Sujet : DPS
Audition de : Joaquin Masanet
En qualité de : secrétaire général de l’Union Nationale des Syndicats Autonomes de la Police
Par : Commission d’enquête parlementaire sur le DPS, Assemblée nationale (France)
Le : 17 février 1999
Présidence de M. Guy HERMIER, Président
M. Joaquin Masanet est introduit.
M. le Président lui rappelle que les dispositions législatives relatives aux commissions d’enquête lui ont été communiquées. A l’invitation du Président, M. Joaquin Masanet prête serment.
M. le Président : Votre syndicat a obtenu 32,91 % des voix lors des élections professionnelles parmi les gardiens de la paix. Nous avons donc souhaité vous entendre pour que vous nous fassiez part de votre expérience concernant les activités du DPS et le comportement de ses membres. Nous souhaiterions également savoir quelle relation existe entre les membres de la police et ceux de ce service d’ordre.
M. Joaquin MASANET : Je vous remercie de nous recevoir devant cette Commission. Je souhaiterais faire un exposé situant le DPS par rapport aux organisations syndicales de la police nationale, le Front National police, qui a été dissous, la FPIP, fédération professionnelle indépendante de la police, et le SPPF.
En tant que fonctionnaires de police républicains, nous nous posons la question de l’opportunité de laisser faire le DPS, service d’ordre du Front National. A ce jour encore, on y voit des fonctionnaires de police - il y en a partout, malheureusement - : toutes les manifestations du Front National sont filmées, et l’administration ne prend pas de dispositions à l’encontre des fonctionnaires qui participent à ce service d’ordre. Il me semble que pour y participer, il faut au moins en épouser les idées.
C’est un gros problème : le lendemain ou le surlendemain, ces collègues reviennent dans les compagnies ou les services de police. Leur comportement vis-à-vis des quartiers dits sensibles ou difficiles incite aussi à développer des idées xénophobes, etc.
Notre souhait serait que l’on puisse dissoudre ce service d’ordre - nous l’avons dit aussi au directeur général - ou lui imposer une autre tenue distincte de celle des CRS ou des autres fonctionnaires de la police. Cela ne peut pas durer au sein de la police nationale.
C’était le préambule.
J’ai écrit et nous avons dit au ministre de l’intérieur, à propos de tous les fonctionnaires qui font partie de ce service d’ordre, qu’il existe un devoir de réserve chez nous : on ne peut pas être fonctionnaire de police et, en dehors des heures de travail, être payé ou rémunéré pour un autre service de sécurité, qui, de surcroît n’épouse pas du tout les idées républicaines, mais celles du Front National.
Il faut faire très attention parce que, d’après les informations dont nous disposons, il y en a dans chaque département. Bien sûr, il n’y a rien de particulier dans le département de Strasbourg ou celui de Marseille, mais dans chaque service, vous avez des gens de ce service d’ordre du Front National et l’administration est bien au courant. Ce peut être des gardiens de la paix, des officiers, qu’il s’agisse de lieutenants, de capitaines ou de commandants et je pense que l’administration devrait prendre ses responsabilités, aujourd’hui comme hier, et les sanctionner. On ne peut pas faire deux métiers : assurer la sécurité de tous nos concitoyens et, après, participer à un service d’ordre, celui du Front National, de surcroît !
Pour ce qui est des noms, la Commission pourrait entendre des gens qui ont quelque chose à voir, de près ou de loin, avec la FPIP : en l’occurrence, son secrétaire général, M. Philippe Bitauld, ainsi que MM. Besson, Quesada et Tridon, qui font tous partie du Front National, pour savoir ce qu’ils pensent du DPS et surtout de ses idées xénophobes. Il faudrait s’interroger sur les dispositions prises à l’égard de M. Laurendeau, fonctionnaire qui, en 1994, lors d’une patrouille de police, est allé participer à la réunion d’un parti politique, le Front National ; à ma connaissance il n’a jamais été traduit par l’administration devant une instance disciplinaire. Pourtant, je ne crois pas que l’on doive aller participer à une réunion politique lorsqu’on est en service, sauf si l’on y est invité pour assurer un service d’ordre.
Ce laxisme de la police permet aux gens qui appartiennent à ce service d’ordre de le faire presque ouvertement.
Il faut aussi poser à notre directeur général la question de leur présence au sein de la police nationale. J’insiste car ces services d’ordre comprennent des fonctionnaires, comme on peut le voir à Vénissieux.
Je n’ai pas de noms, mais les renseignements généraux, la police judiciaire existent et, au cours de chaque manifestation du Front National, des films, des cassettes sont à la disposition de tout le monde. L’administration peut savoir s’il y a des fonctionnaires de police ou non.
C’est ce que je veux vous dire sur le DPS.
Nous souhaiterions, bien sûr, que ce service d’ordre du Front National disparaisse purement et simplement de l’échiquier. Il n’y a aucune raison qu’on laisse M. Bruno Mégret ou M. Jean-Marie Le Pen se constituer un service d’ordre comprenant des fonctionnaires de police. Nous nous affirmons comme une police républicaine, nous ne voulons pas d’une police des xénophobes. On voit bien le risque d’un laisser-aller dans toutes les compagnies et au cours des services que l’on effectue ; parfois, des paroles malheureuses sont prononcées dans des quartiers dont nous essayons d’assurer la sécurité, et la délinquance augmente.
M. le Président : Vous avez donc des exemples précis de fonctionnaires de police, gardiens de la paix ou officiers, qui font partie du DPS.
M. Joaquin MASANET : Les noms que je vous cite sont ceux de fonctionnaires de police qui, si vous les interrogez, ne vous diront pas qu’ils font partie du service d’ordre. Tous ces gens-là - le Front National de la Police n’existant plus depuis 1997 parce qu’il portait le nom d’un parti politique - la FPIP, le SPPF, constituent des organisations d’extrême-droite, des ramifications du Front National et parmi eux, il y a des fonctionnaires de police, qui se permettent de parler sous des pseudonymes. Dernièrement un article est sorti, à Lyon : à Vénissieux, les gens du DPS vont recruter des fonctionnaires de police dans les compagnies républicaines de sécurité ou dans les commissariats. Ils en parlent librement dans le journal.
Voyons ! Si l’on est fonctionnaire de police et que l’on n’arrive pas à dire qu’untel ou untel participe, on aboutira, comme on l’a vu, à des affaires comme celle de M. Jamet, fonctionnaire de police très bien noté alors que tout le monde connaissait - ou peut-être pas ! - son comportement à l’extérieur. Et après enquête, on s’est rendu compte qu’il y avait des ramifications avec le Front National et l’extrême-droite européenne.
Les gens ne se cachent pas pour dire qu’ils font partie du Front National et que s’ils peuvent donner un coup de main pour assurer le service d’ordre, ils le font. Toutes les manifestations politiques sont filmées. Si la police nationale n’est pas capable de savoir ceux qui appartiennent au DPS, où va-t-on ? C’est laisser faire tout et n’importe quoi. Que l’on ne soit pas surpris après du comportement de certains collègues policiers sur le terrain !
Il faut à un moment donné prendre des dispositions. Il faut des policiers républicains. Je ne dis pas que tous ceux qui sont au DPS ne sont pas des policiers républicains mais il faut leur rappeler qu’ils sont fonctionnaires de police, et que, donc, ils ne peuvent pas assurer ce service d’ordre.
L’exemple doit aussi venir de la hiérarchie. Hier, on nous disait qu’il ne fallait pas faire partie des sociétés de gardiennage. Vous savez très bien que les fonctionnaires de police sont formés chez nous, et quelques années après, certains, de quelque niveau qu’ils soient, partent dans des sociétés de gardiennage. Est-il normal d’assurer une formation à un fonctionnaire pendant des années pour le voir partir dans un service d’ordre xénophobe comme le DPS ? Je ne le pense pas. Nous ne développons pas ce genre de police et à chaque fois que nous en avons des exemples précis, nous le signalons à l’administration.
Mme Geneviève PERRIN-GAILLARD : Lorsque, en réponse à la question de M. le président, vous parlez de " fonctionnaires qui participent au service d’ordre ", cela veut-il dire que vous savez, par des cassettes, par ouï-dire, ou au moyen de rapports, etc., que des fonctionnaires en activité ont pu à un moment donné assurer le service d’ordre du Front National pendant ou en dehors de leurs heures de travail ?
M. Joaquin MASANET : Oui, absolument.
Mme Geneviève PERRIN-GAILLARD : Il s’agit, entre autres, des noms que vous nous avez cités ?
M. Joaquin MASANET : Je vous cite le nom de personnes issues d’une organisation syndicale d’extrême-droite, parce qu’à une époque, nous les avons connues. Ces personnes ont été révoquées, puis réintégrées dans les années 1993-1994. On connaît leur origine et leur appartenance. La police des polices, l’IGPN, travaille aussi, et pourrait certainement vous répondre sur ce point.
Ce que j’ai lu tout à l’heure sur un fonctionnaire de police est réel et concerne un garçon auquel l’administration a demandé pourquoi il s’était rendu à cette réunion d’un parti politique. Bien que cela ne soit pas mentionné, il s’agissait du Front National et tout le monde sait qu’il s’y est rendu avec deux autres collègues en 1994 et qu’il n’a pas été traduit en conseil de discipline.
Mme Geneviève PERRIN-GAILLARD : Jusqu’à présent, nous avions connaissance de retraités qui participaient au DPS, mais nous n’avons jamais eu l’occasion d’entendre ici que des fonctionnaires en activité avaient ce type d’activité parallèle. C’est la raison pour laquelle nous insistons. C’est là une piste qui nous intéresse. Il faut donc qu’il n’y ait aucune confusion.
M. Joaquin MASANET : Je vous le dis. Il faut avoir le courage de ses actes. Mais
– comme l’a dit M. le président, tout est secret - je regrette que l’administration ne prenne pas de décisions à l’encontre de ces fonctionnaires. Lorsque j’interroge l’administration, on me répond que ceux qui participent au DPS sont des retraités. Je regrette mais il y a des ramifications dans la police nationale. Il y a des fonctionnaires en activité qui ont des liens avec le DPS. C’est pourquoi mon organisation demande la dissolution de ce DPS.
S’agissant des tenues, il faut bien différencier le service d’ordre d’un parti du service d’ordre de la police nationale ! Or, les membres du DPS portent exactement les mêmes tenues !
Où les achètent-ils ?
C’est incroyable que personne ne dise rien et qu’on laisse faire ! Un fonctionnaire peut faire partie du RPR, du parti socialiste, du parti communiste ou autre, mais non d’un parti divulguant les idées du Front National ! Quand nous avons fait appel devant le tribunal pour dissoudre le Front National de la Police, nous avons gagné. Ces gens étaient en activité et ont certainement des liens avec le DPS. Il y a eu d’autres services d’ordre qui ont été dissous ou éliminés. Pourquoi pas le DPS ?
Vous savez très bien aussi que des fonctionnaires de police en activité sont affectés à la sécurité de M. Jean-Marie Le Pen.
Enfin ! Toutes les manifestations de M. Jean-Marie Le Pen, si j’ai bien compris, sont filmées et l’on ne pourrait pas savoir si ceux qui assurent sa sécurité sont des fonctionnaires de police ou non ? Je souhaiterais que ce ne soit que des retraités. Malheureusement, il y a des fonctionnaires de police en activité, la montée du Front National au sein de la police le montre. Nous sommes face à une situation où la délinquance augmente et où les comportements et les propos tenus par certains fonctionnaires de police appartenant au DPS ne sont pas dignes d’une police républicaine. Je ne voudrais pas que demain l’on dise qu’il ne faudrait plus de police nationale à cause de ses idées.
Je maintiens que des fonctionnaires de police en activité font partie de ce service d’ordre. Chacun doit prendre ses responsabilités, que ce soit le ministère de l’Intérieur pour donner des noms, pour les filmer, pour les traduire en conseil de discipline, ou les organisations syndicales ; puisque avec Alliance et l’UNSA Police, nous sommes majoritaires au sein de la police nationale, nous les traduisons devant le conseil de discipline.
Vous savez très bien que tout a été caché. Je prends le cas de M. Laurendeau parce que j’ai le papier. On sait qu’il s’est rendu avec un véhicule de police à une réunion politique du Front National ; il n’a jamais été traduit devant le conseil de discipline.
M. le Président : Y a-t-il eu une enquête de l’IGPN sur ce cas ?
M. Joaquin MASANET : Je ne sais pas. Je n’ai que les papiers que l’on veut bien me fournir.
Mais il faut arrêter de dire qu’il n’y a que des retraités au DPS. Il suffit de les regarder : que tous ces " costauds " soient des retraités, ça m’étonnerait, moi qui suis plus près de la sortie que de l’entrée ! (Sourires.)
Il faut savoir ce que l’on veut faire du DPS au niveau de l’Etat et du ministère de l’Intérieur. Je suis un homme libre. Je dis ce que l’on voit et je ne voudrais pas que l’on dise demain que dans la police nationale, il y a des racistes. Que ce soit l’organisation syndicale Alliance, concurrente à la nôtre, ou la nôtre, nous voulons une police républicaine, nous ne voulons plus voir ce que l’on voit aujourd’hui. C’est une aberration de laisser faire ces gens-là, autour de Mégret ou de Le Pen.
M. Gérard LINDEPERG : Ce que vous nous dites représente une avancée par rapport à ce que nous avions entendu jusqu’à présent. Dans la plupart des auditions précédentes nous essayions d’établir ce que nous appelions, avec beaucoup de précautions et de subtilités, des " connivences ".
Vous faites des affirmations extrêmement vigoureuses sur des participations actives, directes. Nous avons bien reçu votre acte de foi républicain mais l’important pour notre Commission, c’est d’avoir des éléments concrets et précis. Vous avez donné quelques noms mais au-delà de la déclaration de caractère général, pouvez-vous nous renseigner sur l’importance quantitative de ces participations ? Avez-vous des exemples précis, tangibles, palpables, vérifiables, quitte pour la Commission à élargir ses auditions à certaines que nous n’avions pas prévues ?
M. Joaquin MASANET : Je vous ai invité à entendre les gens dont j’ai cité les noms, qui font partie d’organisations syndicales, dont la FPIP. Posez-leur la question. Ils sont en activité et appartiennent au Front National.
M. Gérard LINDEPERG : Vous n’en connaissez pas ?
M. Joaquin MASANET : J’en connais, mais je n’ai pas de pièces me permettant de dire, précisément, qui a participé à telle ou telle manifestation. Je peux même en citer qui ne sont pas loin d’ici, en Île-de-France, mais je n’ai pas de preuves.
Je n’ai pas de preuve écrite permettant d’affirmer que tel commandant de telle compagnie d’intervention fait partie du DPS.
Mais aujourd’hui, avec les systèmes vidéo, on filme toutes les manifestations, sportives, artistiques, etc. Je suppose que les manifestations de partis politiques comme le Front National sont filmées et que des membres de la police, des renseignements généraux assistent à ces réunions. Ne peuvent-ils pas savoir s’il y a des fonctionnaires de police dans le DPS ? Je regrette mais, quitte à me répéter, je ne pense pas que tous ceux qui encadrent M. Bruno Mégret ou M. Jean-Marie Le Pen sont des retraités. Je n’ai pas de preuve. Je sais qui participe, mais nous n’avons rien d’écrit. Faut-il absolument attendre que se produisent des événements comme on en a vu par le passé ? Il faut savoir ce que l’on veut : veut-on dissocier le service de sécurité du Front National, le DPS, des fonctionnaires de police ? La police nationale a une tenue. On a essayé de distinguer les polices municipales et la police nationale, et on ne pourrait pas le faire avec le service d’ordre du Front National ! Ses membres sont tous en treillis et portent les mêmes tenues que ceux qui font du maintien de l’ordre. Est-ce normal ?
Il faut distinguer les tenues puis il suffira de regarder sur les films, ceux qui seront en tenue différente. Quand on veut trouver quelqu’un, on le trouve.
M. Robert GAÏA : Pour revenir aux faits, on nous a signalé dans une audition précédente que quatre fonctionnaires de police avaient été reconnus membres du DPS. Trois ont été révoqués, un est encore en poste à Clermont-Ferrand.
Par le biais de vos secrétaires départementaux, auriez-vous une étude quantitative sur le nombre de fonctionnaires de police membres du DPS ? Je précise bien du DPS, pas du Front National.
Vous avez dit qu’un certain nombre de fonctionnaires de police étaient rémunérés pour ces activités.
M. Joaquin MASANET : Absolument.
M. Robert GAÏA : Votre hiérarchie nous a dit qu’il est difficile d’empêcher quelqu’un de faire ce qu’il veut en dehors de ses heures de travail. Mais dès lors qu’une rémunération est versée, le problème est différent. Pourriez-vous, d’ici la fin de la commission d’enquête, par le biais de vos secrétaires départementaux, nous donner le nombre de fonctionnaires membres du DPS rémunérés en tant que tels ? Et non rémunérés ?
Par ailleurs, un autre syndicat de police qui ne concerne pas le corps que vous représentez, nous a dit qu’une défense syndicale très ferme empêchait d’obtenir la révocation, lorsqu’on déférait en commission de discipline des fonctionnaires pour des agissements liés au DPS, contrairement à certains corps de police, où l’on trouve beaucoup plus de révocations. Qu’en pensez-vous ? Êtes-vous offensif aussi dans les commissions de discipline ? C’est une observation qui s’adresse aux syndicats en général.
M. Joaquin MASANET : Lorsque je siégeais en conseil de discipline au nom de mon organisation syndicale - ce n’est plus le cas aujourd’hui - nous demandions la révocation de quiconque appartenait à l’extrême-droite, en fonction de la gravité de sa faute, bien sûr. J’avais révoqué M. Provence, CRS à l’époque où je siégeais - je siégeais pour les CRS - pour des faits relatifs à une manifestation, etc. Il a été réintégré trois ou quatre ans après.
Sur ce sujet, mon organisation est claire : dès l’instant où nous avons des faits constitués, nous demandons la révocation pour ne pas nuire à l’image de la police nationale. Nous voulons une police nationale républicaine et je crois que les autres organisations ont le même comportement que nous, du moins au niveau du corps de maîtrise et d’application.
Pour ce qui s’est passé à Lyon, c’était la commission administrative paritaire de Lyon, qui avait siégé pour ces gens-là. Trois ont été révoqués et un est encore en poste, me semble-t-il, à Clermont-Ferrand. Nous procédons à un examen département par département, ainsi que dans les territoires d’outre-mer, mais il est très difficile de connaître le nombre de fonctionnaires faisant partie du DPS et de savoir s’ils sont rémunérés. Je ne dispose que d’informations sur des gens dont je sais qu’ils appartiennent à ces services d’ordre d’extrême-droite mais sans en avoir la preuve écrite, aucune mention DPS ne figurant dessus.
M. le Président : C’est le DPS qui nous intéresse.
M. Joaquin MASANET : Sur le DPS, nous sommes en train de faire une étude. Je n’ai pas plus d’éléments. Je ne peux vous communiquer les noms dont je dispose car je n’ai rien de concret à leur sujet.
M. le Président : En nombre ?
M. Joaquin MASANET : Je ne sais pas. Nous sommes en train de quantifier leur nombre, département par département. Quand nous l’aurons, je vous l’enverrai au titre de l’UNSA Police, sans donner les noms, sauf si j’ai des preuves.
Je lisais l’autre jour l’article d’un journal lyonnais dont le titre était Il faut donner un grand coup de balai au Front National. Il y est indiqué que le DPS va chercher des fonctionnaires de police, élus en 1989 ou 1998 au conseil municipal de Villeurbanne aux côtés de M. Pierre Vial. C’est connu, on lit cela dans tous les journaux. Il doit être possible aux chefs de service de savoir qui en fait partie, en discutant ...
M. le Rapporteur : A Strasbourg, un CRS est allé féliciter Mme Catherine Mégret. Savez-vous s’il y eu à son encontre une procédure disciplinaire et quel en a été le résultat ?
M. Joaquin MASANET : J’ai demandé la révocation de cet individu de la CRS 23, âgé de cinquante ans et qui avait adhéré chez nous. Je l’ai exclu de l’organisation à laquelle j’appartiens, c’est-à-dire le syndicat national indépendant et professionnel des CRS. Quand je l’ai reçu, je lui ai dit que je demanderais sa révocation, mais cet avis n’a pas été suivi par l’administration. Il a eu deux mois d’exclusion, je crois. Pour ma part, je l’aurais révoqué. J’aurais pris des mesures draconiennes à son encontre.
M. le Rapporteur : Quelle avait été la demande de l’administration à son sujet ?
M. Joaquin MASANET : Je vous enverrai le compte rendu de la commission.
J’ai apporté quelques cas ici de fonctionnaires de police ayant attaché des personnes à des radiateurs, qui n’ont jamais été révoqués par le conseil de discipline ! Et ils n’ont pas attaché des blancs !
M. le Président : Si vous avez des éléments concernant des faits qui touchent plus précisément au DPS, nous sommes preneurs, naturellement.
M. Joaquin MASANET : J’ai évoqué une procédure tout à l’heure concernant M. Laurendeau datant de 1994. Le fait qu’il s’était rendu à une réunion politique du Front National ne figurait pas sur le compte rendu signé du directeur !
M. le Président : Il y a eu une procédure.
M. Joaquin MASANET : Je vous en ai lu le passage tout à l’heure. Vous avez le nom, M. Laurendeau, vous pouvez le convoquer, il est toujours en activité dans le Val-de-Marne.
Et je vous ferai parvenir le dossier à propos de la CRS 23, située à Charleville-Mézières.
M. Jacky DARNE : Mon propos rejoint celui de mes collègues. Nous apprécions votre intervention peu diplomatique et sans ambiguïté, mais nous sommes tous à la recherche de faits précis qui permettent d’étayer votre intervention. C’est évidemment ce qui nous manque.
Il ressort de votre intervention une critique sous-jacente de la hiérarchie : finalement, des personnes se compromettent dans des services d’extrême-droite, la hiérarchie devrait le savoir grâce aux vidéos et il ne se passe rien. Comment cela se peut-il ? Doit-on considérer qu’il y a des sympathies à tous les niveaux de la hiérarchie ou que le laxisme de tel ou tel responsable empêche les sanctions lors de poursuites disciplinaires, par exemple ?
Vous utilisez en parlant du CRS de Strasbourg l’expression " j’ai demandé sa révocation ". Comment se déroule le processus de décision ? J’imagine que c’est un responsable hiérarchique qui demande et qu’ensuite, le conseil disciplinaire s’exprime à une majorité. Qui a la possibilité de saisir ce conseil disciplinaire ? Au niveau départemental, vous avez constaté que certains comportements étaient répréhensibles et ne faisaient l’objet d’aucune sanction. Il existe donc des cas où vous estimez que les poursuites devaient être engagées et ne l’ont pas été ?
De même, au début de votre intervention, vous avez regretté que les policiers soient ensuite recrutés par des services d’ordre et des sociétés de gardiennage. Là encore, puisqu’il ne s’agit plus de fonctionnaires en activité, avez-vous des cas précis montrant qu’après avoir eu des responsabilités au sein de la police, certaines personnes ont eu des responsabilités précises - au DPS, c’est ce qui nous intéresse plus particulièrement - qui témoignent de comportements répréhensibles du point de vue de la déontologie, si ce n’est du point de vue légal ?
M. Joaquin MASANET : Sur les sociétés de gardiennage, il ne s’agit pas des sociétés de gardiennage du DPS. Ce sont des fonctionnaires de police qui ont été dans l’administration depuis des années et qui, à un moment donné, demandent une mise en disponibilité pour travailler dans des sociétés de gardiennage. Pourquoi avoir formé des fonctionnaires de police pour les voir partir après dans différentes sociétés de gardiennage, que ce soit chez Danone, chez Carrefour ou autres ? Il y a quelques années, on demandait aux fonctionnaires de police, gradés et gardiens, de constituer un dossier sur l’activité ultérieure, avant d’accorder une mise en disponibilité.
Le DPS n’a rien à voir avec les sociétés de gardiennage. Je dis que nous avons formé des fonctionnaires de police auxquels on donne l’autorisation de se mettre en disponibilité pendant un à six ans, pour partir dans des sociétés de gardiennage.
Il ne s’agit pas de fonctionnaires en retraite qui peuvent faire ce qu’ils veulent. Mais je précise qu’il y a quelques années, les gens en activité ne pouvaient pas se mettre en disponibilité pour entrer dans des sociétés de gardiennage. Aujourd’hui, c’est possible grâce au nouveau règlement d’emploi. Vous n’empêcherez donc pas un fonctionnaire de police de demander une mise en disponibilité pour partir dans une société de gardiennage. Est-ce que ce n’est pas une incitation ? Je crois plutôt que notre intérêt est de garder les fonctionnaires parmi nous et de les mettre dans des quartiers sensibles.
Je vous transmettrai des informations sur la procédure suivie devant le conseil de discipline afin que vous voyiez ce qu’a écrit la hiérarchie.
Affirmer que la hiérarchie couvre tel ou tel fonctionnaire de police appartenant au DPS - de toute façon, on ne peut pas le savoir précisément - me paraît aller un peu loin. La hiérarchie ne veut pas que l’on sache que, dans telle compagnie ou tel commissariat, les élections professionnelles ont révélé un fort pourcentage de votes Front National comme à la CRS 54, où une soixantaine de fonctionnaires avaient voté pour la FPIP. En effet, on demande ensuite des comptes au chef de service, parce que l’administration ne veut pas de tels gens.
Mais je ne pense pas que la hiérarchie comporte plus de membres appartenant au Front National que les autres catégories de fonctionnaires ; ce serait une catastrophe pour la police nationale.
M. le Président : Vous avez parlé de dirigeants de la FPIP qui avaient été révoqués et réintégrés. Avant leur révocation, il y a eu certainement des enquêtes de l’IGPN ?
M. Joaquin MASANET : Oui : " Enquête administrative suite aux incidents ayant émaillé la manifestation de la fédération professionnelle indépendante ". Vous pouvez les demander à l’administration.
M. le Président : Justement. Nous avons demandé à la direction de l’IGPN de venir devant cette Commission, elle nous a répondu qu’elle n’avait aucune information sur la question du DPS.
M. Joaquin MASANET : Il ne s’agit pas de membres du DPS. Il y a des fonctionnaires de police qui se sont présentés au Front National, des gens qui sont en activité encore aujourd’hui. Ils ne sont peut-être pas au DPS, mais ils sont en activité.
C’est le cas de M. Philippe Bitauld. Demandez à l’administration.
M. le Président : Dans ce cas, y a-t-il une enquête de l’IGPN ?
M. Joaquin MASANET : Bien sûr. Il y a une " enquête administrative suite aux incidents ayant émaillé la manifestation ".
M. le Président : De quelle année cela date-t-il ?
M. Joaquin MASANET : Par arrêté du 17 juin 1991, de l’avenue Trudenne à la place de la Résistance à Paris. Enquêteur : Daniel Martinez.
Ange Quesada, Bernard Pattedoie...
M. le Président : Qu’avaient-ils fait ?
M. Joaquin MASANET : C’était une manifestation.
" Aux alentours du 12 juin 1991, M. Philippe Bitauld, président de la FPIP, déposait à la préfecture de police de Paris une déclaration de manifestation prévue le 17 juin, suite à une manifestation... Malgré cette interdiction, un rassemblement avait lieu le 17 juin 1991 ".
Des gens ont été sanctionnés.
La comparution devant le conseil de discipline de MM. Philippe Bitauld, Girod, Schuler, Benoit, Patrick Extreme, Patrick Allier et Michel Tridon, prouve que, même s’ils ne font pas partie du DPS, ils font bien partie d’une organisation syndicale proche du Front National.
De même, pourquoi ne pas écouter M. Laurendeau, fonctionnaire de police en activité dans le Val-de-Marne et lui demander ce qu’il pense du DPS ? Il représente une organisation qui s’appelle le SPPF.
J’ai cité M. Philippe Bitauld, parce que cela peut vous donner des informations. Vous pouvez essayer de l’entendre.
M. le Rapporteur : Celui qui avait été révoqué en 1991 a-t-il été réintégré depuis ?
M. Joaquin MASANET : Bien sûr, il a été réintégré en 1995, il est toujours en activité et président de la FPIP. Il vient siéger avec nous au Comité technique paritaire. Demandez tout cela à l’administration qui vous communiquera les dossiers, puisque vos travaux sont secrets.
M. le Président : C’est secret mais ce n’est pas pour cela que l’on nous donne les éléments. En tout cas, vous nous aidez à les chercher.
M. Joaquin MASANET : Je vous enverrai la traduction devant le conseil de discipline. Vous pouvez la demander à l’administration. On y expose la raison de la révocation.
Je siège en conseil de discipline, j’ai donc toutes les procédures que je ne peux vous donner pour des raisons de confidentialité, mais vous pouvez les demander à l’administration.
Pourquoi ont-ils été réintégrés ?
M. André VAUCHEZ : Monsieur a beaucoup insisté sur le problème de la tenue qui représente un vrai problème.
Qu’un policier puisse être candidat aux élections municipales est permis par votre statut. Pourquoi pas, hélas, pour le Front National ? Il peut très bien se trouver dans un meeting comme devant être utilisé par le Front National au sein du DPS, et la boucle est bouclée.
M. Joaquin MASANET : Exactement. De toute façon, un fonctionnaire de police a le droit de se présenter à une élection politique quelle qu’elle soit. On sait alors tous ceux qui se sont présentés sous l’égide du Front National, non ? Je crois rêver aujourd’hui. Quand on m’envoie les affiches, je regarde : " Front National : pour les Français d’abord, Olivier Kubertsky ". Il est toujours en activité et s’est présenté sous l’égide du Front National aux élections municipales, même s’il a démissionné le 16 mai 1996 du conseil municipal des Ullis. Et je ne pense pas qu’il ait démissionné du Front National.
M. le Président : Nous vous remercions pour l’aspect catégorique de vos déclarations et, nous le voyons bien, de votre engagement.
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