La séance est ouverte à 10 h 35.
La Présidente, Mme Perceval (Argentine) (parle en espagnol) : Conformément à l’article 37 du règlement intérieur provisoire du Conseil, j’invite le représentant de l’Ukraine à participer à la présente séance.
Conformément à l’article 39 du règlement intérieur provisoire du Conseil, j’invite M. Oscar Fernandez- Taranco, Sous-Secrétaire général aux affaires politiques, et M. Ivan Šimonović, Sous-Secrétaire général aux droits de l’homme, à participer à la présente séance.
Le Conseil de sécurité va maintenant aborder l’examen de la question inscrite à son ordre du jour.
Je souhaite de nouveau la bienvenue à M. Oscar Fernandez-Taranco et lui donne la parole.
M. Fernandez-Taranco, Sous-Secrétaire général aux affaires politiques (parle en anglais) : Depuis la dernière fois que nous nous sommes réunis pour parler de l’Ukraine, les résultats des efforts visant à mettre fin au conflit sont restés mitigés. Le 5 septembre, sous les auspices du groupe de contact trilatéral, le protocole de Minsk a été signé pour mettre fin au conflit violent dans l’est de l’Ukraine. Il présente des mesures spécifiques qui, si elles sont pleinement mises en œuvre, aideraient les Ukrainiens à sortir du cauchemar national qu’ils ont vécu une bonne partie de l’année. Comme mesure de suivi, le 19 septembre, le mémorandum de Minsk a été signé. Il donne des précisions sur la mise en œuvre de l’accord de cessez-le-feu. À l’instar de nombreux autres dirigeants, le Secrétaire général a salué ces accords et appelé à leur pleine mise en œuvre.
Néanmoins, malgré ces accords importants, nous sommes présents ici aujourd’hui car il faut faire encore beaucoup plus pour s’assurer qu’une paix durable règne en Ukraine. Des étapes initiales importantes ont été franchies par diverses parties prenantes dans l’application du protocole et du mémorandum de Minsk, parmi lesquelles, notamment,,l’application du cessez- le-feu, l’échange d’un certain nombre de prisonniers et les mesures prises par le Gouvernement ukrainien pour avancer sur la voie de la décentralisation, y compris avec l’adoption d’un statut spécial – une autonomie provisoire – pour certaines zones de Donetsk et Lougansk. Cela étant, les violations de l’accord de cessez- le-feu sont quotidiennes, et se soldent généralement par des morts. Nous devons tous, collectivement, consentir tous les efforts possibles pour appuyer l’application urgente du protocole et du mémorandum de Minsk. Pour le moment, cette application est très lente.
Bien que les combats aient ralenti depuis le 5 septembre, des affrontements sporadiques se poursuivent dans le Donbass. Ils sont principalement concentrés autour de l’aéroport de Donestk et dans les zones autour des villes stratégiques de Lougansk et de Marioupol. Dans l’intervention qu’il fera tout à l’heure, M. Ivan Šimonović, Sous-Secrétaire général aux droits de l’homme, nous fera le point de la situation des droits de l’homme.
La mission spéciale de surveillance de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), qui est chargée de surveiller et de vérifier le respect du cessez-le-feu et des autres dispositions du protocole de Minsk, fait tout ce qu’elle peut pour s’acquitter de son mandat crucial, malgré les difficultés logistiques. L’ONU est en contact constant avec la mission et avec le Secrétariat de l’OSCE pour identifier les zones spécifiques où les compétences et les ressources des Nations Unies peuvent présenter une utilité. La communauté internationale doit appuyer pleinement les efforts de l’OSCE de manière que cette dernière dispose de toutes les capacités requises, ainsi que des accès nécessaires, pour surveiller et vérifier l’application du cessez-le-feu et s’assurer que la frontière entre la Russie et l’Ukraine est totalement sécurisée.
Ces derniers jours, nous avons reçu des informations extrêmement préoccupantes sur les allégations d’emploi généralisé d’armes à sous-munitions, lesquelles sont prohibées à l’échelon international. Ces informations font notamment référence à 12 incidents avérés dans l’est de l’Ukraine, au cours desquels au moins six personnes ont été tuées et des dizaines d’autres ont été blessées. Le 22 octobre, au cours de son entretien avec M. Jeffrey Feltman, Secrétaire général adjoint aux affaires politiques, le Chargé d’affaires de la Mission permanente de l’Ukraine auprès de l’Organisation des Nations Unies a renouvelé les assurances officielles du Ministère ukrainien des affaires étrangères, à savoir que les forces armées ukrainiennes « n’ont jamais utilisé et n’utilisent pas d’armes à têtes multiples ». Le Chargé d’affaires a également souligné l’engagement du Gouvernement ukrainien à apporter une assistance et une contribution actives à l’enquête impartiale qui sera menée sur ces allégations.
Si elles sont confirmées, ces pratiques ignobles sont absolument inacceptables. Il faut mener une enquête urgente et exhaustive sur ces informations, et les responsables, une fois identifiés, devront répondre de leurs actes. Ces allégations graves viennent nous rappeler de façon brutale qu’il y a urgence à appliquer les 12 points du protocole de Minsk, ainsi que le mémorandum, afin de jeter les bases d’une paix durable, du relèvement et de la responsabilisation.
La situation humanitaire dans l’est de l’Ukraine, en particulier avec l’arrivée de l’hiver, reste extrêmement préoccupante. Malgré le cessez-le-feu, les conditions de sécurité restent difficiles, ce qui entrave les opérations de secours. L’ONU continue d’œuvrer pour garantir l’accès des organisations humanitaires à toutes les personnes dans le besoin, notamment dans les régions de l’est de l’Ukraine où la situation est plus instable. Nous devons urgemment redoubler d’efforts pour aider les personnes déplacées et les réfugiés à faire face aux répercussions du conflit et à se préparer à affronter l’hiver. Nous devons également veiller à ce que la situation humanitaire dans le sud-est de l’Ukraine ne se dégrade pas davantage. Ces efforts exigent la poursuite de l’appui de la communauté internationale et un niveau élevé de coordination avec le Gouvernement ukrainien.
Aujourd’hui, nous nous réunissons deux jours à peine avant l’ouverture officielle des bureaux de vote pour les élections parlementaires anticipées en Ukraine. Il importe plus que jamais que les élections législatives extraordinaires et les élections locales, prévues le 26 octobre et le 7 décembre respectivement, puissent avoir lieu dans le calme dans toute l’Ukraine et apportent une contribution clef aux efforts visant à aider à stabiliser le pays et à permettre aux énergies nationales de se focaliser de nouveau sur la réforme, la reconstruction et la réconciliation, pour tous les Ukrainiens.
Les allégations de violences subies par plusieurs parlementaires et représentants issus de divers partis, candidats aux prochaines élections législatives, sont déplorables. De même, la rhétorique incendiaire des groupes rebelles armés qui menacent de perturber le déroulement des élections dans les régions de l’est de l’Ukraine et d’organiser leurs propres élections le 2 novembre, au mépris de la Constitution et de la législation nationale, doit être condamnée par tous.
Toutes les parties prenantes nationales et internationales ne doivent s’épargner aucun effort pour appuyer la réussite des élections parlementaires. Les initiatives internationales de surveillance des élections – avec, en tête, le Bureau des institutions démocratiques et des droits de l’homme de l’OSCE, qui, selon les estimations, a dépêché 600 observateurs, ainsi que 1 700 observateurs internationaux supplémentaires et 37 organisations non gouvernementales nationales inscrites auprès de la Commission électorale centrale – seront critiques. L’ONU accueille favorablement les efforts déployés par les autorités ukrainiennes pour veiller à ce que tous les citoyens ukrainiens soient en mesure d’exercer leur droit de vote, conformément à la Constitution ukrainienne.
Certes, les prochaines élections constituent un pas en avant important pour l’Ukraine, mais elles devront être suivies par une mise en œuvre rapide des réformes politiques, juridiques et économiques d’ensemble annoncées par le Gouvernement ukrainien, ainsi que par le lancement urgent d’un dialogue national exhaustif visant à restaurer la cohésion et à régler tous les problèmes critiques nationaux encore en suspens.
Nous devons tous œuvrer collectivement au règlement pacifique de ce conflit, d’une manière qui préserve la souveraineté, l’indépendance et l’intégrité territoriale de l’Ukraine. Nous ne pouvons pas – et ne devons pas – permettre à l’est de l’Ukraine de venir s’ajouter à la litanie des conflits gelés en Europe. Nous nous félicitons des discussions qui ont eu lieu récemment sur le conflit en Ukraine, en marge de la dixième Réunion Asie-Europe, qui s’est tenue les 16 et 17 octobre à Milan, en Italie. La poursuite des discussions bilatérales entre les Présidents ukrainien et russe concernant les moyens de mettre pleinement en œuvre le protocole et le mémorandum de Minsk reste essentielle.
Le Secrétaire général reste déterminé à user de ses bons offices pour aider à régler ce conflit violent. Nous continuerons à tenir le Conseil informé des efforts collectifs de l’Organisation pour aider le peuple et le Gouvernement ukrainiens à restaurer la paix et la stabilité dans leur pays.
Ces dernières semaines, il est devenu clair que, malgré les accords cruciaux conclus à Minsk, nous sommes toujours loin de leur pleine application, et, de ce fait, de parvenir à instaurer une paix durable en Ukraine. Il incombe à tous les acteurs de s’acquitter de leurs responsabilités et de recentrer leurs efforts dans ce sens. Et il nous incombe à tous de les y aider.
La Présidente (parle en espagnol) : Je remercie M. Fernandez-Taranco de son exposé.
Je donne maintenant la parole à M. Ivan Šimonović.
M. Šimonović, Sous-Secrétaire général aux droits de l’homme (parle en anglais) : Je vous remercie, Madame la Présidente, de me donner l’occasion d’informer le Conseil de sécurité de la situation des droits de l’homme en Ukraine.
Le 8 octobre, le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme a publié son sixième rapport mensuel sur la situation des droits de l’homme en Ukraine, lequel rapport est basé sur les travaux de la Mission de l’ONU de surveillance des droits de l’homme en Ukraine, qui couvrent la période du 18 août au 16 septembre. Aujourd’hui, je voudrais mettre en exergue certaines des principales conclusions du rapport. J’aborderai ensuite les événements qui se sont produits récemment, après la période considérée dans le rapport.
Pendant la période considérée, l’accord de cessez- le-feu du 5 septembre n’a été respecté que dans la mesure où il n’y a eu aucune offensive de grande envergure. Bien que l’on ait fait état de calme dans certains pans de la zone de conflit, comme la ville de Lougansk, les échanges de tirs d’artillerie, d’armes lourdes et d’armes de petit calibre se sont poursuivis au quotidien à d’autres endroits : la ville de Donetsk, notamment autour de l’aéroport, et les villes de Debaltseve, dans la région de Donetsk, et de Chtchastia, aux alentours de Lougansk, ont été les principaux foyers de tensions.
Le nombre de victimes, parmi les militaires et les civils, ne cesse de croître. Au 21 octobre, le bilan officiel du conflit dans l’est était d’au moins 3724 personnes, dont les 298 victimes du vol de la Malaysia Airlines. Je tiens à ajouter que ce nombre n’inclut que les victimes recensées par les ressources disponibles et qu’il est probable que le nombre réel soit sensiblement plus élevé. En moyenne, neuf personnes ont été tuées chaque jour depuis la signature de l’accord de cessez-le-feu. Au plus fort des combats, cet été, la moyenne s’établissait à 42 morts par jour. Le bilan journalier actuel est proche du niveau enregistré entre la mi-avril et la mi-juillet, soit un peu plus de 10 personnes par jour.
Les zones résidentielles continuent de faire l’objet de bombardements aveugles de la part de divers systèmes d’artillerie et de lance-roquettes. Par exemple, le 1er octobre, un bus a été touché par des tirs de roquette au centre de Donetsk, et en conséquence, six civils ont été tués et 25 ont été blessés. Le 14 octobre, sept civils ont été tués et 18 ont été blessés suite à un tir de roquette qui a touché un cortège funèbre dans le village de Sartana, près de la ville de Marioupol dans la région de Donetsk. Des incidents similaires sont signalés presque chaque jour.
Des informations récentes faisant état de l’emploi d’armes à sous-munitions dans les zones résidentielles sont alarmantes. En raison de leur large rayon d’impact, les armes à sous-munitions en général frappent immédiatement et sans discrimination lorsqu’elles sont utilisées dans des zones où se trouvent des civils. Leur emploi dans de telles situations constitue une violation du droit international humanitaire et peut constituer un crime de guerre. Le Gouvernement a nié avoir utilisé des armes à sous-munitions lorsqu’il a été contacté par la Mission de surveillance de droits de l’homme à ce sujet. Il faut impérativement mener rapidement une enquête approfondie sur ces allégations d’emploi d’armes à sous- munitions, ainsi que sur les informations faisant état de bombardements aveugles de zones résidentielles à l’aide d’armes classiques.
Les groupes armés continuent de terroriser les populations dans les zones qu’ils contrôlent, en commettant des meurtres, des enlèvements, des actes de torture, de mauvais traitements et d’autres violations graves des droits de l’homme, y compris la destruction de logements et la saisie de biens. Ils continuent d’enlever des gens pour réclamer une rançon, pour les soumettre au travail forcé ou pour les utiliser dans le cadre d’échanges et de libérations simultanées de détenus avec le Gouvernement ukrainien. Ils continuent également de mobiliser des civils de force et de menacer la population locale d’exécutions.
Par ailleurs, il y a des allégations persistantes de violations des droits de l’homme commises par des bataillons de volontaires sous le contrôle du Gouvernement, qui exercent les fonctions de police dans certains villes et villages récupérés par le Gouvernement. Nous n’avons cessé d’insister auprès du Gouvernement pour qu’il contrôle mieux toutes ses forces, y compris les bataillons de volontaires, et pour veiller à ce que leurs membres qui ont commis des violations et des crimes répondent de leurs actes.
La situation humanitaire dans les zones contrôlées par les groupes armés demeure précaire, en particulier dans la région de Lougansk. En dépit du cessez-le- feu, cela fait deux mois que beaucoup de gens dans la zone de conflit sont privés d’un accès régulier à l’eau et à l’électricité et n’ont qu’un accès limité aux soins de santé et à l’enseignement. L’aide humanitaire est fournie en grande partie par des bénévoles et quelques organisations internationales, notamment le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) et Médecins Sans Frontières. Je voudrais saisir cette occasion pour présenter mes sincères condoléances au CICR à la suite du décès d’un des membres de son personnel dans un attentat commis le 2 octobre dans la ville de Donetsk. Les auteurs de ce crime et d’autres violations du droit international humanitaire doivent être traduits en justice.
Le cessez-le-feu a encouragé de nombreux déplacés à regagner leurs foyers dans les régions de Donetsk et de Lougansk. Certains sont rentrés pour récupérer leurs effets personnels ; d’autres sont rentrés définitivement. En plus des conditions de sécurité qui restent précaires, les personnes qui ont regagné leurs foyers font face à de graves difficultés, notamment le fait que leurs biens ont été détruits ou endommagés et qu’il n’y a pas assez de possibilités d’emploi, vu que de nombreuses sociétés ou secteurs ne fonctionnent pas. Selon le Service d’urgence de l’État en Ukraine, en date du 24 octobre, le nombre total de déplacés enregistrés avait atteint un chiffre record de 430 059. Un grand nombre de déplacés ne sont pas enregistrés.
Le conflit dans l’est du pays a suscité une vague de solidarité chez les Ukrainiens envers les personnes déplacées, mais la capacité des communautés d’accueil à continuer d’absorber les personnes déplacées commence à diminuer. La majorité des déplacés vient toujours de leurs économies, mais certains d’entre eux, en particulier ceux qui sont venus de Crimée, n’ont toujours pas accès à leurs dépôts dans les banques ukrainiennes. Le 20 octobre, le Parlement ukrainien, la Verkhovna Rada, a adopté une loi sur les personnes déplacées. On ne peut que s’en féliciter. Alors que nous attendons que cette loi soit promulguée publiquement et signée par le Président, nous espérons vivement qu’elle fournira des garanties importantes aux déplacés, notamment pour ce qui est de l’accès aux soins de santé, à l’emploi et au logement. Nous allons surveiller son application, avec l’appui de nos partenaires, en particulier le Haut- Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés.
Au cours des dernières semaines, il y a eu une intensification de mesures prises directement par le Secteur droit et d’autres militants pour relever publiquement de leurs fonctions des fonctionnaires soupçonnés de corruption ou d’anciens responsables politiques du Parti des régions. Dans ce contexte, des violences ont été commises à l’encontre de certains individus, notamment des personnalités qui ont été portées à bras d’homme dans des poubelles. Depuis le début du mois de septembre, plus de 12 statues de Lénine ont été renversées dans la région de Kharkiv par des groupes favorables à l’unité du pays. Il semble que dans certains cas, les forces de l’ordre locales font preuve d’indulgence face à ces actes, qui exacerbent les tensions entre les communautés.
Il y a également des informations relatives à des incidents liés aux élections dans certaines régions, notamment des intimidations et des actes de violence à l’encontre du personnel de campagne, des infrastructures du parti et des candidats. La loi de lustration, adoptée le 9 octobre, a été largement critiquée, aussi bien par le Médiateur que par la société civile. Il s’agit d’une loi de vaste portée, qui autorise la lustration d’un certain nombre de postes et interdit aux détenteurs actuels de certains postes de les conserver ou de les occuper à nouveau. En théorie, cette loi pourrait s’appliquer à un million de fonctionnaires.
Certes, il est essentiel que le Gouvernement prenne des mesures pour lutter contre la corruption, mais ces mesures doivent s’accompagner de garanties fondamentales d’une procédure régulière et doivent être appliquées de façon non discriminatoire. J’encourage le Gouvernement à aligner cette loi sur les normes régionales pertinentes. Ces évolutions ont des incidences négatives sur les droits de l’homme et risquent d’exacerber les divisons au sein de la population ukrainienne à un moment où il faut aller de l’avant pour mettre en œuvre le plan de paix et de réconciliation nationale. Dans ce contexte, le respect du principe de responsabilité est non seulement une condition préalable mais aussi la pierre angulaire de toute solution pacifique et durable à la crise en Ukraine.
Après le cessez-le-feu du 5 septembre, il est devenu beaucoup plus facile de récupérer les corps non ensevelis des personnes tuées dans le contexte des hostilités et d’identifier des fosses illégales et de fortune dans la zone de conflit. En conséquence, des centaines de corps ont été retrouvés, mais beaucoup d’entre eux n’ont pas encore été identifiés. Le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme salue les efforts qui sont entrepris pour établir l’identité des morts et remettre les corps à leurs familles, et en vue de leur inhumation dans la dignité.
Dans le cadre de ce processus, la question des fosses communes qui auraient été retrouvées près du village de Nyzhnia Krynka dans la région de Donetsk a fait l’objet d’une large publicité. L’une de ces fosses, située près de l’entrée du village, contenait cinq corps. Deux autres fosses, découvertes sur le territoire de la mine de Komunar numéro 22, contenaient chacune deux corps. Les personnes dont les corps ont été retrouvés dans la première tombe ont été identifiées comme étant des membres des groupes armés et auraient été tués au combat.
Actuellement, les observateurs des droits de l’homme n’ont pas eu connaissance d’allégations selon lesquelles ces personnes auraient été exécutées sommairement. En ce qui concerne les quatre personnes retrouvées dans les deux fosses situées près de la mine, d’après des responsables de la République populaire de Donetsk autoproclamée, il existe des preuves scientifiques qu’elles ont été exécutées sommairement. Le 15 octobre, une équipe d’observateurs a visité l’emplacement de ces trois fosses. L’équipe a également interrogé les membres de famille des deux personnes dont les corps auraient été identifiés. Selon leurs témoignages, ces personnes avaient été préalablement détenues par les forces ukrainiennes.
Il faut mener une enquête approfondie sur l’exécution alléguée de quatre personnes dont les corps ont été retrouvés dans les fosses situées à proximité de la mine Komunar numéro 22 et prendre toutes les mesures qui s’imposent pour préserver les éléments de preuve. Un certain nombre d’autres fosses contenant plusieurs corps auraient été retrouvées dans la zone de conflit, mais les observateurs des droits de l’homme ne disposent pas d’informations selon lesquelles ces fosses contiendraient les corps de victimes d’exécutions sommaires ou arbitraires. Si de telles informations sont portées à leur connaissance, elles devront faire l’objet d’une enquête en bonne et due forme.
Le respect du principe de responsabilité est le garant de la réconciliation. Il faut également déployer des efforts pour s’assurer que les membres des groupes armés qui ont commis des violations graves des droits de l’homme, y compris des meurtres, des disparitions forcées et des actes de torture, répondent de leurs actes.
À cet égard, je me félicite de ce que le protocole en 12 points de Minsk, qui inclut la promulgation d’une loi autorisant l’abandon des poursuites contre les personnes liées aux événements qui ont eu lieu dans certaines parties des régions de Donetsk et de Lougansk, exclut toute amnistie pour des crimes comme le génocide, le terrorisme, le meurtre et le fait infliger de graves blessures, les sévices sexuels, la prise d’otages et la traite d’êtres humains. Toutefois, la loi semble permettre l’amnistie pour les actes de torture, ce qui doit être clarifié en vue de mettre cette loi en conformité avec les normes et règles internationales.
Autre tendance préoccupante en Crimée, outre les violations des droits de l’homme précédemment signalées : l’augmentation du nombre des cas de disparition forcée. En particulier, je tiens à dire que je suis préoccupé par l’enlèvement de quatre Tatars de Crimée le mois dernier, dont un a été retrouvé mort. Il est impératif de déterminer où se trouvent les personnes disparues et de faire que les responsables de leur enlèvement en répondent.
La mise en œuvre de l’accord de cessez-le-feu du 5 septembre reste fragile. Des violations des droits de l’homme et du droit international humanitaire se poursuivent. Nous risquons d’être confrontés à un autre conflit prolongé de faible intensité, comme l’a indiqué le Sous-Secrétaire général, M. Fernandez-Taranco. Néanmoins, l’accord de cessez-le-feu du 5 septembre offre toujours la meilleure possibilité d’un règlement pacifique de la situation dans l’est.
Je suis persuadé que le protocole en 12 points de Minsk à de fortes chances de tenir s’il est appliqué conformément aux normes des droits de l’homme. Près de la moitié des dispositions du protocole sont susceptibles, en fait, d’influer positivement sur la situation des droits de l’homme. Afin de contribuer à une paix durable et de faciliter la réconciliation, la mise en œuvre de l’accord doit se baser sur le respect de l’état de droit et des droits de l’homme.
Je me félicite aussi de ce que le Président Poroshenko ait signé le 15 octobre le décret concernant l’élaboration d’une stratégie nationale des droits de l’homme, visant à créer un mécanisme de protection globale des droits de l’homme. D’après le document, le du Conseil des Ministres est chargé de la supervision de l’élaboration de cette stratégie, avec la participation des autorités gouvernementales, des organismes publics locaux, des organisations de la société civile et d’experts internationaux.
Le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme œuvre de concert avec l’ensemble du système des Nations Unies, le Conseil de l’Europe, l’institution nationale des droits de l’homme et le Gouvernement à l’adoption d’une approche globale répondant aux exigences des Nations Unies, dans le cadre du processus d’adhésion à l’Union européenne.
À la veille des élections parlementaires de dimanche en Ukraine, nous demandons aux autorités de veiller à ce que ces élections soient libres, équitables et ouvertes et qu’elles se déroulent dans un climat de tolérance, de paix et de respect des droits de l’homme.
La Présidente (parle en espagnol) : Je remercie M. Šimonović de son exposé.
Je donne maintenant la parole aux membres du Conseil de sécurité.
Sir Mark Lyall Grant (Royaume-Uni) (parle en anglais) : Le Royaume-Uni a demandé la tenue de la présente séance d’information parce que nous restons vivement préoccupés par la situation en Ukraine. Avec l’annexion illégale de la Crimée, la difficile situation des droits de l’homme qui y règne ainsi que dans l’est de l’Ukraine, et le refus de la Russie d’honorer ses engagements au titre des accords de Minsk, il ne fait aucun doute que la situation continue de représenter une menace claire à la paix et à la sécurité internationales.
Je suis reconnaissant au Sous-Secrétaire général, M. Šimonović, de son exposé. Le Royaume-Uni se félicite du travail qu’accomplit la mission d’observation des droits de l’homme de l’ONU en Ukraine, dont les rapports objectifs et impartiaux tranchent nettement avec la désinformation et la propagande russes. Son sixième rapport lève le voile sur dures conditions de vie dans les régions contrôlées par les séparatistes à Donetsk et Lougansk, où « les groupes armés continuent de terroriser la population » et où « l’ordre public s’est complètement effondré ». Dans ces régions, les meurtres, les enlèvements, la torture et d’autres graves violations des droits de l’homme se poursuivent impunément, et les victimes n’ont droit ni à une protection ni à la justice. Le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCR) se préoccupe à bon droit de la non- application du principe de responsabilité. Il est essentiel qu’il y ait des enquêtes indépendantes sur toutes les allégations de graves violations, quels qu’en soient les auteurs.
Nous sommes profondément troublés par le rapport de Human Rights Watch rendu public cette semaine, qui contient des allégations d’emploi d’armes à sous-munitions par l’armée ukrainienne. Nous savons que l’Ukraine réfute ces allégations et nie que l’armée ukrainienne utilise de telles armes. Nous prenons acte aussi de ce que l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) ait indiqué aujourd’hui que ses observateurs n’ont aucune preuve que des bombes à sous-munitions ont été utilisées, et nous nous félicitons de ce que l’Ukraine se soit engagée à coopérer avec Human Rights Watch et à enquêter plus avant sur ces allégations.
Nous sommes profondément troublés par les informations du HCR faisant état de la détérioration de la situation des droits de l’homme dans la péninsule de Crimée illégalement annexée. L’introduction de la législation russe, en violation de la résolution 68/262 de l’Assemblée générale, a limité les libertés d’expression, de réunionpacifique, d’association, de religion et de croyance. Le traitement infligé à la population tatare de Crimée est particulièrement inquiétant. La Russie a souvent dit qu’elle se préoccupait des droits des minorités en Ukraine, mais nous ne voyons aucune preuve qu’elle se préoccupe des droits des Tatars de Crimée.
La situation humanitaire dans les régions contrôlées par les groupes armés séparatistes reste précaire et va même s’aggraver encore davantage à l’approche de l’hiver. Mais l’envoi par la Russie de convois en Ukraine, sans accord du Gouvernement ukrainien et en violation de la souveraineté de l’Ukraine, est un acte de provocation qui ne doit pas se répéter. L’aide humanitaire est nécessaire, mais elle doit être fournie dans le cadre d’une action internationale coordonnée par les agences compétentes et avec l’accord du Gouvernement ukrainien. Si la Russie veut aider à améliorer les conditions de vie des civils vivant dans l’est de l’Ukraine, elle doit retirer immédiatement de l’Ukraine toutes ses forces militaires, arrêter de fournir des armes aux séparatistes, aider plutôt à rétablir la souveraineté de l’Ukraine et œuvrer en faveur d’un règlement politique de la crise.
Le Sous-Secrétaire général, M. Fernandez- Taranco, décrit bien dans son exposé la fragilité de la situation dans l’est de l’Ukraine où les combats et les violations du cessez-feu se poursuivent au quotidien. Les accords de Minsk offrent une réelle perspective de désescalade des tensions dans l’est de l’Ukraine. Toutes les parties doivent joindre l’acte à la parole et honorer les engagements qu’ils ont pris. Le Gouvernement ukrainien a pris d’importantes mesures, notamment l’octroi d’un statut spécial aux districts de Donetsk et de Lougansk et la promulgation d’une loi d’amnistie qui, comme le note le rapport du HCR, est conforme aux normes internationales des droits de l’homme. Et le Gouvernement s’apprête maintenant à tenir des élections locales régies par la loi ukrainienne dans les zones de Donetsk et de Lougansk contrôlées par les séparatistes.
La Russie, par contre, continue de fournir armes et matériels aux séparatistes, notamment des lance-roquettes multiples et des pièces d’artillerie, de maintenir plusieurs centaines de soldats sur le territoire ukrainien et, énième rappel inquiétant des tactiques auxquelles elle a recouru pour façonner des « conflits gelés » en République de Moldova et en Géorgie, délivre des passeports aux habitants des zones tenues par les séparatistes. Comme les accords de Minsk le stipulent clairement, pour que la situation dans l’est de l’Ukraine se stabilise, il est essentiel que tous les groupes armés illégaux, le matériel militaire, les combattants et les mercenaires se retirent, et que la frontière ukraino- russe soit sécurisée au moyen d’une surveillance accrue sous vérification de l’OSCE.
Si la Russie est attachée à ces accords, pourquoi alors a-t-elle bloqué ce mercredi à Vienne un renforcement de la surveillance de sa frontière par l’OSCE ? Cela est en violation de l’article 4 du protocole de Minsk et montre que la Russie vise à empêcher toute surveillance efficace de sa frontière afin qu’elle puisse continuer de fournir armes et matériels aux groupes d’activistes. La stabilité ne sera pas rétablie si la Russie continue d’appuyer les groupes séparatistes, dont les chefs ont fait part de leur intention d’étendre le territoire qu’ils contrôlent.
Les élections parlementaires de ce dimanche prouvent l’attachement de l’Ukraine à la démocratie. Elles doivent pouvoir se dérouler sans influence extérieure. Les autorités ukrainiennes sont en train de prendre les mesures nécessaires pour permettre au plus grand nombre possible de citoyens d’exercer leur droit de vote, notamment en mettant en place des arrangements pour les personnes déplacées de leurs foyers par l’instabilité dans l’est et pour les ressortissants du territoire illégalement annexé de Crimée.
Nous espérons que la Russie, en tant que membre permanent du Conseil de sécurité et partie aux accords de Minsk, œuvrera au rétablissement de la paix et de la sécurité en Ukraine en respectant le résultat des élections et en appuyant la tenue des prochaines élections locales en vertu de la législation ukrainienne. Nous demandons instamment aux Russes de ne pas revenir sur les engagements qu’ils ont pris, mais plutôt de faire jouer leur influence afin de prévenir l’organisation d’élections distinctes par les séparatistes à Donetsk ou Lougansk en novembre. Ces élections seraient illégales, contraires aux accords de Minsk et constitueraient un obstacle de taille au rétablissement d’une paix durable en Ukraine.
Mme Murmokaitė (Lituanie) (parle en anglais) : Je tiens à remercier les Sous-Secrétaires généraux, M. Oscar Fernández-Taranco et M. Ivan Šimonović, de leurs exposés. Nous remercions la Mission de l’ONU de surveillance des droits de l’homme en Ukraine de son action et attendons avec impatience ses futurs rapports. Les missions de surveillance de l’ONU et de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) doivent pour avoir un accès total, libre et sans restriction à l’ensemble du territoire de l’Ukraine, y compris la Crimée.
Depuis la dernière séance que nous avons tenue sur la situation en Ukraine (voir S/PV.7253), un cessez- le-feu a été instauré, ou plutôt un « tirer d’abord et cesser après », selon l’interprétation des séparatistes. Durant cette période, les forces et les civils ukrainiens ont été bombardés environ 2 000 fois, quelque 90 soldats ukrainiens ont été tués et 500 ont été blessés. Le chef autoproclamé de la prétendue République populaire de Donetsk, Zakharchenko, prétend que toute la région de Donetsk lui appartient, et qu’il pourrait saisir les villes de Berdiansk et Izioum, entre autres.
Des soldats russes continuent d’être tués sur le territoire ukrainien – des soldats qui officiellement ne se trouvent même pas sur place. Yelena Vasilyeva, chef d’un groupe de femmes russes, « Cargo 200 from Ukraine to Russia », affirme que quelque 4000 soldats russes ont perdu la vie en Ukraine.
Les chefs de clan séparatistes autoproclamés dans l’est de l’Ukraine – des pions du Kremlin en vue d’appliquer son dangereux plan Novorossia visant à redessiner les frontières de l’Europe – ne perdent pas de temps pour saper les progrès accomplis à Minsk. Les attaques incessantes de groupes armés illégaux contre l’aéroport de Donetsk sont une réalité quotidienne. Les derniers rapports de la Mission spéciale d’observation de l’OSCE font état de tentatives de saisir des cibles stratégiques de la part des groupes armés séparatistes. Du matériel militaire russe sophistiqué, des lance- roquettes multiples, des chars et des munitions continuent de semer la mort et la destruction sur le sol ukrainien, et la frontière reste grande ouverte aux allées et venues d’hommes en treillis et en uniforme cosaque.
De fait, seul un kilomètre sur les 400 que mesure la frontière, qui échappe actuellement au contrôle de l’Ukraine, est surveillé par l’OSCE. Lors d’une réunion du Conseil permanent de l’OSCE tenue le 22 octobre, la Russie a à elle seule bloqué l’extension des activités de la Mission d’observation de l’OSCE à l’ensemble de la frontière. « Nous contrôlons la frontière et nous ne laisserons pas de gardes-frontières ukrainiens y revenir. Nous n’avons pas non plus besoin de la présence de médiateurs internationaux à la frontière », a déclaré Andrei Purgin, premier Vice-Premier Ministre autoproclamé de la République populaire de Donestk, selon Interfax. En effet, pourquoi auraient-ils besoin d’une présence internationale qui serait témoin des flux illégaux de matériel militaire et de combattants étrangers ou qui pourrait établir le fait que le charbon et le matériel ukrainiens sortent clandestinement du pays, avec des conséquences économiques et financières considérables pour l’Ukraine ?
N’oublions pas qu’en août et septembre, la Russie a envoyé trois convois d’aide humanitaire non autorisés en Ukraine, en violation claire de la souveraineté de l’Ukraine, sans que les autorités ukrainiennes n’aient l’occasion de les inspecter et sans coordination du Comité international de la Croix-Rouge. Fait notable, immédiatement après l’entrée de ces mystérieux convois, les rebelles ont rapidement repris du terrain et annulé les progrès accomplis par l’Ukraine en vue de débarrasser la région des groupes armés illégaux.
Alors que l’Ukraine se prépare à organiser des élections nationales capitales le 26 octobre, les séparatistes prévoient d’organiser leur propre scrutin le 2 novembre – une nouvelle élection frauduleuse, illégale et illégitime, une autre violation cynique et flagrante des accords de Minsk. La Russie, qui est si prompte à proférer des accusations contre l’Ukraine, dont certaines ont été invalidées depuis longtemps, n’a pas condamné ne serait-ce qu’une seule fois les multiples violations du cessez-le-feu commises par les militants illégaux qu’elle continue de soutenir pleinement.
La situation des droits de l’homme dans les zones contrôlées par des groupes armés soutenus par la Russie reste une source de profonde préoccupation. Les exécutions extrajudiciaires, la torture, l’intimidation, les humiliations publiques, les mauvais traitements, l’extorsion, les enlèvements contre rançon et le travail forcé portent le sceau des militants pro-russes dans l’est de l’Ukraine. Comme l’indique le dernier rapport du groupe de surveillance, la violence contre les femmes dans les zones contrôlées par les séparatistes, notamment les viols, a atteint des proportions inquiétantes. Les informations qui font état de la présence d’enfants soldats dans les rangs des militants séparatistes et d’écoles militaires pour les enfants sont une indication que des violations du droit international humanitaire sont commises.
La situation de la communauté autochtone tatare en Crimée, qui est occupée par la Russie, continue de se détériorer. Les enlèvements, la torture et les meurtres de jeunes hommes tatars en Crimée, leur persécution et leur éviction du Majlis de Simféropol, ainsi que les interrogatoires d’activistes de la communauté, se poursuivent sans relâche. Pourtant, une fois encore, en dépit des multiples atrocités commises par les groupes séparatistes illégaux, ces crimes n’ont pas été condamnés une seule fois par la Russie. Ironie du sort, la Russie, qui traite résolument par le mépris les rapports publiés par Human Rights Watch concernant ces violations, notamment les disparitions forcées en Crimée, cite maintenant abondamment un rapport de Human Rights Watch concernant l’utilisation présumée d’armes à sous-munitions en Ukraine. Le meilleur moyen pour l’Ukraine, qui nie l’utilisation de ces armes, d’éviter toute spéculation future à cet effet serait qu’elle adhère à la Convention d’Oslo, et nous l’exhortons à le faire.
Contrairement à ce que prétend la Russie, l’Ukraine montre son attachement à la mise en œuvre des accords de Minsk. La situation revient lentement à la normale dans les zones débarrassées de l’insurrection illégale. Des lois importantes ont été adoptées, comme l’a souligné le Sous-Secrétaire général, M. Šimonović. Le 18 octobre, la loi sur le statut spécial de Lougansk et Donetsk est entrée en vigueur. Nous saluons la volonté de l’Ukraine de poursuivre des réformes difficiles mais nécessaires, et nous encourageons fermement le Gouvernement à poursuivre le dialogue national et à garantir la pleine participation de toutes les composantes de la population.
Dans le même temps, il convient de souligner que si la Russie ne coopère pas pleinement et n’applique pas les accords de Minsk dans leur intégralité, ces derniers n’auront d’autre valeur que celle du papier sur lequel ils sont imprimés. La seule solution viable est une solution qui respecte pleinement la souveraineté, l’indépendance, l’unité et l’intégrité territoriale de l’Ukraine, y compris la Crimée, qui fait partie intégrante de l’Ukraine. La Russie doit rappeler immédiatement toutes ses formations armées, son matériel militaire et ses combattants du territoire de l’Ukraine, arrêter de soutenir et d’armer les séparatistes, et elle doit condamner sans équivoque les élections illégales prévues par les commandos séparatistes. Il faut assurer une surveillance et une vérification permanentes des deux côtés de la frontière russo-ukrainienne. La Russie doit également s’abstenir d’attiser davantage les tensions dans toute la région. Le projet d’accord récemment proposé concernant l’alliance et l’intégration entre la Fédération de Russie et la république fantoche d’Abkhazie n’est rien de plus qu’une annexion de facto d’une région qui fait partie intégrante de la Géorgie.
Les pertes humaines se chiffrent en milliers et le nombre de personnes déplacées en centaines de milliers, et il est essentiel d’établir les responsabilités concernant les violations des droits de l’homme commises durant la guerre contre l’Ukraine. Les auteurs de violations graves du droit international humanitaire et du droit international des droits de l’homme doivent être amenés à rendre des comptes. À cet égard, nous encourageons l’Ukraine à adhérer au Statut de la Cour pénale internationale et à accélérer ses efforts pour garantir la responsabilisation. Nous réitérons également notre position concernant le vol MH17, à savoir que ceux qui sont à l’origine de cet acte et ceux qui ont entravé l’accès au lieu de l’accident et l’enquête doivent être amenés à rendre des comptes.
M. Pressman (États-Unis d’Amérique) (parle en anglais) : Je remercie les Sous-Secrétaires généraux, M. Oscar Fernández-Taranco et M. Ivan Šimonović, de leurs exposés.
Les États-Unis ont toujours été déterminés et restent déterminés à trouver une solution pacifique à la crise en Ukraine. La paix appelle le respect – du droit international, des frontières, de la souveraineté des autres pays. Elle exige que l’on respecte ses engagements et que l’on assume ses actes. Pourtant, durant les 25 séances consacrées par le Conseil de sécurité à l’Ukraine, cela s’est avéré un problème insurmontable pour la Russie. La Russie continue de fournir des ressources, des armes et une formation aux séparatistes, tout en continuant de nier les faits. La pilote ukrainienne, Nadiya Savchenko, a été capturée par des séparatistes en Ukraine et transférée illégalement en Russie, où elle est en ce moment soumise de force à une prétendue « évaluation psychiatrique », ce en quoi ses droits fondamentaux sont violés en ayant recours à une pratique tristement célèbre du temps de l’Union soviétique. On nous a signalé que d’autres Ukrainiens sont également détenus en Russie, là encore au mépris des normes internationales. Ces agissements doivent s’arrêter.
Il existe un moyen clair de rétablir la paix en Ukraine. Toutes les parties, y compris la Russie et les séparatistes qu’elle soutient, doivent honorer les engagements qu’elles ont pris le 5 septembre à Minsk. Au nombre de ces engagements, il y a l’arrêt immédiat de toutes les violations du cessez-le-feu, la reprise par l’Ukraine du contrôle de son côté de la frontière internationale, la surveillance de la frontière par l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) et l’instauration d’une zone de sécurité de chaque côté de la frontière, le retrait des forces, des mercenaires et du matériel étrangers d’Ukraine et la libération des otages et des prisonniers. Toutes les parties ont pris 12 engagements le 5 septembre, et les Ukrainiens ont pris des mesures pour honorer tous ceux qui relèvent de leur responsabilité.
Malheureusement, tant les séparatistes soutenus par la Russie que la Russie elle-même ne se montrent pas capables de tenir leurs engagements pris à Minsk. En réaction aux lois ukrainiennes sur le statut spécial qui octroie un autonomie supplémentaire à certaines parties de Donetsk et de Lougansk, y compris des élections spéciales prévues le 7 décembre, les séparatistes ont déclaré unilatéralement qu’ils tiendraient leurs propres « élections » locales en novembre. Cette mesure est anticonstitutionnelle et complètement incompatible avec les accords de Minsk. Elle révèle en outre les véritables intentions des séparatistes, qui ne consistent pas à donner plus d’autonomie à la population en lui offrant un choix dans le cadre du processus politique légal de l’Ukraine, mais plutôt à organiser un nouveau scrutin qu’une fois encore ils peuvent truquer.
Les assauts continus des séparatistes en certains points de Donetsk et Lougansk, y compris au niveau de l’aéroport et alentour, font de nombreux morts et blessés parmi les membres des forces armées et les civils ukrainiens et entraînent la destruction d’infrastructures vitales. Ces attaques se produisent depuis l’accord de Minsk et l’entrée en vigueur du cessez-le-feu. Le non- respect du cessez-le-feu ne fait que causer plus de difficultés et de souffrances aux habitants de la région du Donbass. Ce sont eux qui sont contraints de vivre sans eau ni électricité et sans possibilité d’assurer leur subsistance, et ce sont les écoles de leurs enfants qui sont prises entre deux feux. Personne ne devrait avoir à vivre dans de telles conditions.
Le peuple ukrainien vivra ce dimanche un jour à marquer d’une pierre blanche quand il se rendra aux urnes pour élire un nouveau parlement, démontrant par là son attachement à la poursuite du processus démocratique en dépit du soulèvement politique de l’année passée. Nous espérons une participation forte de tous les Ukrainiens, y compris en Crimée, à Donetsk et à Lougansk, et condamnons fermement toute ingérence dans cet effort légitime en faveur de la démocratie.
Alors que l’Ukraine cherche à s’assurer un avenir pacifique, stable et sûr, la Russie continue d’occuper son territoire national. Après la tentative d’annexion de l’Ukraine par son pays, le représentant de la Russie a promis au Conseil qu’il n’avait « pas à s’inquiéter du sort des Tatars de Crimée » (S/PV.7157, p. 23). Pourtant, rapport après rapport, nous sommes informés de violations diverses, notamment des arrestations, des expulsions, des restrictions imposées à la circulation et la suspension des libertés d’expression, de réunion pacifique, d’association et de religion ou de croyance. L’occupation russe de la Crimée doit prendre fin et, d’ici là, il est impératif que les autorités d’occupation russes cessent de harceler les minorités religieuses et ethniques et donnent aux observateurs internationaux des droits de l’homme et aux observateurs de l’OSCE un accès total à la Crimée. Dans cette région, nous voyons de quelle manière un groupe de séparatistes qui s’est emparé du pouvoir sous le prétexte de protéger une minorité s’est fait l’oppresseur cruel d’une autre. Nous ne devons pas nous attendre à une attitude différente de la part des séparatistes qui cherchent à prendre le contrôle de la partie orientale de l’Ukraine.
Nous nous félicitons de l’engagement de l’Ukraine à enquêter sur les accusations qui font état de charniers et nous notons qu’en juillet, avec l’aide d’experts internationaux, le pays a entamé une enquête sur des fosses communes contenant huit corps qui ont été découvertes à Slaviansk après que la ville a été soustraite à la férule des séparatistes. Nul n’est au- dessus des lois, et les États-Unis souhaitent que toutes les allégations concernant l’existence de charniers fassent l’objet d’enquêtes complètes, approfondies et impartiales. La mise en œuvre intégrale de l’accord de Minsk serait évidemment de nature à favoriser la progression de ces enquêtes.
Nous avons également connaissance des rapports établis par des organisations non gouvernementales au sujet de l’utilisation d’armes à sous-munitions. Nous notons les dénégations du Gouvernement ukrainien à cet égard. Nous prenons très au sérieux toutes les accusations concernant les atteintes faites aux civils et condamnons sans équivoque tout bombardement aveugle de zones civiles. Rien ne peut justifier les violations commises à l’encontre de quiconque se bat dans l’est de l’Ukraine et toutes les accusations de ce genre devraient être soumises à des enquêtes diligentes dès que les conditions de sécurité le permettront. Cela suppose bien sûr la coopération des séparatistes et de leurs soutiens russes.
Ces derniers jours, les lignes de démarcation du cessez-le-feu ont été au centre de l’attention, mais n’oublions pas une ligne plus importante encore : la frontière internationale. En effet, le quatrième point des 12 que comporte l’accord de Minsk du 5 septembre prescrit la surveillance permanente de la frontière entre l’Ukraine et la Russie et sa vérification par l’OSCE. Le Gouvernement ukrainien a récemment présenté un plan pour la prise en charge de cette surveillance, la restauration du contrôle par l’Ukraine de son côté de la frontière, la prévention du franchissement illégal de la frontière par du personnel et du matériel et la création d’une zone de sécurité exempte d’armements dans les zones adjacentes à la frontière entre l’Ukraine et la Fédération de Russie. Cependant, la Russie, à l’instar des séparatistes, n’a pas mis ce plan à exécution et refuse le déploiement des observateurs de l’OSCE le long de la frontière.
Tant qu’une mission complète de surveillance n’aura pas été mise en place au niveau de la frontière internationale, fournitures et équipement continueront d’affluer depuis la Russie à destination des séparatistes et ces derniers pourront poursuivre à leur guise leur va-et-vient entre les deux pays. Le Président Poutine a déclaré à Milan qu’il n’envisagerait pas d’autoriser l’OSCE à surveiller la frontière tant que les résidents du Donbass ne seront pas en sécurité. En réalité, c’est tout l’inverse. Les résidents du Donbass ne seront pas en sécurité tant que l’OSCE ne surveillera pas la frontière. La souveraineté de l’Ukraine doit être restaurée tout le long de sa frontière avec la Russie.
Si la frontière peut être sécurisée et que des élections libres et régulières peuvent se tenir – non seulement le 26 octobre dans toute l’Ukraine pour la Rada, mais aussi le 7 décembre dans les régions de Donetsk et Lougansk –, tout le monde en sortira gagnant et cela servira la cause de la paix et de la sécurité. Les agissements de la Russie au cours des derniers mois ont remis en cause les principes les plus fondamentaux de notre système international. Les frontières ne peuvent ni ne doivent être redessinées au canon d’un fusil ou sur le seul caprice d’un dirigeant et de son cercle d’amis. Nous avons identifié un moyen de parvenir à la paix. Les parties y ont souscrit à Minsk. Il repose sur des engagements concrets et vérifiables, qui doivent tous être mis en œuvre. L’Ukraine a pris des mesures sincères pour honorer ses engagements. Tel n’est pas le cas de la Russie et des séparatistes qu’elle soutient. Nous les appelons à remplir les obligations qu’ils ont contractées, et nous les appelons à le faire immédiatement.
M. Delattre (France) : Je remercie M. Fernandez- Tarranco de sa présentation. Je remercie également M. Šimonović pour son exposé, et mon collègue britannique pour avoir suscité cette réunion.
La situation des droits de l’homme en Ukraine continue de se détériorer. Le sixième rapport de la Mission de l’ONU de surveillance des droits de l’homme en Ukraine est à ce titre éclairant. Il relève une escalade des hostilités culminant début septembre, soit juste avant la signature du cessez-le-feu. Le rapport le souligne : si ces combats ont atteint un tel niveau d’intensité, c’est que les milices armées pro-russes ont bénéficié du soutien de nombreux combattants étrangers, y compris russes, ainsi que de renforts en armements sophistiqués. Les responsables de cette escalade sont ceux qui ont estimé, voilà maintenant plusieurs mois, au mépris de la Charte des Nations Unies, que la souveraineté ukrainienne pouvait être violée.
Depuis les accords de Minsk, le front s’est globalement stabilisé, entraînant une diminution du niveau global de la violence, même si le cessez-le-feu est régulièrement violé, et que des combats continuent ici et là du fait de la volonté des séparatistes d’homogénéiser leur territoire. La situation de cet été a entraîné une augmentation significative des pertes humaines, à la fois civiles et militaires. Cet embrasement a également conduit à une multiplication des violations des droits de l’homme, avec un recours à la torture, aux exécutions sommaires, aux enlèvements. Nous condamnons toute violation des normes internationales, y compris de protection des droits de l’homme, qui doivent être respectés par toutes les parties au conflit. C’est particulièrement vrai dans les zones contrôlées par les séparatistes. C’est en effet dans ces zones qu’on vit dans la peur et sous la menace ; ce sont ces zones que des milliers de civils ont fui. Rappelons-le : la peine de mort a été rétablie à Donetsk ; quand on quitte son domicile, il est confisqué ; il n’y a plus de police, plus de tribunaux pour défendre les Ukrainiens contre l’arbitraire des milices. Dans ce contexte, des milliers de personnes sont jetées sur les routes, contraintes d’abandonner tout ce qu’elles possédaient, et, à l’approche de l’hiver, les populations déplacées vont se retrouver dans une situation de grave précarité.
Nous suivons également avec préoccupation la dégradation de la situation des populations de Crimée. Les Tatars, en particulier, subissent les exactions des groupes d’autodéfense, de multiples vexations administratives, des expropriations et des arrestations arbitraires. Leurs droits fondamentaux, tels que la liberté d’expression, la liberté de religion et de conscience ainsi que la liberté de mouvement sont régulièrement bafouées. Nous rappelons à ce titre notre attachement à la souveraineté et à l’intégrité territoriale de l’Ukraine dans ses frontières internationales.
Dans ce contexte sombre, une nouvelle dynamique a pourtant vu le jour. Avec la signature du cessez-le-feu à Minsk le 5 septembre, puis d’un accord le 19 septembre, un processus diplomatique s’est enfin engagé entre Kiev et Moscou. La France avec ses partenaires européens continuera à appuyer ce contact entre Russes et Ukrainiens, notamment dans le cadre des rencontres en format Normandie. Ces accords sont une bonne base pour envisager une sortie de crise qui repose sur trois axes : le respect du cessez-le-feu, la surveillance de la frontière et des discussions politiques afin de trouver une solution pérenne.
Les discussions ont lieu et les Présidents Poutine et Poroshenko se sont rencontrés à Milan la semaine passée en marge du Sommet Asie-Europe. Des avancées sur le contrôle de la frontière et d’une manière générale, le contrôle du cessez-le-feu ont pu avoir lieu.
Pour autant, nous resterons vigilants afin que cesse enfin le soutien aux séparatistes, l’affaiblissement de l’État et de l’état de droit et que soit pleinement respecté le cessez-le-feu.
Nous attendons la sécurisation de la frontière russo-ukrainienne et sa surveillance permanente sous l’égide de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE). Nous pensons que le mandat de la mission de l’OSCE en territoire russe doit être renforcé et élargi le plus rapidement possible à d’autres postes frontières.
Ces efforts déployés témoignent de notre engagement collectif à régler la crise ukrainienne. Mais cette crise ne peut être réglée que si tous les acteurs se comportent avec la même sincérité. Nous saluons les mesures prises par l’Ukraine pour mettre en œuvre ses engagements, notamment l’adoption par le Parlement ukrainien des lois prévoyant un statut transitoire d’autonomie locale. Nous souhaitons à ce titre que la mise en place de ce nouveau statut à travers la tenue prochaine d’élections locales puisse être l’occasion pour toutes les parties de s’engager résolument dans la désescalade et la sortie de crise.
Par ailleurs, nous appelons toutes les parties à œuvrer effectivement pour permettre la tenue ce dimanche des élections législatives anticipées, dans le respect des normes internationales, et sur l’ensemble du territoire ukrainien. Ces élections sont essentielles pour permettre à l’Ukraine de poursuivre le chemin nécessaire des réformes. Ceux qui s’opposeraient à ce scrutin montreraient leur refus du compromis et de la paix.
Les élections de ce dimanche sont autant une chance d’un nouveau départ pour l’Ukraine, pour la Russie et pour la stabilité dans l’ensemble de la région.
Mme Paik Ji-ah (République de Corée) (parle en anglais) : Je remercie le Sous-Secrétaire général Fernandez-Taranco et le Sous-Secrétaire général Šimonović pour leurs présentations.
Depuis la signature de l’accord de Minsk, la République de Corée suit de près la situation dans l’est de l’Ukraine dans l’espoir qu’un virage se fasse vers une solution politique à cette crise. Toutefois, alors même que le niveau de violence a diminué, les combats continuent de faire rage à Donetsk, les rapports faisant état de bombardements et d’accrochages quotidiens qui menacent de faire capoter un cessez-le-feu fragile. Nous avons été particulièrement perturbés par le rapport selon lequel plus de 300 personnes auraient été tuées depuis l’entrée en vigueur du cessez-le-feu. Ces violations constantes du cessez-le-feu montrent clairement que le risque d’une nouvelle escalade des tensions est toujours présent. Nous devons bien garder à l’esprit que la moindre provocation pourrait de nouveau faire sombrer la situation dans une spirale incontrôlable. Compte tenu de la volatilité de la situation sur le terrain, toutes les parties concernées doivent prendre sans plus tarder des mesures crédibles afin que le cessez-le-feu soit observé de manière durable et, notamment, que le mémorandum de cessez-le-feu de Minsk soit pleinement mis en œuvre. Tout nouvel acte d’incitation ou de provocation visant à perturber le processus de paix doit cesser immédiatement.
À cet égard, nous sommes d’avis que le cessez- le-feu doit être soumis à un contrôle effectif et à une vérification fiable dans le cadre de la mise en œuvre du mémorandum d’accord de Minsk. Un mécanisme d’observation international et impartial, telle la Mission spéciale d’observation de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, est un outil indispensable pour la vérification des engagements pris dans le cadre du cessez-le-feu. Dans le même temps, tous les acteurs sur le terrain doivent garantir la sûreté et la sécurité de l’ensemble du personnel international dans des circonstances difficiles et dangereuses.
Nous tenons également à saisir la présente occasion pour réitérer notre plein appui au travail de la mission d’observation des droits de l’homme des Nations Unies en Ukraine. Comme son dernier rapport l’explique en détail, la poursuite des combats dans l’est de l’Ukraine a entraîné une détérioration continue de la situation des droits de l’homme et de la situation humanitaire, ce qui reste extrêmement préoccupant. Nous sommes profondément attristés que ce conflit ait déjà fait plus de 3000 victimes et un grand nombre de personnes déplacées dont la situation, avec l’approche de l’hiver, devient de plus en plus précaire. En outre, au vu des rapports de violations généralisées des droits de l’homme par des groupes armés illégaux – tueries, enlèvements, détentions arbitraires et tortures – il devient urgent d’en traduire les auteurs en justice et de déterminer les responsabilités.
Des élections importantes étant prévues pour le 26 octobre, nous voudrions réitérer qu’un processus politique inclusif est le fondement essentiel d’un avenir stable et démocratique pour tous les Ukrainiens. À cet égard, nous nous félicitons des mesures progressives prises par le Gouvernement ukrainien pour mettre en œuvre les dispositions du mémorandum de cessez-le- feu de Minsk, notamment l’adoption d’un projet de loi sur une amnistie et un statut spécial pour la région de l’est, ce qui constitue une mesure importantes vers un processus politique plus inclusif qui, nous l’espérons, fournira une bonne base à la désescalade des tensions.
Enfin, la République de Corée appuie les efforts diplomatiques en cours vers la stabilisation de l’Ukraine, y compris les réunions tenues récemment en marge du sommet Europe-Asie qui a eu lieu à Milan. Si la situation sur le terrain reste tendue, ces efforts diplomatiques constructifs nous donnent néanmoins des raisons d’espérer. Encore une fois, nous encourageons toutes les parties concernées à déployer un maximum d’efforts pour parvenir à un règlement politique pacifique.
M. Hmoud (Jordanie) (parle en arabe) : Je remercie le Sous-Secrétaire général aux affaires politiques, M. Fernandez-Taranco, et le Sous-Secrétaire général aux droits de l’homme, M. Šimonović, pour leurs exposés très complets sur les récents événements survenus en Ukraine et sur la situation des droits de l’homme.
La Jordanie a pris note du sixième rapport de la mission d’observation des droits de l’homme des Nations Unies en Ukraine, publié par le Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme. Nous déplorons le non-respect des dispositions les plus importantes du plan de paix, à savoir la cessation complète des hostilités et l’arrêt des affrontements entre les forces ukrainiennes et les séparatistes, bien que la fréquence de ces heurts ait diminué. Un nombre croissant de crimes ont été commis contre les citoyens – déplacements forcés, tortures et travail forcé notamment – privés de leur droit à la stabilité et à la sécurité. La Jordanie est préoccupée par les rapports d’organisations des droits de l’homme faisant état de l’utilisation lors de plusieurs attaques de bombes à sous-munitions. C’est là une violation des dispositions du droit international et une évolution dangereuse de la situation qui met en danger la vie des citoyens. Dans ce contexte, nous demandons l’ouverture d’une enquête internationale indépendante et objective sur l’utilisation de ces armes qui font l’objet d’une interdiction internationale.
La Jordanie exprime son appui à la mission d’observation des droits de l’homme des Nations Unies en Ukraine et à la mission spéciale d’observation de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, en raison de leur rôle important qui consiste à suivre régulièrement le déroulement des événements et à présenter des rapports périodiques au Conseil sur la situation sur le terrain en Ukraine, en particulier dans l’est du pays. Nous demandons au Gouvernement ukrainien et aux séparatistes de faciliter l’accès de ces missions à toutes les régions du pays afin de promouvoir la sécurité et la stabilité. Nous réitérons notre plein appui aux efforts visant à trouver une solution à cette crise par la voie du dialogue et de la diplomatie, et nous réaffirmons la nécessité de protéger les citoyens et de respecter les dispositions du droit international et du droit international des droits de l’homme et de prévenir les attaques illicites contre les citoyens, qui constituent une violation des droits de l’homme.
Mettre fin à ce conflit est une responsabilité politique et morale pour l’ensemble des parties prenantes. Le Conseil de sécurité doit jouer son rôle et consentir tous les efforts possibles pour faciliter une solution politique qui respecte la souveraineté et l’unité de l’Ukraine. Nous appelons toutes les parties à respecter leurs engagements, ainsi que l’accord de paix et le mémorandum de Minsk, et à faire preuve d’une réelle volonté de surmonter les divergences de vues afin de parvenir à une solution durable.
Nous saluons les mesures positives prises par l’Ukraine, à savoir la ratification de certains actes législatifs, en particulier ceux qui octroient un statut spécial aux régions de Donetsk et Lougansk- auxquelles ils accordent un gouvernement autonome pendant une durée de trois ans – et l’organisation d’élections locales en décembre prochain. Nous appelons le Gouvernement ukrainien à déployer davantage d’efforts pour garantir les droits de tous les citoyens ukrainiens, y compris ceux des minorités, et à veiller à ce que ces droits soient justes et égaux. En effet, la justice et la protection des droits politiques, économiques et sociaux des personnes constituent l’un des facteurs les plus importants pour la stabilité et la sécurité.
Nous espérons que les élections législatives prévues pour le 26 octobre seront organisées dans un climat de stabilité et de confiance afin de promouvoir le processus de réforme et un retour à l’état de droit et la démocratie dans la vie politique en Ukraine.
Mme Lucas (Luxembourg) : À mon tour, je remercie le Sous-Secrétaire général aux affaires politiques, M. Oscar Fernandez-Taranco, et le Sous- Secrétaire général aux droits de l’homme, M. Ivan Šimonović, de leurs exposés.
Le Luxembourg est gravement préoccupé par la situation des droits de l’homme dans l’est de l’Ukraine, en particulier dans les régions de Lougansk et de Donetsk qui échappent au contrôle du Gouvernement ukrainien. Nous condamnons les nombreux cas de meurtres, d’enlèvements, de torture, de simulacres d’exécution, de travail forcé et d’enrôlement de force dont les groupes armés séparatistes se sont rendus coupables. Le rapport du 16 septembre du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme mentionne aussi l’adoption d’un code pénal illégal rétablissant la peine de mort pour certains crimes, la confiscation des logements des personnes qui ont fui le conflit, l’humiliation publique des opposants politiques et des soldats ukrainiens faits prisonniers. Ces actes méritent notre condamnation unanime.
Nous condamnons aussi les violations des droits de l’homme commises par les bataillons de volontaires engagés aux côtés des forces ukrainiennes. Nous avons pris connaissance avec préoccupation des allégations concernant l’utilisation de bombes à sous-munitions par les parties au conflit dans l’est de l’Ukraine. La Mission spéciale d’observation de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) n’a cependant pas pu confirmer la véracité de ces allégations, et nous notons que l’Ukraine a nié que ses forces aient utilisé de telles armes. Nous saluons la disponibilité de l’Ukraine à coopérer pour qu’une enquête impartiale et indépendante permette de faire toute la lumière sur ces graves allégations, et nous attendons des séparatistes qu’ils fassent de même. Les attaques indiscriminées dans les zones peuplées sont à condamner et doivent cesser.
L’Ukraine a le droit et l’obligation de défendre son territoire contre les atteintes continues et répétées à sa souveraineté et à son intégrité territoriale. En même temps, il est essentiel que l’Ukraine respecte ses obligations internationales et que ses forces agissent à tout moment de manière proportionnelle et mesurée. Comme le dit le Haut-Commissariat aux droits de l’homme, avec le nombre croissant de rapports faisant état de graves violations du droit international humanitaire et des droits de l’homme commises dans la zone de conflit, il est crucial d’assurer la redevabilité et de lutter contre l’impunité.
La situation dans l’est de l’Ukraine ne doit pas nous faire oublier les problèmes qui persistent en Crimée depuis son annexion illégale par la Russie, en flagrante violation des principes de la Charte des Nations Unies et de la résolution 68/262 de l’Assemblée générale. Les droits des minorités continuent d’être violés, en particulier ceux des Tatars de Crimée et des populations parlant l’ukrainien, qui s’opposent dans leur grande majorité aux changements politiques récents. Nous sommes particulièrement préoccupés par les intimidations récurrentes qui visent le Mejlis du peuple des Tatars de Crimée et ses membres, les activistes de la cause des Tatars de Crimée et les journalistes qui couvrent ces événements.
Nous nous félicitons de l’approbation, dans le cadre du groupe de contact trilatéral, du protocole de Minsk du 5 septembre et du mémorandum de Minsk du 19 septembre, qui constituent un pas vers une solution politique durable à la crise. Cette solution doit être fondée sur le respect de l’indépendance, de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de l’Ukraine. Nous prenons note de la diminution du niveau global de la violence à la suite de l’accord de cessez-le-feu. Cependant, le cessez-le-feu continue de faire l’objet de nombreuses violations, en particulier de la part des séparatistes, ce que nous condamnons vivement.
Le Luxembourg salue les efforts déployés par l’Ukraine pour mettre en œuvre les engagements qu’elle a pris, notamment l’adoption par le Parlement ukrainien des lois prévoyant une amnistie et un statut transitoire d’autonomie locale. Il faut maintenant redoubler d’efforts pour que les parties mettent en œuvre tous les autres engagements pris dans les documents de Minsk. Lundi dernier à Luxembourg, l’Union européenne a souligné la responsabilité qui incombe à la Fédération de Russie à cet égard, et demandé le retrait des groupes armés, du matériel militaire, des combattants et des mercenaires illégaux, ainsi que la sécurisation de la frontière entre l’Ukraine et la Russie, et sa surveillance permanente sous vérification de l’OSCE. Nous déplorons qu’il n’ait pas encore été possible d’étendre la mission d’observation de l’OSCE déployée aux postes frontières de Goukovo et de Donetsk à d’autres postes frontières adjacents au territoire occupé par les séparatistes.
Nous saluons les dispositions prises par le Gouvernement ukrainien en vue de la bonne tenue, après-demain, le 26 octobre, des élections législatives anticipées. Ces élections devront permettre au pays de poursuivre les réformes positives entreprises depuis quelques mois. Pour s’assurer que le scrutin soit libre et équitable, un rôle clef reviendra à la mission d’observation électorale de l’OSCE à laquelle mon pays, comme d’autres autour de cette table, participe activement.
Nous appelons la Fédération de Russie à utiliser son influence sur les séparatistes pour favoriser la bonne tenue des élections locales prévues le 7 décembre prochain, en vertu de la nouvelle loi ukrainienne. En effet, seul ce scrutin permettra d’élire des représentants légitimes des régions concernées qui pourront participer à la reprise du dialogue national sans exclusive en Ukraine.
Je conclurai par une évidence. Il est grand temps de mettre fin à ce conflit qui a déjà causé la mort de plus de 3700 personnes, parmi elles au moins 36 enfants.
Les accords trouvés à Minsk sont une occasion unique qu’il convient de saisir pour rétablir la paix. Il n’est dans l’intérêt de personne qu’un nouveau conflit s’enracine sur le continent européen.
M. Quinlan (Australie) (parle en anglais) : Je remercie le Sous-Secrétaire général, M. Fernandez- Taranco, et le Sous-Secrétaire général, M. Šimonović, de leurs exposés. L’Australie apporte tout son soutien au travail que mène actuellement le Haut-Commissariat aux droits de l’homme concernant la situation des droits de l’homme en Ukraine, un travail particulièrement important pour permettre au Conseil de se faire une idée de l’évolution de la situation en Ukraine et dont nous avons évidemment grand besoin. Comme nous l’avons vu, le sixième rapport de la Mission de l’ONU de surveillance des droits de l’homme en Ukraine suscite, encore une fois, de graves préoccupations.
Des faits encourageants ont été enregistrés pendant et après la période à l’examen, notamment l’accord de cessez-le-feu et le protocole de Minsk conclus début septembre, le rétablissement de l’ordre public dans certaines parties de l’est de l’Ukraine, et le retrait partiel du personnel et du matériel militaires russes du territoire ukrainien. Pourtant, nous sommes profondément inquiets de la poursuite des hostilités dans certaines parties de l’est de l’Ukraine, lesquelles ont fait bien plus de 300 morts – civils et combattants – depuis l’instauration du cessez-le-feu. Le dernier rapport fait état d’un nombre considérable de victimes, d’un grand nombre de personnes déplacées, de l’état déplorable d’infrastructures essentielles et du fait que des milliers d’enfants n’ont plus accès à l’éducation. L’Australie appelle toutes les parties à respecter le cessez-le-feu et à engager un dialogue véritable, constructif, afin de trouver une solution politique.
Le rapport brosse un tableau très préoccupant de la vie dans les territoires de l’est de l’Ukraine occupés par les groupes armés. Nous avons affaire une fois de plus à un rapport de l’ONU faisant état de l’effondrement de l’ordre public dans les zones sous contrôle des séparatistes. Les cas d’enlèvements contre rançon, de travail forcé, de tortures et d’exécutions extrajudiciaires portent la marque de fabrique de la criminalité et de l’illégitimité. Le meurtre d’un agent du Comité international de la Croix-Rouge touché dans les bombardements de Donetsk est déplorable et souligne une fois de plus à quel point il est nécessaire que toutes les parties respectent le droit international humanitaire. Toute violation du droit international humanitaire par l’une quelconque des parties au conflit doit faire l’objet d’une enquête en bonne et due forme et tous les responsables doivent être tenus d’en répondre.
Le respect du cessez-le-feu constitue à l’évidence un important facteur aux fins d’une solution politique, mais il en va de même de la préservation de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de l’Ukraine. Nous sommes troublés par les informations crédibles en provenance, notamment, de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), selon lesquelles un nombre important de combattants étrangers continueraient de traverser la frontière russe pour pénétrer en Ukraine, où des attaques de grande ampleur seraient perpétrées contre des points de contrôle frontaliers ukrainiens. Cela doit cesser. La frontière entre la Russie et l’Ukraine doit être sécurisée, dans l’idéal, par une surveillance permanente dans le cadre de la mission étendue de vérification de l’OSCE. Il est troublant que la Russie se soit opposée à cela.
Nous prenons acte des informations faisant état d’un possible recours à des munitions interdites ainsi que de bombardements aveugles. Nous notons également que le Gouvernement ukrainien a nié avoir joué le moindre rôle dans des violations de cet ordre. Il est clair qu’il est nécessaire d’établir la séquence des faits exacte. Si de telles violations existent, elles doivent cesser. Nous relevons également que la violation persistante du cessez-le-feu empêche la réinstallation des nombreux milliers de personnes que le conflit a forcées au déplacement. Comme l’a souligné ce matin le Sous-Secrétaire général, M. Šimonović, cette situation est d’autant plus inquiétante que l’hiver arrive.
L’Ukraine tiendra des élections législatives dans deux jours. Les Ukrainiens ont le droit d’avoir des élections libres, équitables et transparentes. Il est clair qu’elles doivent se dérouler sans ingérence extérieure. Elles doivent avoir lieu dans le calme, de façon à ce que la liberté d’expression et la liberté de réunion pacifique soient préservées dans le cadre de la législation ukrainienne.
Les annonces faites par les républiques autoproclamées de Donetsk et de Lougansk selon lesquelles elles ont l’intention de tenir des élections séparées en novembre sont en contravention aussi bien avec la lettre qu’avec l’esprit du protocole de Minsk et compromettent les efforts déployés pour trouver une solution politique durable dans le cadre de la loi ukrainienne. Ces prétendues élections ne sauraient avoir la moindre légitimité. Comme le relève le rapport, les structures de gouvernance parallèles actuellement créées à Donetsk et à Lougansk ne sont pas conformes aux normes internationales ni, bien sûr, à la Constitution de l’Ukraine.
Le rapport appelle encore une fois l’attention du Conseil sur les inquiétantes violations multiples des droits de l’homme constamment commises dans le territoire de Crimée illégalement annexé, à commencer par les lois russes imposées qui limitent les libertés d’expression, de réunion pacifique, d’association et de religion. La persécution et l’intimidation de la population tatare de Crimée sont inadmissibles.
Les dimensions internationales du conflit en Ukraine sont connues de nous tous, notamment les familles australiennes pleurant toujours la perte de leurs proches dans l’accident du vol MH17. Toutes les informations dont nous disposons, y compris le rapport d’enquête préliminaire indépendant du Conseil néerlandais de la sûreté, concordent avec la version que l’avion assurant le vol MH17 a été abattu par un missile sol-air tiré d’un lieu contrôlé par les séparatistes appuyés par les Russes. L’Australie, à l’instar de ses partenaires néerlandais et malaisien, reste déterminée à retourner sur le site de l’accident lorsque les conditions seront suffisamment sûres et à faire tout ce qui est en son pouvoir pour traduire en justice ceux qui ont abattu cet avion et sont responsables du meurtre de tous ceux qui étaient à son bord.
Pour terminer, nous ne devons pas oublier la cause première de la situation dans l’est de l’Ukraine : la campagne insistante de déstabilisation délibérée menée par la Russie. Toutefois, il y a moyen de mettre fin à la violence dans l’est de l’Ukraine : la Russie doit retirer tout soutien aux séparatistes, enlever toutes ses forces et tous ses moyens militaires du territoire ukrainien, respecter les frontières de l’Ukraine, se conformer à ses obligations au titre des accords de Minsk et engager un vrai dialogue avec l’Ukraine. En continuant de refuser d’entendre l’appel de la communauté internationale à une désescalade de la crise, la Russie ne peut que s’acculer elle-même à un plus grand isolement.
M. Barros Melet (Chili) (parle en espagnol) : Nous remercions tout d’abord le Sous-Secrétaire général aux droits de l’homme, M. Ivan Šimonović, de son exposé sur la situation des droits de l’homme en Ukraine et le Sous-Secrétaire général aux affaires politiques, M. Fernandez-Taranco, du travail qu’il effectue dans le pays au nom et aux côtés du Secrétaire général.
Le rapport que nous examinons décrit de façon préoccupante la situation des droits de l’homme dans l’est de l’Ukraine. L’augmentation dramatique des violations du droit à la vie, du droit à la liberté et du droit à la sécurité que subissent actuellement les civils au Donbass souligne la nécessité du rétablissement de l’état de droit et du respect de la souveraineté, de l’indépendance et de l’intégrité territoriale de l’Ukraine conformément à la résolution 68/262 de l’Assemblée générale et aux dispositions du droit international. Les derniers rapports en date faisant état d’une utilisation possible de bombes à sous-munitions dans l’est de l’Ukraine sont particulièrement préoccupants. Il convient de faire enquête sur les faits allégués et s’ils étaient avérés, d’en traduire les responsables en justice. Comme nous l’avons souligné dans différentes enceintes, nous condamnons l’utilisation de ce type d’armes et en appelons aux pays qui ne l’ont pas encore fait afin qu’ils signent et ratifient la Convention sur les armes à sous-munitions dans les plus brefs délais.
Nous insistons de nouveau sur la nécessité de garantir la reddition de comptes dans tous les cas de violations des droits de l’homme et d’exactions commis en Ukraine. Il est également indispensable que les autorités mènent à bien leur enquête et que soient traduits en justice les responsables de la mort de 48 personnes à Odessa le 2 mai dernier, et que l’on éclaircisse les raisons pour lesquelles les forces de sécurité ne sont pas intervenues à temps et de manière plus décisive. Nous sommes préoccupés, de même, par la situation des droits de l’homme en Crimée, particulièrement la discrimination dont font l’objet les ressortissants ukrainiens et la minorité tatare.
Dans le domaine humanitaire, la situation des personnes déplacées dans l’est de l’Ukraine, qui sont déjà, selon le Bureau de la coordination des affaires humanitaires, plus de 400000 – pour la plupart des femmes et des enfants –, est alarmante et constitue un signe évident de la gravité de la crise. Nous accueillons avec satisfaction, à cet égard, l’adoption, le 20 octobre, au Parlement ukrainien de la Loi sur les droits et libertés des personnes déplacées.
Dans la perspective des élections prévues cette semaine, nous aimerions redire qu’un processus politique fédérateur fondé sur le dialogue est fondamental si l’on veut assurer à l’ensemble du peuple ukrainien un avenir stable et démocratique. Nous nous félicitons à cet égard des mesures progressives adoptées par le Gouvernement ukrainien afin de mettre en œuvre les dispositions du protocole de Minsk, et en particulier celles qui ont trait au cessez-le-feu, à la libération de tous les prisonniers, ainsi qu’au retrait des groupes armés et à leur désarmement.
Tout en réitérant notre appel afin que soient respectés intégralement, d’urgence, l’état de droit, la démocratie et les droits de l’homme en Ukraine, y compris les droits de toutes les minorités, nous renouvelons également notre appui au travail de la mission d’observation des droits de l’homme en Ukraine ainsi que de la mission de surveillance de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe.
M. Liu Jieyi (Chine) (parle en chinois) : Je souhaite remercier le Sous-Secrétaire général aux affaires politiques, M. Fernandez-Taranco, ainsi que le Sous-Secrétaire général aux droits de l’homme, M. Šimonović, de leurs exposés.
La Chine note que, depuis la signature des accords de Minsk entre le Gouvernement ukrainien et les milices de l’est de l’Ukraine, au début de septembre, il n’y a pas eu d’affrontements armés de grande ampleur dans l’est de l’Ukraine. Toutefois, les conditions de sécurité sur le terrain demeurent précaires, avec des accès de violence sporadiques, en violation de l’accord de cessez-le-feu, qui provoquent des victimes et des dommages aux infrastructures.
La Chine est profondément préoccupée par la situation. La priorité absolue est désormais que les parties concernées mettent effectivement et intégralement en œuvre les accords de Minsk et veillent au respect du cessez-le-feu et à l’arrêt des violences dans l’est de l’Ukraine. C’est le seul moyen véritable d’améliorer la situation humanitaire dans le pays et de créer les conditions nécessaires à la fourniture d’une assistance humanitaire. La Chine espère que la communauté internationale continuera de jouer un rôle constructif en faveur de l’amélioration de la situation humanitaire en Ukraine. La Chine continue de penser que les organes des Nations Unies chargés des droits de l’homme et les organismes internationaux de secours humanitaire doivent respecter rigoureusement les principes d’objectivité et de neutralité dans l’accomplissement de leur travail.
La question de l’Ukraine fait intervenir un passé historique complexe qui a des répercussions sur les problèmes contemporains. Les parties concernées doivent s’attaquer à la racine du problème et trouver une solution globale. Tout en s’efforçant de satisfaire pleinement les droits, intérêts et revendications légitimes de toutes les régions et de tous les groupes ethniques en Ukraine, il faut prendre soin de répondre aux préoccupations légitimes des parties et trouver un équilibre entre les différents intérêts. Une solution politique est la seule bonne manière de régler la question de l’Ukraine. La Chine espère que les parties concernées vont continuer d’appliquer les accords de Minsk et de mener des efforts et des échanges constructifs afin d’entamer le plus rapidement possible un dialogue ouvert en vue de parvenir à un règlement politique complet, équilibré et durable de la question de l’Ukraine.
La communauté internationale doit insister auprès des parties pour qu’elles fassent plein usage des canaux de communication et des possibilités de dialogue qui existent, prennent des mesures propices à la confiance mutuelle et évitent la confrontation. La Chine appuie tous les efforts qui aideront les parties à procéder au dialogue et à la concertation afin de parvenir à un règlement politique de la crise, et nous continuerons de jouer un rôle actif et constructif dans la recherche d’un règlement politique de la question de l’Ukraine.
M. Nduhungirehe (Rwanda) (parle en anglais) : Je vous remercie, Madame la Présidente, d’avoir convoqué la présente séance. Je tiens aussi à remercier M. Oscar Fernandez-Taranco, Sous-Secrétaire général aux affaires politiques, et M. Ivan Šimonović, Sous- Secrétaire général aux droits de l’homme, de leur exposé respectif sur la situation politique et la situation des droits de l’homme en Ukraine.
Le Conseil de sécurité se préoccupe du conflit en Ukraine depuis le mois de février. Au fil des mois qui ont suivi, plus de 3700 personnes ont été tuées, plus de 9000 civils ont été blessés et plus de 824000 Ukrainiens ont été obligés de fuir de chez eux. On dénombre plus de 430000 déplacés. La position du Rwanda est claire et n’a pas changé. Elle s’articule autour de trois principes clefs. Le premier est qu’il faut mettre un terme aux hostilités et garantir le respect de l’indépendance, de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de l’Ukraine. Le deuxième est qu’il faut encourager un dialogue authentique entre les Ukrainiens, privilégier la réconciliation nationale, accorder une certaine autonomie et défendre les droits des minorités. Enfin le troisième, est qu’il faut obtenir un règlement diplomatique de la crise, avec la participation des pays et des organisations de la région.
C’est dans ce contexte que le Rwanda se félicite de la signature du protocole d’accord de Minsk en 12 points, le 5 septembre, déclarant un cessez-le-feu dans l’est de l’Ukraine, ainsi que du mémorandum pour sa mise en oeuvre, le 19 septembre, sous les auspices du groupe de contact trilatéral. Nous prenons acte avec satisfaction des mesures déjà prises par le Président Petro Poroshenko et le Parlement ukrainien pour mettre en œuvre ce qui a été convenu, à savoir la mise en place du cessez-le-feu, les échanges de prisonniers et l’adoption d’une loi d’amnistie et d’une loi sur l’autonomie. Nous pensons que les élections législatives de dimanche vont concourir à la mise en œuvre de ces accords, car elles sont déterminantes pour la consolidation de la démocratie, la diversité ainsi que la primauté du droit en Ukraine. Nous sommes toutefois préoccupés par les discours incendiaires des séparatistes armés qui rejettent ces élections, et nous insistons sur le fait que seules des élections organisées par le Gouvernement légitime de Kiev seront constitutionnelles et conformes aux accords de Minsk.
Bien que le cessez-le-feu ait un temps redoublé les espoirs de paix, nous sommes inquiets de voir que le Premier Ministre de la République populaire autoproclamée de Donetsk a officiellement décrété la fin du cessez-le-feu, du fait de violations régulières de celui-ci par les parties armées. Dans ce contexte, nous renouvelons notre appel à tous les groupes armés illégaux présents en Ukraine, principalement dans les régions de Donetsk et de Lougansk, à déposer les armes, et nous invitons instamment le groupe de contact trilatéral à user de son influence pour faire en sorte que le travail de la Mission spéciale d’observation de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe ne soit pas entravé et que le protocole de Minsk soit pleinement respecté.
Le Rwanda est profondément troublé par les conclusions du rapport semestriel de la Mission de l’ONU de surveillance des droits de l’homme en Ukraine. Nous condamnons la poursuite des actes de terreur auxquels se livrent les groupes armés dans les zones sous leur contrôle, où ils ont commis des meurtres, des enlèvements, des actes de torture et d’autres atteintes graves aux droits de l’homme, y compris des mauvais traitements, la destruction d’habitations et la spoliation de biens. Nous condamnons de la même manière les violations du droit international des droits de l’homme commises par certains des bataillons de volontaires sous contrôle du Gouvernement ukrainien. En outre, nous tenons à faire part de notre préoccupation face à l’utilisation d’armement lourd et aux bombardements aveugles de zones densément peuplées, y compris semble-t-il au moyen de bombes à sous-munitions. Compte tenu de la réponse du Gouvernement ukrainien, qui nie employer des munitions illégales, nous espérons qu’une enquête complète, approfondie et indépendante sera menée pour faire toute la lumière sur ces allégations.
De manière plus générale, étant donné le tableau bien sombre de la situation des droits de l’homme en Ukraine, le Rwanda exhorte toutes les parties au conflit à respecter le droit international humanitaire et le droit international des droits de l’homme. Nous nous félicitons que le Gouvernement ukrainien ait pris l’engagement d’enquêter sur les allégations de violations des droits de l’homme, y compris celles faisant état de charniers, et nous insistons sur le fait que les coupables, y compris ceux qui ont la responsabilité du commandement, devront rendre des comptes.
Je voudrais conclure en signalant qu’avec les combats en cours, l’hiver qui approche à grands pas et la pénurie actuelle de gaz en Ukraine, la partie est du pays va droit vers une catastrophe humanitaire. Nous demandons donc aux dirigeants politiques ukrainiens, et à ceux qui ont une influence sur eux, de faire montre de leadership et d’un vrai sens des responsabilités en faisant en sorte que le cessez-le-feu tienne et en trouvant une solution politique et diplomatique durable à une crise qui n’a que trop duré.
M. Gombo (Tchad) : Je voudrais remercier M. Oscar Fernandez-Taranco, Sous-Secrétaire général aux affaires politiques, et M. Ivan Šimonović, Sous- Secrétaire général aux droits de l’homme, de leurs exposés.
Le Tchad demeure très préoccupé par la dégradation de la situation humanitaire et sur le plan de la sécurité en Ukraine, particulièrement dans l’est du pays. Sur le plan humanitaire, le Tchad note que malgré l’accord de Minsk du 5 septembre, qui inclut le cessez-le-feu, l’utilisation d’armes lourdes et des bombardements aveugles dans des zones d’habitation continue de manière quotidienne. Nous sommes d’autant plus préoccupés que selon certaines sources, l’armée ukrainienne et les forces séparatistes utilisent des bombes à sous-munitions dans les combats qu’elles se livrent dans l’est de l’Ukraine. Comme le Conseil le sait, ces types de bombes causent des dégâts énormes. Parfois, lorsqu’elles n’explosent pas, elles deviennent des mines en puissance. Le Tchad condamne énergiquement l’utilisation de ce type d’armes de destruction massive, en violation des conventions internationales, et appelle à la cessation immédiate des hostilités.
Sur le plan humanitaire, les chiffres mettent en évidence la forte augmentation des victimes civiles dans ce contexte d’intensification des combats. Selon le rapport du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, on dénombre à ce jour plus de 3000 personnes tuées et à peu près 9000 blessés dans l’est de l’Ukraine. Malgré la trêve en date du 5 septembre, il y a plus de 350 personnes tuées. S’agissant des personnes déplacées, l’Ukraine en compte plus de 400 000.
Le moment est grave. La majorité des populations des zones de conflit font face à des difficultés considérables. Elles n’ont pas accès à l’éducation, aux services de santé, à un logement, à un abri et au travail. De plus, avec la venue de l’hiver et l’impasse dans laquelle se trouvent les négociations entre l’Ukraine et la Fédération de Russie sur la fourniture de gaz, nous craignons que, pour des millions de personnes, la situation devienne insoutenable. Dans les régions de Donetsk et de Lougansk, des milliers de personnes sont privées de revenus car environ 40000 petites et moyennes entreprises ont cessé leur activité à cause des combats.
En outre, les pratiques liées à la guerre – tels la torture, les enlèvements, les détentions illégales, l’intimidation, la confiscation des biens, les exécutions sommaires et arbitraires et les violences sexuelles – visant les populations civiles auxquelles se livrent les forces gouvernementales tout comme les séparatistes sont inadmissibles. Le Tchad condamne toutes ces violences et atteintes aux droits de l’homme et au droit international humanitaire.
Vu l’ampleur de ce conflit et malgré les appels répétés de la communauté internationale et du Conseil de sécurité, le Tchad pense que la situation n’est pas seulement fragile, comme le précise le rapport ; bien au contraire, nous sommes proches d’une crise humanitaire aiguë. Face à cette situation, le Tchad exhorte les parties au conflit à la retenue et au calme et appelle les pays ayant une influence sur les acteurs en présence à tout mettre en œuvre pour qu’une solution politique soit trouvée à cette crise qui n’a que trop duré.
Le Tchad félicite le Gouvernement ukrainien pour les efforts faits en vue de la pacification et de la consolidation de la paix en Ukraine : tout d’abord, la signature de l’accord de Minsk et le mémorandum signé par le groupe de contact trilatéral le 19 septembre à Minsk ; ensuite, la ratification, le 16 septembre, par le Parlement ukrainien de la loi sur l’autonomie particulière de certaines parties des régions de Donetsk et de Lougansk ainsi que la loi sur l’amnistie et la libération immédiate de tous les otages et détenus. Ces efforts doivent continuer car les élections législatives prévues dimanche seront une autre étape clef de la volonté de paix en Ukraine.
La situation humanitaire appelle à la responsabilité des dirigeants et acteurs politiques. Des solutions durables doivent être offertes aux populations affectées en donnant la priorité aux problèmes structurels qui portent atteinte aux droits humains conformément aux normes internationales et aux recommandations contenues dans le rapport du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme sur la situation des droits de l’homme en Ukraine, et dans le cadre du respect de la résolution 68/262 de l’Assemblée générale sur la souveraineté et l’intégrité territoriale de l’Ukraine.
M. Laro (Nigéria) (parle en anglais) : Je remercie les orateurs qui ont présenté un exposé pour leur déclaration. Le Nigéria salue les efforts faits par des dirigeants européens pour trouver une solution à la crise dans l’est de l’Ukraine. La récente réunion entre le Président Poroshenko et le Président Poutine lors du Sommet Asie-Europe a ouvert une perspective prometteuse. Ces échanges de haut niveau offrent selon nous un cadre pour envisager des moyens de mettre fin à l’instabilité et à la violence dans lesquelles l’est de l’Ukraine est plongé. Nous insistons sur le fait qu’une solution diplomatique est le seul moyen viable de trouver une solution à la crise dans l’est de l’Ukraine.
L’accord de Minsk est un progrès encourageant qui donne un moyen d’apaiser les tensions dans l’est de l’Ukraine. Nous considérons que, s’il est pleinement mis en œuvre, il pourrait permettre de rétablir la paix et la stabilité dans la région. Nous exhortons donc toutes les parties à respecter les engagements qu’elles ont pris au titre de cet accord.
Depuis que nous examinons cette question, nous avons toujours insisté sur le respect des principes consacrés par la Charte des Nations Unies : le respect de la souveraineté, de l’indépendance et de l’intégrité territoriale des États. À cet égard, nous condamnons le fait que les forces séparatistes ont l’intention d’organiser des élections locales en novembre. Cela est contraire à l’esprit de l’accord de Minsk et peut menacer encore la paix, l’unité et la souveraineté de l’Ukraine. Nous appelons les États Membres qui exercent une influence sur les séparatistes à les convaincre de renoncer à ce projet et de ne pas organiser ces élections, dans l’intérêt de la paix et de la sécurité en Ukraine.
M. Churkin (Fédération de Russie) (parle en russe) : Cela doit être, à ce jour, la vingt-cinquième fois que nous réunissons pour discuter de la crise interne en Ukraine qui s’est pratiquement transformée en guerre civile. Pourtant, malgré un calendrier très chargé et les efforts internationaux considérables qui ont pris différentes formes, l’Ukraine ne fait que se rapprocher encore plus vite du fond de l’abîme. Quelle en est la raison ?
La réponse est sous nos yeux. Dès le début de la crise, nous avons averti que les faits survenus en Ukraine l’hiver dernier – encouragés par une ingérence extérieure grossière qui a abouti à un coup d’État – pourraient entraîner une division profonde du pays qui ne pourrait être surmontée que dans le cadre d’un dialogue national commun auquel toutes les régions, tous les pouvoirs politiques et tous les groupes ethniques participeraient et qui respecterait leurs intérêts et leurs droits. Ces principes, qui ouvraient véritablement la voie à un règlement pacifique de ce conflit, ont été acceptés par la Russie, les États-Unis, l’Ukraine et l’Union européenne le 17 avril à Genève. Ils n’ont toutefois pas été appliqués. Ils n’ont pas été acceptés par l’ensemble de la nouvelle et de l’ancienne élite ukrainienne ou tous leurs parrains étrangers. Il n’y a pas eu de dialogue ni de réforme constitutionnelle, qui avait été promise.
Au lieu d’avancer vers une solution équilibrée qui aurait contribué à stabiliser la situation et à renforcer l’unité de l’Ukraine, le parti de la guerre à Kiev n’a cessé d’être encouragé par des capitales occidentales à mener une opération punitive pour lutter contre la dissidence, fragilisant ainsi les liens économiques, culturels et humanitaires avec la Russie. En tentant d’empêcher que la crise ne s’aggrave, nous avons exhorté les parties à cesser de diviser l’Ukraine et de l’obliger à choisir, de manière artificielle, entre l’Union européenne et l’Occident, et la Russie.
Qu’observons-nous aujourd’hui ? Aujourd’hui, à Kiev et à Bruxelles, tout le monde revient en fait à ce par quoi nous aurions dû commencer : le report de l’accord d’association avec l’Union européenne, que le Président Yanukovych, évincé, avait voulu reporter. Le fait d’avoir retardé cette décision pendant près d’un an a pour prix la vie de milliers de personnes, près d’un million de réfugiés, un grand nombre de personnes déplacées, une économie détruite, une guerre civile et la situation très grave des civils dans les régions de Donetsk et de Lougansk, auxquels nous continuerons de fournir une aide humanitaire d’urgence. Nous sommes prêts à coopérer avec les autorités ukrainiennes sur ce point et avec le Comité international de la Croix-Rouge, mais nous n’accepterons aucune obstruction, malgré ce que peuvent dire les pharisiens.
Certains collègues, au Conseil et dans d’autres nobles organes, ont déclaré plus d’une fois que le soulèvement de Maïdan et les processus politiques internes qui ont suivi sont le résultat des aspirations démocratiques du peuple ukrainien et de leur attentes concernant les valeurs européennes et l’état de droit. Cela est louable. Néanmoins, que voyons-nous en réalité ? S’agissant de ceux qui, en Ukraine, souhaitent véritablement le développement civilisé de leur pays, ils sont nombreux, et nous ne pouvons que témoigner de la sympathie à leur égard. La campagne électorale en cours se caractérise tout particulièrement par la mauvaise foi et le cynisme. L’arène politique a été vidée de concurrents, tant au sens figuré que littéral. Une loi sur l’épuration a été adoptée, ce qui annonce une grande chasse aux sorcières. Les dissidents sont victimes d’actes d’intimidation et de violence. Les lyncheurs s’inspirent de modèles étrangers. Les médias qui s’écartent de la ligne générale sont muselés. Si une chaîne de télévision diffuse des programmes en Russe ou si un journal contient ne serait-ce que le mot « russe », ils sont immédiatement considérés comme séparatistes.
Dans ce contexte, notre inquiétude tient au fait que le sentiment néonazi, encouragé par les autorités à Kiev, est de plus en plus fort. Les 14 et 15 octobre, à Kiev, Kharkov et Odessa, ainsi que dans plusieurs autres villes, des défilés de néonazis brandissant des torches et décorés d’insignes fascistes ont été organisés. Des références ont été faites à Hitler pendant ces rassemblements. L’on y a appelé à la violence contre les représentants de divers groupes ethniques. À Kiev, il y a eu des autodafés. Le 14 octobre – qui est la date de création de la soi-disant Armée insurrectionnelle ukrainienne – a été proclamé Journée du défenseur de la patrie. Or ce groupe s’est rendu coupable de terribles crimes pendant la Deuxième Guerre mondiale, et a contribué au massacre de centaines de milliers d’innocents – Polonais, Russes, Ukrainiens, juifs et autres. Il est tout à fait inadmissible que cette proclamation ait été faite à la veille du soixante-dixième anniversaire de la victoire de la Deuxième Guerre mondiale. Cette proclamation va à l’encontre de la résolution 67/154 de l’Assemblée générale, récemment adoptée, qui condamne sans équivoque les nazis. En outre, elle fait peser une menace grave sur le règlement du conflit après les affrontements.
Avec ce genre de bagage idéologique, l’Ukraine peut-elle réellement vouloir se rapprocher de l’Europe ? Nos collègues occidentaux, d’habitude si éloquents, ne disent rien là-dessus. Il nous semble étrange voire inacceptable que ce sujet ait été complètement passé sous silence dans les exposés de M. Fernandez-Taranco et M. Šimonović aujourd’hui. Nous les engageons à s’atteler en priorité à lutter contre la glorification du nazisme et contre les tentatives de réécrire l’histoire, comme le demande précisément la résolution 67/154 à chacun.
La perspective d’un règlement politique en Ukraine est de plus en plus réelle avec la signature en septembre du protocole et du mémorandum de Minsk. Nous nourrissons l’espoir que ces accords se révéleront viables, puisqu’ils sont fondés sur une entente directe entre Kiev et le sud-est du pays, entente obtenue avec la contribution de la Russie et de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, ce qui est nouveau. Il est également important de noter que le processus de Minsk a permis de mettre fin aux affrontements militaires à grande échelle et de respecter les grands principes du maintien de la paix. Certes, il y a encore des combats. Mais cela ne fait que souligner la nécessité pour la communauté internationale d’oeuvre de bonne foi pour faire avancer les négociations et mettre en oeuvre ce qui a été convenu à Minsk par les représentants de l’Ukraine et des milices populaires.
À la récente Réunion Asie-Europe, le Président russe Vladimir Poutine a une fois de plus insisté sur le fait que nous appuyons la mise en oeuvre de tous les volets des accords de Minsk. Dans le même temps, les négociations de Milan ont montré qu’il était vital de respecter l’essence des accords et de faire en sorte que leur application suive un certain ordre.
On a parlé du rapport de la Mission de l’ONU de surveillance des droits de l’homme en Ukraine. Malheureusement, une fois de plus, il est très loin d’être objectif. En fait, ce sont les autorités ukrainiennes qui ont invité la Mission et donc donnent le ton. Cela ne m’empêche pas toutefois de relever quelques faits peu flatteurs pour le Gouvernement ukrainien, en particulier le fait que les forces de sécurité ukrainiennes ainsi que les bataillons Aïdar, Azov, Dnepr, Kiev-1 et Kiev-2, qui sont tous sous le contrôle des autorités de Kiev, violent de manière flagrante les normes du droit international et se livrent à des enlèvements, des meurtres, des pillages et des arrestations arbitraires.
Parallèlement, je ne saurais oublier de mentionner les conditions de vie très dures auxquelles sont soumis des Ukrainiens ordinaires, y compris des enfants, sous prétexte qu’ils auraient des liens avec le terrorisme. Il y a eu une augmentation spectaculaire de nombre de victimes civiles en raison des tirs d’artillerie aveugles sur des zones densément peuplées, de l’utilisation d’armes lourdes, d’armes prohibées, y compris des bombes à sous-munitions et des bombes au phosphore, et de missiles tactiques. L’absence de progrès dans l’enquête sur les morts déplorées sur la place Maïdan, ainsi qu’à Odessa et à Marioupol n’est pas du tout évoquée dans le report, ni d’ailleurs les tentatives de falsifier ou de dissimuler les éléments de preuve. Il est par ailleurs indispensable qu’une enquête minutieuse soit menée sur la fosse commune découverte à Nyzhnia Krynka. En outre, l’enquête sur la catastrophe du vol MH17 continue d’être un sujet d’inquiétude. Ce n’est certainement pas un hasard si, le 13 octobre, le site du crash a été visé par des tirs en provenance de la partie ukrainienne alors qu’un groupe d’experts hollandais et d’observateurs de l’OSCE était présent sur les lieux. L’une des déclarations entendues aujourd’hui a rapporté une version des faits non confirmée, ce que nous jugeons irresponsable. Nous ne comprenons toujours pas la frilosité opposées par certains membres du Conseil de sécurité à la proposition que nous avons faite le 19 septembre d’élargir l’enquête.
La Crimée a été de nouveau mentionnée aujourd’hui. Pendant toutes les années où la péninsule a appartenu à l’Ukraine, beaucoup de problèmes socioéconomiques se sont accumulés. La Russie va tenter de les résoudre de manière progressive et méthodique. Nous ne serons pas arrêtés par les agissements des autorités de Kiev, qui espèrent ainsi se venger du fait que la population de la Crimée a choisi de rejoindre la Russie.
Malheureusement, plutôt que d’œuvrer collectivement à analyser les graves conséquence de la crise ukrainienne et de tenter de régler la situation, certains membres du Conseil de sécurité continuent d’appuyer sans réserve toutes les mesures prises par les autorités de Kiev, alors même que ces dernières sont favorables à la guerre. Cet appui est fondé sur des calculs géopolitiques cyniques qui n’ont rien à voir avec les intérêts du peuple ukrainien. Le Conseil de sécurité doit faire tout ce qui est en son pouvoir pour aider toutes les parties au conflit à prévenir l’effusion de sang, à prendre part à un dialogue national authentique sur les questions relatives à la réforme constitutionnelle, et à mettre en place un nouvel État ukrainien ancré dans l’ouverture. Il est indispensable d’envoyer un signal clair à ceux qui sont favorables à un règlement pacifique de la situation en Ukraine, sur la base du document de Genève et des accords de Minsk.
La Présidente, Mme Perceval (Argentine) (parle en espagnol) : Je vais maintenant faire une déclaration en ma qualité de représentante de l’Argentine.
Je voudrais, tout comme mes collègues, remercier le Sous-Secrétaire général aux affaires politiques, M. Oscar Fernandez-Taranco, et le Sous-Secrétaire général aux droits de l’homme, M. Ivan Šimonović, de leur exposé respectif sur la situation en Ukraine.
L’Argentine se dit de nouveau préoccupée par la dégradation persistante de la sécurité, des droits de l’homme et de la situation humanitaire en Ukraine, en particulier dans l’est du pays, ainsi que par les répercussions du regain de violence sur la population civile, ce qui menace les efforts consentis pour parvenir à un règlement diplomatique et politique de la situation.
Nous insistons sur le fait qu’il ne sera pas possible de trouver une issue pacifique à la crise en Ukraine par des mesures unilatérales de quelque sorte que ce soit. Il est donc impératif que toutes les parties prenantes agissent dans le strict respect du droit international et des principes de la Charte des Nations Unies. Nous rappelons l’obligation qui incombe à tous les États de régler leurs différends internationaux par des moyens pacifiques, afin de ne pas compromettre la paix et la sécurité internationales, conformément à la Charte des Nations Unies.
La seule solution possible, nous le répétons, passe par le dialogue et la négociation, en respectant scrupuleusement l’indépendance de l’Ukraine dans la conduite de ses affaires intérieures. L’Argentine appelle une nouvelle fois aujourd’hui à mettre fin à la stratégie de la confrontation et à toute forme d’ingérence dans les affaires intérieures, qui sont la juridiction exclusive des États, que cette ingérence soit de nature militaire, politique, économique ou rhétorique.
C’est pourquoi nous accueillons favorablement le protocole obtenu par le groupe de contact trilatéral – composé de l’Ukraine, de la Russie et de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe – pour l’application du plan de paix du Président Poroshenko ainsi que les initiatives du Président Poutine, auxquelles ont également souscrit les groupes armés qui s’opposent au Gouvernement ukrainien. Cela étant, nous admettons que la fragilité du cessez-le-feu suscite une inquiétude bien réelle. Après la récente rencontre, à Milan, entre les Présidents ukrainien et russe, nous appelons à poursuivre les discussions dans l’optique de trouver une issue au conflit et demandons à toutes les parties d’appliquer les mesures convenues dans le cadre du protocole.
Naturellement, nous sommes profondément préoccupés par les informations faisant état de l’usage de bombes à sous-munitions dans des zones densément peuplées. Il est impératif que les parties respectent rigoureusement les droits de l’homme et le droit international humanitaire et veillent à ce que les auteurs de toute violation avérée des droits de l’homme et du droit international humanitaire répondent de leurs actes. Nous déplorons les informations faisant état d’assassinats, d’enlèvements, de disparitions forcées, de tortures, de mauvais traitements et d’autres violations graves des droits de l’homme. Cela est très préoccupant. Toutefois, face aux dénonciations et aux indices de violations des droits de l’homme, nous voulons connaître la vérité. Il nous faut des informations objectives et il faut qu’une enquête fiable soit menée rapidement et que justice soit faite. En ce qui concerne la situation humanitaire, nous voudrions mettre en exergue l’aide fournie par le Comité international de la Croix-Rouge et Médecins Sans Frontières. La communauté internationale doit continuer à appuyer ces efforts et les parties doivent garantir l’accès humanitaire.
Enfin, comme nous l’avons fait à chaque fois que le Conseil de sécurité a traité de cette question, l’Argentine tient à rappeler la responsabilité qui incombe au premier chef au Conseil de maintenir la paix et la sécurité internationales, conformément au rôle que lui assigne la Charte des Nations Unies. Nous regrettons que jusqu’à présent, malgré que nous nous soyons réunis à de nombreuses reprises pour discuter de la situation en Ukraine, le Conseil n’a pas été en mesure de jouer un rôle constructif. Comme dans d’autres situations, la diplomatie constructive a cédé la place à la politisation au sein même du Conseil, qui est tombé dans le discrédit.
Une fois de plus, l’Argentine demande instamment qu’au lieu d’être un obstacle, nous contribuions à ce que les parties trouvent un terrain d’entente afin de parvenir à une solution politique et diplomatique et de mettre fin aux affrontements qui ont eu des effets de plus en plus graves et déplorables sur la population civile. Nous ne pouvons pas nous permettre d’assister sans rien faire à des régressions encore plus graves. En particulier, les acteurs qui ont le plus d’influence doivent contribuer le plus à la diplomatie constructive. La communauté internationale doit concentrer ses efforts à faire en sorte que les parties trouvent une issue pacifique à la situation complexe qui règne en Ukraine.
Je reprends à présent mes fonctions de Présidente du Conseil.
Je donne la parole au représentant de l’Ukraine.
M. Pavlitchenko (Ukraine) (parle en anglais) : Madame la Présidente, je vous remercie d’avoir convoqué cette réunion importante. Je voudrais également remercier le Sous-Secrétaire général, M. Fernandez- Taranco, et le Sous-Secrétaire général, M. Šimonović, de leurs exposés d’aujourd’hui.
Nous nous réjouissons des rapports établis par la Mission de l’ONU de surveillance des droits de l’homme en Ukraine et de l’assistance fournie par l’Organisation des Nations Unies. Nous sommes pleinement engagés à protéger et à promouvoir les droits de l’homme de tous les citoyens ukrainiens, y compris ceux qui vivent dans le territoire ukrainien temporairement occupé de Crimée et dans la ville de Sébastopol. Nous avons pris bonne note des questions soulevées par M. Šimonović dans le dernier rapport de la Mission de surveillance et nous continuerons à coopérer étroitement avec son équipe.
Pour protéger comme il se doit les droits civils et éliminer les vestiges de l’économie totalitaire et les injustices du régime de M. Yanukovych, il faut mener des réformes globales en Ukraine. À cette fin, le Président Poroshenko a lancé une stratégie de réforme pour 2020. Cette stratégie couvre huit domaines prioritaires, à savoir la réforme du système judiciaire et la lutte contre la corruption, la réforme des organes chargés de faire respecter la loi, la dérégulation et le développement de l’esprit d’entreprise, la réforme fiscale, la décentralisation du pouvoir et la bonne gouvernance, la réforme du secteur de la sécurité et de la défense et la réforme des soins de santé. La semaine dernière, le Parlement a adopté un train de mesures destinées à lutter contre la corruption et une loi visant à renforcer la primauté du droit. Le Président a également signé un décret pour lancer les travaux relatifs à l’élaboration d’une stratégie nationale en matière de droits de l’homme. Ces réformes ont été élaborées en étroite coopération avec la société civile, visent à répondre aux aspirations des citoyens et sont axées sur les populations. Des mesures supplémentaires seront introduites par la suite.
Toutefois, alors même que nous nous employons à construire un meilleur avenir, nous n’avons eu de cesse d’indiquer clairement qu’il faut mener des enquêtes approfondies au sujet de tous les crimes, en particulier ceux relatifs à des violations des droits de l’homme et des libertés fondamentales et traduire leurs auteurs en justice. Cela vaut pour les meurtres commis sur la place Maïdan en février et pour la tragédie survenue à Odessa le 2 mai. Les tribunaux ont été déjà saisis des premières affaires liées à ces événements tragiques. La semaine dernière, Human Rights Watch a publié un rapport laissant entendre que les forces armées ukrainiennes auraient utilisé des armes à sous-munitions à Donetsk. Nos forces n’ont jamais utilisé des armes à sous- munitions ou d’autres armes interdites. Mercredi, l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) a confirmé qu’il n’y avait pas d’éléments de preuve attestant l’emploi de telles armes par les forces ukrainiennes. Toutefois, nous n’avons rien à cacher et nous sommes prêts à accepter une enquête publique et transparente.
Le dernier rapport de la Mission de l’ONU de surveillance des droits de l’homme en Ukraine contient encore plus de détails sur la situation alarmante des droits de l’homme dans les zones contrôlées par les militants dans l’est de l’Ukraine. Ce rapport met en exergue le rôle des militants étrangers, en particulier ceux en provenance de la Fédération de Russie, et les graves violations des droits de l’homme que continuent de commettre des groupes armés illégaux. Comme le rapport l’indique clairement, ces groupes terrorisent les citoyens ukrainiens dans les zones sous leur contrôle. Ils commettent des exactions au quotidien, y compris des actes de torture, des meurtres et des enlèvements. Par exemple, le rapport évoque l’introduction d’un code pénal, basé sur celui de la Fédération de Russie, qui prévoit la création de tribunaux militaires et l’utilisation de la peine de mort. Nous condamnons fermement ces violations des droits fondamentaux. Ce sont des Ukrainiens dont les droits sont violés par des groupes militants qui prétendent les protéger.
Le dernier rapport attire également l’attention sur les enlèvements de citoyens ukrainiens et leur transfert illégal en Russie. Il y a par exemple le cas d’une femme soldat ukrainienne, Nadiya Savchenko, qui a été enlevée en juillet sur le territoire ukrainien par les services de sécurité russes et qui est actuellement détenue illégalement en Russie. Les services de maintien de l’ordre et les tribunaux russes ont traité son affaire sans la moindre transparence, en violant ses droits à de nombreuses reprises. Le réalisateur ukrainien Oleg Sentsov est également détenu illégalement. La Russie refuse d’accorder l’accès consulaire ukrainien à M. Sentsov en prétendant, sans son autorisation, qu’il était citoyen russe, puisqu’il réside en Crimée. Il s’agit d’une grave violation de ses droits en tant que citoyen ukrainien, et cela va à l’encontre des lois ukrainiennes et des normes juridiques internationalement reconnues. En outre, selon les informations dont le Gouvernement ukrainien a eu connaissance, ces deux captifs ont fait l’objet de mauvais traitements dans les prisons russes.
Nous demeurons vivement préoccupés par les violations massives et systématiques des droits de l’homme commises en Crimée, qui est occupé illégalement.En violation flagrante du droit international, la Russie a imposé de force sa législation nationale en Crimée. Les autorités d’occupation ont également encouragé la commission d’actes criminels contre les Tatars de Crimée et d’autres personnes appartenant à des minorités nationales et à certains groupes religieux. Les autorités russes ont refusé de faciliter la conduite d’enquêtes en bonne et due forme ou même de faire des commentaires au sujet des meurtres et des enlèvements de militants pro-ukrainiens et des Tatars de Crimée, dont Reshat Ametov, Tymur Shaymardanov, Seyran Zinedine, Leonid Korzh et Vasyl Chernysh. Ils ont empêché les dirigeants tatars, Mustafa Jemilev et Rifat Chubarov, de se rendre à la péninsule de Crimée, qui est leur terre natale.
Les détentions illégales, les actes de torture, les fouilles, les confiscations et les pressions exercées sur les entreprises et les groupes d’activités sociales sont devenus une réalité quotidienne pour les habitants de Crimée. Nous exigeons que la Russie, en tant qu’occupant temporaire de la Crimée, cesse de violer les droits de nos citoyens. La situation qui y règne doit faire au minimum l’objet d’une surveillance internationale constante. Nous nous félicitons de la détermination continue des Nations Unies à faire en sorte que ceux qui souffrent en Crimée ne soient pas oubliés.
Comme le Président Poroshenko l’a affirmé à maintes reprises, l’Ukraine est pleinement attachée à un règlement pacifique de la situation dans l’est de notre pays. Nous ne sommes pas responsables de cette situation, mais nous nous efforçons de mettre un terme à cette effusion de sang. Notre engagement en faveur d’un règlement pacifique a abouti à la signature du protocole de Minsk et du mémorandum de Minsk par l’Ukraine, l’OSCE et la Fédération de Russie, avec la participation des représentants des groupes de militants.
Immédiatement après la signature du protocole de Minsk, le Gouvernement ukrainien s’est empressé de mettre en œuvre cet accord. Le Parlement a adopté une loi accordant provisoirement l’autonomie locale à certains districts des régions de Donetsk et de Lougansk et fixé la date des élections locales. Il a aussi adopté une loi accordant l’amnistie aux personnes impliquées dans les derniers troubles. Nous avons entamé des pourparlers sur l’échange d’otages, qui ont abouti à la libération de plus de 1000 personnes. Nous avons continué à fournir des secours humanitaires, en œuvrant en étroit partenariat avec des organismes des Nations Unies et d’autres organisations internationales, et la nouvelle loi adoptée lundi sur le statut provisoire des personnes déplacées facilitera encore davantage notre action humanitaire. Nous avons préparé un plan de relance et de croissance économiques, y compris des plans de relèvement économique de la région du Donbass, et avons appelé à la tenue d’une conférence des donateurs dans le courant de l’année. Nous avons fourni toute l’assistance possible à la Mission spéciale d’observation de l’OSCE en vue de créer les conditions qui permettent à ses experts de vérifier le cessez-le-feu.
Nous appuyons pleinement l’action menée actuellement pour intensifier les efforts d’observation, comme le stipulent les articles 2 et 4 du protocole de Minsk, particulièrement le long de la frontière entre l’Ukraine et la Russie. Pour le moment, seuls deux postes frontières sont surveillés par l’OSCE, ce qui est nettement insuffisant. Malheureusement, notre proposition de renforcer la surveillance de la frontière a été bloquée mercredi à l’OSCE par la Fédération de Russie. Il est très préoccupant que, bien qu’elle soit une partie signataire de l’accord, la Russie refuse d’agir concrètement aux fins de sa mise en œuvre. Il est évident qu’il ne s’agit là que d’une tentative cynique de sa part de maintenir les mouvements quotidiens d’armes, de matériel de guerre et de militants de la Russie vers l’Ukraine.
Nous avons observé strictement le régime de cessez-le-feu, dont les détails sont précisés dans le mémorandum de Minsk. Depuis sa signature, les forces armées ukrainiennes n’ont pas mené d’offensive militaire et n’ont utilisé leurs armes que pour se défendre. Hélas, il n’a pas été répondu à notre bonne volonté par des actions réciproques. Les chefs des rebelles ont fait publiquement part de leur intention de violer les termes du cessez-le-feu et de s’emparer d’autres territoires, notamment les villes de Marioupol et Slaviansk. De violents combats ont eu lieu aux alentours de l’aéroport de Donetsk et dans les faubourgs des villes de Bebaltseve et Shchastya, où des rebelles essayent d’étendre la zone qu’ils contrôlent.
Il est tragique que des citoyens ukrainiens continuent de mourir. Depuis que la trêve a été annoncée, les positions occupées par les forces armées ukrainiennes ont été pilonnées plus de deux milliers de fois. Résultat, 89 soldats ukrainiens ont été tués et 500 blessés. Au moins 54 civils ukrainiens ont été tués par le pilonnage des séparatistes, dont sept par des tirs de roquettes près du village de Sartana la semaine dernière.
Pour que les accords de Minsk soient düment mis en œuvre, toutes les parties devront honorer 100% de leurs engagements. Les rebelles et les troupes russes qui continuent d’être présentes sur notre territoire doivent mettre un terme à leur offensive militaire et arrêter de pilonner les zones occupées par des civils. Les personnels militaires doivent tous quitter le territoire de l’Ukraine. La Fédération de Russie doit cesser ses fournitures illégales d’armes et d’équipements, réduire le mouvement de « volontaires » qui traversent notre frontière souveraine et nous permettre de rétablir des contrôles adéquats.
Malheureusement, ce que nous constatons maintenant c’est que le renforcement de la présence militaire se poursuit le long de notre frontière et dans le nord de la Crimée. Les groupes de militants illégaux ont pu renforcer leurs capacités militaires et menacent désormais de s’emparer d’autres villes d’Ukraine par de nouvelles offensives militaires. En lançant ces appels, nous ne faisons qu’exhorter la Russie et ses alliés, les séparatistes pro-russes, à respecter des accords qu’ils ont signés en toute liberté. Nous les avertissons plus particulièrement de s’abstenir de tout acte de provocation visant à perturber les prochaines élections.
Ce dimanche, des élections législativess nationales vont se tenir sur tout le territoire ukrainien. Des élections locales dans la région du Donbass, envisagées par le protocole de Minsk sont prévues en décembre. Les dirigeants de l’Ukraine mettront tout en œuvre pour garantir qu’elles se déroulent de façon régulière et transparente, en pleine conformité avec les normes démocratiques internationales et les lois ukrainiennes. Ces deux élections sont l’une et l’autre partie intégrante du processus de paix et sont essentielles pour la tenue d’un dialogue inclusif au niveau national. Elles permettront d’élire des représentants de toutes les régions de l’Ukraine ainsi que des représentants locaux légitimes dans la région du Donbass.
Actuellement, en raison des conditions de sécurité dans la région de l’est, les élections législatives ne peuvent se tenir que dans 11 des 21 circonscriptions que compte la région de Donetsk et dans 4 des 11 circonscriptions que compte la région de Lougansk. Mais il importe que la voix de chacun soit entendue. C’est pourquoi nous recommandons que les citoyens ukrainiens qui résident dans les zones encore contrôlées par les rebelles aient un accès libre et sécurisé aux bureaux de vote.
Nous demandons à la Russie de condamner sans ambages les tentatives des groupes armés d’organiser leurs propres élections locales le 2 novembre. Moscou doit faire clairement comprendre aux autorités rebelles que leur action entravera le processus de paix et que les résultats de ce scrutin illégal, organisé en violation de la législation ukrainienne, ne seront jamais reconnus.
Depuis le début de l’année, l’Ukraine connaît de profonds bouleversements. Notre territoire a été illégalement occupé et nos frontières violées. Visant à assouvir d’étroits intérêts, la Russie a fomenté dans la région du Donbass une rébellion brutale qui a causé d’innombrables pertes en vies humaines, notamment les passagers du vol MH17, abattu par un missile tiré par les séparatistes. Le droit international a été foulé au pied et les droit de l’homme des citoyens ukrainiens violés.
En cette heure difficile, nous sommes reconnaissants de l’appui apporté par les Nations Unies, les membres du Conseil, l’Union européenne et les membres de la communauté internationale qui ont défendu la Charte des Nations Unies et les principes de l’Organisation. Mais la crise dans notre pays n’est pas encore terminée. C’est maintenant plus que jamais que nous avons besoin de l’aide du Conseil pour mettre un terme à la violence. En septembre, nous avons conclu des arrangements dans l’espoir d’arrêter le bain de sang et de parvenir à une paix durable. Pour atteindre cet objectif, il faut que toutes les parties impliquées dans le dialogue trilatéral mettent pleinement en œuvre les termes de l’accord. Nous demandons instamment au Conseil de veiller à ce que tous les signataires honorent leurs engagements.
La Présidente (parle en espagnol) : Le représentant de la Russie a demandé à prendre la parole pour faire une nouvelle déclaration.
M. Churkin (Fédération de Russie) (parle en russe) : Je ne vais pas faire d’observations concernant la déclaration faite par le représentant de l’Ukraine dans tous ses détails, car nous avons déjà entendu, au cours de 24 séances précédentes, les mêmes déclarations politisées et souvent antirusses. Mais je voudrais revenir sur trois aspects de cette déclaration et de déclarations faites par plusieurs autres collègues.
Premièrement, je pense qu’il est inapproprié de porter devant le Conseil de sécurité des questions en cours d’examen à l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), notamment pour ce qui est de la mise en œuvre des dispositions des accords de Minsk concernant la surveillance des frontières. Puisque des accusations ont été portées contre la Russie dans ce contexte, je tiens à rappeler que la proposition de déployer des observateurs de l’OSCE à certains points de passage à la frontière a été soumise par la Russie dans le contexte du cessez-le-feu. Le cessez- le-feu n’a pas été respecté. Cependant, nous sommes allés encore plus loin. Nous avons affirmé que même en l’absence d’un cessez-le-feu, nous étions prêts à déployer les observateurs du côté russe de la frontière russo-ukrainienne. Cela représente un geste important de la part de la Fédération de Russie, et toute critique à cet égard est inacceptable.
S’agissant des questions sur lesquelles se penche l’OSCE à Vienne, je tiens à rappeler, comme je l’ai souligné dans ma déclaration, que le protocole de Minsk prévoit une séquence de mesures qu’il importe de respecter. Cette séquence est avant tout fondée sur la mise en œuvre du cessez-le-feu, qui n’est malheureusement pas intervenue.
Le représentant ukrainien a lancé un appel extrêmement important à l’arrêt des bombardements ciblant des zones où résident des civils. Pourquoi ne dirige-t-il pas cet appel vers son propre camp ? Il a mentionné les insurgés. Il a affirmé que des civils sont victimes de ces bombardements. Si tel est le cas, c’est bien évidemment très regrettable. Cependant, des civils, dont le nombre peut atteindre jusqu’à 19 par jour, sont tués dans le Donbass par les tirs des forces armées ukrainiennes. Nous notons un choix de mots intéressant. Le représentant de l’Ukraine affirme que ses forces armées ne sont pas responsables, mais qu’en est-il des bataillons sous commandement ukrainien ? Il semble qu’ils sont sous commandement ukrainien mais donnent l’impression qu’ils ne le sont pas.
Une fois de plus, notre collègue ukrainien n’a rien pu faire de mieux que de donner une version non vérifiée des faits, selon laquelle un missile tiré par des séparatistes est à l’origine de l’incident du vol de la Malaysia Airlines. Je réaffirme qu’il est irresponsable de mentionner des informations non confirmées au Conseil de sécurité. Dans ce contexte, j’ai deux questions : comment et pourquoi est-il arrivé ce qui est arrivé ? Je vais l’expliquer. Chacun sait maintenant que dès que cette tragédie s’est produite, des rumeurs ont circulé à Kiev. De fausses informations censées donner une version précise des faits ont été communiquées. Pourquoi ? Si l’on dispose d’informations, pourquoi ne pas les partager ? Pourquoi les garder secrètes ? Il ne s’agit là que d’une explication très simple.
Dans le rapport préliminaire qu’ils nous ont fourni, les experts néerlandais ont affirmé que les enregistrements du contrôle aérien étaient des enregistrements de routine et ne contenaient aucune information importante. S’ils relèvent effectivement de la routine, pourquoi ne pas les publier pour faire preuve de transparence ? Plus grave encore, nos experts ont posé quelque 40 questions importantes auxquelles il faudra répondre pour comprendre ce qui s’est passé. Le représentant ukrainien n’a pas tenté de répondre ne serait-ce qu’à une de ces questions. Il est temps qu’il cesse – en particulier durant des réunions du Conseil de sécurité – de répéter sans fin des versions non confirmées des faits et qu’il réponde à ces questions. Nous pourrions alors avoir une discussion sérieuse.
Autrement, attendons et tentons de mener l’enquête avec autant de sérieux que possible, comme nous l’avons proposé le 19 septembre (voir S/PV.7269).
La Présidente (parle en espagnol) : Le représentant de l’Australie a demandé la parole pour ajouter un commentaire.
M. Quinlan (Australie) (parle en anglais) : Je serai très bref. Je suis d’accord avec mon collègue russe eu égard à la nécessité de répondre à toutes les questions qui exigent une réponse dans le cadre de l’enquête indépendante en cours sur l’incident du vol MH17. Cette enquête est indépendante. Elle est menée par un organe indépendant – le Conseil néerlandais de la sûreté. Deux experts russes participent à cette enquête. Selon nous, toutes les questions posées sont systématiquement examinées.
Des experts australiens participent évidemment à cette enquête, mais, en tant que membre du Gouvernement australien, je n’ai pas accès à la nature ou au détail de cette participation. C’est une enquête indépendante qui a déjà abouti à la rédaction d’un rapport préliminaire mais qui se poursuit. Tous les gouvernements participants et les organes concernés, notamment l’Organisation de l’aviation civile internationale, ont reçu l’assurance que cette enquête serait menée dans les règles et de façon systématique et qu’elle répondrait à toutes les questions posées.
Je conviens donc avec mon collègue russe que ces questions doivent être examinées. Nous croyons comprendre que tel est le cas. Mais le fait est qu’il s’agit d’une enquête indépendante. Y participent tous les acteurs concernés, y compris des experts russes, et cette enquête est menée dans le respect des directives internationales en vigueur, comme l’a affirmé M. Feltman dans l’exposé qu’il a présenté le 19 septembre (voir S/PV.7269).
Eu égard à ma déclaration précédente concernant les causes de cet incident, j’ai souligné que si tous les éléments de preuve recueillis à ce jour n’étaient pas concluants, ils étayaient cependant l’hypothèse initiale selon laquelle cet événement, cette atrocité, résulte bien d’un missile sol-air tiré depuis les zones et dans les termes que j’ai mentionnés. Je n’ai pas affirmé qu’il existait une conclusion définitive – certainement pas encore – résultant de cette enquête indépendante, qui cherche toujours à déterminer ce qui s’est passé plutôt que de désigner un responsable.
Les enquêtes criminelles en cours, auxquelles participent des centaines d’enquêteurs du ministère public originaires de 13 pays, et qui sont coordonnées par le Gouvernement néerlandais, tenteront de désigner les coupables et de lancer les démarches nécessaires pour qu’ils soient amenés à rendre des comptes. Les pays les plus directement touchés qui ont perdu des citoyens dans cet attentat ont tous indiqué qu’ils avaient confiance dans les deux processus en cours. J’en ai assez dit, mais je tenais à ce qu’il soit pris acte de mes paroles.
La Présidente (parle en espagnol) : Je donne maintenant la parole au représentant de l’Ukraine, qui souhaite ajouter un commentaire.
M. Pavlichenko (Ukraine) (parle en anglais) : Je tiens tout d’abord à souligner que l’enquête indépendante sur l’incident du vol MH17 est menée par les Pays-Bas et les autorités compétentes et qu’une équipe internationale y participe. Mon gouvernement y participe également. Il est profondément attaché aux travaux menés par ce groupe.
Pour ce qui est des autres allégations proférées par la délégation russe, je regrette que celle-ci continue d’employer cette rhétorique négative. Je souhaite simplement réaffirmer notre message principal en ce qui concerne les accusations lancées contre le Gouvernement ukrainien selon lesquelles nos troupes auraient commis des crimes. Nous prenons très au sérieux toute information crédible concernant n’importe quel crime commis sur le territoire ukrainien. Le Gouvernement ukrainien condamne tous les crimes, en particulier les crimes graves au regard du droit international. Tout crime de ce type doit faire l’objet d’une enquête approfondie. Des enquêtes seront menées et les responsables seront amenés à rendre des comptes tôt ou tard. L’Ukraine est prête à coopérer avec ses partenaires internationaux pour enquêter sur ces crimes.
J’espère que cette position est tout à fait claire. Cependant, dans le même temps, il me semble que la Russie lance des allégations infondées contre l’Ukraine pour détourner l’attention de la communauté internationale du problème principal, à savoir l’agression menée par la Russie contre l’Ukraine et son ingérence dans les affaires intérieures de mon pays. L’occupation de la Crimée, l’instigation de troubles dans l’est de l’Ukraine et la fourniture d’armes et de main- d’œuvre pour les besoins des mouvements séparatistes en Ukraine sont parmi les principales causes de ces événements dramatiques.
Malheureusement, je n’ai pas entendu, de la part de la délégation russe, l’expression d’une volonté ferme de se conformer strictement aux accords de Minsk, alors que le pays qu’elle représente y est partie. Nous n’avons pas entendu la Russie indiquer qu’elle était fermement résolue à retirer ses troupes d’Ukraine, ni qu’elle était disposée à coopérer avec l’Ukraine pour l’établissement d’un contrôle effectif sur la frontière entre les deux États. Nous n’avons pas entendu de condamnation des crimes graves commis par les groupes armés illégaux, crimes dont il est clairement rendu compte dans le rapport de la Mission de l’ONU de surveillance des droits de l’homme en Ukraine.
Nous escomptions aussi que la Russie condamne l’intention des séparatistes de tenir des élections locales le 2 novembre, en violation flagrante des accords de Minsk, signés par l’Ukraine et la Russie. Il serait très difficile de régler la situation qui a cours dans l’est de l’Ukraine sans aborder cette question, comme souligné dans notre déclaration d’aujourd’hui. Les dirigeants ukrainiens ont démontré par leurs actes qu’ils étaient prêts à œuvrer en faveur d’un règlement pacifique, et désireux de le faire. Il est temps pour les autres parties de s’engager en montrant qu’ils ont la volonté sincère d’entamer le dialogue.
La Présidente (parle en espagnol) : Le représentant de la Fédération de Russie a demandé la parole pour faire une nouvelle déclaration.
M. Churkin (Fédération de Russie) (parle en russe) : Je demanderai à notre collègue ukrainien de relire le texte de ma déclaration d’aujourd’hui, ainsi que les déclarations faites ce jour par le Président Vladimir Poutine à Sotchi et par le Ministre des affaires étrangères, M. Sergey Lavrov, qui font clairement ressortir notre position concernant le règlement pacifique et le processus de Minsk. Ma déclaration est en russe. J’en donnerai le texte au Conseil ; il n’existe pas de traduction officielle en anglais, mais je crois néanmoins que ce sera utile.
S’agissant de ce qu’a dit notre collègue australien, je ne pense pas qu’il nous faille un long débat sur l’enquête indépendante, mais je me réjouis vivement qu’il ait eut des paroles si constructives au sujet de ladite enquête. Un point m’a néanmoins gêné, sur lequel j’estime que nous devons être très clairs. Le
Représentant permanent de l’Australie a affirmé que la version dont nous sommes aujourd’hui saisis est, selon ses dires, généralement acceptée, ou qu’elle devrait en tout cas être celle qui découlerait de l’enquête.
Or, ce n’est pas le cas. Il s’agit simplement d’une version élaborée par les États-Unis, sans la moindre justification. Cette version donne uniquement à lire qu’un missile a été tiré d’une région censément sous le contrôle des séparatistes. Nous n’avons vu passer aucune preuve. D’ailleurs, quelques jours après la tragédie, la même région a reçu la visite d’un journaliste du service russe de la BBC, qui y a fait un reportage de quatre minutes dans lequel il était démontré que personne n’avait tiré de missile depuis cet endroit. Le reportage n’a paru qu’une demi-journée sur le site Web de la BBC avant d’être retiré. J’imagine qu’il n’a pas été jugé suffisamment intéressant pour rester en ligne plus longtemps.
Je tiens à réaffirmer un point des plus importants. Nous ne devrions pas échanger de vues ici, dans la salle du Conseil de sécurité, sur des versions de ce qui s’est produit. Nous devrions attendre les conclusions de l’enquête. Nous devrions nous assurer que l’enquête indépendante aborde le fond du problème et attendre de voir comment l’équipe d’enquêteurs continue de travailler et quel genre de rapport elle produit.
La Présidente (parle en espagnol) : Il n’y a pas d’autre orateur inscrit sur ma liste. Le Conseil de sécurité a ainsi achevé la phase actuelle de l’examen de la question inscrite à son ordre du jour.
La séance est levée à 13 h 5.
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