I. Introduction
1. Le présent rapport est soumis en application du paragraphe 12 de la résolution
57/113 A et du paragraphe 23 de la résolution 57/113 B de l’Assemblée générale, en
date du 6 décembre 2002, dans lesquels l’Assemblée générale a prié le Secrétaire
général de lui rendre compte, à sa cinquante-huitième session, des progrès réalisés
dans l’application de ces résolutions. Le rapport contient un résumé des principaux
faits nouveaux dans les domaines politique et humanitaire en Afghanistan, ainsi que
des activités de la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan
(MANUA), du 1er juillet 2002 à novembre 2003. Les questions mentionnées dans le
rapport sont examinées d’une manière plus détaillée dans les rapports périodiques
qui ont été soumis à l’Assemblée générale et au Conseil de sécurité en 2002 et 2003
(A/56/1000-S/2002/737, A/57/487-S/2002/1173, A/57/762-S/2003/333 et A/57/850-
S/2003/754 et Corr.1).
II. Application de l’Accord de Bonn
A. Renforcement des capacités du Gouvernement
et extension de son autorité
2. Au cours de l’année écoulée, l’Administration de transition afghane a appliqué
un certain nombre de mesures pour renforcer ses structures administratives et
étendre son autorité. L’opération interministérielle de budgétisation effectuée au
début de 2003 a été particulièrement importante pour la mise en place de systèmes
nationaux de prise de décisions (voir par. 49 ci-après).
3. Le Gouvernement central a adopté une série de réformes, notamment en
nommant de nouveaux superviseurs provinciaux des douanes, afin d’améliorer la
perception des recettes dans les provinces. Au cours du premier trimestre de
l’exercice budgétaire actuel, qui a commencé le 21 mars 2003, le montant des
recettes obtenu par le Gouvernement a dépassé le montant pour tout l’exercice
budgétaire précédent. Le Gouvernement prévoit d’obtenir au moins 200 millions de
dollars des États-Unis au cours de l’exercice budgétaire actuel. L’introduction de la
nouvelle monnaie afghane, achevée en janvier 2003, a été une autre réforme
cruciale. La stabilité générale de la monnaie à la suite de son introduction met en
évidence l’efficacité de cette réforme.
4. Des progrès ont été également réalisés dans la réforme de l’administration
civile. Le 20 mai 2003, le Conseil national de sécurité a convoqué à Kaboul 10 des
gouverneurs provinciaux les plus puissants du pays et deux commandants de région,
qu’il a mis en demeure de se conformer à une décision en 13 points (voir A/57/850-
S/2003/754, par. 3). Le Gouvernement a pris une mesure importante pour appliquer
cette décision le 13 août, lorsqu’il a remplacé les gouverneurs de deux provinces,
Kandahar et Zabol, qui s’étaient opposés à l’autorité centrale, et a retiré le titre
militaire du Gouverneur de Herat, Ismaël Khan. Le Président Karzai et le Ministère
de l’intérieur ont également réussi à remplacer des fonctionnaires corrompus et
incompétents aussi bien à Kaboul que dans les provinces. Toutefois, dans certains
cas, les nouveaux fonctionnaires nommés n’ont pas été acceptés par les titulaires de
ces postes. Cela implique que le Gouvernement central doit redoubler d’efforts pour
assurer que tous les fonctionnaires acceptent son autorité légale de nommer les
fonctionnaires et d’appliquer les décrets relatifs à l’administration civile.
5. La création, le 11 juin 2003, de la Commission indépendante chargée de la
réforme de l’Administration et de la fonction publique devrait également faciliter la
nomination et la promotion des fonctionnaires de l’État selon le critère du mérite
(voir A/57/850-S/2003/754, par. 5). La Commission sera habilitée à écarter les hauts
fonctionnaires corrompus ou non qualifiés. La mise en place, également en juin
2003, d’un Groupe de travail sur le paiement des salaires par le Ministère des
finances devrait permettre de simplifier les mécanismes de paiement, de lutter
contre la corruption, d’améliorer le taux de rétention des fonctionnaires, et de
renforcer la loyauté vis-à-vis du Gouvernement central.
6. La phase pilote du projet de recensement prévu par l’Accord de Bonn s’est
achevée au début de 2003. La première phase du recensement proprement dit, qui
consistait notamment à actualiser les cartes et à procéder au dénombrement
préliminaire de la population, a également été menée à bien dans les provinces de
Parwan, Kapisa et Logar, sous la direction de l’Office central de statistique de
l’Afghanistan et avec le concours du Fonds des Nations Unies pour la population
(FNUAP). La deuxième phase, à savoir le recensement national de la population,
commencera en 2004.
B. État d’avancement du processus de Bonn
Réforme constitutionnelle
7. L’élaboration d’une nouvelle constitution, prévue dans l’Accord de Bonn, a été
une tâche critique pendant la période considérée. La nouvelle constitution fournira
une base permanente pour le rétablissement de l’état de droit en Afghanistan et
définira un ordre politique permettant de satisfaire pacifiquement les aspirations des
Afghans.
8. Le processus d’élaboration a commencé avec la création en novembre 2002 de
la Commission de rédaction de la Constitution. En avril 2003, la Commission de
rédaction a soumis un projet préliminaire de constitution à la Commission d’examen
de la Constitution, établie par décret présidentiel le même mois. La Commission
d’examen comprend 35 membres, dont sept femmes, et est représentative de la
diversité professionnelle, religieuse, ethnique et régionale de la population afghane.
À la suite d’une campagne de sensibilisation qui a duré un mois, la Commission a
entrepris des consultations publiques dans les 32 provinces de l’Afghanistan ainsi
qu’en République islamique d’Iran et au Pakistan. Quelque 178 000 Afghans, dont
19 % de femmes, ont participé à plus de 556 réunions afin d’examiner le projet. En
outre, plus de 50 000 observations écrites ont été soumises. Les résultats de ces
consultations ont ensuite été incorporés par la Commission d’examen dans un projet
final de constitution qui a été publié le 3 novembre 2003. Le projet est diffusé dans
tout le pays avant d’être soumis à la Loya Jirga constitutionnelle aux fins de
ratification.
9. Le projet de constitution prévoit un président ayant des pouvoirs importants et
un parlement à deux chambres. Le respect des droits de l’homme fondamentaux, et
en particulier les droits énoncés dans la Déclaration universelle des droits de
l’homme, est mentionné dans le projet. Par ailleurs, il stipule que les lois du pays
doivent être conformes aux principes de l’islam. Le projet décrit des mesures de
transition, notamment la tenue d’élections présidentielles dans les six mois suivant
la ratification et d’élections législatives au plus tard un an après. Le projet a suscité
des réactions diverses. Un nombre important d’Afghans estiment que le projet
favorisera le processus de paix et renforcera l’état de droit. D’autre part, de
nombreux Afghans continuent à être favorables à une monarchie constitutionnelle.
Cette opinion est particulièrement forte parmi les Pashtouns. Le statut des langues
nationales est également controversé, le pashto et le dari seront les langues
nationales, alors que les langues des minorités n’ont aucun statut officiel. Il y a
également des controverses en ce qui concerne le rôle de l’islam, la protection des
droits de l’homme (que certains considèrent comme insuffisante dans le projet) et le
manque de délégation de pouvoirs aux régions.
10. La Loya Jirga constitutionnelle, qui doit commencer le 10 décembre 2003,
comprendra 500 délégués. Parmi ceux-ci, 344 seront élus au niveau provincial par
les 16 000 représentants de district enregistrés qui ont participé à la Loya Jirga
d’urgence en 2002 (voir A/56/1000-S/2002/737, par. 29). Cent six sièges
supplémentaires ont été réservés pour l’élection de représentants de catégories
spéciales, notamment les femmes, les réfugiés qui se trouvent au Pakistan et en
République islamique d’Iran, les personnes déplacées à l’intérieur du pays, les
Kuchis (nomades) et les Hindous et les sikhs. Le Président nommera les 50 délégués
restants, qui auront des connaissances spécialisées en droit ou en droit
constitutionnel, et dont la moitié sera constituée de femmes.
Processus électoral
11. L’Accord de Bonn prévoit que des élections se tiendront en juin 2004 et que
l’Organisation des Nations Unies effectuera une opération d’enregistrement des
électeurs avant ces élections. Étant donné qu’il n’y a jamais eu en Afghanistan
d’élection populaire moderne, les structures juridiques et institutionnelles ont dû
être créée ex nihilo. L’Administration de transition a donc établi le 26 juillet 2003
une Commission électorale afghane intérimaire comprenant six membres. La
Commission a commencé à collaborer avec la MANUA en vue de préparer le
lancement du projet d’enregistrement des électeurs. L’Organe mixte
d’administration des élections, créé également le 26 juillet, supervisera le processus
d’enregistrement des électeurs, y compris l’élaboration de règlements et de
directives, l’enregistrement provisoire des partis et la certification finale de la liste
des électeurs. L’Organe est composé de six commissaires électoraux intérimaires et
de cinq experts internationaux sur les questions électorales, dont le chef du Groupe
des élections de la MANUA.
12. En août 2003, l’Organisation des Nations Unies et le Gouvernement afghan
ont présenté aux donateurs un budget de 78 millions de dollars pour l’exécution du
projet d’enregistrement des électeurs. Ce budget, qui doit être alimenté par des
contributions volontaires, doit encore recevoir plus de 50 % des fonds requis. En
novembre 2003, des fonds d’un montant de 36,8 millions de dollars avaient été
reçus ou annoncés. Les retards de financement sont venus s’ajouter à certains autres
problèmes d’ordre logistique, culturel, géographique et politique. Par conséquent, le
lancement du projet d’enregistrement des électeurs a été reporté du 15 octobre au
1er décembre. Des préoccupations concernant la sécurité à la suite de la pose d’une
bombe dans une voiture piégée devant le bureau électoral de la MANUA à Kandahar
en novembre 2003 ont obligé la Mission à réduire le nombre d’équipes qui devaient
être déployées le 1er décembre. Selon le plan révisé, des équipes d’enregistrement
seront déployées dans les huit centres régionaux de l’Afghanistan, mais au départ,
l’enregistrement des électeurs se fera principalement dans les localités où des
élections provinciales pour la Loya Jirga constitutionnelle seront tenues dans des
conditions rigoureuses de sécurité.
13. En fonction de la situation financière et de la sécurité, des équipes
d’enregistrement supplémentaires seront déployées au cours de trois phases
distinctes. La première phase portera sur les centres régionaux avec environ
70 équipes. La deuxième phase ajoutera 79 équipes supplémentaires et s’étendra aux
chefs-lieux de province. La troisième phase ajoutera environ 150 équipes
supplémentaires, dont certaines seront mobiles et seront déployées dans des zones
rurales isolées.
14. Un projet complémentaire de 9 millions de dollars pour la sécurité de
l’enregistrement a également été élaboré et présenté aux donateurs. Ce projet
appuiera la formation et le déploiement de la police afghane avec les équipes
d’enregistrement. Ce projet est intégralement financé grâce au Fonds d’affectation
spéciale pour le maintien de l’ordre en Afghanistan.
Réforme du secteur judiciaire
15. Dans le contexte de la transition fragile de l’Afghanistan vers la paix, la
réforme du secteur judiciaire est inséparable de la sécurité, et partant de réformes
parallèles de l’armée, de la police et du système pénitentiaire. En particulier,
l’objectif de la réforme du secteur judiciaire est de créer des institutions judiciaires
impartiales, responsables, viables et permanentes.
16. L’Administration de transition a créé la Commission de la réforme judiciaire,
qui a commencé ses travaux en novembre 2002 (voir A/57/762-S/2003/333, par. 37,
et A/57/487-S/2002/1173, par. 25). L’Italie, qui est le principal pays donateur pour
le secteur judiciaire, a organisé à Rome les 19 et 20 décembre 2002 une conférence
où les donateurs ont fait des annonces de contributions de 30 millions de dollars
pour un appui financier et technique.
17. La Commission de la réforme judiciaire a achevé en juin 2003 une étude
préliminaire des besoins du secteur judiciaire, y compris l’infrastructure physique,
les effectifs, les procédures, la justice traditionnelle et le système pénitentiaire dans
10 provinces. Un certain nombre d’autres initiatives ont été lancées, notamment des
stages de formation pour les juges et les procureurs, la remise en état de
l’infrastructure, l’indexation et la révision des lois, et l’éducation et la
sensibilisation juridiques.
Situation d’ensemble en matière de sécurité
18. La sécurité reste un sujet de préoccupation majeure dans la plus grande partie
du pays. La criminalité non contrôlée, la recrudescence des combats entre les
factions et les activités liées au commerce illégal de stupéfiants ont toutes eu des
conséquences négatives pour la sécurité. La principale source d’instabilité demeure
les activités terroristes menées par des personnes soupçonnées d’appartenir aux
Taliban, à Al-Qaida et aux partisans de Gulbuddin Hekmatyar. Ces groupes ont pris
pour cibles des membres de l’Administration de transition et de la communauté
internationale. Au cours de l’année écoulée, les attaques contre le personnel
international et national des organismes d’assistance se sont intensifiées. En mars
2003, un fonctionnaire international du Comité international de la Croix-Rouge a été
assassiné dans la province d’Uruzgan et, au cours du même mois, un visiteur italien
a été tué dans la province de Zabol. Plusieurs véhicules et locaux de l’Organisation
des Nations Unies et d’organisations non gouvernementales ont été la cible de tirs
isolés et d’attaques à l’explosif qui ont entraîné, dans certains cas, des pertes en vies
humaines. Au début de l’année, les activités de déminage ont été suspendues à la
suite d’une série d’embuscades mortelles contre des démineurs afghans. Le 7 juin
2003, la Force internationale d’assistance à la sécurité a subi l’attaque la plus
mortelle qu’elle ait connue depuis son déploiement : un attentat-suicide à la voiture
piégée a été perpétré contre un bus de la Force à Kaboul, provoquant la mort de
quatre soldats et blessant 29 autres personnes. Malheureusement, le mois de
novembre 2003 a été marqué par une série d’attaques contre le personnel et les
installations des Nations Unies, qui ont culminé par le meurtre d’un fonctionnaire
international du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) à
Ghazni le 16 novembre.
19. Dans le sud et le sud-est du pays, en particulier dans les zones frontalières, les
attaques terroristes contre les forces gouvernementales, les organisations non
gouvernementales et les Afghans dont on estime qu’ils travaillent pour le
Gouvernement ou l’appuient se sont intensifiées. Les forces de la coalition et les
forces de l’armée nationale afghane ont effectué des opérations pour découvrir des
groupes armés et empêcher les infiltrations à travers la frontière. Néanmoins, afin de
garantir la sécurité de son personnel, l’Organisation des Nations Unies a imposé des
restrictions strictes sur les déplacements dans la région sud (voir A/57/850-
S/2003/754, par. 24). À la suite des événements de la mi-novembre 2003,
l’Organisation des Nations Unies a suspendu les missions effectuées par la route et
les mouvements du personnel dans les régions concernées et a réduit ses effectifs
internationaux. Bien qu’elles soient nécessaires, ces précautions limitent
certainement la capacité de l’Organisation des Nations Unies d’exécuter les
programmes et de soutenir le processus de paix.
20. Les rivalités entre les factions armées continuent d’être une source
d’insécurité. Des accrochages entre des factions rivales dans le nord ont entraîné
l’établissement au début de 2003 d’une Commission mixte de la sécurité, à laquelle
la MANUA participe. Parmi ses succès, la Commission a pu négocier des cessez-le-feu
à la suite du déclenchement de combats à Maymana, dans la province de Faryab,
en avril 2003, et à Mazar-e Charif, dans la province du Balkh, en mai 2003.
Néanmoins, les tensions restent à un niveau élevé et des solutions durables n’ont pas
encore été trouvées.
Réforme du secteur de la sécurité
21. Au cours des huit derniers mois, le Gouvernement a entamé le processus de
réforme des institutions de la sécurité nationale. Ce processus requiert la
coordination de cinq activités étroitement liées : a) le désarmement, la
démobilisation et la réinsertion des factions armées ; b) la constitution d’une
nouvelle armée nationale ; c) l’entraînement d’une nouvelle force de police nationale
et des gardes frontière ; d) le redressement du secteur judiciaire ; et e) la lutte contre
le trafic de stupéfiants.
22. Une impulsion a été donnée en vue de la réforme par le décret présidentiel du
1er décembre 2002 portant création de l’armée nationale afghane et prévoyant le
désarmement, la démobilisation et la réinsertion de toutes les forces des factions
ainsi que la réforme du Ministère de la défense. Malheureusement, le rythme de la
réforme a été plus lent que prévu. En fait, chaque étape du processus s’est heurtée à
l’opposition des dirigeants politiques au niveau le plus élevé.
23. Néanmoins, des progrès importants ont été réalisés grâce à la mise en oeuvre
en septembre 2003 d’un plan de réforme du Ministère de la défense. Le plan
prévoyait le remplacement des titulaires de 22 postes du " premier niveau " du
Ministère de manière à ce que les responsables soient plus représentatifs de la
diversité de l’Afghanistan. Cela impliquait, en particulier, de réduire l’influence de
la faction panshiri du Ministre de la défense. Toutefois, après sa mise en oeuvre, la
réforme a été moins radicale qu’on ne l’avait espéré. Par conséquent, de nombreux
Afghans continuent à croire que le pouvoir réel se trouve dans les mains d’une seule
faction. Ce sentiment est particulièrement fort parmi la population pashtoune du
sud. Afin d’obtenir la confiance de nombreux Afghans, le nouveau Ministère de la
défense doit démontrer qu’il applique des politiques au niveau national plutôt qu’au
niveau des factions. En particulier, les nouveaux responsables qui ont été nommés
doivent être investis d’une autorité effective dans leur domaine de responsabilité.
Désarmement, démobilisation et réinsertion
24. Comme il a été indiqué ci-dessus, un certain nombre d’initiatives de réforme
dépendent de la réforme du Ministère de la défense. Le désarmement, la
démobilisation et la réinsertion (DDR) des factions armées est un programme
crucial qui ne pouvait pas être exécuté tant que le Ministère de la défense était de
toute évidence contrôlé par une seule faction. En l’absence d’un programme de
DDR, l’insécurité persistera et la participation de la population au processus
constitutionnel et aux élections nationales sera entravée. D’autre part, un
programme de DDR efficace peut contribuer à créer les conditions nécessaires pour
la mise en place d’un système judiciaire impartial et d’une armée et d’une police
nationales efficaces.
25. En octobre 2003, on a estimé que la réforme du Ministère de la défense avait
atteint un niveau suffisant pour permettre le lancement de deux projets pilotes de
DDR. Dans le cadre du premier projet pilote, qui a été lancé à Kunduz le 24 octobre,
647 soldats ont été démobilisés et incorporés dans différents projets de réinsertion.
Le deuxième projet pilote a commencé à Gardez le 9 novembre, et 586 soldats ont
été démobilisés. Le programme complet de DDR devrait commencer au début de
2004. Au total, le programme vise à désarmer 40 000 soldats, dont 35 000 seront
réinsérés dans la société au cours de la première année (les 5 000 autres soldats
seront formés et incorporés dans la nouvelle armée nationale). Quelque
100 000 soldats seront démobilisés au cours du programme pluriannuel.
26. Les préparatifs des volets technique et opérationnel du programme de DDR ont
été fortement appuyés par le Gouvernement japonais, qui est le pays chef de file
pour cette activité. Le 22 février, le Japon a organisé une conférence de donateurs à
Tokyo afin de mobiliser un appui international, qui a permis d’obtenir des annonces
de contributions s’élevant au total à 50,7 millions de dollars.
Armée nationale afghane
27. Sous la supervision des États-Unis d’Amérique, 11 bataillons de l’armée
nationale afghane, comptant 6 500 soldats au total, ont été constitués. À terme, les
forces afghanes devraient compter 70 000 hommes. Quatre bataillons seront prêts
pour assurer la sécurité pendant la Loya Jirga constitutionnelle en décembre 2003.
En juillet 2003, deux bataillons de l’armée nationale afghane se sont joints aux
forces de la coalition dirigées par les États-Unis à Zurmat, dans la province de
Paktia, afin de combattre des éléments soupçonnés d’appartenir aux Taliban et
d’autres rebelles. Un bataillon a également été déployé à Mazar-e Charif afin de
contribuer à la stabilisation de la zone. Les unités de l’armée nationale afghane
déployées temporairement lors de missions d’entraînement dans le pays, notamment
à Gardez et Bamian, ont créé une impression favorable chez les Afghans, qui ont pu
constater leur discipline et leur professionnalisme.
Réforme de la police et du système pénitentiaire
28. Parmi les institutions afghanes chargées de la sécurité, le Ministère de
l’intérieur est celui qui a mis en oeuvre les réformes les plus ambitieuses. En
application du décret présidentiel du 6 avril 2003, le Ministère a commencé à
réaménager sa structure interne et il a élaboré un plan quinquennal visant à créer
une police nationale de 50 000 agents professionnels et un corps de gardes frontière
de 12 000 agents (la tutelle des gardes frontière a été transférée du Ministère de la
défense au Ministère de l’intérieur en janvier 2003). La formation des agents de
police, ainsi que des unités spécialisées, est assurée dans le cadre du projet allemand
d’appui à la police. Depuis mai 2003, les États-Unis d’Amérique exécutent un
programme complémentaire de formation d’instructeurs de la police et de
perfectionnement des agents en poste à Kaboul. Le Ministre de l’intérieur a
également créé en avril 2003 un service autonome chargé des droits de l’homme. Ce
service a enquêté sur plus de 70 cas de violations des droits de l’homme qui auraient
été commises par des membres des forces de l’ordre depuis la fin du mois de mai.
29. Le transfert, du Ministère de l’intérieur au Ministère de la justice, des
attributions relatives aux services pénitentiaires nationaux est en cours. La
Commission de réforme de la justice procède actuellement à une enquête en vue de
déterminer quelles installations pénitentiaires devraient être rénovées et mises en
conformité avec les normes internationales minima. Le 17 mai, un accord d’une
durée de deux ans et portant sur la réforme du système pénitentiaire en Afghanistan
a été signé par le Ministère de la justice et l’Office des Nations Unies contre la
drogue et le crime.
30. Le financement de la réforme des services de police, y compris les traitements
des agents de police, est assuré par l’entremise du Fonds d’affection spéciale pour
l’ordre public en Afghanistan administré par le Programme des Nations Unies pour
le développement.
Équipes de reconstruction de province
31. À compter de décembre 2002, les forces de la coalition conduite par les Etats-Unis
ont commencé à dépêcher des équipes de reconstruction de province en dehors
de Kaboul (à Bamian, Gardez et Kunduz). Ces équipes ont aidé à la reconstruction
et contribué à l’instauration d’un climat général de sécurité, par le renforcement de
la confiance, l’aide à l’extension de l’autorité de l’État et la création d’une instance
de formation puis de la mise en place de nouvelles institutions de sécurité. La
MANUA, en étroite collaboration avec les équipes de reconstruction de province, a
aidé ces dernières à pourvoir aux besoins de sécurité de l’Afghanistan en leur
proposant des services tels que la formation des policiers et la remise en état des
infrastructures, de l’administration et des transports.
32. Un certain nombre de pays se sont dits intéressés par la constitution d’équipes
supplémentaires. Il s’agit, notamment, de la Nouvelle-Zélande, qui a pris le
commandement de l’équipe de Bamian, et de l’Allemagne, qui a dépêché une équipe
à Kunduz. Le Royaume Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord avait dépêché
auparavant à Mazar-e Charif une équipe qui a contribué activement à soutenir les
activités de médiation et de désarmement de la Commission mixte de sécurité (voir
plus haut, par. 20). Huit équipes supplémentaires doivent être déployées d’ici au
début de 2004. La priorité est accordée à la création d’un cordon d’équipes à travers
la région sud instable de l’Afghanistan, à Kandahar, Khost, Kunar et Zabul.
Force internationale d’assistance à la sécurité
33. L’Allemagne et les Pays-Bas ont pris la relève de la Turquie à la tête de la
Force internationale d’assistance à la sécurité (FIAS) en février 2003. Six mois
après, le 11 août 2003, le contrôle de la FIAS a été transféré à l’Organisation du
Traité de l’Atlantique Nord (OTAN). Sous la direction de l’OTAN, la FIAS a gagné
en stabilité et en continuité, et il n’est plus nécessaire de rechercher tous les six
mois un nouveau pays auquel confier la direction de la Force, sans parler de la
meilleure intégration du commandement et de l’appui logistique. Le mandat de la
FIAS demeure le même sous le commandement de l’OTAN et des pays qui ne font
pas partie de l’OTAN continuent de fournir des contingents. La présence de la FIAS
a beaucoup contribué au climat de sécurité qui règne à Kaboul et est bien accueillie
par la population.
34. Le 13 octobre 2003, le Conseil de sécurité a adopté sa résolution 1510 (2003)
autorisant le déploiement de la FIAS en dehors de Kaboul, ce que le Gouvernement
afghan et l’ONU demandaient instamment depuis le début de 2002. La création sous
commandement de la FIAS d’une équipe de reconstruction de province allemande à
Kundunz (voir plus haut, par. 32) représente le premier déploiement de la FIAS en
dehors de Kaboul. Il importe toujours que d’autres pays fournissent les effectifs et
les ressources nécessaires pour continuer d’étendre la présence de la FIAS à d’autres
grandes villes afghanes où sa présence est on ne peut plus nécessaire.
Lutte contre les stupéfiants
35. Le Gouvernement de transition a prouvé qu’il était résolu à lutter contre la
production de drogues illicites et s’est déclaré disposé à s’associer aux efforts
multilatéraux de lutte contre les stupéfiants. Cela étant, selon l’Afghanistan Opium
Survey 2003 de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime,
l’Afghanistan demeure le plus important producteur d’opium au monde. Qui plus
est, les producteurs d’opium se sont adaptés aux campagnes d’éradication. Ainsi,
pour la saison de plantation de 2003, la culture du pavot s’est apparemment étendue
à plusieurs nouvelles provinces tout en diminuant dans les zones traditionnelles de
culture de Helmand, Kandahar, Nangarhar et Uruzgan.
36. Avec le soutien de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime et
du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, pays chef de file pour la
lutte contre les stupéfiants, le Gouvernement a pris au cours de la période à
l’examen plusieurs mesures en vue de lutter contre la production illicite de
stupéfiants. Une direction de la lutte contre les stupéfiants a été créée au sein du
Conseil national de sécurité de l’Afghanistan en octobre 2002 pour fournir un appui
et des conseils techniques aux ministères concernés et veiller à ce que les objectifs
nationaux dans ce domaine soient atteints conformément au calendrier prévu. En
mai 2003, l’Afghanistan a adopté une stratégie décennale de lutte contre les
stupéfiants visant à éliminer la production, la consommation et le trafic de
substances illicites à destination, à l’intérieur ou en provenance du pays. Par
ailleurs, une direction de la police des stupéfiants a été créée au sein du Ministère de
l’intérieur. Une campagne d’élimination des cultures a donné quelques résultats
concrets, mais il a fallu l’interrompre dans certaines régions, devant la forte
opposition des cultivateurs.
37. Le sous-développement rural, l’absence d’état de droit et le peu de ressources
financières disponibles pour assurer l’application des lois et susciter des modes de
subsistance différents continuent de limiter la capacité du Gouvernement à lutter
contre les substances illicites. Les solutions régionales au problème des drogues
sont dès lors d’autant plus importantes. En mai 2003, la Conférence internationale
sur les itinéraires de la drogue entre l’Asie centrale et l’Europe a rassemblé les
représentants des pays touchés par les drogues produites en Afghanistan afin de
promouvoir la coopération internationale dans ce domaine et de renforcer les
mesures d’interdiction et les politiques de réduction de la demande dans les pays
touchés.
Relations internationales
38. Les tensions entre l’Afghanistan et le Pakistan ont subsisté tout au long de la
période à l’examen. L’un des problèmes clefs a trait à l’infiltration à travers la
frontière pakistanaise d’éléments hostiles au Gouvernement afghan. Rencontrant le
Président Karzai, le 22 avril 2003, le Président Musharraf s’est déclaré disposé à
coopérer avec l’Afghanistan dans le domaine de la sécurité. Les informations faisant
état, à la fin de juin et au début de juillet, d’incursions de forces militaires
pakistanaises en territoire afghan ont toutefois réduit à néant ces efforts de
coopération. Ces informations sont à l’origine de la mise à sac par la foule de
l’ambassade pakistanaise à Kaboul, le 8 juillet 2003, acte inexcusable et qui a
ramené à leur point le plus bas des relations bilatérales qui, autrement, s’étaient
améliorées au cours de cette période, qu’il s’agisse du commerce, de l’assistance ou
du rapatriement des réfugiés. La constitution, en avril 2003, d’une commission
tripartite regroupant l’Afghanistan, le Pakistan et les États-Unis d’Amérique a
contribué à atténuer, en s’attaquant à ses causes sous-jacentes, la tension entre les
deux pays voisins. S’agissant de la région en général, il importe toujours que les
sept signataires de la Déclaration de Kaboul sur les relations de bon voisinage de
décembre 2002 respectent et consolident les engagements qu’ils ont pris d’oeuvrer
en faveur de la stabilité politique régionale et du bien-être économique mutuel.
C. Droits de l’homme
Situation générale des droits de l’homme
39. L’état de droit n’étant toujours pas une réalité en Afghanistan, les violations
des droits de l’homme sont malheureusement monnaie courante. Au cours de la
période à l’examen, la MANUA a été saisie de nombreuses plaintes faisant état
d’actes d’intimidation politique et elle a enquêté à ce sujet. Souvent, il s’agit des
médias, de la société civile et des partis politiques qui font état d’atteintes à leur
liberté d’expression. Ces violations ont été constatées essentiellement à Kaboul,
Herat et, dans une moindre mesure, à Mazar-e Charif. Cette augmentation apparente
du nombre des violations depuis quelques mois est particulièrement inquiétante au
moment où s’engagent le processus de réforme constitutionnelle et les préparatifs du
scrutin national. La légitimité de ces processus est tributaire d’une participation sans
entrave de tous les Afghans.
40. Étant donné la persécution et le déplacement forcé de groupes minoritaires, de
Pashtounes en particulier, dans le nord et l’ouest, une commission du rapatriement
pour la région nord a été créée en octobre 2002. Un groupe de travail de cette
commission, qui a effectué récemment une mission dans les provinces de Faryab,
Samangan, Balkh, Jowzjan et Sar-i-Pul, a constaté que la situation dans la région
était de manière générale propice au retour des réfugiés et des personnes déplacées,
mais que dans plusieurs districts, les conditions de sécurité étaient encore
mauvaises. Toutefois, de nombreuses personnes déplacées dans le sud ont fait savoir
qu’elles n’étaient pas disposées à retourner dans leurs régions d’origine, dans le
nord, tant que leur sécurité ne pouvait pas être garantie, qu’il n’était pas mis fin à
l’immunité des commandants locaux et que des programmes de démobilisation-désarmement-
réinsertion n’étaient pas mis en oeuvre.
41. Une analyse préliminaire de la fosse commune de Dasht-i-Layli a été effectuée
en février 2003 par les spécialistes en médecine légale du Haut Commissariat des
Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH) (voir A/57/762-S/2003/333, par. 43
et 44 et A/57/487-S/2002/1173, par. 21). Les travaux n’ont pas été poussés plus
avant parce qu’il n’était pas encore possible de garantir la sécurité du site ou des
témoins éventuels. Cela étant, il est important à cet égard, sur le plan des symboles
comme sur celui de la dissuasion de violations aussi manifestes des droits de
l’homme, que le Gouvernement ait pris le 10 février 2003 la décision importante de
ratifier la Convention portant création de la Cour pénale internationale.
Commission indépendante des droits de l’homme en Afghanistan
42. Tout au long de l’année écoulée, la Commission indépendante des droits de
l’homme en Afghanistan, soutenue par la MANUA et le HCDH, s’est employée à
perfectionner ses moyens de traitement des requêtes, des plaintes et des enquêtes sur
les violations des droits de l’homme. L’aptitude de la Commission à être le porte-parole
efficace des victimes de violations a été renforcée par ses liens avec l’ONU.
La Commission a également commencé à étendre ses opérations à tout le pays à la
suite de l’ouverture de sept annexes dans les différentes régions entre mars et mai
2003. L’arrivée du conseiller technique principal de la Commission a facilité les
travaux de planification stratégique et de hiérarchisation des activités. La
Commission indépendante des droits de l’homme a consulté la Commission pour la
réforme de la justice et la Commission constitutionnelle pour veiller à ce que cette
dernière prenne en compte les préoccupations relatives aux droits de l’homme, et
elle a également organisé un certain nombre de séminaires d’éducation et de
formation aux droits de l’homme à l’intention d’un large éventail de publics,
notamment les agents des ministères, les journalistes, les mollahs et théologiens et
la police nationale. Par ailleurs, un groupe consultatif des droits de l’homme, créé
dans le cadre des consultations sur le budget du développement national et présidé
par la Commission, a permis aux représentants du Gouvernement, des donateurs, des
Nations Unies et des ONG de disposer d’une enceinte pour la coordination
mensuelle sur les questions plus larges relatives aux droits de l’homme.
D. Parité
43. Les femmes ont pris une part active aux préparatifs de la Loya Jirga
constitutionnelle et à l’inscription sur les listes électorales nationales. Le Ministère
des affaires féminines, la MANUA, le Fonds de développement des Nations Unies
pour la femme et des organisations de la société civile organisent depuis plusieurs
mois des réunions consacrées à des questions telles que le rôle des femmes dans la
réforme constitutionnelle (voir plus haut, par. 8) et juridique et dans les élections.
Le processus d’inscription sur les listes électorales, par exemple, comprend un
certain nombre de mesures spécifiquement destinées à favoriser la démarginalisation
des femmes.
44. Le 8 mars 2003, la Journée internationale de la femme a été célébrée en
coordination avec le Ministère des affaires féminines. Une résolution a été adoptée
qui reconnaît le rôle important joué par les femmes dans la reconstruction du pays.
L’engagement de l’Afghanistan en faveur des droits fondamentaux des femmes a été
renforcé par la ratification, le 4 avril 2003, de la Convention sur l’élimination de
toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes.
45. Il n’en demeure pas moins que, en Afghanistan, les femmes continuent de
buter sur des obstacles non négligeables. L’intimidation, les restrictions à la liberté
de se déplacer, les mariages forcés, les crimes d’honneur et l’incarcération
" protectrice " sont des réalités, en particulier dans les zones rurales où le
conservatisme social est de rigueur. Dans ces zones, le danger pour les femmes est
aussi constitué par les commandants locaux qui violent leurs droits et commettent
des agressions sexuelles en toute impunité. Les femmes réfugiées et les veuves
courent aussi des risques particuliers liés à l’absence de sécurité ainsi qu’aux
difficultés physiques et psychologiques.
III. Secours, relèvement et reconstruction
46. Au cours de la période à l’examen, l’Afghanistan a fait des progrès certains
pour ce qui est du relèvement après la guerre. Le produit intérieur brut a augmenté
de 30 % entre 2002 et 2003 et devrait augmenter encore de 20 % en 2004. Entre
autres réalisations, il convient de citer la remise en état du système national
d’enseignement primaire et la bonne gestion de l’une des plus importantes
entreprises de rapatriement de réfugiés jamais soutenues par les Nations Unies (voir
plus loin, par. 64 à 67). De sérieuses difficultés subsistent néanmoins, la plus
importante étant de créer un environnement sûr dans le sud de l’Afghanistan afin
que les activités de reconstruction puissent avoir lieu. Tout aussi capitaux sont les
efforts faits par les autorités centrales pour étendre leur autorité, améliorer leur
capacité administrative et dispenser des prestations socioéconomiques à l’échelle
nationale.
47. Le schéma du relèvement après la guerre figure dans le budget du
développement national de l’Afghanistan. Pour l’année en cours, ce budget est de
1,8 milliard de dollars des États-Unis. Au milieu du mois de septembre, les montants
que les donateurs s’étaient engagés à verser au budget de développement
représentaient au total 1,2 milliard de dollars. Sur ce total, 529 millions de dollars
ont été versés, ce qui représente 29 % des crédits nécessaires et 40 % des montants
promis par les donateurs. Ce déficit de financement signifie que le taux d’exécution
de nombreux programmes demeure inférieur aux prévisions. Le risque de " lassitude
des donateurs " est d’autant plus préoccupant que le budget de développement de
l’année prochaine doit passer à 2,5 milliards de dollars compte tenu de
l’accélération de la mise en oeuvre de projets plus importants.
48. L’aide que les Nations Unies apportent à l’Afghanistan a pour cadre le
Programme d’assistance transitoire pour l’Afghanistan. Lancé en décembre 2002, ce
programme a permis d’établir des priorités et des stratégies en vue d’une assistance
internationale coordonnée aux efforts de secours, de relèvement et de
reconstruction. Il résulte d’un accord entre l’Administration transitoire et les
Nations Unies pour faire en sorte que la programmation de l’aide humanitaire des
Nations Unies aille dans le sens des priorités définies par le Gouvernement dans le
budget du développement national et renforce la capacité du Gouvernement à
exécuter ce budget. Pour la période allant de janvier 2003 à mars 2004, le
Programme d’assistance transitoire sollicitait au départ 815 millions de dollars,
montant qui a été par la suite ramené à 715 millions de dollars compte tenu du
regroupement du Programme avec le budget de développement national. En octobre
2003, les contributions reçues représentaient quelque 360 millions de dollars des
États-Unis, soit à peine plus de 50 % du montant révisé des ressources nécessaires
pour la mise en oeuvre du Programme d’assistance transitoire. Il reste donc à
trouver un montant supplémentaire de 354 millions de dollars.
49. Afin de renforcer la collaboration en matière de programmes entre
l’Organisation des Nations Unies et le Gouvernement, les deux parties sont
convenues de procéder périodiquement à des examens conjoints des programmes.
Au cours du premier de ces examens, à la fin de septembre 2002, il a été demandé
aux organismes de présenter à un comité interministériel leurs plans respectifs pour
2003. Cet examen à mi-parcours avait pour objet d’évaluer l’exécution du budget de
développement de l’année en cours, d’identifier les principaux déficits de
financement et de déterminer les enseignements à tirer. Il est apparu à cette occasion
que le budget de développement national est en train de devenir le principal
instrument d’élaboration des politiques par le Gouvernement et que le Groupe
consultatif est en train de devenir le principal mécanisme de coordination des
interventions du Gouvernement, des donateurs et des organismes des Nations Unies.
50. En juin 2003, le Ministère du réaménagement et du développement des zones
rurales a lancé le Programme national de développement de proximité (voir
A/57/850-S/2003/333, par. 8). Sous la conduite des gouverneurs de province, des
ateliers de planification locale ont permis de définir les priorités de développement à
l’échelon des districts dans 21 provinces. Au moins un projet prioritaire sera financé
en 2003. Le Ministère du réaménagement et du développement des zones rurales, en
coopération avec le Ministère des finances, a également mis en route le Programme
national de solidarité qui vise à renforcer les capacités de développement à
l’échelon communautaire. Dix-neuf ONG nationales et internationales ont obtenu
des contrats d’un an en tant que " partenaires facilitateurs " dans 29 provinces, et
d’autres contrats couvrant les trois provinces restantes devraient être accordés
incessamment. Au cours de l’année prochaine, quelque 6 900 villages dans 96
districts participeront à ce programme (voir A/57/850-S/2003/333, par. 9).
A. Assistance pendant la saison d’hiver
51. Près de 2,2 millions d’Afghans très vulnérables, essentiellement dans les hauts
plateaux du nord, de l’ouest et du centre, ont bénéficié d’une assistance pendant la
saison d’hiver au cours de la période à l’examen. Dans les zones rurales, une
attention particulière est portée aux communautés isolées. Dans les zones urbaines,
la priorité est accordée aux rapatriés et aux personnes déplacées privées de logement
convenable ou de mécanismes de soutien, ainsi qu’aux familles extrêmement
vulnérables. La fourniture de cette assistance a été facilitée par la création d’une
commission gouvernementale de préparation à la saison d’hiver, placée sous la
direction du Ministre du réaménagement et du développement des zones rurales.
Des agents des Nations Unies ont été également détachés auprès d’administrations
provinciales pour faciliter cette assistance. Les besoins autres qu’alimentaires ont
été satisfaits et 95 % des vivres nécessaires étaient en place préalablement à février
2003. Le Ministère et les ONG avec lesquelles il collabore ont procédé à la
réparation d’urgence du tunnel de Salang et la Cellule conjointe de logistique et le
Bureau des services d’appui aux projets de l’ONU ont effectué des réparations sur
d’autres itinéraires, si bien que les routes sont restées accessibles pendant toute la
saison d’hiver.
B. Agriculture
52. La récolte de céréales de 2002 était en augmentation de 83 % par rapport à
celle de l’année précédente et à peine inférieure à celle de 1998, avant la sécheresse.
En 2003, la production céréalière a encore augmenté de 50 % en raison des pluies
abondantes et de la mise en exploitation de terres précédemment inutilisées. Quinze
pour cent de la production agricole afghane provient de terres non irriguées ; cette
année, près de 31 % de la récolte de blé provient de ces terres, contre 5 % seulement
en 2002. Les fortes précipitations ont également incité les cultivateurs à exploiter
des terres marginales, qui étaient normalement utilisées comme pâturage, dans
certaines zones. Cela étant, il ne sera peut-être pas possible de maintenir l’avenir de
tels niveaux de production sur les terres non irriguées.
C. Aide et sécurité alimentaires
53. En juin 2003, 535 000 tonnes de produits alimentaires avaient été distribuées à
près de 10 millions de personnes, notamment des compléments alimentaires, des
repas scolaires et des rations distribuées aux fonctionnaires. On estime à 6 millions
le nombre des Afghans qui ont encore besoin d’une aide alimentaire pour le restant
de l’année 2003. Des déficits alimentaires importants subsistent parmi les
populations situées dans des zones reculées, les personnes déplacées et les rapatriés
de fraîche date, mais le nombre des intéressés est nettement inférieur à ce qu’il était
en 2002, en raison des pluies plus abondantes et du début de reprise économique.
L’insécurité alimentaire a été néanmoins accentuée dans certaines régions du pays
par la dégradation de l’environnement et, dans le sud et le sud-ouest, par la
poursuite de la sécheresse.
54. Tout un ensemble de programmes d’aide alimentaire en cours permettent de
veiller à ce que les besoins dans ce domaine soient satisfaits. L’Afghanistan étant un
pays essentiellement agraire, la majorité des projets d’aide alimentaire porte
essentiellement sur le rétablissement des possibilités de production agricole, la
remise en état des terres agricoles, les réserves de semence, les systèmes
d’irrigation, la remise en état des terres de parcours et la reconstitution des cheptels,
ainsi que la protection de l’environnement. Des initiatives spéciales sont axées sur
les besoins particuliers des groupes vulnérables, notamment les populations
nomades kuchi, dont le mode de vie traditionnel a beaucoup souffert des années de
sécheresse et de conflit.
D. Santé et nutrition
55. Durant la période considérée, le Ministère de la santé s’est employé à faire en
sorte que la grande majorité de la population rurale puisse bénéficier de soins de
santé primaires d’ici à la fin de 2003 dans le cadre d’un programme de prestations
de santé de base, financé par la Banque mondiale, l’Agency for International
Development des États-Unis (USAID), l’Union européenne et le Fonds des Nations
Unies pour l’enfance (UNICEF). Afin de lutter contre la mortalité maternelle en
Afghanistan, qui est la plus élevée du monde, le Ministère de la santé met en place
des centres de soins obstétriques d’urgence dans chaque province, avec l’aide de
l’UNICEF, de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et du FNUAP. L’offre de
sang non contaminé étant une des principales fonctions de ces services, l’ouverture
de la Banque centrale du sang, le 15 juin dernier, devrait se traduire par une
nouvelle réduction de la mortalité maternelle.
56. Le 20 mai 2003, l’Afghanistan a observé une journée nationale d’unité pour
les enfants afin de faire connaître les résultats qu’il a obtenus ces 18 derniers mois
en matière de santé et d’éducation des enfants. Cette journée coïncidait avec le
lancement de la campagne d’enregistrement des naissances des enfants de moins
d’un an et avec les journées nationales de vaccination. L’enregistrement des
naissances a permis de recueillir des renseignements de base qui permettent de
s’assurer que les enfants sont vaccinés et inscrits à l’école à l’âge voulu, de recenser
leurs besoins en services de base et de faciliter les efforts faits pour les protéger
contre la traite et l’adoption illégale.
57. Les journées nationales de vaccination menées durant la période considérée
ont remporté un grand succès. Onze millions d’enfants ont été vaccinés en 2002 et
5 millions en 2003. Depuis la dernière série de vaccinations contre la poliomyélite
en décembre 2002, aucun cas confirmé de polio n’a été signalé en 2003. En mai
2003, le pourcentage d’enfants vaccinés contre la rougeole était de 94 % dans tout le
pays, enrayant de fait la transmission de la maladie, qui causait la mort de 15 à 20 %
des enfants de moins de cinq ans. La campagne antitétanique menée en 2003 a
permis de vacciner 95 % des femmes en âge de procréer.
E. Eau et assainissement
58. Le Ministère du réaménagement et du développement des zones rurales a
collaboré avec l’UNICEF, le HCR et plusieurs organisations non gouvernementales
afin d’assurer la fourniture d’eau potable et la construction d’installations sanitaires
dans les écoles, les villages en situation précaire touchés par la sécheresse, les
localités qui doivent faire face à un retour massif de réfugiés et les camps de
personnes déplacées. De plus, l’UNICEF, l’OMS et le Programme alimentaire
mondial (PAM) coopèrent avec le Ministère de la santé en vue de réduire
l’incidence des maladies diarrhéiques, qui sont en forte augmentation dans les
grandes villes notamment, en menant des campagnes de sensibilisation de l’opinion
et des opérations de désinfection de l’eau par la chloration. Cette année, tous ces
camps ont été équipés de ces installations mais un tiers seulement des 3 500 écoles
et moins de 5 % des villages en situation précaire ciblés ont pu bénéficier de ces
services. Les principaux problèmes rencontrés à cet égard ont été le faible niveau de
ressources fournies par les donateurs, le manque de partenaires d’exécution et de
matériels de forage et les capacités médiocres en matière de planification et de
gestion dans ce secteur.
F. Éducation
59. Pour la nouvelle année scolaire qui a commencé le 21 mars 2003, des
fournitures scolaires ont été distribuées à 4 millions d’élèves, à 50 000 instituteurs
et à plus de 5 000 directeurs d’écoles dans tout le pays. À la suite du programme
intitulé " Retour à l’école ", en 2003, 829 000 enfants de plus qu’en 2002 ont été
scolarisés, dont environ 304 500 filles. En vue d’augmenter les taux d’inscription,
de fréquentation et de réussite, le PAM a fourni une aide alimentaire à près de
400 000 élèves de 1 416 écoles dans l’ensemble du pays. À titre de mesure
d’encouragement supplémentaire à la scolarisation des filles, celle-ci ont reçu une
ration d’huile à emporter chez elles.
60. À la suite d’une évaluation technique menée par le Ministère de l’éducation,
en association avec l’UNICEF et le Bureau des Nations Unies pour les services
d’appui aux projets, 292 écoles dans tout le pays, comptant plus de 127 000 élèves,
ont été retenues pour des travaux de remise en état ou de construction. Grâce à
l’initiative Ogata, 196 de ces écoles se trouvent dans les régions de Mazar-e Charif,
Jalalabad et Kandahar, où les rapatriés sont en très grand nombre.
61. En vue de réduire le taux élevé d’analphabétisme chez les femmes - estimé à
79 % - un nouveau partenariat entre le Ministère de l’éducation, le Ministère de la
condition féminine et l’UNICEF a été lancé le 8 mars, Journée internationale de la
femme, en vue de mettre au point le premier manuel d’alphabétisation destiné aux
femmes. Pour compléter ce manuel, un assortiment d’outils pédagogiques a
également été préparé à l’intention des enseignants qui dispensent ces cours.
G. Culture et médias
62. Avec l’aide de l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et
la culture (UNESCO), le Ministère de l’information et de la culture a entrepris des
travaux de restauration d’un certain nombre de sites culturels et de monuments, y
compris du Musée de Kaboul. La remise en état des Archives nationales, des
bibliothèques publiques et du théâtre de Kaboul a été achevée durant la période
considérée. Le Ministère et l’UNESCO s’efforcent en outre de mettre fin aux
excavations illicites des sites historiques et au trafic de biens culturels.
63. En ce qui concerne le développement des médias, la MANUA a participé à
plusieurs projets visant à améliorer l’accès aux nouvelles et informations relatives
au processus de Bonn. Depuis décembre 2002, la Radio et Télévision afghanes
(RTA) diffuse un programme radiophonique hebdomadaire en dari et en pachtoun,
avec le concours de l’ONU. En coopération avec la MANUA, la télévision afghane
a également dispensé une formation à quatre producteurs de télévision et fourni du
matériel de montage ultramoderne, qui leur a permis de commencer à réaliser une
série de documentaires télévisés.
H. Rapatriement librement consenti et réinsertion
64. D’après le HCR, plus de 2,5 millions de rapatriés ont reçu une aide à ce titre
depuis le lancement de l’opération en mars 2002. Ceux qui rentrent peuvent
généralement regagner leur village d’origine et ne subissent aucune discrimination
en raison de leur statut de rapatrié. Cependant, comme les autres villageois déjà
établis, la viabilité de leurs moyens de subsistance et leur protection contre les
violations des droits de l’homme continuent de poser de graves problèmes, qui sont
exacerbés par l’absence de sécurité.
65. En juin 2003, l’Afghanistan, la République islamique d’Iran et le HCR ont
signé un accord conjoint portant sur le rapatriement librement consenti des réfugiés
afghans, qui fait suite à l’accord de rapatriement signé à Genève l’an dernier et
prévoit le retour progressif d’environ un million d’Afghans à partir de l’Iran au
cours des deux années à venir. L’accord, qui demeurera en vigueur jusqu’en 2005,
fournit à l’Afghanistan et aux principaux pays d’asile le cadre voulu pour organiser
le rapatriement librement consenti des réfugiés durant cette période.
66. Depuis le début de 2002, le HCR et l’Organisation internationale pour les
migrations ont fourni une assistance à 341 000 personnes déplacées pour les aider à
retourner dans leurs lieux d’origine. Depuis janvier 2003, plus de 41 000 déplacés
ont quitté les camps établis dans le sud et l’ouest du pays. Les effets persistants de
la sécheresse et les menaces à la sécurité qui se poursuivent ont empêché les
300 000 autres déplacés restés dans des camps et des zones d’installation de
regagner leur foyer. La majorité d’entre eux se trouvent à Helmand et Kandahar.
67. Le HCR a suspendu son programme de rapatriement à partir du Pakistan à la
suite de l’assassinat d’une de ses membres, Bettina Goislard, à Ghazni en novembre
2003. Les centres de rapatriement volontaire au Pakistan ont été fermés, ainsi que le
bureau établi à Ghazni. Le HCR a en outre provisoirement fermé ses bureaux à
Kandahar, Gardez et Jalalabad et a suspendu ses missions dans le sud, le sud-est et
l’est du pays.
I. Lutte contre les mines
68. Les mines terrestres et les munitions non explosées continuent de faire peser
une lourde menace sur l’effort de relèvement en Afghanistan. Près de 800 kilomètres
carrés dans tout le pays - dont plus de 50 % doivent être déminés en toute priorité -
sont touchés, entravant ainsi gravement le déroulement des opérations humanitaires
et de développement, qui sont d’une importance cruciale, et causant un grand
nombre de blessés parmi la population. Dans certaines régions, la contamination des
sols a été aggravée à la suite des activités militaires menées récemment, des pluies
torrentielles et des glissements de terrain qui ont déplacé les mines vers des zones
préalablement déminées et modifié les marqueurs des champs de mines.
69. Face à ce problème, le Programme de lutte antimines pour l’Afghanistan,
auquel participent 15 agents d’exécution non gouvernementaux dotés d’un effectif
de 7 200 personnes et qui, coordonné par le Centre de coordination pour l’action
antimines de l’ONU en Afghanistan, a continué de répondre aux besoins croissants
des partenaires humanitaires et de développement et à intensifier sa coopération
avec le Gouvernement et d’autres entités. Des efforts considérables ont été faits en
2003 pour lutter contre ce fléau ; plus de 105 kilomètres carrés ont été déminés et
des messages de sensibilisation au danger des mines ont été diffusés à l’intention de
2,5 millions d’Afghans. Les relevés topographiques ont permis de réduire de plus de
26 kilomètres carrés les zones susceptibles d’être contaminées par des mines et les
priorités humanitaires et de développement, telles que les grands projets de
construction de routes et de mise en place d’infrastructures, ont été mieux intégrées
à la planification, la coordination et la mise en oeuvre de ces opérations. Dans les
mois à venir, le Programme de lutte antimines pour l’Afghanistan contribuera en
outre à faciliter le processus de désarmement, de démobilisation et de réinsertion en
permettant d’intégrer un nombre important d’ex-combattants à l’" Initiative de lutte
antimines pour la paix ". Ces efforts s’insèrent dans l’action continue visant à
débarrasser le pays de toutes les mines au cours des 10 prochaines années,
conformément à une stratégie pluriannuelle élaborée par le Gouvernement, le Centre
de coordination pour l’action antimines de l’ONU et d’autres partenaires. La
poursuite de ces activités, qui demeurent vitales pour permettre la réalisation de la
plupart des autres activités de développement et de relèvement, continuera
néanmoins d’être tributaire de l’aide fournie par les donateurs à ce titre.
J. Reconstruction des routes
70. En juillet 2003, les États-Unis et le Japon ont commencé à réparer six tronçons
de la route reliant Kaboul à Kandahar, soit une longueur totale de 439 kilomètres.
Dans d’autres régions, le Pakistan et l’Union européenne ont entrepris la
reconstruction de l’axe routier Torkham-Kaboul, la Banque asiatique de
développement finance les travaux de remise en état de la route reliant Spin Boldak
à Kandahar, la République islamique d’Iran devrait achever la réparation de l’axe
Islam Qala-Hérat au début de l’année prochaine et l’Arabie saoudite finance la
remise en état d’un tronçon de la route reliant Kandahar à Hérat. Dans le cadre d’un
programme d’urgence de remise en état des transports mené par la Banque
mondiale, d’un coût de 108 millions de dollars, la reconstruction du Tunnel de
Salang, sur le principal axe routier reliant le nord et le sud du pays, a commencé en
juillet 2003 sous la supervision du Ministère des travaux publics.
IV. Mission
71. Le 1er novembre 2002, la responsabilité première de la Mission d’assistance
des Nations Unies en Afghanistan (MANUA) a été transférée du Département des
affaires politiques au Département des opérations de maintien de la paix.
72. L’intégration de l’action que l’Organisation des Nations Unies mène en
Afghanistan est désormais facilitée par la création d’un Centre d’opérations des
Nations Unies, qui consiste en une structure d’appui logistique et administratif
située à la périphérie de Kaboul. La MANUA y a installé ses bureaux administratifs
le 31 mars 2003 et continue d’y transférer ses différentes composantes. Le
programme Nouveau départ pour l’Afghanistan a officiellement inauguré son siège
dans le complexe le 12 juillet 2003. Le Fonds des Nations Unies pour l’enfance
(UNICEF) devrait y emménager le 15 août 2003. D’autres organismes des Nations
Unies envisagent ou ont déjà décidé le transfert total ou partiel de leurs bureaux. Ce
regroupement devrait permettre d’améliorer la sécurité du personnel et aussi de
réaliser des économies grâce à l’exploitation commune de certaines installations.
Afin de faciliter le transfert du personnel des élections et du matériel électoral à
Kaboul, la MANUA a également ouvert un bureau à Doubaï le 12 juin 2003.
73. La Mission a continué à convertir des postes de personnel international en
postes d’agent local afin de réduire au maximum les effectifs du personnel
international et de renforcer les capacités du personnel recruté sur le plan national.
Elle a également organisé, à l’intention du personnel recruté sur le plan national,
notamment des cours de langue anglaise, de rédaction de rapports et d’informatique.
74. Le Représentant spécial adjoint, Fisher, a quitté la Mission à la fin de juillet
2003. Il a alors été procédé à une réévaluation de la structure de la MANUA afin de
mieux intégrer son mandat, notamment en matière de secours, de redressement, de
relèvement et d’intervention politique et de renforcer la coordination avec les
organismes des Nations Unies et la capacité de la Mission à assumer un rôle de
direction et d’orientation, aux niveaux des politiques et des choix stratégiques
relatifs à tous les volets de son mandat, tout en aidant le Gouvernement afghan à
réaliser pleinement son potentiel et ses capacités de direction.
75. Répondant à la demande de voir la MANUA participer pleinement au
processus de désarmement, démobilisation et réinsertion, le Conseil de sécurité a
adopté la résolution 1471 (2003) autorisant une augmentation des effectifs du
Groupe des conseillers militaires, qui sont passés de 8 à 12 personnes. La Mission
pourra ainsi déployer en permanence un conseiller militaire dans chacun de ses huit
bureaux régionaux.
76. Dans sa résolution 1471 (2003), le Conseil de sécurité a également autorisé
l’augmentation des effectifs du Groupe des conseillers en matière de police civile,
qui ont été portés à huit. Ce renforcement des effectifs a amélioré la capacité de la
MANUA à fournir des avis au Gouvernement, en coordination avec les projets de
formation mis en oeuvre par l’Allemagne et les États-Unis d’Amérique.
V. Observations
77. Plus de 12 mois se sont écoulés depuis la mise en place de l’Administration
transitoire. Après l’euphorie initiale suscitée par l’instauration de la paix sont
apparus les vestiges complexes de deux décennies et demi de conflit armé. De ce
fait, certains processus politiques vitaux ont été ou risquent d’être retardés. Le
Gouvernement afghan et les États Membres devront faire preuve d’une volonté
politique résolue, notamment pour remédier à l’insécurité et promouvoir la réforme
d’institutions gouvernementales de premier plan.
78. Tandis que l’Administration transitoire s’efforce de renforcer son autorité et
d’étendre la couverture sécuritaire aux provinces, la politique des factions, qui
déstabilise une bonne partie du pays, sape sa légitimité en tant que gouvernement de
la nation. D’importants groupes ont de plus en plus le sentiment que certaines
institutions gouvernementales ne sont ni comptables de leurs actions ni
représentatives des aspirations nationales. Dans ce climat, il apparaît encore plus
important de veiller à ce que la Loya Jirga constitutionnelle et les élections
nationales de 2004 prévues dans l’Accord de Bonn se déroulent dans de bonnes
conditions. Pour pouvoir jeter les bases de la réconciliation et de la stabilité, ces
processus devront être perçus comme étant légitimes, la participation du public
devant rester à l’abri de l’intimidation et de la violence politique.
79. Le succès des futures initiatives politiques reste lié avant tout à la volonté des
principales factions, qui sont militairement présentes dans diverses régions du pays.
Tant que des factions continueront à faire prévaloir leurs intérêts au sein de certains
ministères clefs, les Afghans continueront à perdre toute confiance vis-à-vis du
Gouvernement central. En tête des ministères où la réforme s’impose figurent ceux
qui sont chargés de la sécurité de la nation, à savoir les Ministères de la défense, de
l’intérieur et des renseignements. Une mise en oeuvre soutenue de la réforme
devrait convaincre le pays de la volonté du Gouvernement d’imprimer un caractère
réellement national aux forces de sécurité et instaurer la confiance nécessaire à la
réussite du programme de désarmement, démobilisation et réinsertion. On s’emploie
également à définir les conditions qui doivent être remplies, selon un calendrier
précis, pour permettre au Gouvernement et à la communauté internationale
d’organiser des élections crédibles.
80. La sécurité s’avère indispensable non seulement pour créer un environnement
propice à l’activité politique mais aussi pour mener à bien la reconstruction.
L’insuffisance des activités de développement dans les zones les plus instables du
pays n’a pas été sans conséquences. Le manque de sécurité et l’absence de services
sociaux de base dont se ressentent les populations de ces zones contribuent à miner
davantage la confiance de ces dernières vis-à-vis du processus de paix. La relance
du secteur social - écoles, centres de santé, routes et possibilités économiques -, qui
relève du Gouvernement central, permettra de renforcer non seulement l’appui
politique aux institutions nationales mais aussi la loyauté vis-à-vis de ces structures.
Les possibilités de développement devraient également permettre de freiner l’entrée
dans l’économie des drogues illicites qui, sans cette intervention, pourrait
compromettre en grande partie le renforcement des institutions et la primauté du
droit en Afghanistan. Dans ce contexte, l’assistance que les États-Unis d’Amérique
viennent d’annoncer et qui pourrait atteindre 1 milliard de dollars devrait avoir une
profonde incidence sur la reconstruction de l’Afghanistan, notamment dans la
mesure où une partie des fonds devraient servir à financer des projets censés être
menés à bien dans un délai d’un an et produire ainsi l’essentiel de leurs effets avant
les élections de juin 2004.
81. Le désarmement, la démobilisation et la réinsertion des groupes armés et leur
remplacement par une armée nationale, la formation d’une nouvelle force de police
professionnelle, la remise en état du système judiciaire et l’élimination des menaces
que font peser les drogues illicites revêtent une importance cruciale pour la sécurité,
la prospérité et la restauration de l’état de droit en Afghanistan. La communauté
internationale a démontré sa volonté de contribuer à la mise en place de ces
nouvelles institutions chargées de la sécurité et de l’administration de la justice. Il
reste que, si les progrès accomplis dans chacun de ces domaines favorisent la paix,
les retombées liées à l’ensemble de ces projets n’apparaîtront que dans les années à
venir.
82. À un moment où le processus de Bonn fait indiscutablement face à de graves
difficultés, la volonté de la communauté internationale et du Gouvernement afghan
ne doit pas faiblir. La communauté internationale doit décider soit de maintenir son
intervention en Afghanistan au niveau actuel et risquer l’échec soit de redoubler
d’efforts afin que le processus de Bonn permette d’instaurer la paix et la stabilité.
La communauté internationale doit, avant tout, réaffirmer sa détermination à assurer
la sécurité. L’Organisation des Nations Unies demeure résolue à s’acquitter du
mandat défini à Bonn, mais elle n’y parviendra que si la détérioration actuelle de la
sécurité est totalement enrayée et si les programmes et le personnel des Nations
Unies, des organisations non gouvernementales et d’autres organismes qui apportent
leur concours aux Afghans bénéficient d’une protection adéquate. Les États
Membres contribueront au mieux à combler les lacunes en matière de sécurité en
mettant concrètement en application la résolution 1510 (2003) et en fournissant les
ressources qui permettront à la Force internationale d’assistance à la sécurité (FIAS)
de se déployer dans les zones où sa présence est particulièrement nécessaire.
83. Enfin, prenant note de l’invitation qui m’a été faite par la mission du Conseil
de sécurité en Afghanistan d’étudier la possibilité d’organiser une deuxième
conférence internationale pour assurer l’appui financier et l’élan politique
nécessaires à l’instauration de la paix et de la stabilité en Afghanistan (voir
S/2003/1074, par. 14), j’ai engagé des consultations sur la suite à donner au
processus de Bonn. Je crois, pour l’essentiel, que cette conférence permettra de
réunir des éléments représentatifs de la population afghane en partenariat avec la
communauté internationale. Les protagonistes dresseront le bilan de l’action menée
jusque-là et préciseront les améliorations à apporter. La deuxième conférence
permettra de réviser les priorités pour l’Afghanistan et de définir un programme
d’action s’étendant au-delà de la période de mise en oeuvre de l’Accord de Bonn.
Elle devrait donc permettre de renouveler l’appui politique et financier nécessaire à
une réelle transition politique et économique, telle que la préconise l’Accord de
Bonn.
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