Ce rapport rend compte des activités de la Commission de contrôle, de vérification et d’inspection des Nations Unies pendant la période allant du 1er décembre 2002 au 28 février 2003 ; une période caractérisée par une activité intense de la part de la Commission. En Iraq, les inspections et les contrôles ont repris le 27 novembre 2002. A New York, l’analyse des déclarations de l’Iraq et des questions de désarmement en suspens est allée de pair avec une planification intensive des inspections et des activités administratives.
Depuis l’arrivée des premiers inspecteurs en Iraq, le 27 novembre 2002, la Commission a procédé à plus de 550 inspections portant sur environ 350 sites, dont 44 nouveaux sites. Les inspections ont eu lieu dans tout le pays, sur des sites industriels, des dépôts de munitions, des centres de recherche, des universités, des sites présidentiels, des laboratoires mobiles, des maisons particulières, des installations de fabrication de missiles, des camps militaires et des sites agricoles. Le rapport note que plus de 200 échantillons de produits chimiques et plus de 100 échantillons biologiques ont été prélevés sur différents sites, et qu’à ce jour, les résultats des analyses des trois quarts des échantillons concordent avec les déclarations de l’Iraq. La Commission a procédé également à l’identification et a entrepris la destruction d’une cinquantaine de litres d’ypérite déclarés par l’Iraq, qui avaient été placés sous la supervision de la Commission et mis sous scellés sur le site de Muthanna en 1998. Cette opération se poursuivra.
Le rapport fait état de l’augmentation de la capacité d’inspection de la Commission dont le personnel se trouvant en Iraq se chiffrait au total, vers la fin de février 2003, à 202 personnes provenant de 60 pays, dont 84 inspecteurs. Un avion et huit hélicoptères auxquels est affecté un personnel de 57 personnes assurent les opérations aériennes de la Commission. Après l’ouverture d’une antenne à Mossoul, dans le nord de l’Iraq, au cours de la première semaine de janvier, la Commission prévoit d’ouvrir en mars une deuxième antenne à Bassorah, au sud de l’Iraq. L’antenne de la Commission à Larnaca a été, quant à elle, agrandie.
Dans le cadre des réunions de haut niveau entreprises entre la Commission et la partie iraquienne, le Président exécutif, ainsi que le Directeur général de l’AIEA, s’est rendu à Bagdad les 19 et 20 janvier et les 8 et 9 février afin d’examiner des questions d’inspection et de coopération. Une déclaration conjointe a été publiée à l’issue des entretiens avec la partie iraquienne. Les documents qui ont été remis à la Commission lors de la rencontre des 8 et 9 février ne contenaient pas de nouveaux éléments de preuve et ne réglaient pas des questions en suspens. Par ailleurs, la Commission examine actuellement les modalités pratiques de la conduite d’entretiens en dehors du territoire iraquien, après avoir été informée par l’Iraq que trois candidats, qui avaient refusé d’être interrogés dans les conditions de la Commission, avaient changé d’avis.
Pour ce qui est des programmes de missiles déclarés par l’Iraq, à la suite de l’évaluation des programmes de missiles -Al Samoud 2 et Al Fatah- par le personnel de la Commission, il a été conclu que compte tenu des caractéristiques du missile Al Samoud, toutes ses variantes avaient une portée de plus de 150 kilomètres et constituaient des systèmes d’armes interdits. Par conséquent, les équipes d’inspection ont commencé à les marquer, de même que leurs composantes. La destruction de ces missiles, demandée par la Commission, a commencé le 28 février. Un groupe d’experts, sollicité par la Commission pour donner un avis sur cette question, a estimé avoir besoin de précisons complémentaires au sujet du missile Al Fatah avant de pouvoir se prononcer. En revanche, après avoir procédé à l’examen des chambres de coulées de l’usine Al Mamoun, les experts ont décidé qu’elles restent encore interdites. Le rapport souligne également que les capacités de la Commission se sont accrus de surveillance aérienne et offrent par ailleurs à la Commission et à l’AIEA de nouveaux outils leur permettant de renforcer leurs opérations et de vérifier si l’Iraq s’acquitte effectivement de ses obligations.
Parmi les faits nouveaux survenus au cours de la période à examen, le rapport note que l’Iraq a complété la liste de personnes participant à son programme de missiles et s’est déclaré prêt à faire de même pour les autres listes. De même que six munitions chimiques vides de 122 millimètres, dont quatre ont été découvertes par l’Iraq, et deux par les inspecteurs de la Commission, vont être détruites. La Commission a par ailleurs été informée par l’Iraq que deux bombes de type R-400 complètes (dont l’une contenant un liquide) ainsi que des fragments de ce que l’Iraq déclare provenir des 118 bombes de type R-400 avaient été déterrés à Azzizziyah, qui serait, d’après l’Iraq, le site de destruction unilatérale des bombes remplies d’agents biologiques, ainsi que certains éléments et restes d’autres munitions détruites. Des inspecteurs de la Commission étudient actuellement ces découvertes. L’Iraq a également communiqué à la Commission la liste de personnes ayant participé au cours de l’été 1991 à la destruction unilatérale d’armes chimiques et biologiques et de missiles.
Dans son évaluation du rapport trimestriel du Président exécutif de la Commission, le Secrétaire général affirme que, d’une manière générale, la Commission a à sa disposition des moyens plus importants et des outils plus perfectionnés et, à bien des égards, a pris une envergure plus grande que prévu au départ. Elle met actuellement la dernière main à un document interne d’importance non négligeable, à savoir une compilation des questions de désarmement qui demeurent non réglées, ainsi que les mesures que l’Iraq pourraient prendre en vue d’y apporter une solution. La Commission a indiqué que d’une manière générale, l’Iraq coopérait « quant à la procédure » : aucune barrière n’a donc été érigée dans l’espace, aucune contrainte n’a été imposée non plus dans le temps ; les hélicoptères de la Commission ont pu se déplacer pour des missions de transport et d’inspection ; la Commission a pu envoyer un avion de surveillance sur l’ensemble du territoire iraquien pour ne citer que quelques exemples.
En revanche, en ce qui concerne la coopération « quant au fond », le Secrétaire général regrette que malgré les espoirs mis en elle et malgré sa longueur, la déclaration du 7 décembre n’ait pas fourni de nouvelles données ou de nouveaux éléments de preuve propres à aider à régler les questions de désarmement en suspens. Toutefois, l’Iraq coopère en procédant à la destruction de certains articles, qui a lieu sous la supervision de la Commission et en localisant deux bombes aériennes R-400 ainsi que des fragments de ce qu’il déclare être 118 bombes R-400. La destruction des missiles Al Samoud 2 et des articles connexes déclarés par l’Iraq a été demandée et a commencé le 28 février. Le Secrétaire général note également que le décret présidentiel interdisant aux citoyens iraquiens et aux sociétés mixtes de se livrer à des activités liées aux armes de destruction massive n’est pas, à lui seul, suffisant pour répondre aux exigences fixées par l’ONU. Il précise en outre que même avec la coopération voulue de la part de la partie iraquienne, l’objectif d’assurer le plus tôt possible un désarmement vérifié, demandera inévitablement du temps.
Compte tenu de cette évaluation, le Secrétaire général souligne que l’Iraq aurait pu faire des efforts plus soutenus pour localiser les articles interdits résiduels ou fournir des pièces crédibles attestant l’absence de tels articles. Il estime que sur le plan du désarmement, les résultats ont été jusqu’à présent très modestes. L’Iraq aurait pu tirer pleinement parti de la déclaration qui a été présentée le 7 décembre. Si certaines des mesures qui sont prises actuellement avaient été amorcées plus tôt, elles auraient peut-être déjà produit des résultats.
Déclarations
M. HANS BLIX, Président exécutif de la Commission de contrôle, de vérification et d’inspection des Nations Unies (CCVINU), a déclaré qu’en ce qui concerne la procédure, sa Commission n’a connu que peu de difficultés et certainement beaucoup moins que son prédécesseur, l’UNSCOM. « Ceci est peut-être dû à la forte pression extérieure », a dit M. Blix. Ceci ne veut pas dire, a-t-il ajouté, que les inspections se déroulent sans friction, mais à ce stade, la Commission est capable de s’acquitter des inspections de manière professionnelle sans préavis dans l’ensemble du pays et de renforcer le contrôle aérien. L’Iraq, qui possède un système administratif très développé, devrait être capable de fournir plus de preuves écrites sur ses programmes d’armes prohibées. Seule une petite partie de ces preuves a été présentée depuis le début des inspections. A ce propos, M. Blix s’est déclaré déçu que la Déclaration iraquienne du 7 décembre n’ait pas contenu de nouvelles preuves. Il a donc espéré que les efforts en la matière, y compris la création d’une commission gouvernementale, donneront des résultats significatifs.
Les interviews avec les personnes qui pourraient avoir les informations et les compétences relatives au programme d’armement peut être un autre moyen d’obtenir des preuves, a poursuivi le Président exécutif de la CCVINU. Commentant, en conséquence, la liste des personnes concernées que l’Iraq a fournie, M. Blix en a conclu que des informations si détaillées sur ceux qui ont pris part à la destruction unilatérale des armes conduisent à croire en l’existence de notes relatives aux quantités et autres données sur les divers articles détruits. Il a, en outre, jugé important que les entretiens puissent se mener sans influence extérieure. Estimant que pour ce faire, les conditions sont difficiles à réunir à l’intérieur de l’Iraq, il a exprimé son intention de demander que les entretiens se fassent en dehors du pays.
Revenant, une nouvelle fois, sur les informations données par certains services de renseignements sur les déplacements à l’intérieur de l’Iraq des armes de destruction massive et sur l’existence de laboratoires mobiles, M. Blix a souligné qu’aucune preuve allant dans ce sens n’a été trouvée jusqu’à présent. Il a dit attendre de l’Iraq qu’il contribue à la recherche de moyens crédibles pour mener des inspections sans préavis dans le secteur des transports. Par ailleurs, les inspections continuent sur le programme iraquien concernant les véhicules télécommandés. Quant à la conduite d’activités d’armement souterraines, M. Blix a souligné qu’il revient à l’Iraq de fournir toutes les informations en la matière. Toutefois, a-t-il précisé, les inspections menées jusqu’ici n’ont pu établir l’existence d’installations souterraines pour la fabrication d’armes chimiques et biologiques ou pour le stockage. M. Blix a ajouté qu’en ce qui concerne ces deux questions, la Commission aura besoin de renforcer son personnel en précisant qu’il ne s’agit pas de doubler le personnel mais bien de pouvoir accéder aux informations les plus pertinentes.
Abordant la question des missiles Al Samoud 2, M. Blix a indiqué qu’après avoir nié qu’ils dépassaient la portée autorisée par les résolutions pertinentes de l’ONU, l’Iraq a désormais accepté leur destruction et celle des articles associés. Le début de cette destruction constitue une mesure substantielle de désarmement et, en fait, la première depuis le milieu des années 90, a estimé M. Blix. Il ne s’agit pas, a-t-il insisté, de la destruction de cure-dents. Ce sont bien des armes meurtrières qui sont en train d’être détruites. A l’heure actuelle, 34 missiles ont été détruits sous la supervision de la CCVINU. Le travail continue pour identifier et faire l’inventaire des pièces et des équipements associés au programme des missiles Al Samoud 2. Deux chambres de coulée « reconstituées » ont été détruites. Le caractère prohibé ou non des missiles Al Fatah est toujours à l’étude, a ajouté M. Blix. De plus, de nouveaux documents sur l’anthrax, le gaz VX et les missiles ont été fournis récemment. Certains d’entre eux nécessiteront un examen plus avant.
L’Iraq fait un véritable effort pour dissiper les doutes sur les quantités des armes chimiques et biologiques qui ont été détruites unilatéralement en 1991, a poursuivi M. Blix. A ce jour, l’Iraq a déterré 14 bombes complètes. L’enquête sur la destruction du site en question pourrait permettre de déterminer le nombre de bombes détruites sur ce site. L’enquête devrait être suivie par un effort sérieux et crédible pour déterminer le nombre de bombes de type R-400 qui ont été produites. A cet égard, les inspections se poursuivent et pourraient conduire à des résultats fructueux. Sur l’anthrax, M. Blix a souligné que déterminer la quantité détruite exige que l’on sache avec précision quelle quantité a été produite.
Après une période de coopération réticente, il faut constater une accélération des initiatives de l’Iraq depuis la fin du mois de janvier, a-t-il dit. Il s’agit là d’un développement positif mais la valeur des mesures prises doit être jugée au nombre de questions qu’elles permettent d’élucider. Ce n’est pas encore évident, a dit M. Blix. Commentant ainsi le degré de coopération de l’Iraq, M. Blix a indiqué qu’à certains moments, la partie iraquienne a essayé d’imposer des conditions. Toutefois, elle n’y s’est jamais tenue quant à l’exercice par les inspecteurs de leurs droits. Les initiatives « actives », et même « proactives » de l’Iraq, qui viennent 3 ou 4 mois après l’adoption de la résolution 1441, ne constituent pas, a dit M. Blix, « une coopération immédiate » tout comme elles ne couvrent pas tous les domaines pertinents. Ces initiatives sont néanmoins accueillies avec satisfaction et la CCVINU en profite pour résoudre les questions en suspens.
Les membres du Conseil, a souligné M. Blix, peuvent lier les propos de la CCVINU à la résolution 1441 mais la Commission travaille en vertu de plusieurs résolutions du Conseil dont la résolution 1284 (1999). Aux termes de cette résolution, la CCVINU présentera son programme de travail au cours de ce mois pour, conformément à la même résolution, traiter des questions en suspens dont elle a finalisé la liste. Chaque point du programme de travail est assorti d’un certain nombre de sous-points indiquant à l’Iraq ce qui est attendu de lui pour résoudre les questions en suspens. En conséquence, l’Iraq pourra être jugé en fonction du nombre de questions réglées. Le programme de travail contient aussi des suggestions pour traiter de la poursuite, dénoncée par certains services de renseignements, des programmes d’armement prohibé et de l’existence d’infrastructures souterraines.
Combien de temps faudra-t-il pour résoudre les questions en suspens ? A cette question, M. Blix a répondu que si la coopération doit être immédiate, le désarmement et la vérification ne peuvent être instantané. Cela ne prendra ni des années ni des semaines mais des mois. Ni les gouvernements ni les inspecteurs ne veulent que les inspections perdurent. Toutefois, a rappelé M. Blix, conformément aux résolutions sur lesquelles se fondent les inspections, un système d’inspection et de surveillance doit, de toute manière, rester sur place après la vérification du désarmement et ce, pour rétablir la confiance ou tirer la sonnette d’alarme au moindre signe de reprise d’un programme d’armes prohibées.
M. MOHAMMED EL BARADEI, Directeur général de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), a rappelé que les activités de son Agence étaient passées d’une phase de « reconnaissance » à une « phase d’enquête », centrée sur une question : est-ce que l’Iraq a relancé ou tenté de relancer son programme d’armement nucléaire au cours de ces quatre dernières années ? Pendant cette période, sur la majorité des sites, les capacités industrielles ont été dégradées de façon substantielle en raison du départ de l’appui étranger et de nombreux personnels iraquiens qualifiés et de l’absence d’entretien des équipements modernes. Cette dégradation générale concerne la capacité de l’Iraq à reprendre un programme nucléaire.
L’AIEA a désormais conduit 218 inspections nucléaires sur 141 sites, dont 21 n’avaient jamais été inspectés auparavant. En outre, les experts de l’AIEA ont pris part à plusieurs inspections conjointes AIEA-CCVINU. L’appui technique pour les inspections nucléaires a continué et s’est étendu. Les trois collecteurs d’échantillons d’air ont recueilli chaque semaine des particules sur certains sites clefs qui ont été envoyées au laboratoire pour analyse. L’équipement mobile chargé d’enquêter sur les radiations a couvert quelque 2 000 km au cours des trois dernières semaines, couvrant 75 sites dont des garnisons et des camps militaires, des usines d’armement, des manufactures et des zones résidentielles.
Les entretiens de personnels concernés iraquiens se sont poursuivis dans le même temps, individuellement ou en groupe, sur les lieux de travail au cours des inspections ou parfois lors de rendez-vous convenus au préalable avec des scientifiques et des experts autrefois impliqués dans le programme nucléaire de l’Iraq. Récemment, sur notre insistance, a poursuivi M. El Baradei, les personnes concernées ont consenti à être interrogées sans escorte et sans enregistrement. Deux entretiens privés ont été conduits ces dix derniers jours et nous espérons pouvoir continuer de le faire, y compris en dehors de l’Iraq. M. El Baradei a par ailleurs indiqué réfléchir aux moyens d’affiner encore davantage les procédures d’interview pour garantir qu’elles soient conduites librement et lever les inquiétudes concernant les écoutes effectuées par l’Iraq.
L’Iraq a remis ces dernières semaines un nombre considérable de documents portant sur des questions soulevées comme présentant un problème particulier, notamment ses tentatives de se procurer des tubes d’aluminium et des aimants et ses capacités à produire des champs magnétiques et d’importer de l’uranium. Depuis ma dernière communication devant le Conseil de sécurité, a souligné M. El Baradei, le principal souci de l’AIEA au plan technique, a été de résoudre plusieurs questions en suspens concernant les nouvelles tentatives de l’Iraq pour enrichir de l’uranium au moyen de centrifugeuses. A cette fin, l’AIEA a rassemblé une équipe d’experts internationaux en centrifugation.
S’agissant des tubes d’aluminium, l’AIEA a enquêté sur les tentatives de l’Iraq pour acheter de larges quantités de ces tubes à haute résistance. Comme indiqué précédemment, l’Iraq a soutenu que ces tubes étaient destinés à la production de roquettes et des enquêtes extensives ainsi que des analyses de documents n’ont pas permis de montrer que l’Iraq entendait utiliser ces tubes de 81 mm pour des projets autres que la rétro-ingénierie. L’Iraq a fourni des copies de croquis, des enregistrements, les minutes des réunions de ses commissions et les chiffres et données qui s’y rapportaient. Ces documents et les entretiens conduits par l’AIEA lui ont permis de se faire une image cohérente de ces acquisitions et de leur destination. L’AIEA a donc conclu sur la question des tubes d’aluminium que leur achat n’avait rien à voir avec la fabrication de centrifugeuses et qu’il était en outre hautement improbable que l’Iraq soit en mesure de relancer un tel programme. Néanmoins, la question restera à l’étude.
A propos des efforts de l’Iraq pour importer des aimants de haute capacité ou de sa capacité de les produire pour un programme d’enrichissement par centrifugeuse, M. El Baradei a souligné que depuis 1998, l’Iraq avait acheté de tels aimants pour différents usages. L’AIEA a vérifié que les aimants préalablement acquis avaient été utilisés pour le guidage de missiles mais aussi à d’autres fins comme la machinerie industrielle ou les téléphones. Les experts de l’AIEA, dans le cadre de leurs visites des sites de production et de recherches et d’analyse, ont conclu qu’aucun de ces aimants déclarés par l’Iraq n’ont été utilisés pour des programmes d’enrichissement par centrifugeuse. Mais l’AIEA continuera de suivre ces programmes et les achats de matériels, a prévenu le Directeur général de l’Agence.
A propos des chambres de coulées, M. El Baradei a expliqué que l’Iraq avait utilisé ses faibles capacités de production de roquettes et qu’il avait commencé récemment à produire ses propres tubes d’aluminium. Notre évaluation est que l’Iraq possède à cette date une abondance de tubes à haute résistance produits dans les années 80 et dispose aussi de l’expertise nécessaire pour continuer d’en produire de nouveaux de bonne qualité ; mais qu’il ne dispose pour l’heure que d’équipements de faible qualité. En outre, son manque d’expertise et d’expérience dans ce domaine rend hautement improbable une production actuelle de cylindres d’aluminium présentant les qualités requises pour un programme d’enrichissement. L’AIEA continuera néanmoins à surveiller toutes les machines et installations potentiellement capables de le faire, au moyen de caméras de surveillance 24 heures sur 24.
S’agissant de l’acquisition d’uranium, l’AIEA a progressé dans son enquête sur les tentatives d’acquisition d’uranium par l’Iraq, ces dernières années, auprès du Niger : les enquêtes se sont fondées sur des documents fournis par plusieurs Etats Membres et portant sur un accord entre les deux pays pour la vente d’uranium entre 1999 et 2001. L’AIEA a discuté de ces documents avec les Gouvernements d’Iraq et du Niger qui ont tous deux nié de telles activités. Pour sa part, l’Iraq a fourni à l’AIEA une explication détaillée quant à ses relations avec le Niger et a expliqué une visite d’un responsable iraquien dans différents pays d’Afrique en février 1999, dont le Niger : l’AIEA a conclu avec le concours d’experts externes que les documents -qui formaient la base des rapports sur d’éventuelles récentes transactions d’uranium entre les deux pays- n’étaient pas authentiques. Ces allégations sont sans fondement mais nous continuerons d’étudier toute preuve supplémentaire concernant les efforts de l’Iraq pour importer du matériel nucléaire.
De nombreuses préoccupations se sont fait jour concernant les efforts de l’Iraq pour reprendre son programme nucléaire, a poursuivi M. El Baradei : ces efforts ont été réalisés en violation de la résolution 661 ; d’autres vérifications seront donc engagées et un certain nombre d’enquêtes sont en cours auprès de sociétés commerciales et de courtage pour comprendre les modes d’achat de l’Iraq.
Mais en conclusion, a déclaré M. El Baradei, en matière d’armes nucléaires les inspections progressent : l’AIEA a fait ces derniers mois d’importants progrès dans son évaluation des efforts de l’Iraq pour relancer son programme nucléaire précédent. Il n’y a pas d’indication que les activités nucléaires aient repris dans les bâtiments préalablement identifiés par satellites comme ayant été reconstruits ou nouvellement construits depuis 1998, ni d’indications que les activité prohibées nucléaires aient lieu dans les sites inspectés. Il n’y a aucune indication que l’Iraq ait tenté d’importer de l’uranium depuis 1998, ni de tubes d’aluminium pour l’usage de centrifugeuses d’enrichissement. Il n’y a pas non plus d’indication que l’Iraq ait acheté des aimants pour relancer son programme nucléaire.
Après trois mois d’inspection, l’AIEA n’a donc aucune preuve ni indication plausible que l’Iraq cherche à relancer son programme d’armement nucléaire. Nous continuerons nos inspections, utilisant tous les droits que nous garantit la résolution 1441 et nous espérons pouvoir continuer de recevoir toute l’aide des Etats pour l’accomplissement de notre mandat, a-t-il poursuivi. Ces dernières semaines, probablement sous la pression internationale, l’Iraq a coopéré avec l’AIEA et M. El Baradei a espéré que cette coopération continuera de s’étendre.
M. JOSCHKA FISCHER, Vice-Chancelier et Ministre des affaires étrangères de l’Allemagne, a déclaré que l’objectif de la communauté internationale demeure le désarmement complet de l’Iraq afin d’éliminer de manière pacifique la menace qu’il fait peser sur la sécurité internationale à cause de ses armes de destruction massive. Il a regretté les divergences sur le règlement de la question iraquienne et a réaffirmé que le Conseil de sécurité devait faire preuve d’unité pour réaliser l’objectif commun du désarmement de l’Iraq sur les termes de la résolution 1441. Tout en condamnant fermement la nature du régime de Saddam Hussein, M. Fischer s’est penché sur la question du désarmement au regard des informations fournies par MM. Blix et El Baradei qui laissent entendre que des progrès ont été réalisés. Il a regretté que l’Iraq ait attendu longtemps avant de coopérer et de faire preuve de bonne volonté. L’évolution et les progrès réels dans la mise en œuvre des résolutions du Conseil de sécurité ne justifient pas que l’on change d’approche, a jugé le Ministre allemand des affaires étrangères. Il a réaffirmé que le désarmement pacifique de l’Iraq était possible comme le démontre la méthode proposée par M. Blix qui consiste à donner un délai raisonnable à ce processus. Il a rappelé qu’actuellement, la coopération est bonne en ce qui concerne les inspections, comme le démontre la destruction en cours des missiles Al Samoud 2. S’agissant des armes biologiques, il a rappelé que des bombes aériennes de type R-400 avaient été déterrées et étaient actuellement analysées.
Enfin, il a salué le début des entretiens avec les scientifiques iraquiens et rappelé que ces entretiens pourraient bientôt se dérouler à l’étranger. Le Ministre a rappelé le mémorandum présenté le 14 février par la France, l’Allemagne et la Fédération de Russie, qui appelle à un renforcement du processus et du dispositif d’inspections. A cette fin, il a invité MM. Blix et El Baradei à transmettre sans délai au Conseil de sécurité un programme de travail détaillé pour expliquer quelles tâches demeurent à accomplir et dans quels délais. Le Gouvernement iraquien doit coopérer pleinement, a-t-il dit, avant de s’interroger sur la pertinence d’une nouvelle résolution alors que les inspections montrent des résultats tangibles.
Rappelant que le Conseil de sécurité se réunit pour la troisième fois en un mois au niveau ministériel sur la question iraquienne, il a mis en garde contre les souffrances qu’infligerait une guerre sur les plans humain et humanitaire. Les moyens pacifiques sont loin d’avoir été épuisés, a-t-il dit, avant de souligner que le choix auquel est confrontée la communauté internationale est clair : soit le désarmement par la guerre, ce qui ne stabiliserait pas la région, ce qui entraînerait un renforcement du terrorisme international, et ce qui compliquerait le règlement de la situation au Moyen-Orient ; soit la poursuite des inspections et la mise en place au niveau international de mesures de confiance grâce à la consolidation d’un système de désarmement par des voix pacifiques. Une telle solution, a observé M. Fischer, renforcerait la pertinence des Nations Unies et l’unité de la communauté internationale.
M. FAROUK AL-SHARA’, Vice-Premier Ministre de la République arabe syrienne, a rappelé qu’à l’issue de son Sommet, qui s’est tenu le 1er mars, à Charm el-Cheikh, la Ligue arabe a exprimé son opposition catégorique à une guerre contre l’Iraq. Le Sommet, a-t-il dit, a souligné le besoin de donner aux inspecteurs le temps nécessaire pour accomplir leur travail tout en mettant l’accent sur la responsabilité du Conseil de sécurité quant à la protection du peuple iraquien et le maintien de l’indépendance, de l’unité et de l’intégrité territoriale de l’Iraq. La Ligue a d’ailleurs créé un Comité de suivi composé du Bahreïn, du Liban, de la Tunisie, de la Syrie, de l’Egypte et de son Secrétaire général, qu’il a chargé de transmettre aux cinq membres permanents du Conseil le point de vue des pays arabes. Le Sommet a été suivi par le Sommet de l’Organisation de la Conférence islamique durant lequel les pays islamiques ont confirmé la décision du Sommet de la Ligue arabe.
Commentant les propos du Président de la CCVINU, le Vice-Premier Ministre a constaté qu’il a fait part d’une coopération active tant sur la procédure que sur le fonds. Partant, il s’est demandé pourquoi l’on insiste tant sur une nouvelle résolution qui permettrait le recours à la force militaire, comme si la guerre était la meilleure et non la pire option. Dans ce cadre, a-t-il dit, on peut aussi s’interroger sur la logique qui sous-tend la coopération entre les Etats-Unis et Israël dans la mise au point de missiles sophistiqués qui coûtent des milliards de dollars aux contribuables américains alors que l’on refuse ce droit aux pays arabes qui peuvent en avoir besoin pour se défendre. Il est également difficile de croire que la guerre contre l’Iraq pourrait aider à la découverte des armes de destruction massives que les inspecteurs ne peuvent toujours pas trouver malgré tous les moyens mis à leur disposition. Quels que soient les arguments avancés pour justifier cette guerre, les opinions arabes sont gravement préoccupées, en particulier du possible massacre contre le peuple palestinien, la démolition de leurs maisons et leur transfert forcé en pleine guerre contre l’Iraq.
M. LUIS ERNESTO DERBEZ, Ministre des affaires étrangères du Mexique, s’est félicité que malgré les divergences de position sur les moyens de parvenir au désarmement définitif de l’Iraq, la diplomatie ait toujours cours. Nous pensons sincèrement, a-t-il indiqué, qu’en avançant vers un accord, nous serons capables de revitaliser le crédit et l’autorité du Conseil de sécurité : aussi ne gâchons pas cette occasion, a-t-il plaidé.
Ayant pris note de l’état des inspections de la CCVINU et de l’AIEA, le Ministre a rendu hommage à leurs experts et exprimé son regret de constater le manque de coopération active et efficace de la part des autorités de l’Iraq. Entre nous, a-t-il souligné, il existe un consensus clair sur ce que nous devons faire. Pourtant, les derniers développements montrent que différentes visions s’opposent sur les moyens de parvenir à ce désarmement. Nous regrettons en particulier que les efforts de ces dernières décennies pour partager des valeurs communes sont en train de s’effriter. Nous sommes face à des décisions complexes à prendre pour l’avenir du monde. C’est pourquoi, nous déplorons tant que les divisions entre les membres du Conseil de sécurité soient aujourd’hui la source de récriminations et d’animosités qui avaient disparu. Si ces divisions devaient s’aggraver, elles aggraveraient sérieusement la question du désarmement. C’est la raison pour laquelle le Mexique appelle à rechercher un consensus plus vaste entre les membres du Conseil.
La Charte de l’ONU est l’instrument qui doit donner forme et légitimité à tous nos accords et décisions, a poursuivi le Ministre. Ces derniers jours, le Mexique a examiné les moyens de se mettre d’accord avec d’autres Etats Membres et d’éviter de les voir s’accrocher à des positions irréductibles. Il n’est pas essentiel qu’il existe une uniformité, mais il faut encourager les accords sur les questions les plus pressantes. Le Ministre a déploré l’impact négatif de la question de l’Iraq sur la politique internationale et les marchés financiers. Le Mexique s’est toujours efforcé de présenter des initiatives qui renforcent les instances multinationales, a-t-il indiqué.
Le Mexique souhaite élargir l’éventail des formules possibles pour réaliser le désarmement réel de l’Iraq, tout en préservant la voie diplomatique, a plaidé le Ministre. Il a encouragé l’adoption de mesures de pressions de plus en plus efficaces pour obliger l’Iraq à coopérer. Il est lamentable que l’Iraq réagisse mieux devant la pression politique et la menace de recours à la force que devant les demandées répétées de désarmement de la communauté internationale et il est encore plus regrettable que la coopération ne soit pas plus totale. Le Mexique appelle donc à l’emploi de moyens plus fermes, mais pacifiques. Le Mexique, a poursuivi le Ministre, appelle l’Iraq à adresser un signe fort montrant qu’il a choisi la voie du désarmement, la solution pacifique à la crise. Le Ministre a lancé un appel au Conseil pour qu’il fasse preuve de créativité sur cette question.
M. COLIN POWELL, Secrétaire d’Etat des Etats-Unis d’Amérique, a déclaré que le Conseil de sécurité se retrouve aujourd’hui pour se poser une question importante : le régime iraquien a-t-il fait le choix de respecter les résolutions pertinentes et de se débarrasser définitivement de toutes ses armes de destruction massive ? La réponse à cette question ne proviendra pas de l’augmentation du nombre d’inspecteurs ou du délai supplémentaire que le Conseil de sécurité est disposé à leur donner. La réponse dépend entièrement de la responsabilité de l’Iraq, qui doit clairement prouver qu’il a tout mis en œuvre pour se débarrasser de ses armes de destruction massive. J’ai écouté attentivement MM. Blix et El Baradei pour savoir si l’Iraq avait compris que la volonté de la communauté internationale était de le voir désarmer sans délai et sans conditions, a dit ensuite M. Powell, et j’ai été déçu d’entendre que, malgré quelques résultats positifs, l’Iraq ne faisait pas preuve de coopération active et inconditionnelle, conformément aux dispositions de la résolution 1441.
Une longue liste de preuves de non-coopération figure dans le rapport des inspecteurs, a-t-il constaté, et les plus évidentes sont les suivantes : si l’Iraq voulait réellement désarmer, il n’aurait pas besoin de mettre en place des installations mobiles ou de construire des laboratoires souterrains. Les inspecteurs ne peuvent porter le fardeau de la preuve et retourner chaque pierre, chaque lopin de terre en Iraq pour s’assurer que ces armes sont réellement détruites, a-t-il dit, car c’est à l’Iraq de respecter totalement et immédiatement les termes des résolutions 1441 et 1284. Le Secrétaire d’État a fait valoir que l’Iraq avait pris des mesures sous la menace de la force et à contre-cœur, alors que précisément la résolution 1441 exige une coopération immédiate et sans conditions. Combien l’Iraq a-t-il de missiles Al Samoud 2, a demandé M. Powell, mettant en avant des preuves selon lesquelles l’Iraq dispose encore des infrastructures pour en fabriquer davantage, au moment où il a commencé timidement à en détruire. Il a exigé une coopération immédiate de l’Iraq, qui doit remettre impérativement toutes ses armes de destruction massive.
Si l’Iraq était décidé de le faire, sur une base volontaire, comme cela a été le cas en Afrique du Sud ou en Ukraine dans le passé, cela apparaîtrait clairement, a-t-il poursuivi. Il a rappelé que l’AIEA était sur le point, en 1991, d’établir que l’Iraq n’avait pas de programme nucléaire, avant de constater le contraire quelque temps après. Aussi, M. Powell a invité le Conseil de sécurité à faire preuve de prudence, indiquant que l’Iraq s’était adressé à un pays européen pour se fournir en tubes d’aluminium. Faisant référence ensuite au rapport de la CCVINU, il a constaté que ses 167 pages pouvaient se résumer à un catalogue d’échecs, non pas pour les inspecteurs de la CCVINU, mais pour l’Iraq qui, dans près de 30 cas, a menti et a fourni de fausses preuves aux inspecteurs.
La CCVINU ne peut éliminer le risque de voir des bombes de type R-400 encore sur le sol iraquien, a-t-il dit, avant d’inviter l’Iraq à transmettre les documents sur les inventaires de production et les codages de ces bombes produites après 1990, comme preuve de sa bonne volonté. Pourquoi l’Iraq n’a pas donné ces informations au cours des dix dernières années et comment lui faire confiance aujourd’hui, alors qu’autant de questions demeurent en suspens, a demandé M. Powell ? Il a affirmé que l’Iraq dispose de près de 10 000 vecteurs et de drones et d’une capacité de production d’armes chimiques et biologiques, mais que sa collaboration n’a pas été franche au cours des quatre derniers mois. Si l’Iraq voulait respecter la résolution 1441, le rapport de la CCVINU ne contiendrait pas 167 pages, mais des milliers de pages avec des réponses claires sur l’ypérite, sur le gaz sarin, sur le bacille du charbon, et sur l’ensemble des programmes interdits, a-t-il dit. Cela permettrait aux inspecteurs de travailler concrètement, a estimé M. Powell, avant de rappeler que la communauté internationale a déjà vécu l’espoir d’un nouvel esprit de coopération avec l’Iraq en mars 1998. Mais neuf mois plus tard, les inspecteurs de l’UNSCOM se retiraient de l’Iraq, a constaté le Secrétaire d’Etat.
Il a mis en garde contre le risque de relâcher la pression, faisant remarquer que les Iraquiens falsifient les informations. La décision stratégique de désarmer a-t-elle été prise à Bagdad, s’est demandé M. Powell ? Assurément, les États-Unis pensent que non. Les membres du Conseil de sécurité ont une lourde responsabilité aujourd’hui qu’ils doivent assumer au risque de voir l’Iraq continuer de menacer la région et le monde entier. Il est temps d’envoyer un message clair à Saddam Hussein, a dit le Secrétaire d’Etat américain, rappelant que les progrès limités constatés ces dernières semaines ne viennent pas des résolutions et des inspecteurs, mais de la présence d’armées étrangères aux portes de l’Iraq comme moyen de pression. Dans un avenir très proche, nous transmettrons au Conseil de sécurité un projet de résolution sur cette question, a-t-il assuré.
M. IGOR IVANOV, Ministre des affaires étrangères de la Fédération de Russie, s’est dit convaincu que, conformément à la résolution 1441, le Conseil doit aboutir à un désarmement complet de l’Iraq. Mais les moyens que nous emploierons, a-t-il dit, conditionneront non seulement l’avenir de l’Iraq mais poseront aussi les fondements de la paix et la sécurité dans le monde contemporain. Si par nos efforts, nous parvenons à résoudre la crise iraquienne conformément à la Charte de l’ONU, ce sera une étape importante vers un nouvel ordre mondial juste et sûr. Aujourd’hui plus que jamais, a estimé le Ministre des affaires étrangères, il s’agit non seulement de la voie la plus réaliste mais aussi de la plus fiable. Le rapport de la CCVINU témoigne que des progrès notables ont pu être obtenus grâce au travail commun et énergique ainsi qu’aux pressions exercées de toutes parts sur Bagdad, notamment par le biais d’une intensification de la présence militaire. Invitant les membres du Conseil de sécurité à s’en tenir aux faits rapportés par les chefs des inspecteurs, le Ministre russe des affaires étrangères a estimé que le processus d’inspections évolue de façon satisfaisante. Il a néanmoins reconnu que l’Iraq aurait dû adopter cette position plus tôt. La mise en place d’un contrôle à long terme, a souligné M. Ivanov, est un autre mécanisme important qui peut assurer qu’il n’y aura pas d’armes de destruction massive à l’avenir. A ce titre, il a demandé s’il serait raisonnable de mettre fin aux inspections, et partant, de changer le cours du processus de désarmement de l’Iraq.
L’intérêt de la communauté internationale réside dans la poursuite du travail des inspecteurs et en aucun cas dans le recours à la force, qui pourrait provoquer un grand nombre de victimes et avoir des conséquences lourdes et irréparables sur la stabilité régionale. M. Ivanov a estimé que le désarmement de l’Iraq par des moyens politiques est possible. Aujourd’hui, ce qu’il faut n’est pas une nouvelle résolution du Conseil, mais un appui actif aux inspecteurs pour mettre en œuvre les décisions adoptées. La Fédération de Russie se prononce fermement pour la poursuite et le renforcement des activités des inspecteurs qui ont désormais un caractère bien ciblés. Les tâches que la CCVINU doit établir dans son programme de travail doivent être formulées de la façon la plus précise possible pour juger de manière objective du degré de coopération de l’Iraq et pour répondre, de façon exhaustive, aux problèmes non réglés. En concluant, le Ministre russe des affaires étrangères a exprimé le vœu que les différences de points de vue au sein du Conseil ne provoquent pas de scission. Nous partageons tous les mêmes valeurs et ce n’est qu’en agissant à l’unisson que nous pourrons relever les nouveaux défis. Le Conseil doit émerger de la crise non pas affaibli et divisé mais uni et renforcé, a-t-il conclu.
M. DOMINIQUE DE VILLEPIN, Ministre français des affaires étrangères, a rappelé que depuis un mois, les inspecteurs assurent que l’Iraq coopère avec eux ; que des progrès substantiels ont été atteints dans le domaine balistique avec la destruction progressive des missiles Al Samoud 2 et de leurs équipements ; que des perspectives s’ouvrent avec les récents interrogatoires de plusieurs scientifiques. Les éléments d’un vrai désarmement sont désormais constatés, a-t-il estimé. Alors, pourquoi s’engager aujourd’hui dans une guerre en Iraq, a-t-il demandé ? Pourquoi briser les instruments qui viennent de prouver leur efficacité ? Pourquoi choisir la division alors que notre unité et notre détermination amènent l’Iraq à se défaire des armes de destruction massive ? Pourquoi vouloir à tout prix procéder par la force alors que nous pouvons réussir par la paix ?
Le Ministre a appelé le Conseil de sécurité à peser les conséquences et à mesurer les effets de ses décisions. En Iraq, a-t-il dit, nous avançons résolument dans la voie de l’élimination complète des programmes d’armes de destruction massive : la méthode choisie fonctionne. Sur tous les autres programmes, nous devons procéder de la même façon : information, vérification et destruction. Le Ministre a souligné que des informations utiles sont déjà disponibles dans les domaines biologiques et chimiques : l’Iraq doit les compléter dans les meilleurs délais afin que nous disposions de la connaissance plus précise d’éventuels stocks ou programmes. Quant au programme nucléaire, M. El Baradei confirme que nous sommes proches du moment où l’AIEA pourra certifier son démantèlement. Quel bilan en tirer ? Que l’Iraq représente un danger moins important qu’en 1991, a répondu le Ministre français. Dans le même temps, M. de Villepin a appelé à ne pas relâcher la pression sur Bagdad : la résolution 1441 et tous les efforts communs portent leurs fruits et la présence militaire américaine et britannique dans la région appuie cette volonté collective. Nous devons utiliser la pression de la communauté internationale pour aller jusqu’au bout de notre objectif de désarmement.
Reconnaissant néanmoins que les inspections ne pouvaient durer indéfiniment et qu’il fallait accélérer le mouvement, le Ministre a fait trois propositions au nom de la France : demander aux inspecteurs d’établir une hiérarchie des tâches de désarmement et de présenter au Conseil de sécurité dans les meilleurs délais le programme de travail prévu par la résolution 1284 ; en second lieu, demander aux inspecteurs de remettre au Conseil de sécurité un rapport d’étape toutes les trois semaines pour montrer ainsi aux autorités iraquiennes qu’elles ne sauraient interrompre leurs efforts ; enfin, fixer une échéance pour dresser le bilan de la mise en œuvre du programme de travail. La résolution 1284 prévoit 120 jours, nous sommes prêts à réduire ce délai si les inspecteurs le jugent possible, a souligné M. de Villepin. Pour lui, l’agenda militaire ne doit pas dicter le calendrier des inspections : se disant d’accord pour des échéanciers et un calendrier accélérés, il a refusé d’accepter tout ultimatum qui signerait la guerre.
En tant que membre permanent du Conseil de sécurité, a prévenu le Ministre, la France ne laissera pas passer une résolution qui autoriserait le recours automatique à la force car l’enjeu dépasse le seul cas de l’Iraq. Nous sommes, selon lui, en train de définir une méthode de règlement des crises, de choisir l’organisation du monde dans laquelle nous voulons que vivent nos enfants. Citant la Corée du Nord ou le Moyen-Orient, il a jugé que les racines de ces crises étaient nombreuses, d’ordre politique, religieux et économique. L’usage de la force risque d’attiser les rancœurs et les haines, d’alimenter un choc des identités, un affrontement des cultures. A ceux qui croient que la guerre est le plus court chemin pour désarmer l’Iraq, le Ministre a répondu qu’elle créerait au contraire des blessures et des fractures longues à cicatriser.
Nous ne souscrivons pas à ce que seraient les autres objectifs d’une guerre, a-t-il par ailleurs prévenu avant de demander si l’objectif est de changer le régime de Bagdad. Ce n’est pas, a-t-il rappelé, l’objectif de la résolution 1441 ; s’agit-il de lutter contre le terrorisme ? La guerre, selon lui, ne ferait que l’accroître ; s’agit-il de remodeler le paysage politique du Moyen-Orient ? Alors nous prenons le risque d’accroître les tensions dans une région déjà marquée par une grande instabilité. Pour le Ministre, les membres du Conseil de sécurité partagent les mêmes exigences : davantage de sécurité, davantage de démocratie. Soulignant qu’il comprend le profond sentiment d’insécurité des Américains, il a relevé que rien n’indique aujourd’hui qu’il y ait un lien entre le régime iraquien et Al-Qaida et s’est dit convaincu que le monde ne serait pas plus en sécurité après une intervention militaire en Iraq.
Nous ne pourrions accepter sans nous contredire un conflit qui risque d’affaiblir notre sécurité, a-t-il encore indiqué. Devant la multiplicité et la complexité des menaces, il n’y a pas de réponse unique, mais l’exigence de rester unis. Il faut ambition et audace, a plaidé le Ministre en évoquant la situation au Moyen-Orient.
Dans quelques jours, a conclu M. de Villepin, notre responsabilité sera engagée solennellement par un vote et nous serons face à un choix essentiel : désarmer l’Iraq par la guerre ou dans la paix. Ce choix essentiel porte avec lui une vision du monde, une conception du rôle des Nations Unies. Pour faire ce choix, les chefs d’Etat et de gouvernement doivent se retrouver ici, à New York, au Conseil de sécurité. C’est l’intérêt de tous, a souligné le Ministre. Il s’agit de retrouver la vocation fondamentale de l’Organisation des Nations Unies : permettre à chacun de ses membres d’assumer ses responsabilités face à la crise iraquienne, mais aussi de se saisir ensemble du destin du monde.
M. TANG JIAXUAN, Ministre des affaires étrangères de la Chine, a rappelé que l’adoption de la résolution 1441, il y a quatre mois, avait clairement démontré la volonté du Conseil de sécurité de procéder à la destruction des armes de destruction massive détenues par l’Iraq et de trouver un règlement pacifique à cette crise. La résolution 1441 a été unanimement reconnue par la communauté internationale, a observé le Ministre, avant de souligner les progrès intervenus dans le processus d’inspections en Iraq grâce aux efforts conjugués de la CCVINU et de l’AIEA. Dans l’ensemble, a-t-il poursuivi, la résolution 1441 est progressivement mise en œuvre malgré certains problèmes qui persistent dans le processus d’inspections. C’est pourquoi la Chine est favorable à la poursuite de ce processus et estime qu’il est possible de parvenir par un règlement politique à la destruction des armes de destructions massives de l’Iraq. Il ne nous a pas été facile d’adopter la résolution 1441, a rappelé M. Jiaxuan, et c’est la raison pour laquelle nous pensons que la détermination et la patience sont essentielles à la mise en œuvre de l’étape actuelle.
La Chine invite à cet égard le Conseil de sécurité à faire preuve d’unité et de coopération pour préserver son autorité, a dit le Ministre des affaires étrangères. Aussi, le Conseil doit-il réaffirmer son soutien sans faille à la CCVINU et à l’AIEA dans la poursuite des inspections pour leur permettre de finaliser la mise en œuvre de la résolution 1441. Il a invité ensuite le Gouvernement iraquien à prendre des mesures plus efficaces pour renforcer la coopération avec les inspecteurs et réunir les conditions nécessaires à un règlement politique. Aujourd’hui, nous n’avons aucune raison objective de fermer la porte à la paix, a dit le Ministre, avant de déclarer que la Chine est opposée à une nouvelle résolution, surtout si celle-ci prévoit le recours à la force. M. Jiaxuan a invité les membres du Conseil à assumer leurs responsabilités devant l’histoire et à tout faire pour éviter la guerre.
Mme MARIA SOLEDAD ALVEAR VALENZUELA, Ministre des relations extérieures du Chili, a voulu que le Conseil parvienne à un accord sur la manière d’exiger de l’Iraq un désarmement réel et a invoqué, à cet égard, les principes de la Charte des Nations Unies. Les rapports des inspecteurs, a-t-elle dit, permettent de conclure à une collaboration de la part de l’Iraq. Soulignant néanmoins l’insuffisance de cette coopération, la Ministre a estimé que les signes de progrès dans certains domaines concrets ne permettent toujours pas de modifier le sentiment général. Elle a donc appelé l’Iraq à collaborer de façon active et inconditionnelle conformément aux résolutions pertinentes du Conseil. La Ministre a ensuite mis l’accent sur les principes qui sous-tendent la politique extérieure de son pays, à savoir le multilatéralisme au centre duquel se trouve le Conseil de sécurité. Or, aujourd’hui, a-t-elle dit, c’est la crédibilité du Conseil qui est en jeu. Encourageant, en conséquence, une solution conforme au droit international et à la Charte de l’ONU, la Ministre chilienne des relations extérieures a souhaité l’adoption de mesures collectives pour éliminer les menaces à la paix et à la sécurité internationales.
Le Chili, a-t-elle poursuivi, a fait tous les efforts possibles pour contribuer à une décision concertée qui mène à un désarmement pacifique de l’Iraq en défendant la poursuite d’inspections limitées dans le temps. Dans ce cadre, le Chili a toujours argué que le recours à la force doit être perçu comme un dernier recours. Ces derniers jours, a noté Mme Alvear, les membres du Conseil ont fait preuve d’une certaine souplesse. Les idées avancées aujourd’hui montrent des solutions qui pourraient établir un lien entre le désir de paix et le désarmement. La Ministre a donc plaidé pour le renforcement des inspections avec des délais limités. Le régime iraquien, qui a exposé son peuple à de terribles souffrances, a une responsabilité totale en la matière, a-t-elle souligné en attirant l’attention sur le souhait de son pays de voir une solution à la crise conforme à sa vocation de paix.
Mme ANA PALACIO, Ministre des affaires étrangères de l’Espagne, s’est inquiétée que l’arbre puisse cacher la forêt : les gestes de Saddam Hussein, les progrès des inspections ne doivent pas nous faire perdre de vue l’objectif défini par la communauté internationale depuis douze ans : désarmer totalement ce régime. Nous sommes enlisés depuis douze ans, mais avons-nous rempli nos obligations en tant que membres du Conseil de sécurité, a-t-elle demandé ? Quel message adressons-nous au monde ? Le Conseil de sécurité a pour objet de maintenir la paix et la sécurité internationales, mais doit aussi déterminer les actions qu’il convient d’adopter. Je ne peux que constater que la menace persiste, que Saddam Hussein ne s’acquitte pas des résolutions du Conseil de sécurité. La résolution 1441 était la dernière possibilité, mais douze ans plus tard nous sommes sur la même scène qu’en 1991.
Saddam Hussein méprise profondément la légalité internationale et sa stratégie consiste à nous tromper, a estimé la Ministre. Combien de temps encore, a-t-elle demandé ? Au lieu d’envoyer un message ferme et cohérent, le Conseil risque de se transformer en caisse de résonance médiatique qui met en scène nos divergences. Saddam Hussein réussit à ce que beaucoup associent le Conseil à l’agresseur alors que lui-même s’associe à la victime de l’agression ; il divise la communauté internationale et il réussit à renverser la charge de la preuve. Mme Palacio a noté que, comme par magie, le Président iraquien fait aujourd’hui détruire des armes dont il niait l’existence. Alors s’il mentait avant, pourquoi le croire aujourd’hui, a-t-elle demandé, jugeant qu’il n’avait pas été possible de constater une volonté réelle de désarmer de la part de l’Iraq ?
Pour la Ministre, le Conseil doit adresser un message selon lequel il n’acceptera plus de jouer avec Saddam et ne peut encourager les détenteurs d’armes de destruction massive qui pensent pouvoir violer à leur guise la légalité internationale. Il doit également faire comprendre qu’il a toujours défendu le désarmement complet de l’Iraq, en particulier pour les armes chimiques et biologiques. Enfin, nous devons assumer nos responsabilités face au reste du monde. Le désarmement de l’Iraq n’est pas la question de davantage d’inspecteurs ou davantage de temps. Le désarmement passe forcément par la volonté politique du régime iraquien. Il faut que les inspecteurs poursuivent leur travail, mais à partir d’un changement radical d’attitude de la part du régime ; or, pour le moment, Saddam Hussein ne donne aucun signe de vouloir désarmer.
M. JACK STRAW, Secrétaire d’Etat aux affaires étrangères et du Commonwealth du Royaume-Uni, a rappelé que la communauté internationale avait convenu de forcer l’Iraq à désarmer à l’automne. Lorsque nous négocions la résolution 1441, tous les membres du Conseil avaient les preuves des violations patentes de l’Iraq vis-à-vis des résolutions adoptées dans le passé, mais le régime de Bagdad n’a pas saisi cette dernière chance de désarmer. Pas un Ministre présent dans cette enceinte n’a dit que l’Iraq respectait pleinement la résolution 1441, a constaté M. Straw, avant de demander pourquoi il fallait encore croire dans la volonté iraquienne de désarmer. L’Iraq n’a jamais accepté autrement que sous la pression la mise n œuvre de la résolution 1284, et il en est de même pour la 1441, a-t-il constaté. J’ai ici le compte rendu d’une réunion du 7 octobre 1991, au terme de laquelle le Conseil de sécurité avait demandé à l’Iraq de promulguer une loi sur l’interdiction des armes de destruction massive.
Douze ans après, l’Iraq continue de refuser de promulguer une loi établissant que de telles activités sont interdites notamment pour les sociétés d’Etat, a-t-il dit. Le Secrétaire d’Etat britannique a ensuite indiqué qu’à ce jour, seuls 12 entretiens ont été réalisés sur une liste de 3 500 scientifiques et experts iraquiens. Ces scientifiques ont été intimidés par le régime iraquien et certains spécialistes disposant des preuves les plus accablantes ont été mis au secret par les autorités, a-t-il déploré, ajoutant qu’aucun entretien ne s’était encore déroulé à l’étranger. Concernant les missiles Al Samoud 2, le régime iraquien n’a déclaré que 131 moteurs alors que 380 moteurs ont été importés, a-t-il dit, regrettant que Bagdad ait également menti sur la catégorie et la portée de ces missiles. C’est aller à l’encontre de l’expérience acquise que de croire que l’on peut parvenir à un désarmement pacifique, à moins d’une coopération immédiate de l’Iraq, a dit M. Straw. Le Conseil de sécurité doit exiger une décision stratégique et irréversible de l’Iraq de désarmer, de remettre toutes ses armes et de transmettre tous les documents en sa possession.
Il a souhaité que le désarmement se fasse de la façon la plus pacifique, mais a mis en garde contre les progrès dans les inspections qui sont la partie immergée d’un iceberg volumineux. Qu’est-ce qui a changé pour contraindre Saddam Hussein à commencer à coopérer ces derniers jours, a-t-il demandé. Ce ne sont pas les inspections, ou les pressions des Non-Alignés, de l’Union africaine ou d’autres organisations, mais la pression militaire à ses frontières, a-t-il dit.
Nous ne suggérons pas qu’en quelques jours MM. Blix et El Baradei parviendront à désarmer l’Iraq, a-t-il dit, nous suggérons simplement que les idéaux des Nations Unies triomphent par le biais du constat que l’Iraq n’a pas désarmé et que nous appuyons notre diplomatie par un éventuel recours à la force. Je demande au Secrétariat, au nom des coauteurs du projet de résolution, de faire circuler un amendement qui prévoie une nouvelle échéance au terme de laquelle l’Iraq devra avoir désarmé, a conclu le Secrétaire d’Etat.
M. GEORGES CHIKOTI, Vice-Ministre des affaires étrangères de l’Angola, a pris note des progrès que l’Iraq a accomplis ces derniers temps, dans le cadre de sa coopération avec les inspecteurs de l’ONU. Il a néanmoins estimé que cette coopération demeure nettement insuffisante. Cette position, a-t-il dit, ne nous aide guère dans l’accomplissement de notre mandat. La manière et la détermination dont le Conseil traite du désarmement de l’Iraq, a-t-il souligné, formeront les normes du maintien de la paix et de la sécurité internationales. L’Iraq doit procéder à son désarmement en coopérant avec les inspecteurs, a dit le Vice-Ministre en appelant les autorités de Bagdad à jouer un rôle plus proactif et plus énergique dans le processus de destruction de ses armes et à en présenter les preuves à la communauté internationale. Le Conseil doit adresser un message clair et ferme aux autorités de Bagdad et leur faire comprendre que le débat du Conseil ne témoigne en aucun cas d’une réticence à agir, mais plutôt d’une réflexion sur la meilleure manière d’agir conjointement pour réaliser l’objectif commun qui est le désarmement effectif de l’Iraq.
M. MARTIN BELINGA-EBOUTOU (Cameroun) a fait remarquer que la résolution 1441 ne fixait pas de date butoir, mais met sur pied un processus qui doit se réaliser dans les délais les plus courts. Or, le rapport de M. Blix fait état de progrès réels, réalisés rapidement sur le processus et les procédures. Le rapport souligne en même temps nettement que les résultats, relevant du désarmement proprement dit, sont jusqu’à présent très modestes. Une meilleure coopération des autorités iraquiennes aurait pu permettre des progrès plus rapides. A ce stade, le Cameroun reconnaît donc que l’Iraq n’a pas encore saisi la dernière chance qui lui a été accordée par le Conseil de sécurité, a déclaré le représentant.
Le Cameroun, a-t-il poursuivi, est contre la guerre en Iraq ou ailleurs, mais en tant que membre du Conseil de sécurité, il a la responsabilité de mettre en œuvre les décisions prises par cet organe. Nous sommes pour les inspections, a-t-il ajouté, mais nous ne croyons pas à l’opportunité d’inspections qui s’étendraient indéfiniment dans le temps. Il faut donc rechercher une alternative crédible à la guerre et aux inspections interminables. Le représentant s’est demandé comment amener l’Iraq à coopérer pleinement et sans condition et il faudrait pour cela, selon lui, surmonter les divergences entre membres du Conseil. Nous pourrions, a-t-il suggéré, d’une seule voix et avec force sommer les autorités iraquiennes de coopérer activement avec les inspecteurs, comme l’exige la résolution 1441 qu’elles ont acceptée. Le représentant a conclu en exhortant les autorités iraquiennes à agir ainsi dans l’intérêt de leur peuple, de leur pays, et dans l’intérêt de la paix ; il a appelé les membres du Conseil de sécurité à œuvrer en faveur d’une position commune pour faire comprendre aux autorités iraquiennes qu’elles n’ont d’autre alternative que de se conformer aux décisions de la communauté internationale.
M. STEFAN TAVROV (Bulgarie) a estimé que la coopération substantielle de l’Iraq n’est toujours pas satisfaisante et que l’attitude de ce pays laisse toujours à désirer. Par conséquent, l’objectif principal de la résolution 1441, le désarmement de l’Iraq, n’est toujours pas atteint. A ce jour, 34 missiles Al Samoud 2 ont été détruits, mais plus de trois mois après l’adoption de la résolution 1441, aucune percée significative, selon le représentant, n’a été enregistrée en ce qui concerne les quantités d’armes chimiques et biologiques considérées comme manquantes, notamment le bacille de charbon et le gaz VX.
L’adoption unanime de la résolution 1441 a été la forme la plus efficace de pression diplomatique ; mais c’est la menace du recours à la force militaire et la présence d’un nombre important de soldats américains et britanniques aux frontières de l’Iraq qui rendent cette pression crédible. Le recours à la force n’est qu’un ultime recours une fois les moyens diplomatiques épuisés. Pour le représentant, le projet de résolution soumis au Conseil de sécurité par les Etats-Unis, le Royaume-Uni et l’Espagne, ainsi que le mémorandum que font circuler la France, la Fédération de Russie et l’Allemagne, ne sont pas incompatibles. Le mémorandum souligne que la pression sur l’Iraq doit être renforcée et le représentant a indiqué que son pays se rallie à cette stratégie. Mais, il a aussi estimé que le projet de résolution était un bon moyen d’accentuer la pression sur l’Iraq et indiqué qu’il était prêt à soutenir le projet de résolution, ainsi que l’amendement proposé par le Royaume-Uni. Pour le représentant, l’adoption d’une telle résolution serait une continuation logique des efforts du Conseil de faire comprendre à l’Iraq que la patience du Conseil a ses limites.
Pour la Bulgarie, a conclu le représentant, l’unité du Conseil de sécurité reste à la fois un objectif à atteindre pour préserver la crédibilité de l’ONU et du multilatéralisme en général, mais aussi un moyen pour obtenir le désarmement de l’Iraq. Rien ne peut remplacer la diplomatie et il convient dans les jours à venir d’intensifier le dialogue entre les membres du Conseil de sécurité.
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