Votre rapporteur a pu constater aux Etas-Unis la vivacité d’un débat qui semble s’amplifier au fur et à mesure que se rapproche l’échéance fixée pour la décision présidentielle.
Ce débat, fortement animé par les " think tanks ", se développe dans la presse, mais s’appuie également sur les évaluations établies par les agences officielles.
Une première série d’interrogations porte sur le degré de fiabilité de la NMD.
Dans un rapport établi pour le compte de compte du Congrès le 31 mai dernier, le General Accounting Office (GAO) soulignait la difficulté de réaliser l’interception d’un missile assaillant par collision directe (hit to kill). Le GAO indique que sur 14 interceptions tentées depuis 1983 dans le cadre des différents programmes de défense antimissiles, seules 4 interceptions avaient réussi, soit un taux inférieur à 30 %. Or, poursuit le GAO, la NMD ne se justifie qu’assortie d’un très haut degré de fiabilité, afin de protéger réellement les 50 Etats américains des armes de destruction massive.
Le GAO mettait également en cause le calendrier extrêmement serré imposé aux essais et relevait que 3 essais d’interception seulement auraient été réalisés avant que la décision de déploiement de la première tranche ne soit prise. Encore ces essais auront-ils été conduits, selon le GAO, dans des conditions éloignées de la réalité, notamment parce que le véhicule d’impact, lancé par un missile différent de celui envisagé dans la version finale, n’aura pas été soumis aux très fortes accélérations et aux vibrations qu’il connaîtra en conditions réelles.
Cette appréciation du GAO rejoint celle de plusieurs experts qui estiment que l’interception par impact direct pourrait être déjouée par des contre-mesures telles que des leurres ou la dispersion de sous-munitions, que les pays détenteurs de capacités balistiques pourraient en outre perfectionner toujours plus en fonction des performances des intercepteurs américains.
Ces interrogations techniques pourraient mettre en cause l’architecture actuelle de la NMD et renforcer la position de ceux qui souhaitent le développement de systèmes basés en mer ou dans l’espace, capables de détruire le missile assaillant dès sa phase de propulsion.
Une deuxième série de critiques, reflétant une opinion minoritaire mais néanmoins exprimée de manière ferme, porte sur l’appréciation de la menace et son évolution d’un part, et sur les inplications internationales, d’autre part. Ces thèmes sont essentiellement évoqués par les partisans du contrôle des armements, soucieux de l’avenir des relations stratégiques américano-russes et des incidences que pourraient avoir les programmes de défense antimissiles -NMD ou TMD- sur l’effort d’armement des pays tiers, notamment en Asie.
Un nouveau rapport portant sur l’évaluation de la menace et les implications internationales de la NMD doit prochainement être remis au Président Clinton par les agences de renseignement. Selon des informations de presse, cette analyse de renseignement mettrait en évidence la diminution de la menace balistique nord-coréenne, Pyongyang ayant gelé son programme d’essai en contrepartie de l’assouplissement des sanctions américaines. Elle soulignerait également la probabilité d’un renforcement de l’arsenal nucléaire chinois en réponse à la NMD, qui entraînerait celui de l’Inde et du Pakistan, ainsi qu’un risque d’accélération de la prolifération des technologies balistiques, particulièrement dans le domaine des contre-mesures.
Source : Sénat (France) : http://www.senat.fr
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