Mme Tavernier est présidente de l’Union nationale des associations de défense des familles et de l’individu. L’association, qui vient d’être reconnue d’utilité publique et qui est en voie d’obtenir la capacité juridique, regroupe, depuis 1982, 21 ADFI dans toute la France. Elle n’est pas confessionnelle et est apolitique, ayant pour but la défense des familles et de l’individu, victimes de la manipulation mentale pratiquée dans les sectes.
Les objectifs sont les suivants :
15) conduire une large information préventive dans les différents types d’associations et dans les écoles ;
16) alerter les pouvoirs publics ;
17) étudier l’évolution des groupes sectaires ;
18) accueillir les familles et les amis des adeptes et, de plus en plus, les victimes des sectes.
Une large collaboration est engagée avec les ministères, qui, outre un soutien moral, offrent également un appui financier.
L’intervenante regrette cependant l’absence de structures d’accueil pour les personnes sortant des sectes. Elle ajoute que les associations ne se livrent pas à la chasse aux sorcières mais qu’elles agissent lorsqu’il y a atteinte à la liberté individuelle, aux droits de l’homme et de l’enfant et à la dignité humaine. Au niveau européen, des associations sont re-groupées au sein de la FECRIS (Fédération européenne des centres de recherche et d’information sur le sectarisme).
Mme Tavernier insiste sur les difficultés de définir la notion de " secte ". Elle estime cependant que l’on dispose de suffisamment de critères pour définir leur nocivité.
Le témoin regrette aussi l’appellation " nouveaux mouvements religieux ", nouveau masque qu’utilisent les sectes, profitant de la crise de spiritualité, de solitude et désespérance présentes dans notre société.
L’UNADFI a cependant essayé de se livrer à la définition d’une secte. Ainsi, selon elle, une secte est un groupe dans lequel il y a une manipulation mentale et affective, qui entraîne une triple destruction (de la personne, de la famille et de la société), avec à la base une triple escroquerie (intellectuelle, morale et financière).
On se fait piéger par une secte en suivant un triple processus (séduction, destruction et reconstruction à l’image de la secte). La secte s’articule sur trois pivots (un gourou ou un maître, une doctrine et un groupe ou une nouvelle famille).
Mme Tavernier insiste également sur l’intérêt de renforcer le dispositif législatif concernant la notion " d’abus de faiblesse ". En effet, souvent, lorsque des personnes constatent qu’elles ont été piégées, elles ne disposent plus de leur libre-arbitre, voire de leur capacité de juger. Elles sont alors dans l’impossibilité de s’en sortir.
Pour le reste, il vaut mieux appliquer les lois existantes, par exemple, celles relatives au travail, à la protection des enfants, etc.
L’intervenante déclare s’inquiéter aussi face à la prolifération du phénomène sectaire et à l’augmentation de sa dangerosité.
Les sectes sont, en effet, puissantes et infiltrent tous les rouages de la société, notamment en pié-geant des personnalités politiques. Mme Tavernier estime que le cas de l’Eglise de Scientologie est significatif à cet égard. Cette secte pose ses pions partout. Ainsi, des témoignages font état du fait que la Scientologie informatisait un service sensible du ministère de la Défense nationale et aurait infiltré la DST.
Ayant fait l’objet de menaces de mort et de harcèlements, Mme Tavernier fait valoir que la Scientologie est très active en ce domaine. Cette église dit notamment qu’il faut diffamer toutes les personnes qui luttent contre elle et qu’on a le droit de les éliminer physiquement, sans être considéré comme un criminel par les scientologues. A cet égard, le livre de Ron Hubbard " Introduction à l’éthique de la Scientologie " constitue une véritable incitation au meurtre.
Dans ce livre, il est question d’une formule " de puissance pour la troisième dynamique ". On explique ce qu’il faut faire si l’on a des ennuis financiers, par exemple. Il est notamment suggéré : " Quand vous quittez une position de puissance, payez immédiatement toutes vos obligations, déléguez le pouvoir à tous vos amis et partez, armé jusqu’aux dents, avec les moyens de faire chanter tous vos anciens rivaux, des fonds illimités sur votre compte privé, des adresses de tueurs à gages expérimentés ; allez vivre en Bulgarie et soudoyez la police. ".
Autre extrait : " S’il se présente une menace à long terme, vous devez immédiatement l’évaluer et provoquer une campagne de propagande noire afin de détruire la réputation de la personne responsable et de la discréditer, de telle manière qu’elle soit mise au banc de la société. La personne - c’est-à-dire celle qui dit du mal de la Scientologie - peut être privée de ses biens ou blessée par n’importe quel moyen, par n’importe quel scientologue, sans que celui-ci soit passible d’aucune mesure disciplinaire de la part de la Scientologie. On peut tromper une personne non scientologue, la poursuivre en justice ou la détruire. "
Pour le reste, Mme Tavernier précise qu’un observatoire des sectes est en cours de création en France. Elle demande également depuis longtemps qu’un responsable s’occupe des sectes au sein de chaque ministère et qu’il y ait aussi un Monsieur " Sectes ".
En réponse à une question en ce sens, Mme Tavernier réfute l’accusation selon laquelle l’UNADFI constituerait une " secte anti-sectes ". Elle fait observer qu’il ne s’agit pas d’organiser une chasse aux sorcières mais de dénoncer les agissements nocifs de ces mouvements. Ceux-ci essayent par tous les moyens de lui faire abandonner cette lutte. Ainsi, les sectes font régulièrement des procès à l’UNADFI. Elles perdent souvent en première instance, puis vont en appel. Dans la mesure où elles perdent enco-re, elles vont en cassation. Même si elle gagne, l’UNADFI perd non seulement son temps mais aussi son argent. Les subventions servent alors en effet à couvrir les frais d’avocats et de procédure.
L’oratrice indique que peu de plaintes sont déposées à l’encontre des sectes, car les ex-adeptes en sortent fort meurtris. Ils ont du mal à porter plainte, dans la mesure où ils subissent encore des harcèlements.
De plus, ils ont souvent été " programmés " en ce sens. Souvent, ils ont été amenés à participer à des faits répréhensibles, parfois même à caractère sexuel, et ils craignent que cela ne soit rendu public. De plus, dans la mesure où la justice est démunie devant le problème des sectes, nombre de plaintes sont purement et simplement classées sans suite. Cela décourage donc le dépôt de nouvelles plaintes.
Mme Tavernier indique par ailleurs que la création de nouvelles ADFI est freinée par son organisation. D’abord, pour éviter les tentatives d’infiltration. Ensuite, pour éviter de multiplier des mouvements qui finiraient par devenir " sectaires " à leur tour. De nombreuses précautions sont d’ailleurs prises avant de qualifier un mouvement de " secte ". On ne se basera jamais sur un seul témoignage. Par contre, quand une vingtaine de personnes viennent expliquer une même situation, lorsqu’il y a déstabilisation de l’individu, rupture avec la famille ou avec la société, ou encore quand il y a des escroqueries morales, financières ou médicales, on peut, au bout d’un temps, conclure qu’il s’agit bien d’une secte.
L’intervenante ajoute que bien que les sectes recrutent à tous les niveaux de la population, elles comptent en fait très peu d’analphabètes ou de SDF. Par contre, elles recrutent beaucoup d’intellectuels, de personnes pratiquant des professions libérales, de scientifiques et de plus en plus de médecins. Ainsi, la secte IVI (Invitation à la vie intense) fonctionne également avec un " masque " médical, qui la rend fort dangereuse. On ne propose pas seulement aux gens de guérir mais aussi de leur donner le don de guérison. On aborde ainsi la guérison de maladies comme le cancer ou le sida, par simple imposition des mains. Cependant, l’Ordre des médecins se montre quelque peu frileux dans ses réactions. Les contacts sont cependant meilleurs avec la police et la gendarmerie, qui sont des demandeurs réguliers d’informations. Mme Tavernier indique qu’il y a environ 230 sectes en France et 600 000 personnes touchées par le phénomène. Les plus dangereuses sont les sectes apocalyptiques, puisque les membres sont préparés à la possibilité d’un suicide collectif.
Concernant le mouvement du Graal, le témoin indique qu’il y est conseillé de ne pas soigner les malades pour qu’ils aient un meilleur karma dans l’au-delà. Selon elle, une jeune fille serait ainsi décédée d’un cancer tout à fait soignable.
Répondant à une question relative aux ressources de l’Eglise de Scientologie, Mme Tavernier indique qu’elle reçoit des victimes qui y ont laissé 700 000 francs français en trois ans (Il y a tellement de grades à passer ...).
Les adeptes signent, par exemple, un contrat pour un milliard d’années. Ils peuvent également devenir " patrons ". Pour cela, ils doivent alors donner 20 000 à 30 000 francs français par an. D’ailleurs, lorsque les gens n’ont pas de grands moyens, la Scientologie leur apprend à faire des emprunts. Dans la mesure où la Scientologie vend des cours, des biens, etc, ce n’est donc plus une association relevant de la loi de 1901, c’est un commerce. Cependant, les personnes qui dirigent les centres sont d’origine étrangère et sont domiciliés sur un bateau en zone libre.
Un redressement fiscal a cependant été opéré plus récemment. Après ce redressement, le local de la Scientologie à Paris a été fermé judiciairement. Le lendemain même, les scientologues se retrouvaient dans un local plus grand, plus beau, situé dans le 12 e arrondissement.
Source : Chambre des Représentants de Belgique http://www.lachambre.be
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