A) LA FRANCE FINANCE LE BUDGET DE MONACO
Aux termes de la convention fiscale du 18 mai 1963 - approuvée par la loi n° 63-817 du 6 août 1963 et entrée en vigueur le 1er septembre 1963 -, il fut décidé que la Principauté appliquerait sur son territoire la législation française en matière de TVA et que chacun des deux États encaisserait ses propres recettes selon des règles identiques.
La Convention prévoyait néanmoins un partage du produit total des perceptions opérées, selon des modalités fixées par les deux gouvernements. En effet, la TVA est en principe encaissée dans le pays où la marchandise qu’elle frappe est consommée : c’est ce qui permet au titulaire d’un passeport étranger achetant un produit en France de bénéficier de la déduction de la TVA sur le montant de son achat. Le problème avec Monaco résidait dans l’absence de contrôle à la frontière, de sorte qu’il était impossible de connaître les produits qui, achetés à Monaco, étaient consommés en France et vice-versa. D’où la nécessité d’établir une règle de répartition arbitraire de ces taxes entre le Trésor monégasque et le Trésor français.
Les parties à la négociation élaborèrent une équation prenant en compte les chiffres d’affaires des deux pays et la capacité moyenne de consommation des deux populations, résumée par la formule suivante :
QPMonaco = (R* x 1,6 x CAMonaco) / (CAFrance + CAMonaco)
où QPMonaco, R*, CAMonaco et CAFrance sont respectivement la quote-part monégasque, le volume total des recouvrements dans les deux États, le chiffre d’affaires monégasque et le chiffre d’affaires français.
On ne connaît guère les raisons qui ont conduit à majorer discrétionnairement de 60 % - coefficient 1,6 - le résultat qui aurait été obtenu par simple application du principe de proportionnalité.
Le fait est, néanmoins, que le système est devenu progressivement si favorable à la Principauté, qu’une première réforme est décidée en 1987. A cette date, les variables CAMonaco et CAFrance sont gelées au niveau atteint en 1986 et seul R* varie désormais.
Les reversements à Monaco ne cessent cependant de progresser et une nouvelle réforme est intervenue en 1989. Depuis cette date, la quote-part monégasque est obtenue en appliquant à la quote-part de l’année précédente un coefficient d’actualisation. La situation est ainsi, en quelque sorte, gelée.
Evolution des reversements à Monaco au titre de la TVA
1994 635 MF
1995 750 MF
1996 816 MF
1997 839 MF
1998 (prévisionnel) 826 MF
B) MONACO S’ENRICHIT GRACE A LA FRANCE
Les modalités d’établissement du compte de partage de la TVA ont été exceptionnellement favorables à l’Etat monégasque. D’une part, la fraction ainsi attribuée est rapidement devenue la principale ressource de son budget. Celui-ci se montant - selon les données diffusées par le site Internet officiel de la Principauté - à 3,3 milliards de francs en 1998, la ressource TVA représente environ 25 % des ressources de l’Etat.
Par ailleurs, la formule est si bien équilibrée qu’elle a toujours abouti à un reversement de la France à Monaco : 635 millions de francs (1994), 750 millions de francs (1995), 816 millions de francs (1996), 839 millions de francs (1997) et 826 millions de francs en 1998 (prévisionnel). Sur les cinq dernières années disponibles, le reversement a donc crû de 30,1 % alors que, dans le même temps, l’économie nationale ne progressait que de 14,2 % et le revenu disponible brut des ménages français de 13,9 % !
C’est donc largement la France et ses contribuables qui, en vérité, paient l’inexistence de fiscalité directe sur le revenu notamment, de fiscalité locale et d’impôt sur la fortune à Monaco. Les résidents monégasques - qui ne passent pas pour souffrir d’impécuniosité - n’ont toujours pas à se plaindre de la pression fiscale.
A titre de comparaison, ce reversement de TVA proche d’un milliard de francs représente plus que la totalité des moyens que la France consacre aujourd’hui au logement des personnes défavorisées avec le fonds de solidarité pour le logement et l’aide aux associations _uvrant au contact des plus pauvres.
Ce montant est plus élevé que le budget global d’un département comme le Gers (175 000 habitants), les Alpes de Haute Provence (131 000 habitants) ou l’Ariège (137 000 habitants).
Cette somme est par ailleurs équivalente au montant total des dépenses d’aide sociale d’un département comme la Haute Savoie (570 000 habitants) ou le Vaucluse (468 000 habitants).
En d’autres termes, la France paye tous les ans l’équivalent de la moitié du coût estimé de l’extension du port de la Condamine (2) ou de la construction du Forum Grimaldi - futur centre culturel, de congrès et d’exposition de 70 000 m2 de la Principauté, dont la livraison est prévue en juin 2000 (3).
Cet effort curieux et quasi inconnu des contribuables français à l’égard de la Principauté a paru fort contestable à votre Rapporteur, surtout si cet effort a pour but de permettre aux meilleures fortunes du monde de vivre à Monaco sans fiscalité.
Source : Assemblée nationale. http://www.assemblee-nationale.fr
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