Non, la France n’est pas responsable du génocide rwandais.
La conclusion du rapport de la mission d’information parlementaire sur le Rwanda présidée par Paul Quiles se veut ferme et définitive.
Une conclusion étonnante tant elle est démentie par le rapport lui-même.
Soulignant les dérives racistes d’un régime que Paris a soutenu jusqu’au bout, analysant lucidement " la solution finale " qui se préparait sous la protection militaire française, le rapport relève méthodiquement les erreurs, les fautes, les incohérences et les complaisances de la France qui ont pavé le chemin vers le génocide. Rejeter la responsabilité du drame rwandais sur l’ONU, la Belgique ou les USA en stigmatisant leurs défaillances, traiter les spécialistes invités à témoigner " d’idiots utiles "(1), dénoncer " une campagne de haine médiatique contre la France visiblement orchestrée par des services et intérêts étrangers "(2), décréter que tout ce qui n’a pu être prouvé de manière irréfutable n’a pas existé, n’y changent rien : la responsabilité française dans le 3ème génocide du siècle est totalement engagée.
Créée dans la précipitation, après 4 ans de silence absolu, comme contre-feu aux accusations de plus en plus précises qui se multipliaient, formulées par la presse, des ONG, des associations de défenses des droits de l’homme et de nombreux témoins français et rwandais, la mission d’information aura brillamment échoué dans son entreprise de camouflage. Chargée de gommer les aspects les moins reluisants de l’action de la France au Rwanda, elle les étale au contraire au grand jour.
Pourquoi la France a-t-elle envoyé ses soldats se battre au Rwanda ? Pourquoi a-t-elle soutenu un régime criminel jusqu’au génocide ? Pourquoi a-t-elle continué à lui livrer des armes malgré l’embargo des Nations Unies ? Pourquoi a-t-elle ensuite accueilli sur son sol les principaux responsables de ce génocide ? Simple erreur d’appréciation, nous jurent les députés de la mission. Au regard du million de victimes qu’à coûté cette erreur d’appréciation, on ne sait plus s’il faut en rire pour ne pas en pleurer.
A ceux qui s’interrogent sur l’entraînement de l’armée génocidaire et de ses milices par des militaires français, le député UDF de l’Ain, Michel Voisin répond sans rire : " Doit-on reprocher au professeur d’informatique d’avoir dispensé à son élève des connaissances dont il fera usage pour monter des escroqueries à la carte bancaire ! "(3) Et c’est à ce même député qu’on doit la question essentielle à laquelle la mission d’information dont il faisait partie n’a pas voulue ou pas oser répondre : " Si certains considèrent que la présence d’éléments militaires français au Rwanda a favorisé l’ascension aux extrêmes de la crise rwandaise, ce n’est certes pas à ces militaires qu’il convient de faire porter la responsabilité de leur actions. Ils ont exécuté les ordres qui leur étaient donnés. "(3) Par qui ?
Une véritable commission d’enquête s’impose plus que jamais pour aller jusqu’au bout de cette vérité que les membres de la mission Quiles n’ont pas osé affronter. Nous l’a réclamons. (T.K)
1 Commentaire de Jacques Myard, député RPR et membre de la Mission, qualifiant les scientifiques venant déposer devant la Mission
2 Déclaration de M. Balladur , ancien Premier Ministre, durant son audition devant la Mission d’information le avril 1998
3 Extrait d’un texte distribué par le Député M. Voisin le jour de la présentation du rapport à la presse, le 15 déc.1998
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