La Commission a tenté d’établir une typologie des incidents relevés depuis la création du DPS, permettant de tirer des enseignements et de mettre en évidence quelques faits saillants.
– 68 incidents ont été relevés en 13 ans :
1987 3
1988 1
1989 néant
1990 1
1991 néant
1992 9
1993 9
1994 1
1995 9
1996 12
1997 14
1998 8
1999 1
– A l’exception de 1994, année " calme ", on constate à partir de 1992 une " montée en puissance " avec un pic très net en 1997, et un ralentissement en 1998 puisque le nombre d’événements diminue de moitié par rapport à l’année précédente. Les incidents étant souvent liés aux réunions électorales, la conjoncture politique explique pour beaucoup ces évolutions.
La scission du Front National en 1999 ainsi que la réorganisation des deux services d’ordre ne permettent pas de tirer des conclusions de l’accalmie constatée depuis février 1999.
– Les 68 incidents concernent 95 types d’infractions, certains incidents cumulant plusieurs infractions, à l’instar de la réunion organisée par M. Bruno Gollnisch à Montceau-les-Mines le 25 octobre 1996 (rixe ; présomption d’usurpation de tenue et de fonction ; présomption d’utilisation d’armes) ou des événements survenus à Ostwald le 30 mai 1997 en marge du congrès du Front National à Strasbourg (usurpation de tenue et de fonction ; violences).
– Le DPS est impliqué de façon explicite dans 61 cas. Les autres incidents concernent des fais occasionnés par des " supplétifs " (3) appelés à titre de renfort pour la circonstance ou simplement présents sur les lieux (réunion électorale le 3 mars 1992 ; BBR le 25 septembre 1993 ; manifestation du 1er mai 1995). De même, 3 faits sont comptabilisés bien que ne mettant pas en cause formellement ou explicitement le DPS : l’interpellation à Dreux du chauffeur de Mme Marie-France Stirbois le 15 septembre 1993, l’assassinat d’Ibrahim Ali à Marseille le 21 février 1995 au cours d’une opération de collage d’affiches et celui de Brahim Bouarram, noyé dans la Seine à l’occasion de la fête du 1er mai 1995 à Paris.
– La répartition géographique des incidents montre la prépondérance de la région parisienne : 20 incidents (14 sur Paris, 6 en région parisienne), soit presque un événement sur trois (30 %) ; la région Provence-Alpes-Côte-d’Azur arrive en deuxième position (15 incidents), suivie par la Normandie (6 incidents). Ces trois régions totalisent 41 incidents (60 %). Toulon et Vitrolles, deux des quatre villes gérées par le Front National, sont citées respectivement 5 et 3 fois depuis 1995.
Enfin, les faits recensés au cours des 68 incidents peuvent se répartir en trois catégories d’infractions : les agressions (48), la détention d’armes (38) et l’usurpation de tenue ou de fonction (8).
A) LES AGRESSIONS, VIOLENCES, MENACES ET INTIMIDATIONS
49 faits constituent des agressions : intimidation, altercation, provocation, menace, rixe, agression sont les termes employés pour leur description.
. L’intimidation, la provocation, la menace concernent des journalistes (manifestation des familles le 11 octobre 1997) ou des personnes isolées (réunion du conseil municipal au Havre le 16 décembre 1996).
. Si les rixes et agressions opposent le plus souvent des membres du DPS ou des supplétifs à des contre-manifestants, elles peuvent toutefois donner lieu à des affrontements " internes " : membres du DPS contre supplétifs (le 15 septembre 1992 ; le 1er mai 1993 ; le 23 avril 1995 ; en juin 1996 ; lors des fêtes BBR du 28 septembre 1996, du 28 septembre 1997 et du 19 septembre 1998).
. En quatre occasions, les forces de police ou de gendarmerie ont également eu à subir le zèle du DPS : le 21 janvier 1992, le 23 avril 1995, le 18 septembre 1996 et en septembre 1998.
. Deux événements aboutissent à mort d’homme : le 21 février 1995 à Marseille, lors d’une opération de collage d’affiches, et le 1er mai 1995 à Paris, pendant le défilé de la fête de Jeanne d’Arc où l’agression verbale à l’encontre d’un promeneur isolé a dégénéré en meurtre. Les personnes mises en cause ont été reconnues coupables et condamnées, même si leur lien formel avec le DPS n’a pas été établi par la justice dont les investigations n’avaient pas cet objet.
. Enfin, le meurtre de M. Jean-Claude Poulet-Dachary, survenu à Toulon le 29 août 1995, ne manque pas de susciter des interrogations sur le rôle du DPS, selon deux témoins entendus par la Commission, Mme Fiammetta Venner (journaliste à Prochoix) et M. Guy Konopnicki (journaliste à L’Evénement du Jeudi).
B) LA DETENTION D’ARMES
La Commission a recensé 38 cas relatifs à des détentions d’armes, qu’il s’agisse de stockage ou de port (16), d’exhibition (6) ou d’utilisation de ces dernières (16). Il convient de noter la présence d’armes dans 56 % des incidents relevés, soit plus de la moitié.
Les armes utilisées et le rapport des membres du DPS aux armes sera étudié de manière plus analytique dans la deuxième partie du rapport.
C) DE LA CONFUSION AVEC LES FORCES DE L’ORDRE A L’USURPATION DE FONCTION
Six incidents mettent en cause des membres du DPS qui semblent avoir largement outrepassé leur mission de membres d’un service d’ordre pour usurper celle de la police nationale.
. Le 15 janvier 1995, à Tours
Deux membres du DPS tentent de contrôler l’identité d’un opposant au Front National.
. Le 11 novembre 1995, à Carpentras
Le DPS interpelle, fouille et contrôle l’identité d’un individu, remis ensuite aux forces de police.
. En août 1995, à Toulon
Des membres du DPS fouillent les participants à l’entrée de l’université d’été du Front National.
Des membres du DPS inspectent l’appartement du directeur de cabinet et adjoint au maire du Front National.
. Le 25 octobre 1996, à Montceau-les-Mines
Les membres du DPS assurent le " maintien de l’ordre " sur la voie publique pendant une réunion de M. Bruno Gollnisch, de 21 heures à 23 heures, dans des tenues susceptibles de semer la confusion avec la police dans l’esprit du public.
. Le 30 mars 1997, à Ostwald
Quatre membres du DPS, arguant d’une fausse qualité de policier, procèdent au contrôle d’identité de deux sympathisants du mouvement Ras l’Front.
Parmi ces incidents, quelques-uns ont retenu l’attention de la Commission parce qu’ils sont révélateurs des pratiques du service d’ordre du Front National.
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