Présidence de M. Paul Quilès, Président
Le Président Paul Quilès a accueilli le Général Maurice Schmitt en rappelant qu’il avait exercé les fonctions de Chef d’état-major des armées jusqu’au 23 avril 1991, et qu’il avait, à ce titre, contribué à la mise en place de l’opération Noroît.
Le Général Maurice Schmitt a précisé d’emblée que l’opération Noroît s’était déroulée sans poser de problèmes majeurs.
Il a expliqué que la situation avait commencé à se dégrader au Rwanda à la fin septembre 1990. A cette époque, le Gouvernement et les armées de la France avaient à faire face à trois théâtres d’opérations : le Moyen-Orient, le Tchad et le Rwanda.
Le Général Maurice Schmitt a insisté sur l’opération menée au Tchad. La rébellion d’Idriss Deby se développait dans le Darfour et il convenait d’être vigilant à la fois sur Abéché et N’Djamena. Il a fait remarquer que la " relève " entre les deux Présidents tchadiens s’était passée sans aucune exaction à l’encontre des populations civiles à N’Djamena. L’armée française y a sans doute contribué en gardant les dépôts d’armes et munitions de l’armée tchadienne.
En ce qui concerne le Rwanda, le Général Maurice Schmitt a fait état d’informations transmises par le Colonel René Galinié selon lesquelles des affrontements entre Tutsis et Hutus à Kigali, qui faisaient suite à une attaque du FPR, pouvaient mettre en danger la vie des ressortissants étrangers et en particulier des ressortissants français.
Il a rapporté plus précisément que lui-même avait accompagné le 3 octobre 1990 le Président François Mitterrand, MM. Jean-Pierre Chevènement, Roland Dumas et Hubert Védrine, ainsi que l’Amiral Jacques Lanxade dans un voyage au Moyen-Orient. Le 4 octobre, après une nuit à Abu Dhabi, l’ensemble de la délégation est arrivé à Djeddah où elle était reçue à déjeuner par le Roi Fahd. C’est peu avant ce déjeuner que deux messages sont arrivés, en provenance respectivement de l’Elysée et de l’état-major des armées. Ces messages précisaient que des risques graves d’exactions existaient à Kigali et que le Président Habyarimana demandait l’intervention de l’armée française. Un Conseil de défense restreint, très bref, s’est tenu sur l’heure à Riyad, sous la présidence du Président de la République, à la suite duquel l’ordre a été donné d’envoyer au plus vite deux compagnies à Kigali, avec la mission de protéger les Européens, les installations françaises et de contrôler l’aérodrome afin d’assurer l’évacuation des Français et étrangers qui le demandaient. Ces troupes ne devaient en aucun cas se mêler des questions de maintien de l’ordre qui étaient du ressort du Gouvernement rwandais. Le Général Maurice Schmitt a précisé que ces deux compagnies, parties de Bouar, étaient arrivées le soir même à Kigali et qu’elles avaient été le lendemain renforcées par des Belges et des Zaïrois.
De retour à Paris, il a estimé que la situation au Darfour nécessitait le maintien des effectifs qui se trouvaient au Tchad et en Centrafrique et a donc décidé de relever le 3ème RPIMA et le 2ème REP, présents au Rwanda depuis une semaine, pour les remplacer par un état-major tactique complet, placé sous les ordres du Colonel Jean-Claude Thomann. Il a précisé que la situation au Tchad et au Rwanda, en septembre 1990, avait conduit l’état-major des armées à maintenir en réserve, partie en France, partie en Centrafrique, trois régiments parachutistes professionnels pour pouvoir intervenir rapidement et éviter que nos forces ne se trouvent en situation d’infériorité au Tchad et nos ressortissants menacés au Tchad et au Rwanda.
A la fin du mois d’octobre 1990, il ne restait plus, avec les forces françaises, qu’un contingent zaïrois, les Belges ayant décidé de quitter le pays. A ce moment, le calme était revenu, le FPR avait repassé la frontière ougandaise et les FAR, malgré leur faiblesse d’organisation, avaient pu reconquérir Ruhengeri et les localités du nord du pays. Il a indiqué qu’à la demande du ministère de la Coopération, il avait mis en place, après accord du Ministre de la Défense, auprès des FAR, début 1991, un détachement d’assistance militaire et d’instruction (DAMI) de trente personnes. La présence militaire française au Rwanda était donc constituée par une compagnie d’infanterie au titre de l’opération Noroît et un DAMI. Le commandement de l’ensemble de nos deux unités a été alors confié au Colonel Galinié proche de l’ambassadeur (attaché de défense). En mars, cette période coïncidant avec la fin des opérations en Irak, le Général Maurice Schmitt a considéré qu’il fallait recadrer et revoir notre dispositif au Rwanda, s’agissant notamment des missions du DAMI, dans la perspective d’une reconstitution de l’armée rwandaise qui nécessitait notamment la présence d’instructeurs pour l’utilisation d’armes lourdes comme les mortiers.
Il a déclaré en conclusion de son intervention que les forces françaises n’avaient pas à rougir de ce qu’elles avaient fait et a estimé que notre simple présence avait empêché bien des exactions dans Kigali. Il a d’ailleurs souligné que le faible nombre d’évacuations de nos ressortissants témoignait de l’efficacité de cette présence. Toutefois, comme la situation restait préoccupante dans la région de Ruhengeri, le DAMI avait reçu pour mission l’évacuation sur Kigali des ressortissants qui s’y trouvaient, en cas de nouveaux incidents de frontière avec l’Ouganda.
Le Président Paul Quilès a demandé des précisions sur la nature et l’étendue des missions assignées au DAMI. S’agissait-il de missions d’encadrement, d’aide, de formation ?
Le Général Maurice Schmitt a répondu, qu’en l’espèce, ce DAMI était constitué, pour l’essentiel, de cadres et de spécialistes qui avaient principalement des missions de conseil et d’instruction des cadres de l’armée rwandaise. Basés à Ruhengeri, ils étaient aussi les premiers à pouvoir intervenir, en cas de menace du FPR, pour procéder à l’évacuation des ressortissants occidentaux vers Kigali. Il a indiqué que les missions de chaque DAMI sont variables et fonction de la situation et des besoins de chaque pays. En l’occurrence, l’armée rwandaise avait besoin de formateurs et d’instructeurs pour l’utilisation d’armes lourdes.
Le Président Paul Quilès a ensuite demandé au Général Maurice Schmitt s’il partageait l’analyse qui avait conduit l’Ambassadeur Georges Martres à formuler l’observation suivante dans son rapport de fin de mission : " depuis l’affaire de Byumba au cours de laquelle l’assistance technique militaire française a apporté un secours évident aux forces armées rwandaises, le FPR a développé une campagne contre notre présence militaire, assortie de menaces à l’égard de nos ressortissants et il y a tout lieu de croire que, de leur côté, les partis proches du Président amplifient les menaces pour provoquer de notre part des réactions sécuritaires dont l’armée rwandaise pourrait tirer profit en cas de reprise des combats ".
Le Général Maurice Schmitt a estimé que ce point de vue lui semblait conforme à ce qui se passait, malgré les difficultés d’appréciation dues à la relative ancienneté de ces événements. Même si l’on ne pouvait pas affirmer avec certitude que les attaques du FPR menaçaient réellement les ressortissants occidentaux, elles justifiaient néanmoins la présence dissuasive de nos forces armées, notamment pour éviter les pillages et les comportements agressifs.
M. René Galy-Dejean, évoquant l’attentat du 6 avril 1994 contre l’avion présidentiel, s’est demandé si des dépôts d’armement occultes pouvaient avoir existé au Rwanda ou en Ouganda. Revenant sur les missions du DAMI, il a noté que celles-ci comportaient l’instruction à l’utilisation des armes lourdes et a demandé si cette fonction d’instruction pouvait aller jusqu’au maniement d’armes antiaériennes.
Le Général Maurice Schmitt, après avoir précisé que la mission d’instruction à l’utilisation des armes lourdes excluait leur utilisation directe par les militaires français, a indiqué que cette mission ne s’était pas a priori appliquée aux armes antiaériennes car une menace aérienne du FPR venant d’Ouganda n’était pas envisagée. Il a souligné néanmoins qu’il n’était pas très difficile d’apprendre à se servir d’un Stinger ou d’un missile SAM et que certains étaient de surcroît très faciles à transporter sans attirer l’attention, à la différence d’un SCUD par exemple.
M. Pierre Brana a souhaité savoir si les missions confiées aux troupes françaises de l’opération Noroît avaient évolué au cours du temps et si, comme cela a été précisé devant la mission, des militaires français avaient participé ou assisté à des interrogatoires de prisonniers du FPR.
Le Général Maurice Schmitt a rappelé que le premier message signé de l’Amiral Coatanéa contenait des instructions concernant la protection des ressortissants français et étrangers ainsi que des installations françaises. Il ne comportait pas de missions d’instruction de l’armée rwandaise. Cette dernière mission est apparue début 1991. Dans un message dont le texte pourrait être communiqué à la mission d’information, le Chef d’état-major des armées a formulé très précisément les missions du détachement d’assistance militaire et d’instruction (DAMI). Il a précisé qu’il tenait à ce que les chefs des DAMI aient des instructions précises de façon à éviter tout débordement. Les ordres donnés aux militaires de l’opération Noroît ne leur auraient pas permis d’assister à des interrogatoires, d’ailleurs cette manière d’agir n’entre pas dans les habitudes des forces françaises. Pour sa part, il n’a jamais était informé de tels agissements, ni par le Colonel René Galinié, ni par le Colonel Jean-Claude Thomann. Toutefois, il n’a pas exclu qu’à titre individuel un soldat français ait pu assister à des interrogatoires, mais en aucun cas une telle initiative ne pouvait relever d’ordres de l’autorité militaire. Qui plus est, ce type d’interrogatoire n’aurait vraisemblablement apporté aucune information intéressante sur le plan du renseignement car nous étions suffisamment au courant de la situation locale par le biais de nos attachés de défense, fort bien renseignés.
Citant un rapport d’Amnesty International mettant en cause les instructeurs du DAMI français, M. Charles Cova a demandé si l’assistance militaire s’était limitée à l’instruction d’officiers et de soldats de l’armée régulière rwandaise ou si elle avait pu concerner les forces paramilitaires des " escadrons de la mort " qui ont participé par la suite au génocide.
Le Général Maurice Schmitt a souligné que, pendant la période couverte par l’opération Noroît, il n’existait pas encore de milice et qu’en tout état de cause il ne voyait pas en quoi les personnels des DAMI, spécialistes des transmissions ou du maniement d’armes lourdes, pouvaient être d’une quelconque utilité dans l’apprentissage de l’utilisation de la machette. Or, c’est avec ce type d’armes blanches que les massacres ont été perpétrés.
Il n’est certes pas impossible que des militaires des FAR, démobilisés à partir de 1992, aient pu encadrer les milices. L’ancien Chef d’état-major des armées a alors estimé que l’origine du génocide pouvait être trouvée dans l’effroyable panique qui a saisi les Hutus à la suite de l’offensive du FPR dans le nord du pays. Il a rappelé que la France avait été, après autorisation du Conseil de Sécurité, la seule à intervenir, dans le cadre de l’opération Turquoise, pour tenter de rétablir le calme dans le pays alors que les troupes de l’ONU, sur place au moment du déclenchement des massacres, étaient restées sans réaction.
M. Jean-Bernard Raimond a souhaité obtenir des précisions sur la présence concomitante des militaires du détachement d’assistance militaire et d’instruction et des militaires de l’opération Noroît, et sur d’éventuelles livraisons d’armes par la France aux forces armées rwandaises.
Le Général Maurice Schmitt a indiqué qu’au début de l’année 1991, le dispositif Noroît avait été allégé, une des deux compagnies ayant été renvoyée en Centrafrique, et que le DAMI avait été placé sous les ordres du colonel commandant l’opération Noroît.
Le Président Paul Quilès a rappelé que le dispositif Noroît est resté opérationnel jusqu’à fin 1993, date à laquelle il a été remplacé par la MINUAR.
Le Général Maurice Schmitt a indiqué que la France avait livré aux forces armées régulières du Rwanda des armes destinées à des combats classiques dans cette région, de type mortier, dans le cadre de l’accord de coopération et dans le respect des autorisations délivrées par la CIEEMG. Il a précisé que l’avion présidentiel, qui a été abattu par un missile, aurait pu également l’être, le cas échéant, par une mitrailleuse de 12/7 ou un quadritube de 13 mm d’origine soviétique. Il est en effet assez facile d’abattre à l’atterrissage un avion de transport civil de ce type sans recourir nécessairement à l’utilisation d’un missile antiaérien.
Le Président Paul Quilès a évoqué un document manuscrit, tiré d’un manuel d’instruction tenu par un militaire rwandais et récupéré par le FPR, qui permet de cerner le contenu de l’instruction délivrée par les instructeurs du DAMI. Ce document fait notamment état d’explications concernant le tir au mortier, le tir en position couchée, etc., c’est-à-dire de notions correspondant à une instruction militaire de base. Il a insisté sur la nécessité pour la mission de procéder clairement à l’inventaire des missions d’assistance et des missions d’intervention.
Citant un document transmis par le ministère de la Défense qui précise : " le schéma de l’opération Noroît (forces engagées, volume des forces) ne présente qu’une illustration des effectifs AMT-DAMI, limitée à la période pendant laquelle ces éléments sont passés sous commandement Noroît et ne relevaient plus de la direction du ministère de la Coopération au titre de la coopération militaire ", M. Bernard Cazeneuve, rapporteur, s’est interrogé sur la configuration de l’opération Noroît en termes de missions et de structures. Il a rappelé que les effectifs du DAMI avaient été évolutifs entre mars 1991 et décembre 1993 et que le " DAMI de base " d’environ vingt personnes avait été renforcé passant à trente personnes de mars 1991 à juin 1992, puis à soixante personnes et même à quatre-vingts de juillet 1992 à septembre 1993 avant de redescendre à un effectif de trente en septembre-décembre 1993 pour n’être plus constitué que par une seule personne de janvier à avril 1994. Très logiquement, si le DAMI fait partie de l’opération Noroît, celle-ci devrait alors avoir pris fin seulement en avril 1994 et non pas en décembre 1993. Il s’est également interrogé sur la nature de l’opération Noroît, initialement conçue comme une opération d’évacuation et de protection de nos ressortissants, qui s’est ensuite enrichie de la dimension de coopération militaire puisque le DAMI, composante de l’opération Noroît, et qui relève de la Mission d’Assistance militaire, a procédé à des missions d’instruction auprès des FAR. Il a souhaité savoir si ces opérations d’instruction découlaient des accords d’assistance passés avec le Rwanda en 1975 et se trouvaient justifiés par l’avenant, signé en 1992, faisant référence non plus à la gendarmerie nationale rwandaise mais aux forces armées rwandaises.
Le Général Maurice Schmitt a souligné qu’en octobre 1990 l’opération Noroît consistait uniquement à protéger et à évacuer des ressortissants et que la présence des forces françaises avait permis, avec les renforts belges, de stabiliser la situation au Rwanda. Après quelques mois, la Mission de Coopération a effectué une demande pour participer à l’instruction des FAR. Comme il ne pouvait y avoir au Rwanda deux détachements français sous deux commandements différents, le DAMI, mis en place à la demande du ministère de la Coopération, a été placé sous les ordres du Lieutenant-Colonel René Galinié qui était également l’attaché de défense.
Le Général Maurice Schmitt a alors souligné qu’il avait fixé lui-même, en mars 1991, les missions d’instruction du DAMI et limité ses effectifs à trente personnels.
M. Michel Voisin s’est interrogé sur le rôle des forces belges, françaises et zaïroises dans l’arrêt de l’offensive du FPR, sur le maintien des troupes françaises au Rwanda après le départ des soldats belges et sur la présence de forces d’autres nationalités lors de l’entrée du FPR au Rwanda.
Le Général Maurice Schmitt a estimé que cette présentation des événements n’était pas conforme à la réalité. Les FAR n’étaient guère à leur aise dans le nord et le franchissement de la frontière par le FPR avait entraîné des exactions et des pillages à Kigali. C’est cette situation qui a motivé l’intervention française. Les instructions du Président de la République étaient claires, il s’agissait de protéger les populations et d’évacuer ceux qui souhaitaient partir. La stabilisation de la situation militaire, avec le retour en Ouganda du FPR, n’a été qu’une conséquence indirecte de la présence française. La mission initiale n’a pas évolué et n’a jamais consisté à combattre aux côtés des FAR contre le FPR, même si ce dernier avait marché sur Kigali, exception faite du contrôle de l’aéroport. Compte tenu des liens entre le FPR et les forces ougandaises, il est très vraisemblable que ces dernières ont participé à l’offensive de 1990. Aucune information ni aucune allusion n’ont permis de déterminer la présence de forces d’autres nationalités et il est peu probable qu’il y ait eu des Libyens, le Colonel Khadafi ayant bien d’autres préoccupations. Il faudrait, pour répondre avec certitude à ces questions, examiner les télégrammes diplomatiques ou les messages que pourrait communiquer le service historique des armées.
Evoquant le Conseil de défense restreint qui s’était tenu à Djeddah pour décider l’intervention Noroît, M. François Lamy s’est demandé si les événements de Kigali n’avaient pas été amplifiés par les FAR ou par le Gouvernement rwandais pour accélérer cette décision d’intervention et si la présence de soldats occidentaux, qui n’avaient pas participé au combat, avait été déterminante dans le retrait du FPR trois semaines après leur offensive du 1er octobre 1990.
Le Général Maurice Schmitt a indiqué que, pour ce qui concerne les événements liés à l’offensive du 4 octobre 1990, il avait disposé d’informations précises, en provenance de l’ambassade comme de la Mission de Coopération faisant état d’exactions et de spoliations entre Hutus et Tutsis et même à l’égard de quelques étrangers. Il n’y a pas eu d’amplification artificielle des événements. La présence de Noroît a bien été déterminante, ce qui confirme la nécessité d’envoyer des troupes suffisamment nombreuses et dissuasives pour éviter que les événements ne dégénèrent. C’est cette stratégie qui d’ailleurs avait été choisie à Abéché. Les Belges ont envoyé les mêmes effectifs que la France. Il y avait aussi des Zaïrois mais leur armée qui n’était pas payée s’est transformée en armée de soudards. Le FPR a été dissuadé de poursuivre son offensive vers Kigali car il n’était pas aussi puissant en 1990 qu’en 1994, et savait qu’il ne pouvait pas, à ce moment, prendre le pouvoir.
M. Pierre Dauge a souhaité avoir des précisions sur le recadrage, effectué en mars 1991 des missions de l’opération Noroît qui, sur le plan opérationnel, engageait plus fortement la France aux côtés des forces armées rwandaises et a considéré qu’il y avait là la traduction d’une nouvelle nouvelle orientation politique qui correspondait partiellement aux voeux du Président du Rwanda.
Le Général Maurice Schmitt a précisé qu’il avait personnellement recadré les missions des uns et des autres car, dans la mesure où un DAMI avait été envoyé au Rwanda et se trouvait sous les ordres du responsable de l’opération Noroît, il devenait nécessaire que chacun dispose d’instructions écrites précises sur ce qu’il avait à faire, d’autant que la situation devenait plus tendue et que la menace se précisait. L’accord de 1975, dont la portée était limitée, était géré par le ministère de la Coopération et non par celui de la Défense qui mettait des personnels d’aide technique à la disposition de la Mission de Coopération. Il a rappelé que le DAMI n’était composé que de trente spécialistes en mars 1991, soit environ une dizaine d’officiers et une quinzaine de sous-officiers et qu’il convenait de rapporter ces chiffres aux effectifs de l’armée rwandaise.
Précisant que ce n’était pas les instructions de l’opération Noroît qui avaient été modifiées, le Président Paul Quilès a indiqué que la mission entendait vérifier, compte tenu de l’accord de coopération de 1975 alors en vigueur, si une aide militaire a été apportée par la France au Rwanda, dans quelles conditions et pour quelles raisons. Il a souligné que jusqu’à présent les témoignages entendus par la mission confirmaient qu’il ne s’agissait pas de faire participer les troupes françaises aux combats.
Le Général Maurice Schmitt a souhaité que le document qu’il avait signé en mars 1991 soit communiqué à la mission d’information.
M. Jacques Myard a souhaité connaître le nombre d’assistants militaires présents au Rwanda avant l’opération Noroît.
Le Général Maurice Schmitt a indiqué que l’effectif des coopérants militaires ne dépassait pas une dizaine de spécialistes, ce qui représente des chiffres faibles par rapport par exemple à ceux du Tchad.
M. Pierre Brana s’est interrogé sur le rôle de la cellule spéciale de la présidence de la République, et notamment sur la possibilité, évoquée dans un article du Monde, qu’elle ait piloté directement l’encadrement de l’armée française en court-circuitant la hiérarchie militaire.
Le Général Maurice Schmitt a estimé invraisemblable que la présidence de la République donne directement des ordres aux militaires français présents au Rwanda. Il a douté que ceux-ci aient pris le risque d’obéir à de tels ordres, sans l’aval du Chef d’état-major des armées, qui aurait lui-même pris celui du Ministre de la Défense.
M. Jacques Myard a évoqué les critiques exprimées dans la presse et par M. Michel Cuingnet au cours de son audition par la mission selon lesquelles l’armée française se serait comportée alors comme une armée d’occupation.
Evoquant également le témoignage de M. Michel Cuingnet, le Président Paul Quilès a rappelé que celui-ci n’avait pas utilisé au cours de son audition les mêmes termes que dans les documents portant sa signature et parvenus à la mission d’information (rapport de fin de mission de service ou télégrammes diplomatiques) dans lesquels il fait seulement des mises en garde. Soit M. Michel Cuingnet savait à l’époque ce qu’il a déclaré à la mission mais il n’en a pas averti sa hiérarchie. Soit il a réécrit l’histoire et il faut alors en être conscient.
M. François Lamy a demandé s’il existait une liaison directe entre l’état-major particulier du Président de la République et l’attaché de défense.
Le Général Maurice Schmitt a répondu que, bien qu’il ne soit pas d’usage que l’attaché de défense adresse copie de ses messages à l’état-major particulier du Président de la République, l’état-major des armées l’acceptait parfois et se mettait d’accord avec le Chef de l’état-major particulier pour simplifier les communications ; il a précisé qu’il n’y avait pas vu d’inconvénients lorsqu’il était Chef d’état-major des armées, sous réserve qu’il soit lui-même le destinataire principal du message, étant le chef hiérarchique de l’attaché de défense, et qu’il en était de même vis-à-vis de la DGSE. Il a ajouté que lorsqu’il était Chef d’état-major des armées, il n’avait jamais eu vent que le Chef de l’état-major particulier ait directement donné des ordres à l’attaché de défense sans passer par lui-même, qu’il s’agisse du Rwanda ou d’autres pays.
Il a précisé en revanche que lui-même et le Chef d’état-major particulier se tenaient régulièrement au courant des événements et que le Ministre de la Défense était lui aussi régulièrement informé.
Remarquant que la description faite par le Général Maurice Schmitt impliquait qu’il n’y avait pas eu, dans le cas du Rwanda, de circuit dérogeant au processus de décision habituel auquel participent à des titres divers le Président de la République, Chef des armées, le Ministre de la Défense, l’état-major des armées, les autorités militaires sur place et l’ambassadeur, le Président Paul Quilès a souligné qu’on se trouvait en présence de chaînes d’information et de décision complexes qu’il conviendrait de clarifier.
Le Général Maurice Schmitt a précisé que l’ambassadeur avait toujours le droit et la possibilité de transmettre des renseignements confidentiels au Ministre des Affaires étrangères sans en informer le Ministre de la Défense mais que, pour éviter cet inconvénient, le Chef d’état-major des armées dispose d’un conseiller diplomatique destinataire des dépêches diplomatiques.
M. Jacques Myard a alors rappelé qu’en tout état de cause, la présidence de la République n’était pas reliée par liaison chiffrée avec les postes diplomatiques à l’étranger.
M. René Galy-Dejean a rappelé à ce propos la récente décision de rendre désormais le Président de la République obligatoirement destinataire des dépêches, au même titre que le Ministre des Affaires étrangères. Il a estimé qu’il ne fallait pas confondre circulation de l’information entre des responsables qui se connaissent et qui sont en relations constantes et institution de circuits décisionnels parallèles.
Source : Assemblée nationale. http://www.assemblee-nationale.fr
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