pour qu’ils puissent quitter l’Ukraine. Il continue également de s’employer à défendre les droits des minorités et des populations qui ne sont pas de langue ukrainienne. Il s’agit là de signes de bonne volonté de la part des autorités ukrainiennes, qui accroissent les chances de trouver une solution pacifique à la crise.
Enfin, nous appelons la communauté internationale et l’ONU à conjuguer leurs efforts pour assurer le succès du plan de paix et à poursuivre leur médiation et leurs bons offices afin de désamorcer la crise et de permettre le retour de la stabilité en Ukraine.
Le Président Churkin (parle en russe) : Je vais à présent faire une déclaration en ma qualité de représentant de la Fédération de Russie.
Avant toute chose, je dois noter qu’une fois de plus à la présente séance, certains membres du Conseil de sécurité n’ont pas même essayé de faire une analyse objective de la situation en Ukraine et de ses causes profondes. Ils ont au contraire fait des insinuations, ils ont même proféré des menaces contre la Russie. Nous les réfutons catégoriquement, et préférons passer immédiatement aux questions de fond.
C’est la première fois qu’apparaissent, en Ukraine, quelques signes fragiles d’espoir. Le cessez- le-feu déclaré par le Président Poroshenko est bien sûr important, car il ne saurait y avoir, sinon, de négociations. Cependant, l’essentiel est que ce cessez-le-feu conduise à un dialogue entre toutes les parties belligérantes afin de permettre un compromis acceptable par tous et afin que les populations du sud-est de l’Ukraine puissent se sentir indubitablement partie intégrante de ce pays, avec tous les droits des citoyens de cet État, droits qui doivent être garantis, notamment, par la Constitution.
Nous nous félicitons des premières consultations qui ont eu lieu à Donetsk entre les autorités et représentants officiels ukrainiens et les milices du sud- est de l’Ukraine, avec la participation de l’Ambassadeur de Russie en Ukraine et d’un représentant de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE). Nous comptons que l’accord conclu sur le cessez-le-feu sera strictement respecté par les parties.
Le dialogue a commencé, même si, initialement, ce qu’il est convenu d’appeler le plan Poroshenko ne prévoyait pas de négociations. Il n’est pas étonnant, à cet égard, que les représentants de l’est se montrent prudents, car ils n’ont aucune raison de faire confiance aux autorités de Kiev. Pour notre part, nous sommes convaincus que, à défaut d’action concrète ou de négociations directes, le plan de paix ne serait pas viable et réaliste.
Afin de normaliser et de régler la situation qui règne dans l’est de l’Ukraine, et également eu égard aux négociations trilatérales qui ont débuté sur la question, le Président russe, M. Vladimir Poutine, a envoyé une lettre aux représentants du Conseil de la Fédération, à l’Assemblée fédérale, concernant l’abrogation de la décision du Conseil datée du 1er mars 2014 autorisant l’utilisation de l’armée russe sur le territoire ukrainien.
Dès le début, la Russie s’est prononcée en faveur d’une solution politique à la crise en Ukraine par le dialogue ouvert et la mise en œuvre rapide d’une réforme constitutionnelle. C’était le but de la Déclaration de Genève du 17 avril et de la feuille de route de la présidence suisse de l’OSCE, qui a obtenu notre soutien ainsi que celui de nombreux pays, à l’exception, pour une raison ou une autre, de l’Ukraine. Nous avons demandé à maintes reprises que les documents pertinents soient adoptés par le Conseil de sécurité, sous la forme d’une courte déclaration appuyant la Déclaration de Genève ou d’une résolution soulignant l’importance d’un dialogue ouvert dans le règlement des problèmes humanitaires. Malheureusement, nos initiatives se sont invariablement heurtées à l’obstruction de nos collègues occidentaux.
Cela est sans doute dû au fait que les autorités de Kiev sont en désaccord avec un grand nombre de dispositions de ce document, bien qu’elles se soient engagées à ne pas recourir à la violence, à l’intimidation et à la provocation. Au lieu de suspendre les opérations punitives dirigées contre leur propre peuple, en effet, elles les ont intensifiées.
Kiev n’a pas non plus pris de mesures pour désarmer les groupes armés illégaux, en particulier les combattants dudit Secteur droit et d’autres ultra- radicaux, ainsi que les diverses milices régionales, comme Dnepr ou Azov, et la Garde nationale, dont le fondement constitutionnel est douteux.
La crise ukrainienne est fortement marquée par le fait qu’il s’agit d’une conséquence directe du changement anticonstitutionnel et violent de gouvernement de février. Les habitants du sud-est se sont heurtés au mépris des autorités autoproclamées, ils ont copié les tactiques de « Maidan » et pris les armes pour proclamer leurs revendications légitimes. Or, on les a traités pour cette raison de séparatistes et de terroristes, et des opérations punitives ont été menées contre des villes entières, à l’aide de l’artillerie lourde et de l’aviation. Longtemps, sur fond des promesses de paix de M. Poroshenko, ces opérations n’ont pourtant cessé de gagner en intensité et en ampleur.
Par ailleurs, le cessez-le-feu n’a cessé d’être violé, et des obus ont même parfois atterri sur le territoire russe, où ils ont détruit des bâtiments et blessé des personnes aux alentours du point de passage de Dolzhansky Novoshahtinsk. La situation humanitaire reste extrêmement grave, et les réfugiés continuent d’affluer vers la Russie. Nous sommes troublés par le refus du Ministère ukrainien des affaires étrangères de coopérer avec nous à cet égard. Nous appelons à la levée de tous les obstacles artificiels à l’acheminement des denrées humanitaires, et à la création de couloirs humanitaires pour l’évacuation des civils des zones de combat, car malgré les promesses de M. Poroshenko, il n’a toujours pas mis en place ces couloirs.
Pendant ce temps, même sous les balles, les réfugiés continuent d’abandonner l’Ukraine. Plus de 450 000 ressortissants ukrainiens ont franchi la frontière avec la Russie. La plupart vivent chez des parents ou des amis, mais rien que dans les régions frontalières, plus de 220 abris provisoires ont été installés, y compris des villages de tentes. Il y a actuellement dans ces camps plus de 19 000 personnes, dont plus de 5 500 enfants. Cependant, les districts du centre et du sud de la Russie peinent à absorber cet afflux, et de nouveaux centres d’accueil sont mis sur pied dans d’autres régions de Russie. Dans tout le pays, les populations rassemblent de l’aide humanitaire pour les habitants du sud-est de l’Ukraine. Je ne cacherai pas que nous restons sans voix face à l’indifférence dont semblent faire montre en l’occurrence certains de nos collègues du Conseil, pourtant si enclins d’ordinaire à jouer la carte humanitaire quand cela les arrange politiquement.
S’agissant du nouveau rapport du Haut- Commissariat aux droits de l’homme sur la situation des droits de l’homme en Ukraine, je ne vois pas l’utilité de son examen au Conseil de sécurité. En effet, la mission de surveillance de l’ONU a été créée par décision de la Haut-Commissaire aux droits de l’homme, à l’invitation des autorités ukrainiennes. Puisque le Conseil de sécurité n’a quant à lui donné aucune instruction pour l’établissement de ce rapport, la logique voudrait donc que ce rapport ne soit pas présenté au Conseil.
Toutefois, il est surprenant que Kiev, qui avait pourtant invité la mission, refuse maintenant de coopérer avec elle, en particulier pour l’enquête sur la tragédie d’Odessa. Le rapport constate l’absence de progrès dans les enquêtes parallèles menées par l’OSCE, maintenant au nombre de six, ce qui prouve que l’on essaie de noyer la vérité sous le papier, et qu’il est nécessaire qu’une enquête internationale complète soit effectuée sur la tragédie d’Odessa, ce que nous avions dit dès le début. Pour sa part, la Fédération de Russie n’a pas invité la mission et ne lui a fait aucune recommandation. Nous considérons que les recommandations n’ont pas leur place dans le document.
Il est évident que la situation des droits de l’homme en Crimée ne devrait pas être le sujet de ce rapport. Nous estimons en outre que l’incapacité de la mission d’évaluer les conséquences de la décision prise par Kiev de couper l’eau en Crimée, et ce, sous prétexte qu’elle n’a pas eu accès à la région, n’a aucun sens. L’absence d’accès n’a pas empêché la mission de faire des déclarations politiques déplorables en ce qui concerne la détérioration de la situation en Crimée. Le rapport contient plusieurs références à caractère politique. En ce qui concerne la méthodologie employée pour élaborer le rapport, il semble que seules les informations vérifiées pouvaient être utilisées. C’est probablement judicieux, mais étrangement cette limitation joue invariablement en faveur de Kiev dans le rapport.
Ce document fait plusieurs références à de prétendues violations des droits de l’homme commises par des groupes armés dans les régions de Donetsk et Lougansk. Cependant, pourquoi omet-on de nombreux détails en ce qui concerne les habitants de la région et les journalistes, ainsi que les vidéos montrant des tirs d’artillerie sur des zones résidentielles dans des villes du sud-est et des victimes civiles, qui sont le fait de l’emploi aveugle de la force par le Gouvernement ? Le monde entier a pu voir les images des frappes aériennes ukrainiennes sur le bâtiment administratif de Lougansk le 2 juin, bâtiment qui ne saurait en aucun cas être décrit comme une cible militaire. Les photos montrant des victimes civiles sont effrayantes. En dépit du fait que des collègues des observateurs de l’OSCE ont souligné que les frappes avaient été effectuées au moyen de roquettes sol-air, pour je ne sais quelle raison, la Haut- Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme avance l’hypothèse absurde qu’il pourrait s’agir d’une tentative infructueuse par des miliciens d’abattre un avion ukrainien. Cette hypothèse a été réfutée par de nombreux analystes.
Dans la partie consacrée à la propagande, le rapport mentionne en passant l’incident impliquant un hélicoptère marqué du sigle de l’ONU sans l’examiner dans le détail. Or, pour rétablir la vérité, il va falloir déterminer la provenance de ces hélicoptères fournis préalablement à l’Ukraine pour mener des opérations de l’ONU et s’ils ont réellement été repeints. Ces considérations auraient dû figurer dans le rapport, et l’ONU aurait dû mobiliser les ressources nécessaires à cette fin.
La situation des journalistes mériterait un débat à part entière. Le rapport signale qu’un photojournaliste italien, Andrea Rocchelli, et son collègue et interprète russe, Andrey Mironov, ont été tués le 24 mai. Le 17 juin, les journalistes russes Igor Kornelyuk et Anton Voloshin ont, quant à eux, été tués par un tir de mortier, à Lougansk. Il faut mener une enquête minutieuse sur ce crime, car trop d’éléments indiquent qu’il s’agissait d’une attaque ciblée.
Les détentions, les actes d’intimidation et les passages à tabac visant des journalistes se poursuivent. Outre les cas mentionnés dans le rapport, nous tenons à signaler l’incident survenu le 14 juin, au cours duquel deux correspondants de la chaîne de télévision Zvezda ont été sauvagement agressés par les forces armées ukrainiennes afin de leur arracher des aveux. Les autorités ukrainiennes se sont ensuite vantées que les journalistes avaient présenté des excuses pour leur reportage. On ne cesse de signaler que des journalistes sont persécutés alors qu’ils font simplement leur travail ou sont expulsés du pays. De manière générale, nous tenons à dire que le rapport sape la confiance dans la Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme et suscite des interrogations sérieuses quant à l’opportunité que la mission poursuive ses activités.
Je reprends à présent mes fonctions de Président du Conseil.
Je donne la parole au représentant de l’Ukraine.
M. Sergeyev (Ukraine) (parle en anglais) : Il est extrêmement important que le Conseil de sécurité tienne une séance sur la situation actuelle en Ukraine. Je tiens à remercier tous les membres du Conseil de sécurité de leurs déclarations. Je les remercie de leur appui au plan qu’a présenté notre président dans l’optique du règlement pacifique de la situation dans l’est de l’Ukraine.
Nous remercions le Sous-Secrétaire général, M. Tayé-Brook Zerihoun, de son exposé. Nous nous félicitons du rapport sur la situation des droits de l’homme en Ukraine, que nous a présenté le Sous- Secrétaire général, M. Šimonović, qui s’est rendu en Ukraine à nombreuses reprises. Le rapport contient des conclusions et des recommandations auxquelles le Gouvernement ukrainien attache une grande importance et qui sont très utiles pour notre pays. L’Ukraine est disposée à continuer de développer et d’approfondir sa coopération avec les organes du système des Nations Unies chargés de la défense des droits de l’homme. Nous saluons la décision de proroger le mandat de la mission de surveillance des droits de l’homme de l’ONU.
Le rapport note la persistance des tendances préoccupantes en Crimée, notamment les cas de disparition forcée, de détention, de violence et de mauvais traitements aux mains des groupes paramilitaires illégaux, les soi-disant forces criméennes d’autodéfense, qui prennent souvent pour cible des journalistes, des défenseurs des droits de l’homme et des opposants politiques. Il souligne également l’impunité qui entoure les violations des droits de l’homme. Le système judiciaire reste littéralement paralysé. Les habitants de la Crimée ont beaucoup de mal à exercer leurs droits civils et politiques. Victimes de menaces, de nombreux habitants de la Crimée ont été forcés de renoncer à leur citoyenneté ukrainienne. Il n’y a que deux écoles ukrainiennes en Crimée, une a déjà été forcée de devenir russe et son directeur contraint de démissionner. Aujourd’hui, nous avons appris que des hommes armés non identifiés ont fait irruption dans une madrasa, autrement dit une école religieuse musulmane, près de Simféropol, qu’ils occupent désormais.
Selon le Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, le nombre officiel confirmé de personnes ayant quitté la Crimée, en Ukraine, se situe à plus de 12 000. Ces personnes ont dû fuir la péninsule en raison des conditions de vie insupportables créées par les autorités d’occupation. Cette situation est véritablement alarmante. Nous exigeons que la Fédération de Russie, qui occupe temporairement la péninsule de Crimée, garantisse la protection des droits des citoyens ukrainiens de toutes nationalités restant en Crimée, c’est-à-dire les Ukrainiens, les Russes, les Tatars de Crimée et autres, y compris leur droit à la liberté et à la sécurité et les droits des communautés religieuses.
Compte tenu des violations systématiques des droits de l’homme commises actuellement en Crimée, la partie ukrainienne espère que la situation sur la péninsule continuera de mobiliser l’attention de la communauté internationale. Nous appuyons l’appel lancé dans le rapport aux autorités d’occupation en Crimée pour qu’elles autorisent l’accès des experts internationaux indépendants, à commencer par la mission de surveillance de l’ONU.
Le rapport contient notamment des informations actualisées sur les événements tragiques survenus à Odessa. Il convient de souligner que les efforts déployés par les autorités ukrainiennes pour enquêter sur les événements tragiques survenus sur la place Maïdan et sur ceux du 2 mai à Odessa sont reconnus dans le rapport. L’assistance que les organismes chargés d’appliquer le droit ont fourni à la mission et leur respect des droits des personnes arrêtées à Odessa sont salués dans le rapport. Nous remercions le groupe de surveillance des droits de l’homme de l’objectivité avec laquelle il s’est efforcé d’analyser les événements. À l’heure actuelle, plusieurs suspects ont été arrêtés et les criminologues des services de l’État ont pu établir la cause du décès des victimes. L’enquête se poursuit et les résultats officiels seront rendus publics dès qu’ils auront été confirmés.
Le rapport accorde une attention particulière à la situation dans les régions de l’est de l’Ukraine. Le document relève le nombre croissant d’actes illégaux commis par des groupes armés illégaux très organisés, en violation des lois nationales et internationales. Il est extrêmement important de préciser que les violations des droits de l’homme et les problèmes humanitaires ne touchent que les villes qui sont sous le contrôle temporaire des groupes armés illégaux, notamment Sloviansk, Kramatorsk et Snijné. Entre autres activités illégales, ces groupes se rendent coupables de meurtre, d’actes de torture, de saisie de bâtiments administratifs et publics, d’enlèvement et de détention de civils, notamment des journalistes, de prise d’otages, y compris les observateurs de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, et d’actes d’intimidation et de terreur à l’encontre des populations locales. Ils s’emparent des bâtiments de gestion des infrastructures, ce qui perturbe le fonctionnement de certaines stations d’approvisionnement en eau et en électricité qui ont été endommagées par des tirs. Les terroristes font délibérément la guerre à la population civile, entravant notamment la libre circulation des personnes, y compris les personnes handicapées. Ces personnes sont de façon cynique utilisées comme boucliers humains. Nous présentons nos sincères condoléances suite au décès des journalistes italien et russe qui ont été victimes des combats.
Je tiens à souligner qu’il n’y a pas de crise humanitaire en Ukraine. Les problèmes humanitaires dans certaines parties des régions de Donetsk et Lougansk sont causés uniquement par les activités des groupes armés illégaux pro-russes qui sont parvenus à prendre le contrôle de ces villes. Par ailleurs, le Gouvernement ukrainien fait tout son possible pour maîtriser la situation, rétablir l’ordre public et fournir une aide à tous ses citoyens. Le Président ukrainien a ordonné de mettre en place toutes les conditions requises pour permettre aux civils qui souhaitent quitter les villes temporairement sous contrôle des terroristes de le faire en empruntant des couloirs sûrs.
Les services d’urgence nationaux ont été chargés de créer un centre de coordination multifonctionnel afin de transporter les personnes touchées et de répondre aux besoins des civils en matière de soins de santé et de services sociaux. Les autorités locales des autres régions de l’Ukraine se chargent d’héberger les victimes des attaques terroristes en provenance de cette zone. Le Centre de coordination national aide à loger temporairement les citoyens ukrainiens qui ont quitté les régions de Donetsk et de Lougansk pour d’autres régions du pays.
Une attention particulière a été accordée à la réinstallation des enfants qui sont envoyés et logés dans des camps d’été dans toutes les régions du pays.
Le Gouvernement ukrainien démontre sa capacité à assurer la paix. Les autorités des villes libérées, comme Marioupol et d’autres, sont désormais en mesure d’envoyer un message de paix à d’autres villes dont la population continue de recevoir des messages mensongers de propagande anti-ukrainienne. Par souci de pragmatisme, le Président ukrainien Petro Poroshenko a tenu la semaine dernière une vaste réunion inclusive de concertation avec les véritables représentants de la région de l’est – les représentants des communautés locales, des milieux politiques et d’affaires de Donetsk et de Lougansk et les maires légitimement élus.
Lors de son discours d’investiture le 7 juin, le Président Poroshenko a rappelé qu’il assumait sa fonction afin de préserver la souveraineté, l’intégrité territoriale et l’unité nationale de l’Ukraine, d’assurer une paix durable et de garantir la sécurité de tous les citoyens. Vendredi dernier, le Président Poroshenko a présenté son plan pour un règlement pacifique de la situation dans l’est de l’Ukraine, et je suppose que le Conseil appuie ce plan.
Les membres du Conseil auront sans doute remarqué que ce plan comprend trois grandes parties : cessez-le-feu, rétablissement de la paix et dialogue.
Le Président Poroshenko a déjà commencé la mise en œuvre de ce plan en donnant l’ordre d’un cessez- le-feu unilatéral dans l’est de l’Ukraine. J’aimerais maintenant citer les explications détaillées du plan que mon président a fournies à la nation dimanche dernier :
« La mise en œuvre immédiate du plan de paix ouvrira la voie à un dialogue politique. J’invite les représentants légitimement élus des pouvoirs locaux, les organisations non gouvernementales et toutes les personnes intéressées à participer à ce dialogue. Des vues diamétralement opposées ne constitueront pas un obstacle à une participation aux négociations. Je suis prêt à dialoguer avec ceux qui se sont trompés en prenant position en faveur du séparatisme, à l’exception, bien évidemment, de ceux qui ont commis des actes de terrorisme et des meurtres ou infligé des tortures. Par ailleurs, je garantis la sécurité de tous les participants aux négociations, de tous ceux qui préfèrent le langage des mots au langage des armes.
Il convient de noter que la question de l’intégrité territoriale de l’Ukraine n’est pas sur la table. Nous sommes bien conscients des opinions des habitants du Donbass, mais nous ne pouvons pas, pour leur bénéfice, modifier l’Ukraine où les questions relatives à l’unité du pays, à sa structure territoriale, à sa langue et à ses orientations politiques font généralement l’unanimité.
Alors, comment régler la situation ? Il faut procéder à une vaste décentralisation des pouvoirs. La décentralisation prévoit un élargissement des droits des régions en matière de préservation de la mémoire historique, de traditions culturelles et de politique linguistique. Ces questions ne diviseront plus jamais le pays. Les communautés locales du Donbass auront le droit de parler librement le russe de même que la langue nationale. »
Ce plan a reçu l’appui des principaux dirigeants mondiaux et des grandes organisations internationales – l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, le Conseil de l’Europe et l’Organisation des Nations Unies. L’Ukraine est résolue à suivre rigoureusement la voie de la paix. En réponse à notre initiative de rétablissement de la paix, les hommes armés et les terroristes ont continué leurs attaques, en violation flagrante des termes de la trêve.
Nous nous félicitons de l’intention du Président russe d’annuler la décision du Conseil de la Fédération relative à l’utilisation de forces armées sur le territoire de l’Ukraine. Mais ces derniers jours, une augmentation notable de la concentration de soldats et de matériel des forces armées de la Fédération de Russie a été constatée dans les régions de la Fédération de Russie adjacentes à la frontière ukrainienne.
L’Ukraine appelle l’ensemble des partenaires internationaux à appuyer nos efforts continus en faveur du rétablissement de la paix et de l’application inconditionnelle de la Déclaration de Genève du 17 avril 2014 par toutes les parties. Nous avons demandé à la communauté internationale d’appuyer le plan du Président Poroshenko pour un règlement pacifique de la situation dans l’est de l’Ukraine.
Le Président (parle en russe) : Il n’y a pas d’autre orateur inscrit sur ma liste. Le Conseil de sécurité a ainsi achevé la phase actuelle de l’examen de la question inscrite à son ordre du jour.
La séance est levée à 12 h 25.
Restez en contact
Suivez-nous sur les réseaux sociaux
Subscribe to weekly newsletter