La tendance générale
Des régimes parlementaires sous protectorat
Ce qui se passe en Libye constitue le modèle que réserve au monde arabe une alliance politique composée des Frères musulmans, des milieux de la bourgeoisie libérale et de certains mouvements de la gauche. Avec quelques nuances imposées par les nombreuses spécificités entre un pays et un autre, l’exemple libyen offre un échantillon du projet politique vers lequel sont entrainées les sociétés arabes, qui bâtissent les illusions de leur salut sur l’idée de l’intervention étrangère pour répandre la démocratie et se débarrasser du joug du despotisme et de la tyrannie.
Dans le cas libyen, nous assistons à un renouvellement de l’hégémonie coloniale sur le pays et sur ses richesses pétrolières, basé sur un partage de l’influence et du butin entre les puissances occidentales. L’élément nouveau est l’entrée en jeu de la France en tant que partenaire principal, après que le Conseil national de transition (CNT) se soit engagé à accorder aux compagnies françaises 35 % du pétrole, comme l’a révélé un haut responsable du CNT au Parisien. La présence états-unienne, britannique et italienne est préservée, tandis que les influences chinoises et russes sont en voie de liquidation, non pas à cause des positions de ces deux pays dans la crise libyenne mais parce que ces influences sont considérées comme des vestiges de la Guerre froide qu’il faut absolument éliminer.
Sur le plan interne, le système qui est concocté sous la férule de l’Occident colonial et triomphateur est un régime républicain, parlementaire sous l’intitulé de démocratie. Rien de nouveau car il s’agit d’un calque des régimes que les puissances mandataires avaient installés dans les années 20 du siècle dernier : des élites qui se partageaient des Parlements dans le cadre d’élections et d’une vie politique, le tout sous la stricte surveillance d’un haut commissaire. Tout ce monde évoluait sous un plafond fixé par la puissance mandataire, qui disposait d’un mandat « légal » délivré par l’ancêtre des Nations unies, la Société des nations (SDN). C’est pratiquement le même système qui est en train d’être mis en place aujourd’hui, avec certainement plus de subtilité, vu que les temps ont changé.
Il y a un siècle, les pays arabes vivaient sous des monarchies constitutionnelles, ou des régimes parlementaires, avec des partis politiques qui « remportaient » des élections et « formaient » des gouvernements, l’ensemble du processus étant réglé, régi et dirigé par la puissance coloniale.
L’histoire se répète avec des acteurs nouveaux, le plus important étant la Confrérie des Frères musulmans, qui, après 60 ans d’exclusion des cercles du pouvoir, n’a pas trouvé de meilleur cheval que celui de l’Occident pour accéder aux plus hautes sphères de la société.
Le drame est que cette alliance ne propose aucun projet politique ou vision économique pour sortir les sociétés arabes du sous-développement. Prendre le pouvoir est son but et tous les moyens sont bons pour y parvenir. Tout le reste n’a plus aucune importance, pas même la cause de la Palestine, que ces nouvelles élites dirigeantes excluent de leur discours politique. La réussite de ce projet risque de plonger les pays arabes dans un siècle d’obscurantisme et de livrer les richesses au pillage par l’Occident qui ne laissera que les miettes à ceux qu’il aura aidés à arracher le pouvoir aux despotes pour le monopoliser à leur tour.
La tendance en Syrie
Les contras syriens à pied d’œuvre
Tout observateur honnête aura constaté que la mobilisation des contestataires le dernier vendredi en Syrie frôlait le ridicule. Pas plus de 10 000 personnes ont répondu dans l’ensemble de la Syrie à l’appel à manifester, placé sous l’intitulé « La mort plutôt que l’humiliation ». La couverture médiatique de ces modestes rassemblements était inversement proportionnelle au nombre des participants. La tactique des agitateurs est d’organiser des rassemblements dans des villages lointains « pour la photo », afin de donner l’impression que la « révolution » se poursuit, alors qu’il n’est plus un secret pour personne que les grandes villes comme Damas, Alep, Hassaka, Raqqa et d’autres encore, refusent obstinément de participer à la déstabilisation du pays.
En revanche, les extrémistes armés restent actifs dans de nombreuses régions, notamment à Homs, au centre, certains villages de la province de Daraa, au Sud et Deir Ezzor à l’Est. Pas plus tard que dimanche, six militaires, dont un officier et trois fonctionnaires civils ont été tués dans une embuscade tendue dans le centre du pays. Même l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH), qui est la principale source des médias occidentaux, a reconnu que pendant le mois du Ramadan, 500 personnes ont été tuées en Syrie, dont 113 militaires.
Ces groupes armées qui tuent, kidnappent, sabotent et détruisent, ressemblent en tout point aux tristement célèbres Contras, créés, entrainés et financés par la CIA, dans les années 80, pour déstabiliser le Nicaragua.
En donnant l’impression que la mobilisation reste forte et en alimentant les violences, ces groupes extrémistes veulent préparer le terrain à une intervention étrangère contre leur propre pays. Ils pavent la voie à un renforcement des sanctions dans l’espoir d’affaiblir le pouvoir central et faciliter une action militaire de l’Otan via la Turquie. La finalité étant de créer les conditions favorables à une répétition du scénario libyen en Syrie.
Mais ces équations sont basées sur de faux calculs. Tout d’abord, le pouvoir syrien reste soudé dans chacune de ses composantes, notamment l’armée, les services de sécurité et le corps diplomatique. Il dispose d’un solide soutien populaire qui s’est déjà manifesté à plusieurs reprises avec le refus des grandes villes de prendre part au mouvement de contestation et les millions de personnes qui sont descendues dans la rue pour exprimer leur soutien au président Bachar el-Assad. Ensuite, le régime a entamé des réformes selon un calendrier national qui ne prend pas en compte les exigences et les intérêts des occidentaux. Ce qui explique la colère des ces derniers. Enfin, la Syrie continue de jouir de forts soutiens sur la scène internationale. Pas plus tard que dimanche, le ministre russe des Affaires étrangères a assuré que les pays du BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud) refusent la réédition en Syrie du scénario libyen. Serguei Lavrov a accusé l’Occident d’encourager l’opposition syrienne à refuser le dialogue avec le pouvoir dans le but de déstabiliser le pays.
Dans ce contexte, il est clair que les États-Unis et leurs agents européens et arabes devront attendre longtemps avant de voir le régime syrien faiblir et céder à leurs menaces et autres intimidations.
La tendance au Liban
Dans sa décadence, le haririsme s’en prend à l’armé et au grand mufti de la République
La campagne politique et médiatique féroce qu’a lancée le Courant du Futur de Saad Hariri contre l’Armée libanaise et le grand mufti sunnite de la République, illustre la décadence politique d’un mouvement qui a dirigé le Liban pendant 20 ans après la fin de la guerre civile et la conclusion de l’accord de Taef. Ce courant s’élance sans frein, la tête devant, en brisant des limites et en violant des principes politiques et moraux que son fondateur, Rafic Hariri, avait fixés pour être en phase avec les habitudes et les spécificités libanaises.
Le mufti Mohammad Rachid Kabbani a offert pendant 20 ans une précieuse couverture politique et morale au haririsme et a respecté une vieille tradition qui voulait que Dar el-Fatwa (le siège des muftis) reste aux cotés du Premier ministre (qui est toujours sunnite au Liban). Ces six dernières années, cheikh Kabbani s’est mis en porte-à-faux avec de grandes figures de la communauté sunnite pour défendre Saad Hariri et avant lui Fouad Siniora. Il a fourni un filet protecteur communautaire à des personnalités sunnites qui ont commis des crimes impardonnables contre la patrie, comme le député actuel Ahmad Fatfat, qui a ordonné aux forces militaires au Liban-Sud, alors qu’il était ministre de l’Intérieur lors de la guerre de 2006, d’ouvrir la caserne de Marjeyoun à l’armée israélienne et d’offrir du thé aux officiers ennemis.
Lorsqu’aujourd’hui, cheikh Kabbani, fidèle à la tradition, veut rester proche du nouveau Premier ministre et lui assurer une protection politique et morale en sa qualité de plus haut responsable sunnite dans un système basé sur le « confessionnalisme politique », il est critiqué, boycotté et qualifié de « traitre » par le Courant du futur. Le parti de Saad Hariri avait d’ailleurs eu la même attitude peu chevaleresque à l’égard de Najib Mikati après sa nomination au poste de Premier ministre.
La campagne contre l’Armée libanaise illustre, pour sa part, la mentalité milicienne et antiétatique du Courant du futur. Ces six dernières années, le masque du « parti civilisé tournée vers l’action politique et éducative » était tombé, quand les hordes armées de ce mouvement ont sévi partout au Liban. Mais en s’attaquant à l’armée, les haririens commettent une grave erreur politique car le principal vivier de l’institution militaire se trouve dans les régions sunnites pauvres, de tout temps délaissées par le Courant du futur, notamment le Akkar, au Nord, la Bekaa-Ouest et l’Iqlim el-Kharroub, au Mont-Liban.
Dans sa chute, le discours décadent du Courant du futur ressemble de plus en plus à ceux des groupuscules extrémistes sunnites d’affiliation al-Qaida, comme Jund el-Cham et Fateh el-Islam, qu’il a d’ailleurs contribué à financer. Ce comportement qui frôle l’hystérie est sans doute dû au fait que les promesses états-uniennes sur l’imminence de la chute du régime syrien ne se sont toujours pas réalisées et ne se réaliseront pas de sitôt, alors qu’il s’est impliqué à tous les niveaux dans le plan de déstabilisation de la Syrie.
La virulence des campagnes contre Najib Mikati et l’armée s’expliquent par le refus du Premier ministre et de l’institution militaire de cautionner ce plan. Bien au contraire, de par son attitude politique, Mikati a assuré une couverture solide à l’armée qui tente d’empêcher que le Liban ne soit transformé en rampe de lancement contre la Syrie. Au grand dam de Marwan Hamadé et Johnny Abdo, inventeur de cette théorie de rampe de lancement qui avait pour objectif de compléter, avec l’aide de Jacques Chirac, le complot commencé avec l’assassinat de Rafic Hariri, et qui visait à ancrer solidement le Liban au camp israélo-américain.
Déclarations et prises de positions
Najib Mikati, Premier ministre libanais
Extraits d’une interview accordée le 02 septembre à Al-Hayat
« Il est nécessaire de dissocier la situation libanaise de la situation syrienne et ne pas intervenir dans les affaires d’autrui, pour que les autres n’interviennent pas dans nos affaires. Le Liban a des spécificités que tout le monde connaît. Il veut se tenir à l’écart dans les circonstances actuelles. La priorité est aux questions intérieures. Si le Conseil de sécurité parvient à une résolution qui impose des sanctions à la Syrie, le Liban ne contrariera pas la volonté internationale. Nous ne pouvons nous positionner contre personne. Nous prenons nos distances par rapport au dossier syrien, mais nous ne pouvons évidemment pas sortir du giron international. Nous ne pouvons pas et nous n’avons la force de faire face à personne, surtout la communauté internationale. Le gouvernement libanais est déterminé à financer le TSL, parce que cela est dans l’intérêt du Liban, et le gouvernement agit conformément à l’intérêt du Liban. Que l’on cesse de dire que je ne suis ni blanc ni noir mais gris, et que je ne prends pas de décision. L’important c’est l’intérêt du Liban. Le jour où on m’adressera la demande de financement et que je dois prendre une décision, je ne tiendrai compte que de l’intérêt du Liban, et la société libanaise comme la communauté internationale pourront voir cela (…) Il y a quelques jours, nous avons arrêté dans la Békaa un homme faisant l’objet de 360 mandats d’arrêts. Soyons réalistes. Nous avons fait tout ce qu’il fallait pour chercher les accusés du TSL. Je suis prêt à inviter tous les États du monde à nous aider à ce niveau. Nous avons inspecté tous les endroits possibles pendant les 30 jours. Cette question est du ressort du procureur général et de la police judiciaire qui a rempli pleinement son devoir. Le juge [président du TSL] Antonio Cassese a dit que l’effort du gouvernement est acceptable, et l’affaire n’est pas encore terminée. »
Nabih Berry, président du Parlement
« Nous restons attachés aux armes de la Résistance, d’autant, que les précédents régimes avaient laissé tomber le Liban-Sud, le laissant faible devant les ambitions et les visées israéliennes. Ces régimes avaient loué le Sud sous le couvert de l’accord du Caire, voulant le marginaliser et satisfaire par la même occasion le système arabe en place qui se contentait de payer de l’argent pour écarter le danger palestinien. Les régimes précédant l’accord de Taëf n’avaient pas construit une armée, ni exécuté un seul projet de développement au Sud, dans la Békaa et au Akkar, où le courant électrique est arrivé parce qu’il ne pouvait pas faire autrement. L’État avait donc démissionné de sa mission au Sud, en faisant de cette région une proie idéale pour Israël et il a renoncé à sa mission de défense et de protection. La Résistance est-elle ou non en train de respecter la résolution 1701 conformément à la position officielle de l’État ? Est-elle en train de s’immiscer dans la mission de l’armée et son rôle dans le cadre de la résolution 1701 ? Il est de notre droit de réclamer un engagement national sur le fait de considérer Israël comme l’ennemi du Liban (…) L’armée est une ligne rouge et le fait de s’en prendre à elle, de près ou de loin, est inacceptable. En attendant que nous nous entendions sur une stratégie de défense, nous resterons attachés à l’équation armée-peuple-résistance, et nous attendons de certaines parties et forces qu’elles remplissent leur rôle politique dans la défense du Liban. Nous ne livrerons pas nos têtes à l’ennemi. Le projet de la résistance n’est pas un sujet à débattre puisqu’elle est le résultat de l’agression qui se poursuit contre le peuple, la terre, l’eau et désormais contre notre pétrole (…) Une éventuelle partition de la Syrie constitue une menace pour le Liban, l’Irak et la Turquie. Certaines parties libanaises s’impliquent dans le complot étranger contre la Syrie. Il n’existe pas de tente au-dessus d’un régime arabe quel qu’il soit. La révolution du Cèdre, qui se déclare aujourd’hui à l’origine des révolutions arabes, coordonnait son action avec Hosni Moubarak avant sa chute. »
Sami Gemayel, député phalangiste (14-Mars)
« Le Hezbollah fait chuter les gouvernements et les forme, menace les leaders et les partis politiques comme le faisait le régime syrien sous l’ère de l’occupation. Le régime syrien bénéficiait de son déploiement militaire pour faire pression sur les Libanais, le Hezbollah en fait de même aujourd’hui. La logique des accusations de trahison lancées contre la partie adverse est également la même : hier, les étudiants qui manifestaient contre l’occupation syrienne se trouvaient accusés d’être les agents d’Israël, et aujourd’hui tous ceux qui remettent en question la résistance sont qualifiés d’« agents ». Même au niveau des slogans, le légal, temporaire et nécessaire qui servait autrefois à justifier la présence armée syrienne a été remplacé aujourd’hui par son équivalent pour justifier les armes du Hezbollah, en l’occurrence la formule le peuple, l’armée et la résistance. Mais le plus dangereux reste les objectifs stratégiques et idéologiques du Hezbollah. Nous pouvons considérer que sa source d’inspiration est son ennemi et celui des Libanais, en l’occurrence les sionistes. Plus nous observons le Hezbollah et plus nous trouvons qu’il agit au Liban comme les sionistes en Israël. Comme les sionistes, le Hezbollah refuse de se plier aux résolutions internationales. Les sionistes considèrent qu’ils sont le peuple élu de Dieu, ce qui correspond au slogan du Hezbollah relatif aux achraf el-nas [personnes les plus honorables], preuve que l’arrogance existe dans les deux milieux. Le Hezbollah tente d’intimider la société libanaise et de la faire vivre dans un état permanent de peur, tout comme Israël, qui veut faire croire à son peuple qu’il est en état de guerre permanente, l’objectif étant pour le parti de mobiliser la açabiya [facteur de cohésion] et de justifier ainsi son existence et celle de son arsenal militaire. Les sionistes croient que le territoire israélien appartient aux juifs depuis 3 000 ou 4 000 ans, et qu’ils ont donc droit à la terre ; or d’après certains de ses discours, Hassan Nasrallah estime que la région de Jbeil appartient aux musulmans. Pourtant, suivant la même logique, on pourrait lui rappeler que les chrétiens se trouvaient au Moyen-Orient avant l’islam, et que, selon cette logique, nous devrions revendiquer l’ensemble de la région. Les sionistes ont œuvré à établir un État religieux, ce que le Hezbollah cherche à faire sur le territoire libanais. Le Hezbollah poursuit une politique d’expansion par l’achat de terrains, tout comme Israël l’a fait dans les territoires palestiniens. Le parti poursuit une politique de colonisation, en empiétant par la force sur les biens privés qu’il n’a pu acheter et en construisant dessus, ce qui rappelle la manière avec laquelle les Israéliens ont colonisé par la force les territoires qu’ils n’ont pu acheter (…) »
Cheikh Ahmad Kabalan, mufti chiite libanais
« Nous sommes en faveur du printemps des peuples, mais contre le printemps qui se transforme en une tempête hivernale qui nous mène au chaos, contre le printemps qui se transforme en bain de sang. Nous sommes en faveur du dialogue, de la réforme, de la rénovation, du développement, de tout régime qui perçoit que l’importance de l’État émane de l’importance de l’Homme, qui soit au service de son peuple, et contre tout régime tyrannique qui exploite son peuple. Oui, nous sommes en faveur d’une Syrie puissante et résistante, d’une Syrie qui s’est engagée auprès du peuple libanais et de la Résistance, et qui l’a longtemps soutenue dans sa bataille pour libérer sa terre et vaincre son ennemi. C’est le projet américano-sioniste qui profitera de l’affaiblissement du régime syrien actuel. Nous nous adressons aux frères arabes pour les mettre en garde contre ce projet qui vise à mettre en échec non seulement la Syrie, la Résistance libanaise ou le Hamas à Gaza, mais vous vise tous, vise vos régimes, vos États, vos peuples, votre pétrole et vos richesses. Ce projet américano-sioniste, soutenu par l’Europe, ne consiste pas à sauvegarder la dignité de l’Irakien, du Tunisien, de l’Égyptien, du Libyen, du Syrien, du Libanais ou du Palestinien, mais a pour but de transformer la région pour servir l’intérêt de l’entité sioniste qui jouira ainsi de la sécurité et de la stabilité. »
Samir Geagea, leader chrétien allié de Saad Hariri
« Le gouvernement actuel est celui du Hezbollah et de la Syrie, parrains de la chute du gouvernement Hariri et de l’élection de Najib Mikati. L’opposition du 14-Mars se traduira par des positions politiques quotidiennes, des rencontres, des mouvements ou des colloques, et non pas par la paralysie du centre-ville [allusion au campement installé en centre-ville par les partis d’opposition durant la période Siniora]. Le refus du Hezbollah à coopérer avec le TSL est une preuve de son implication dans l’assassinat de Rafic Hariri (…) Il est vrai que de bonnes relations lient le Liban à la Syrie, mais le peuple syrien, qui manifeste quotidiennement, n’a-t-il rien en commun avec le peuple libanais ? Les Libanais ne sont-ils pas concernés, au moins moralement, par ce qui se passe en Syrie ? »
Ahmad Fatfat, député du Courant du futur de Saad Hariri
« Les agissements de certains officiers des services de renseignement libanais ressemblent à ceux des SR syriens. Nous n’avons jamais utilisé les armes. Nous ne nous sommes jamais retournés contre l’armée et ce n’est pas nous qui avons empêché l’armée de se rendre au Liban-Sud. Ce n’est pas nous qui avons assassiné le pilote Samer Hanna. Ce n’est pas nous, non plus qui avons attaqué l’armée à Mar Mikhaël. »
Mohammad Fneich, ministre d’État, Hezbollah
« L’armée est la garantie de la paix au Liban et elle coopère avec la Résistance pour affronter l’ennemi israélien et préserver la sécurité. Toute atteinte à son rôle nuit aux réalisations du peuple libanais. Tous ceux qui visent la Résistance acceptent de faire partir d’une campagne américano-sioniste qui a pour but à faire tomber la Résistance. Le formule Peuple- Armée-Résistance constitue une garantie pour préserver les droits du Liban et de le mettre à l’écart des répercussions des conflits dans la région. »
Revue de presse
As Safir (Quotidien libanais proche de la nouvelle majorité, 30 août 2011)
Imad Marmal
Une source du Courant du futur indique que Saad Hariri restera en Arabie saoudite pour des raisons sécuritaires car il sera exposé à de sérieux dangers s’il retourne à Beyrouth. La source qualifie Beyrouth de « capitale sous occupation du Hezbollah ». Elle évoque la « plaie encore béante » de Hariri suite à la façon dont il a été écarté du pouvoir, alors qu’il représente la majorité sunnite et le plus grand bloc parlementaire du pays. La source y voit une tentative d’isoler la communauté sunnite et de lui tordre le coup. Le Hezbollah a commis une grave erreur en se pliant à la volonté du président Bachar el-Assad qui a pris la décision d’écarter Saad Hariri du pouvoir, ajoute la source.
Saad Hariri attend probablement les résultats des évènements en Syrie. Il mise sur une chute du régime syrien qui, selon lui, provoquera automatiquement la chute du gouvernement Mikati au Liban. Le Hezbollah s’en retrouverait affaibli et, avec les effets de l’acte d’accusation du TSL, il serait vraiment mis au pied du mur. La bataille de la Syrie a donc une importance vitale aux yeux de Hariri.
As Safir (30 août 2011)
Les déclarations des hauts responsables iraniens montrent que la crise syrienne a atteint un degré très sensible et que l’Iran est dans un état d’alerte maximale, politiquement et peut-être aussi militairement, pour faire face à d’éventuelles surprises en Syrie. Un débat existe actuellement au sein du haut commandement iranien. Certains responsables iraniens se demandent en effet si le régime syrien n’a plus aucune chance de s’en sortir et si l’Iran ne devrait pas faire comme la Turquie, c’est-à-dire tenter de préserver ses intérêts vitaux indépendamment de la forme du régime qui sera au pouvoir en Syrie.
As Safir (29 août 2011)
Nabil Haitham
Dans son dernier discours, le secrétaire général du Hezbollah, sayyed Hassan Nasrallah, a évoqué en des termes clairs et francs la situation en Syrie, alors qu’il s’abstenait jusque là de s’exprimer ouvertement sur le sujet. Le discours de Nasrallah montre qu’il est rassuré quant à l’avenir de la Syrie, où la situation est désormais sous contrôle après l’échec de la campagne visant à renverser le régime de Bachar el-Assad et à provoquer une guerre civile en Syrie. Nasrallah a par ailleurs répondu à l’agitation arabo-régionale et internationale autour de la Syrie. Sa réponse se résume par l’équation suivante : « La stabilité d’abord, les réformes ensuite ».
Pour ce qui est de la situation interne libanaise, des sources du Hezbollah mettent en garde contre les risques pour l’unité nationale et l’unité de l’armée dus à l’attitude du Courant du futur, notamment après les déclarations du député Khaled Daher. Le feu vert pour de telles déclarations provient de Saad Hariri lui-même et de ses alliés qui recourent aux incitations confessionnelles pour atteindre leurs objectifs.
As Safir (29 août 2011)
Sateh Noureddine
Les pays de la Ligue arabe ont voulu avertir le régime syrien qu’ils seraient prêts à couvrir une intervention étrangère en Syrie, comme ils l’ont fait pour la Libye. L’arabisation de la crise n’a cependant pas de sens, car les pays arabes n’ont pas un poids politique important. De plus, ils n’ont ni la neutralité ni la compétence nécessaires pour s’aventurer dans l’expérience de la modernisation de la Syrie. La communauté internationale qui a encouragé les pays arabes à prendre l’initiative dans ce dossier ne cherchait pas une couverture politique arabe pour intervenir en Syrie : son intervention a déjà atteint son plus haut degré. L’arabisation n’est donc pas un prélude à l’internationalisation du dossier. En réalité, elle vise d’une part à ériger des obstacles supplémentaires face à l’Iran qui traite le dossier syrien comme une question de vie ou de mort, et d’autre part à proposer une alternative au rôle turc qui a perdu espoir de voir le régime syrien instaurer un véritable changement.
An Nahar (Quotidien libanais proche du 14-Mars, édition du 02 septembre 2011)
Paris, Samir Tuéni
Le Premier ministre libanais Najib Mikati a rencontré le ministre français des Affaires étrangères, Alain Juppé, en marge de la conférence de Paris sur la Libye. Les discussions ont porté sur les développements locaux et régionaux, mais aussi sur la possibilité d’une visite de Mikati à Paris à l’automne, selon des sources diplomatiques. Les sources soulignent que la participation de Mikati à la conférence sur la Libye rompt en quelque sorte l’isolement international imposé au gouvernement libanais depuis la parution de l’acte d’accusation du TSL. Toujours selon les mêmes sources, certains pays occidentaux préférèrent accueillir le Premier ministre libanais chez eux plutôt que de dépêcher des émissaires au Liban qui auraient peut-être à rencontrer des parties opposées au TSL. Il est à signaler que la présidence du Conseil des ministres n’a publié aucun communiqué sur les rencontres parisiennes de M. Mikati.
An Nahar (02 septembre 2011)
Rosanna Bou Mounsef
Le Liban devra relever de nombreux défis en ce qui concerne le dossier syrien, d’autant plus que le Conseil de sécurité semble se préparer à l’adoption d’une résolution contre le régime syrien. Cette résolution n’a pas encore été mise en marche en raison de l’opposition russe, cependant, des négociations sont actuellement en cours pour assouplir la position de la Russie. Le Liban ne peut pas prendre le parti de la Syrie. Avec l’augmentation des pressions internationales contre le régime syrien, personne ne comprendra les considérations internes qui dicteraient une telle position. Des mises en garde occidentales ont d’ailleurs déjà été exprimées au Liban et l’on peut s’interroger sur le prix que le Liban devra payer sur le plan international, mais aussi arabe, s’il va à contre-courant de la tendance internationale prédominante.
An Nahar (29 aout 2011)
Rosanna Bou Mounsef
La communauté internationale a profité des développements en Libye pour lancer deux messages au régime syrien : il subira le même sort s’il continue sur la même voie ; elle pourra désormais se consacrer pleinement à la situation en Syrie.
Cependant, et malgré les déclarations des dirigeants occidentaux appelant Bachar el-Assad à partir, le traitement de la crise syrienne à l’Onu montre que l’Occident ne se presse pas encore de trancher la question. Le compte à rebours effectif pour le régime syrien n’a pas encore commencé. La raison principale est que la bataille en Libye n’est pas encore tranchée et qu’en Syrie, l’armée continue à soutenir le régime. Cela risque de prolonger la crise, d’autant plus qu’une intervention militaire occidentale en Syrie est hors de question.
An Nahar (02 septembre 2011)
Abdel Karim Abou Nasr
Des sources diplomatiques européennes à Paris font état de trois stratégies pour une sortie de crise en Syrie —des stratégies qui sont au cœur des contacts américano-euro-turco-arabes—. D’abord, procéder à de véritables réformes, renoncer à l’option militaro-sécuritaire et à la répression des manifestants. Ces réformes devraient être engagées selon un calendrier précis, pour assurer le passage vers un régime démocratique pluraliste. Mais le régime du président Bachar el-Assad n’y est pas favorable. Ensuite, tâcher par tous les moyens de convaincre Assad de renoncer au pouvoir et de quitter la Syrie. Toutefois, rien n’indique que le président syrien est disposé à le faire. Enfin, faire perdurer la guerre intérieure (stratégie adoptée par le commandement syrien) dans l’espoir de venir à bout de la rébellion, et se contenter de réformes de façade. Mais c’est une stratégie qui mène à une impasse et ne mettra pas fin au mouvement de protestation.
Al Hayat (Quotidien saoudien, 29 aout 2011)
Hassan Haidar
Malgré leurs différences en termes de taille et d’intérêts, le Liban et la Russie traitent avec les évènements dans la région comme s’ils étaient sur une autre planète. Ils ignorent délibérément ce qui s’y passe, mettent en cause des faits qui ne peuvent plus être niés, prennent leurs conséquences à la légère et néglige la volatilité de cette situation. Si Moscou, à la façon dont il suit les évènements du Moyen-Orient, défend ses intérêts immédiats —une défense qui fait de la Russie le dernier défenseur international des dictatures, l’approche des élections présidentielles qui n’autorise aucune prise de risque politique— Beyrouth applique le principe de la tête dans le sable, en espérant échapper à la nécessité de réfléchir et de se préparer au nouveau visage de la région, surtout celui de la Syrie, où le régime s’isole et divise le peuple.
Le gouvernement libanais, qui ne bénéficie ni de ressources naturelles ni de moyens de pressions —à l’exception notable des armes du Hezbollah— s’est embourbé dans des positions éculées, distraits par des plans et des slogans inopinés, comme si le temps s’était arrêté à l’horloge syrienne. Les leaders de la majorité continuent de lorgner sur leur part du gâteau, portés par de misérables considérations électoralistes, corrompant les électeurs avec de l’électricité et de l’eau comme si ce gouvernement était voué à durer, ignorant que chez le grand frère, le changement est devenu inexorable.
L’Orient-Le Jour (Quotidien libanais francophone proche du 14-Mars, édition datée du 02 septembre 2011)
Dans une réponse écrite adressée au président français Nicolas Sarkozy, le Premier ministre Najib Mikati a remercié la France pour son soutien « permanent » au Liban et son « engagement constant à préserver son indépendance et sa souveraineté ». Le Premier ministre a réitéré le respect par le Liban de la légalité internationale et des résolutions onusiennes, « à commencer par la 1701. Au cours de ma dernière tournée au Liban-Sud, j’ai insisté auprès du commandement de la Finul sur l’engagement de notre gouvernement en ce sens et le renforcement de la coopération entre les Casques bleus et l’armée », écrit-il, condamnant l’attaque contre le contingent français.
« La participation de la France à la Finul transcende la simple amitié qui relie nos deux pays pour refléter la foi des Libanais dans le constant soutien de la France, surtout en cette période d’instabilité au Proche-Orient », ajoute-t-il.
Al Joumhouriya (Quotidien libanais proche du 14-Mars, édition du 27 aout 2011)
Selon des sources diplomatiques, les pays occidentaux doutent que le gouvernement libanais soit capable de traiter efficacement les dossiers sensibles. C’est un gouvernement d’expédition des affaires courantes. Cependant, l’Occident n’a pas d’opinion négative sur le Premier ministre Najib Mikati qui a pu par ses contacts internationaux assurer un filet de sécurité pour protéger son statut. Ces mêmes sources ne comprennent pas l’absence de Saad Hariri du Liban.
Ces mêmes sources affirment qu’il n’y a pas de craintes pour l’avenir ou la stabilité du Liban, et qu’aucun deal ne sera effectué à ses dépens. Le printemps arabes se répercutera positivement sur le Liban, ajoutent les sources diplomatiques.
Al Moustaqbal (Quotidien libanais appartenant à la famille Hariri)
Assaad Haidar
Au temps de l’ancien président Hafez el-Assad, la Syrie était l’alliée de l’Iran. Aujourd’hui, Bachar el-Assad est prisonnier de l’alliance avec l’Iran ; son maintien au pouvoir en dépend. La Syrie est donc devenue une carte aux mains de l’Iran. La position iranienne a beaucoup évolué. Des sources diplomatiques fiables indiquent que Téhéran est entré en contact avec des opposants syriens pour essayer de dresser un tableau de l’opposition syrienne : de qui est-elle composée, comment envisage-t-elle la relation avec l’Iran, quelles conditions pose-t-elle pour un retour au dialogue avec le régime ? Au Liban, le Hezbollah suit également de très près les développements en Syrie. Il a chargé ses centres de recherches de fournir des analyses sur l’évolution de la situation en Syrie.
Today’s Zaman (Quotidien turc, 29 aout 2011)
Alors que se tenait à Istanbul une réunion extraordinaire du groupe de contact sur la Libye, les dirigeants turcs en ont profité pour reprendre langue avec leurs homologues libanais. À la tête d’une délégation de parlementaires du Courant du futur, l’ancien Premier ministre Fouad Siniora était à Ankara où il a conversé pendant une heure et demie avec le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan. Il s’est ensuite rendu à Istanbul pour y rencontrer le chef de la diplomatie Ahmet Davutoglu à l’hôtel Conrad.
Plus tôt dans la journée, le ministre turc avait rencontré Wassim Kalajié, un conseiller du Premier ministre libanais Najib Mikati.
Le week-end précédent, au cours d’une visite en Afrique du Sud, Davutoglu a eu une conversation téléphonique avec l’ancien Premier ministre Saad Hariri au cours de laquelle il a été question des derniers développements dans la région. C’est Hariri qui a passé le coup de fil.
Ankara considère que la présence de Mikati au pouvoir est positive, que « c’est quelqu’un avec qui on peut discuter », affirme une source gouvernementale turque. « Mikati est quelqu’un qui surveille attentivement l’équilibre interne de son propre pays. C’est pourquoi les canaux sont toujours été ouverts avec le nouveau gouvernement libanais ». « Si les leaders libanais soutiennent l’approche de Bachar el-Assad en Syrie, le Liban pourrait suivre la même voie que Damas sur la scène internationale, celle de l’isolement », prévient cette même source ».
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