I. Introduction
1. Le présent rapport est soumis en application de la résolution 1401 (2002) du Conseil de sécurité, en date du 28 mars 2002, et de la résolution 57/113 A et B de l’Assemblée générale, en date du 6 décembre 2002. Il couvre la période écoulée depuis le précédent rapport, daté du 21 octobre 2002 (A/57/487-S/2002/1173). Au cours de cette période, le Conseil a également entendu des exposés mensuels sur la situation en Afghanistan (voir S/PV.4638, S/PV.4664, S/PV.4699 et S/PV.4711).
II. Application de l’Accord de Bonn
A. Consolidation de l’autorité du Gouvernement
2. Pendant la période considérée, l’Administration de transition afghane a continué de renforcer son autorité dans tout le pays et de mettre en oeuvre les politiques nationales. L’un des principaux instruments à cet égard a été le budget national pour l’exercice en cours (2003). Ce budget contient plusieurs programmes nationaux, qui devraient doter le Gouvernement des mécanismes nécessaires pour avoir des retombées tangibles sur tous les citoyens du pays dans des conditions d’égalité. Le Gouvernement verse désormais des traitements aux fonctionnaires dans pratiquement toutes les provinces et prévoit d’accroître les fonds alloués aux gouvernements des provinces pour financer leurs dépenses de fonctionnement. On a constaté une amélioration symbolique de la perception des recettes par le pouvoir central pour lequel la situation dans ce domaine demeure néanmoins l’un des principaux problèmes auxquels il continue de se heurter. Pour mettre en place un système administratif cohérent relevant de la capitale, il faudrait, entre autres, un apport constant de ressources ainsi qu’une coordination étroite et un accord entre tous les protagonistes aux échelons provincial, national et international, quant à leurs rôles respectifs à l’égard de l’administration centrale, ainsi qu’un renforcement des capacités des institutions centrales en général.
3. Au cours de la période considérée, le Gouvernement a accompli d’importants progrès dans la mise en place de ces systèmes d’élaboration des politiques nationales dans le cadre de l’établissement des budgets des ministères et du Cabinet. Comme le budget offre un instrument de choix pour définir la politique et arrêter les priorités nationales, la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA) et les organismes des Nations Unies sont convenus de hiérarchiser encore plus leurs programmes et projets dans le cadre du processus budgétaire, sur la base des consultations menées avec le Gouvernement pour élaborer le Programme d’assistance transitoire des Nations Unies à l’Afghanistan (voir A/57/487- S/2002/1173, par. 37), qui a été lancé à Oslo en décembre 2002. De nouveaux fonds d’affectation spéciale et d’autres mécanismes pourraient être créés pour acheminer le financement multilatéral destiné à appuyer le processus d’édification de l’État.
4. Dans le cadre du processus d’établissement du budget de développement national, les ministres ont établi leurs prévisions budgétaires pour leurs secteurs respectifs dans le cadre des groupes consultatifs récemment créés. Les prévisions ont fait l’objet d’un examen approfondi au niveau du Cabinet au début de mars 2003. Le Gouvernement a ensuite présenté son budget de fonctionnement et le budget de développement national lors du Forum de développement de l’Afghanistan, tenu à Kaboul les 13 et 14 mars, et du Forum stratégique de haut niveau pour l’Afghanistan, tenu à Bruxelles le 17 mars.
5. L’Accord définissant les arrangements provisoires applicables en Afghanistan en attendant le rétablissement d’institutions étatiques permanentes (Accord de Bonn, voir S/2001/1154, annexe) prévoit un recensement national de la population qui constituera un fondement important pour une multitude d’activités de développement et de gouvernance. Les préparatifs entrepris à cet effet, sous la conduite de l’Office national de statistique et avec le concours du Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP) sont bien avancés. La première phase, comportant des enquêtes sur les ménages et les infrastructures communautaires, qui a débuté à Kunduz, sera progressivement étendue à d’autres provinces. La première phase devrait être achevée d’ici à la fin de l’année.
6. Au début de janvier 2003, le Gouvernement afghan a achevé ses opérations de passage à une nouvelle monnaie qui avaient commencé en octobre 2002 (voir ibid., par. 7). Il convient de rendre honneur au Gouvernement pour le succès de cette initiative ambitieuse, la nouvelle monnaie jetant les bases d’une amélioration de la stabilité économique et de la mise en oeuvre des réformes financières et économiques.
7. Le rétablissement du système administratif régissant la fonction publique est un domaine où l’on espère que des progrès seront accomplis. Contre toute attente, le système unitaire d’administration mis en place par la Constitution de 1964 a survécu aux années de tumulte et, dans une certaine mesure, demeure respecté par les fonctionnaires dans tout le pays.
8. La consolidation du processus de paix en Afghanistan suppose que les activités de reconstruction progresseront. Les retombées économiques de la paix doivent devenir une réalité pour les Afghans. Le Fonds d’affectation spéciale pour la reconstruction de l’Afghanistan, qui finance les déficits budgétaires et les activités de développement du Gouvernement, a reçu 212 millions de dollars au cours de l’exercice se terminant en mars 2003. La valeur des projets approuvés représente environ 200 millions de dollars. Le Gouvernement a encouragé les donateurs à appuyer les programmes du secteur social par le biais du Fonds d’affectation spéciale et d’autres fonds analogues en cours de création.
9. Les Afghans devraient tirer profit de manière claire et tangible au niveau local de trois grands programmes nationaux : a) le Programme national d’urgence pour l’emploi, financé par le Fonds d’affectation spéciale pour la reconstruction de l’Afghanistan ; b) le Programme de solidarité nationale, financé par la Banque mondiale ; et c) le Programme national de développement des zones, bénéficiant d’une assistance du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD). Le Programme national d’urgence pour l’emploi vise à offrir des emplois à forte intensité de main-d’oeuvre à des groupes vulnérables. Le Ministre de la reconstruction rurale et du développement, agissant en collaboration avec le Bureau des Nations Unies pour les services d’appui aux projets (UNOPS), en sa qualité d’agent d’exécution, fait appel à des organisations non gouvernementales pour l’exécution de projets dans 16 provinces, qui ont déjà été mis en route dans huit d’entre elles. Le Ministère des travaux publics collabore également avec l’UNOPS à la supervision des contrats de remise en état des routes, en collaboration avec des petites entreprises du secteur privé. Suivant le modèle urbain du Programme de relance et d’emploi du PNUD en Afghanistan, cette composante devrait créer des emplois rémunérés représentant plus de 2,5 millions de jours-hommes et sera presque entièrement exécutée dans les six prochains mois.
10. Le Programme de solidarité nationale, également placé sous la conduite du Ministère de la reconstruction rurale et du développement, facilitera la planification communautaire et le versement de subventions à l’échelon local pour la construction d’infrastructures et d’autres investissements dans tout le pays (environ 20 000 dollars par village et par an), l’objectif étant d’en faire bénéficier de 3 000 à 5 000 communautés en 2003/04 et 5 000 à 6 000 autres en 2004/05 (soit près de la moitié des communautés afghanes). Le Programme national de développement des zones, lancé par le Ministère, vise à renforcer la capacité des provinces et des districts d’appuyer les deux autres programmes, tout en apportant en même temps une assistance aux zones vulnérables dans le cadre de programmes pilotes.
11. La coalition militaire dirigée par les États-Unis d’Amérique a déployé des équipes de reconstruction au niveau des provinces à Kunduz, Gardez et Bamyan, et a indiqué qu’elle avait l’intention de déployer des équipes supplémentaires à Mazar-e-Charif, Herat, Jalalabad et Kandahar. D’après la coalition, ces équipes appuieront les activités de reconstruction et aideront à étendre l’autorité du gouvernement central dans les provinces. Elles pourraient offrit à l’avenir un moyen de suivre et de faciliter la réforme du secteur de la sécurité dans les provinces. On espère que la présence de ces équipes aura pour effet secondaire d’améliorer la sécurité à l’échelon local dans leurs zones d’opérations.
12. Le Ministre de l’intérieur préside un comité gouvernemental de coordination du déploiement des équipes de reconstruction au niveau des provinces et la MANUA contribue à faciliter la mise en place de voies de communication claires entre les équipes, l’Organisation des Nations Unies et les organisations non gouvernementales apportant une assistance, en partie pour calmer les inquiétudes au sujet de la confusion qui pourrait exister entre le rôle des militaires et des civils. De l’avis de la MANUA, ces inquiétudes pourraient être apaisées si les équipes de reconstruction au niveau des provinces maintenaient une distinction claire entre leurs programmes et ceux des organismes d’aide humanitaire et de développement en axant leur assistance sur des besoins différents, tels que le réseau routier, la production d’électricité et la reconstruction des édifices gouvernementaux locaux et des postes de douane.
B. Évolution de la situation politique
Processus constitutionnel
13. L’Accord de Bonn prévoit la rédaction et la ratification d’une nouvelle constitution afghane d’ici à la fin de 2003. S’il est mené à bien, ce processus contribuera à fournir le fondement politique nécessaire pour consolider le processus de paix. Le comité de rédaction de la Commission constitutionnelle (voir ibid., par. 28), qui a été officiellement inauguré par l’ancien Roi Zaher Shah le 3 novembre 2002, a pratiquement achevé l’élaboration d’un avant-projet de constitution. Le comité de neuf membres comprend deux femmes juges, ainsi que des spécialistes du droit et des juristes issus de tous les principaux groupes ethniques et régions.
14. Une commission constitutionnelle plus importante, composée d’une trentaine de membres, doit être formée et commencera à se réunir en mars 2003. Le Président Hamid Karzai devrait prendre un décret sur le processus d’élaboration de la constitution et le rôle de la Commission constitutionnelle. Des débats publics seront organisés sur l’ensemble du territoire en avril et mai pour recueillir les vues d’un vaste échantillon de la population. Sur la base de ces débats, la Commission établira dans le courant de l’été un projet définitif qui sera soumis pour adoption à une loya jirga constitutionnelle en octobre. La MANUA aura besoin d’un spécialiste constitutionnel pour la seconder dans cette tâche complexe. Les donateurs offrent également les services d’experts internationaux des procédures et du droit constitutionnels à divers stades du processus. Toutefois, il convient de souligner que le processus constitutionnel demeurera placé sous la conduite des Afghans.
Processus électoral
15. La tenue d’élections d’ici à juin 2004 constitue un autre élément essentiel de l’Accord de Bonn. L’absence d’organes électoraux en Afghanistan complique cette tâche ; en effet, il n’existe pas d’organe électoral national, ni de système d’enregistrement des électeurs, ni de législation régissant le déroulement des élections ou le fonctionnement des partis politiques. Le 15 février 2003, le Président Karzai m’a adressé une lettre dans laquelle il demandait que la MANUA soit chargée d’aider à préparer et à organiser le processus électoral et de coordonner l’assistance électorale apportée par la communauté internationale. J’ai fait droit à cette demande et la MANUA collaborera donc avec la Division de l’assistance électorale du Département des affaires politiques pour définir les modalités requises à cette fin.
16. S’il veut respecter le calendrier établi dans l’Accord de Bonn, le Gouvernement doit désigner d’urgence un organe électoral national chargé de surveiller l’organisation des élections. Grâce à une équipe de conseillers expérimentés, la MANUA apporterait un appui à cet organe électoral et l’aiderait à être mieux en mesure d’inscrire les électeurs, de mener une campagne d’éducation civique et d’assurer le déroulement des élections conformément à l’Accord de Bonn. L’équipe électorale de la MANUA coordonnerait aussi l’assistance internationale et assurerait la liaison avec l’organe électoral national.
17. Le projet de constitution devant être achevé à la fin de 2003, il sera sans doute impossible de fonder le cadre juridique des élections sur la nouvelle constitution car le délai risque d’être trop court pour tenir des élections d’ici à juin 2004. En conséquence, il faudra peut-être promulguer une législation spécifique et limitée relative aux élections et aux partis politiques, applicable uniquement aux élections de 2004. La législation devant régir les élections ultérieures serait fondée sur la nouvelle constitution.
18. Les opérations d’inscription sur les listes électorales et d’éducation civique sont complexes et coûteuses. La Division de l’assistance électorale du Département des affaires politiques et la MANUA sont en train de mettre la dernière main aux prévisions de dépenses initiales pour 2003. Les élections de 2004 marqueraient un jalon important dans la mise en oeuvre du processus de Bonn. L’organisation et la tenue des élections constitueront une tâche particulièrement ardue, compliquée encore par la précarité de la situation en matière de sécurité et par le risque, inhérent aux élections dans n’importe quel pays, que la rivalité entre les candidats exacerbe les tensions et les dissensions au sein de la population.
Relations internationales
19. Le 22 décembre 2002, les Gouvernements de l’Afghanistan et de ses six voisins ont signé la Déclaration de Kaboul sur les relations de bon voisinage (voir S/2002/1416, annexe). Les signataires réaffirmaient leur attachement à des relations bilatérales constructives et bienveillantes fondées sur les principes de l’intégrité territoriale, du respect mutuel et de la non-ingérence dans les affaires des autres pays. Les sept États ont également exprimé leur détermination à venir à bout du terrorisme, de l’extrémisme et du trafic de drogues. Le Conseil de sécurité a immédiatement approuvé et soutenu l’initiative dans sa résolution 1453 (2002) du 24 décembre 2002. Depuis la signature de la Déclaration, les dirigeants afghans se sont rendus dans les capitales des pays voisins pour discuter des moyens de coopération sur tout un ensemble de problèmes, parmi lesquels les relations diplomatiques et économiques et l’afflux de réfugiés. Le Président Karzai s’est également rendu au moins une fois dans la capitale de chacun des six pays voisins.
C. Questions de sécurité
La situation d’ensemble
20. La sécurité demeure le problème le plus grave auquel se heurte le processus de paix en Afghanistan. Elle doit être améliorée pour permettre le rétablissement de la légalité, assurer la protection des droits de l’homme, faciliter l’effort de reconstruction et le succès de processus politiques qui sont complexes, notamment l’élaboration de la nouvelle constitution et l’organisation d’élections libres et honnêtes. Les Afghans, dans beaucoup de régions du pays, ne sont toujours pas protégés par l’État et par des structures de sécurité qui soient légitimes. La criminalité des groupes armés s’est particulièrement manifestée dans le nord, l’est et le sud du pays, et dans de nombreuses régions, les affrontements entre chefs locaux continuent à contribuer à l’instabilité.
21. Durant la période considérée, les rivalités entre les chefs des factions se sont aggravées dans l’ouest du pays : les forces du Gouverneur de Herat, Ismael Khan, sont opposées à celles d’un commandant local, Amanullah Khan, dans la province de Shindand à la fin de 2002. En janvier 2003, les hostilités ont éclaté dans la province de Badghis, entre les forces loyales à Ismael Khan et le Gouverneur local, Gul Mohammad.
22. À Kandahar, les rivalités autour de l’exercice du pouvoir local et les problèmes tribaux ont éclaté au grand jour au moment où des forces appartenant au Gouverneur de Kandahar, Gul Agha, de la tribu Barakzay, ont tenté de désarmer les forces de police obéissant au général Akram, de la tribu Alokozai. Il a fallu l’intervention des chefs tribaux pour régler le différend sur la question de savoir qui est chargé d’assurer l’ordre public dans la ville.
23. Les actes de terreur continuent à être bien trop fréquents. Le plus grave, ces derniers mois, a eu lieu le 31 janvier, quand un autobus a sauté sur une mine artisanale, près de Kandahar, faisant 12 morts parmi les passagers. À la fin de décembre 2002, à Kaboul, un engin explosif a été lancé dans une voiture transportant deux soldats américains en civil et leur interprète, les blessant tous trois. À Kaboul, deux Afghans ont été tués et deux travailleurs humanitaires étrangers ont été blessés après le lancement d’une grenade dans la foule massée tout près de la base de la Force internationale d’assistance à la sécurité (FIAS). Un interprète afghan de la FIAS a trouvé la mort le 7 mars lors d’une patrouille, quand un engin explosif artisanal et télécommandé a éclaté au moment du passage de son véhicule.
24. On signale, de plusieurs sources, aux premiers mois de 2003, une activité accrue d’éléments hostiles au Gouvernement et à la communauté internationale en Afghanistan. On relève ainsi des indices d’activités de groupes taliban résiduels et de factions loyales à Gulbuddin Hekmatyar, qui s’efforcent d’organiser leurs troupes dans les zones frontalières du sud-est et de l’est du pays. On observe aussi une augmentation du nombre des attaques contre le personnel et les équipements des organisations internationales et non gouvernementales, en particulier dans les provinces frontalières de Nangahar, Khost, Kunar, Paktya, Paktika, Kandahar et Helmand. En décembre 2002, deux grenades ont été lancées dans le périmètre des locaux de la MANUA à Gardez ; en février 2003, un engin explosif a éclaté devant les bureaux du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés à Kandahar, et un autre a été lancé contre les bureaux de l’Organisation internationale des migrations (OIM) à Kunduz. Au cours de la période considérée, on signale aussi toute une série d’explosions inexpliquées à Jalalabad ; elles n’ont pas fait de victimes. Diverses attaques contre les forces de la coalition ont fait un mort et de nombreuses victimes.
25. La MANUA et les organismes des Nations Unies prennent des mesures de précaution pour assurer la sécurité de leur personnel, notamment en limitant les déplacements qui ne sont pas indispensables. Les déplacements ou les activités ont parfois été suspendus pendant deux ou trois jours dans certains lieux et cas particuliers, mais la sécurité ne s’est pas encore dégradée au point où cela nécessiterait une cessation des opérations sur le terrain. Les évaluations de la sécurité seront faites zone par zone ; et si les opérations dans une zone donnée doivent être interrompues, cela n’affectera pas celles qui sont menées dans d’autres régions du pays.
Réforme du secteur de la sécurité
26. En fin de compte, le problème de l’insécurité ne pourra être réglé que par la formation de forces nationales loyales, unies, capables de maintenir la paix civile et d’assurer l’ordre public dans le respect de la légalité. L’amélioration de la sécurité en Afghanistan suppose donc des progrès coordonnés sur plusieurs fronts connexes : créer une armée, une force de police et une police des frontières vraiment nationales ; désarmer, démobiliser et assurer la réinsertion des membres des factions armées ; réformer le secteur de la justice ; et répondre, comme il convient, à la menace grandissante que posent la culture et le trafic des drogues. Les Ministères de la défense et de l’intérieur, ainsi que des vastes organes de renseignements, un peu envahissants, doivent être réformés de façon que ces structures apparaissent aux yeux des Afghans comme ayant un caractère authentiquement national. L’équipe dirigeante afghane travaille avec les nations chefs de file dans le secteur de la sécurité pour définir une démarche cohérente, obtenir un soutien financier et technique et appliquer des programmes. Mon rapport précédent (A/57/487- S/2002/1173, par. 11 à 17) présentait plusieurs mesures visant à réformer les structures officielles de la sécurité publique. Certaines de ces mesures ont déjà été prises.
27. Le 1er décembre 2002, le Président Karzai a signé un décret qui devrait constituer la base de la nouvelle armée afghane et organiser le désarmement, la démobilisation et la réinsertion de tous les membres des factions armées et la réforme du Ministère de la défense. Le 12 janvier 2003, la Commission de la défense nationale a commencé à appliquer le décret en créant quatre commissions chargées de coordonner les processus, liés entre eux, du désarmement, de la démobilisation et de la réinsertion des ex-combattants et la constitution progressive de l’armée nationale ; une commission de la démobilisation et de la réinsertion qui aidera les combattants qui souhaitent sortir des formations militaires existantes pour revenir à la vie civile ; une commission du désarmement, qui cherchera à réduire les armements détenus par les formations qui n’appartiennent pas à l’armée nationale, et deux commissions (sur le recrutement des officiers et des soldats, respectivement) chargées de sélectionner, sur la base du mérite, de l’équilibre ethnique et de la représentation des diverses régions du pays, le personnel qui constituera l’armée nationale.
28. Conformément au décret du 1er décembre, un comité consultatif a été constitué le 18 février 2003 : il est composé de représentants des principaux ministères chargés de la réforme de la sécurité, de représentants des pays chefs de file et de ceux de la MANUA, afin de contribuer à la constitution de l’armée nationale afghane et au processus de désarmement, de démobilisation et réinsertion. La réforme du Ministère de la défense a sensiblement progressé quand, le 20 février, 15 postes de haut niveau, dont celui de vice-ministre de la défense, ont été créés, ou modifiés, pour assurer un meilleur équilibre ethnique entre les hauts responsables du Ministère. Cet effort doit se poursuivre pour que les Afghans soient assurés que leur armée sera bien une armée authentiquement nationale et que la politique de défense qu’elle appliquera répondra bien à des impératifs nationaux et non pas factieux.
L’armée nationale afghane
29. La réorganisation des forces et la formation, par les États-Unis et la France, des soldats et des officiers de l’armée nationale afghane se poursuivent au centre d’entraînement militaire de Kaboul. Six bataillons ont jusqu’à présent été constitués au moyen de militaires venant de recevoir une formation. Le quartier général des deux premières brigades du corps central de l’armée nationale afghane devrait très bientôt ouvrir ses portes. Certaines unités ont été déployées dans des opérations limitées en dehors de Kaboul ; elles ont mené des patrouilles et contribué à l’action locale de désarmement. Ces déploiements, généralement bien acceptés par la population locale, ont démontré que la nouvelle armée devient progressivement une force compétente et disciplinée.
Désarmement, démobilisation et réinsertion des ex-combattants
30. La création d’une armée et d’une police nationales efficaces dépend du succès des opérations de désarmement, de démobilisation et de réinsertion dans la vie civile des membres des formations militaires non officielles. Le 22 février, le Gouvernement japonais, qui est chef de file pour les opérations de désarmement, de démobilisation et de réinsertion, a accueilli à Tokyo une conférence dont le but était de mobiliser une aide internationale à cet effet. Des contributions ont été versées ou annoncées à concurrence de 50,7 millions de dollars. Le Japon a annoncé une contribution de 35 millions de dollars au PNUD pour les opérations de désarmement, de démobilisation et de réinsertion, à quoi il faut ajouter certaines contributions en nature. Lors de cette conférence, le Président Karzai a souligné que le désarmement, la démobilisation et la réinsertion devaient se faire de façon impartiale, que le programme devait être mis en oeuvre de façon échelonnée et devait être achevé en moins d’un an. Sur le terrain, il sera appliqué par le programme " Nouveau départ " de la MANUA et du PNUD, qui offre une assistance et une aide pour la réinsertion de ceux des combattants qui ne seront pas orientés vers une formation militaire ou policière.
La police et les prisons
31. À mesure que les milices locales seront démantelées, une police nationale réformée devrait assurer l’ordre public en Afghanistan. Nommé le 28 janvier 2003, le Ministre de l’intérieur, Ali Ahmad Jalali, a montré qu’il était tout à fait disposé à réformer la police. Des discussions sont en cours en vue de la réorganisation de son ministère, et on s’efforce de mieux établir la police des frontières, qui relevait jusqu’à présent du Ministère de la défense, pour en faire une entité du Ministère de l’intérieur. Des discussions sont également en cours entre les partenaires internationaux, afin de trouver un pays susceptible d’être chef de file de l’aide apportée aux autorités afghanes dans la constitution de la police des frontières.
32. Dirigé par des Allemands, le programme de formation de policiers avance bien. Un nouveau groupe de 500 à 600 policiers stagiaires a été recruté ; leur formation commencera en mars 2003. Les États-Unis sont également disposés à compléter l’action de l’Allemagne, à l’aide d’un programme qui aidera à donner une formation de base à des milliers de policiers stagiaires au cours des mois qui viennent. Le Ministre de l’intérieur travaille à la rédaction d’un projet de décret présidentiel qui exposerait les diverses phases de la réforme de la police, tout comme le décret du 1er décembre organisait la réforme de l’armée.
33. Le Gouvernement afghan a pris des mesures importantes pour obtenir que les forces de police respectent la légalité. Le Président Karzai a constitué une commission indépendante chargée d’enquêter sur la répression violente, par la police, des manifestations d’étudiants qui ont eu lieu à l’Université de Kaboul, en novembre 2002. Cette commission a conclu que la police avait fait un usage excessif de la force et que les conditions de vie misérables dans les dortoirs des étudiants, qui avaient apparemment déclenché les manifestations, étaient en partie le résultat de la corruption. Plusieurs administrateurs, dont certains de haut rang, ont par la suite été arrêtés. Un département spécialement chargé des droits de l’homme a été créé au Ministère de l’intérieur. On s’attend à ce que la Commission indépendante des droits de l’homme en Afghanistan et la MANUA coopèrent, dans ce département, à la mise en oeuvre d’un programme d’enseignement des droits de l’homme aux membres des forces de police.
34. Bientôt, les prisons ne relèveront plus du Ministère de l’intérieur, mais du Ministère de la justice. Il n’y a pas actuellement de prison centrale dans la capitale et tous les détenus, quel que soit leur statut, se trouvent au centre de détention de Kaboul, un bâtiment en très mauvais état, surpeuplé, qui jouxte le quartier général de la police de Kaboul. Les autorités afghanes chargées des prisons ont commencé à reconstruire la prison de Pul-i-Charkhi, dans la banlieue de Kaboul, mais le financement de la reconstruction et de la remise en état des prisons n’est pas encore assuré.
Lutte contre les stupéfiants
35. La culture du pavot somnifère et la production et le trafic de drogues demeurent une préoccupation majeure pour les autorités nationales et la communauté internationale. L’Afghanistan, une fois de plus, pourrait être en 2003 le principal producteur d’opium dans le monde. La destruction des cultures, prescrite par un décret présidentiel, se poursuivrait dans beaucoup de régions du pays, mais la vérification demeure problématique. Un projet recevant l’appui de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime aidera le Gouvernement afghan à améliorer sa capacité de vérification. Le succès de la campagne d’éradication dépendra de l’existence d’une force de police crédible, et aussi de la possibilité, pour les agriculteurs, de trouver d’autres moyens de subsistance. Le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord, qui est chef de file dans ce secteur, travaille étroitement avec un petit groupe de ministères, de donateurs et d’organismes des Nations Unies pour assurer la cohérence, au niveau des provinces, des activités de lutte contre la drogue et trouver des projets à impact rapide et des programmes de développement des moyens d’existence à moyen terme, ainsi que des projets d’équipement. La République islamique d’Iran et les États-Unis d’Amérique ont fourni des ressources pour des travaux publics exigeant beaucoup de main-d’oeuvre, et des équipes multidisciplinaires ont été envoyées dans les provinces pour travailler avec les responsables locaux afin d’élaborer ensemble des projets à impact rapide. Le Royaume-Uni apporte au Gouvernement afghan un appui institutionnel à cet effet.
Relève de la Force internationale d’assistance à la sécurité
36. Le 10 février, la Turquie a transféré le commandement de la FIAS à l’Allemagne et aux Pays-Bas au cours d’une cérémonie, à Kaboul, à laquelle ont assisté le Président Karzai et les Ministres de la défense de l’Afghanistan et de ces trois pays. Mon Représentant spécial est déjà en contact étroit avec le nouveau commandement, et nous espérons que se poursuivra une coopération efficace avec la direction allemande et néerlandaise du quartier général de la Force.
D. Réforme du secteur judiciaire
37. Dans mon rapport précédent, j’ai indiqué que la composition de la Commission judiciaire était examinée (A/57/487-S/2002/1173, par. 25). Une nouvelle commission de 12 membres a par la suite été chargée, par décret présidentiel, de diriger les efforts visant à réformer le secteur judiciaire de l’Afghanistan, comme demandé par l’Accord de Bonn. Elle a été habilitée à organiser un vaste programme de réforme du droit, à déterminer les besoins techniques, logistiques et en effectifs du secteur de la justice et à établir des programmes de sélection et de formation des juges, procureurs et autres juristes.
38. La Commission a commencé ses travaux le 28 novembre 2002 et achevé un plan national détaillé pour le secteur de la justice, sur la base de consultations avec les acteurs concernés dans ce secteur. Une conférence organisée par le Gouvernement italien à Rome les 19 et 20 décembre 2002 a contribué à dynamiser le processus. La Commission prépare actuellement le lancement, à Kunduz, d’une étude pilote du secteur de la justice. Les besoins du secteur sont vastes et sa remise en état exigera des efforts considérables. La Commission a toutefois établi une série de priorités immédiates comprenant la remise en état des locaux des tribunaux, l’organisation de programmes de formation de courte durée à l’intention des juges et autres auxiliaires de la justice, et la soumission de recommandations à la commission constitutionnelle sur les questions de justice concernant le nouveau projet de constitution. L’Italie, en tant que nation chef de file, et la MANUA apportent leur soutien à la Commission. Une contribution d’un montant d’environ 30 millions de dollars avait été annoncée à Rome il y a quelques années. Toutefois, la moitié seulement des 27,5 millions de dollars requis pour 2003 pour appliquer le plan national est actuellement disponible.
E. Questions relatives aux droits de l’homme
Situation générale dans le domaine des droits de l’homme
39. La situation générale concernant les droits de l’homme en Afghanistan demeure un sujet de grave préoccupation. L’absence de structures adéquates en matière de sécurité nationale et de maintien de l’ordre et la faiblesse de l’appareil judiciaire contribuent à aggraver les atteintes aux droits de l’homme. Des irrégularités sont commises dans toutes les régions du pays, le plus souvent par les forces contrôlées par les factions régionales ou les commandants locaux. Ainsi, l’amélioration de la sécurité dans l’ensemble du pays demeure le préalable de la protection et de la promotion des droits de l’homme et de la mise en place d’institutions nationales et non gouvernementales dans ce domaine.
La Commission indépendante des droits de l’homme en Afghanistan
40. En application de l’Accord de Bonn, la Commission a pu accélérer la mise en oeuvre de son programme avec le soutien d’un projet commun, lancé le 28 octobre 2002, par la MANUA, le Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme et le PNUD. Elle a organisé divers séminaires et ateliers sur les droits des femmes, l’éducation dans le domaine des droits de l’homme et la justice pendant la période de transition, et organisé des missions d’enquête, en collaboration avec la MANUA, sur les questions relatives aux droits de l’homme dans l’ensemble du pays. La Commission envisage aussi d’ouvrir des bureaux régionaux à Mazar-e-Charif, Herat, Kandahar, Bamyan, Jalalabad, Gardez et Fayzabad. La MANUA l’aide à obtenir l’appui des autorités locales. La Commission a jusqu’à présent reçu plus de 600 pétitions et plaintes de particuliers et de groupes de toutes les régions du pays. Ses enquêtes ont été centrées sur les plaintes concernant des agressions contre des témoins de violations des droits de l’homme, la situation des Pachtounes dans le nord et les plaintes émanant de la communauté Hazara de la province du Helmand. En collaboration avec le Ministère de l’intérieur et le Ministère de la justice, la Commission participe également à une enquête sur les conditions carcérales dans l’ensemble du pays.
41. Un Groupe consultatif sur les droits de l’homme a été créé, qui est présidé par la Commission indépendante des droits de l’homme en Afghanistan et composé de représentants de l’Administration de transition afghane, de pays donateurs et d’entités des Nations Unies, pour servir de cadre à l’évaluation de la situation dans le domaine des droits de l’homme, à l’examen des questions plus vastes liées à ce secteur et à la mise au point de critères pour l’application, par le Gouvernement, de concepts et d’instruments de base dans le domaine des droits de l’homme dans le cadre de ses programmes de développement.
42. La Commission indépendante des droits de l’homme et la MANUA ont également engagé un dialogue sur les questions relatives aux droits de l’homme avec les représentants du Gouverneur d’Herat, Ismael Khan. À Kundunz, la Mission aide le Gouverneur dans le cadre d’une commission créée pour résoudre les conflits fonciers qui ont entraîné des heurts entre les communautés turkmène et ouzbèke.
43. Outre le soutien qu’elle fournit à la Commission indépendante, la Mission a poursuivi ses propres activités d’enquête et de surveillance. Avec l’aide du Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, elle a organisé, en décembre 2002, un stage de formation à l’intention des personnels international et local sur le contrôle du respect des droits de l’homme, les techniques d’investigation et les questions de protection. Le stage portait sur les violations relatives aux actes d’intimidation dont ont été victimes des membres de groupes politiques ou d’organisations de la société civile, la discrimination contre certains groupes ethniques, la violence contre les femmes et les atteintes à leurs droits, et les actes d’intimidation contre des témoins de violations graves des droits de l’homme. Cette dernière question revêtait une importance particulière en ce qui concerne les témoins disposant d’informations potentielles concernant les charniers découverts dans le nord (voir A/57/487-S/2002/1173, par. 21).
44. À ce sujet, en décembre 2002, la Mission a appuyé la visite d’un expert médico-légal, dont les services étaient financés par le Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, chargé de procéder à un examen technique des sites situés près de Mazar-e-Charif. Elle examine les mesures à prendre avec le Gouvernement, la Commission indépendante et le Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, ayant à l’esprit le problème consistant à assurer une sécurité adéquate aux témoins.
F. Questions liées à la situation des femmes
45. Malgré des années de dures épreuves, la brutalité de la guerre et le déni persistant et généralisé de leurs droits fondamentaux, les femmes afghanes, en particulier celles des zones urbaines, reviennent lentement à la vie publique en tant que cadres, étudiantes et membres actifs de la société. Plus de 30 % des élèves qui sont retournés à l’école en 2002 étaient des filles et un tiers des enseignants étaient des femmes. Des femmes ont pu retrouver leur emploi en tant que journalistes de radio et télévision et des centaines travaillent en tant que fonctionnaires et cadres dans les hôpitaux, des tribunaux, d’autres structures gouvernementales et non gouvernementales, des organismes des Nations Unies et dans le secteur privé. La Commission indépendante des droits de l’homme, la Commission judiciaire et la Commission constitutionnelle comprennent toutes des femmes parmi leurs membres, qui jouent un rôle de premier plan dans la promotion des préoccupations des femmes en ce qui concerne les droits fondamentaux et les réformes judiciaire et constitutionnelle. La MANUA et tous les organismes des Nations Unies collaborent avec ces institutions, afin de veiller à ce que les questions liées à la situation des femmes soient pleinement prises en compte. Je me félicite en particulier à ce sujet du fait que, le 5 mars 2003, l’Afghanistan a déposé les instruments de ratification de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes.
46. Le Ministère de la condition féminine, avec l’appui technique de la MANUA et du Fonds de développement des Nations Unies pour la femme, a pris des mesures afin de faire en sorte que les questions liées à la condition féminine fassent partie intégrante du processus budgétaire relatif au développement national. Le Ministère a également demandé le soutien de l’ONU pour la création d’un groupe de travail sur l’égalité des sexes afin de l’aider à établir un plan directeur pour la promotion des droits des femmes. Des efforts ont été faits pour intégrer les questions relatives aux femmes dans la Constitution. Les deux femmes membres de la Commission constitutionnelle ont eu des entretiens avec des représentants de 15 organismes, organisations et donateurs, en décembre 2002, afin d’examiner les questions procédurales et juridiques relatives à la protection et à la promotion des droits des femmes. Ce dialogue se poursuivra et la prochaine réunion comprendra des membres des autres commissions de Bonn et des représentants de la société civile.
47. Afin de célébrer la Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes, le Ministère a organisé un atelier national consacré à la violence familiale. En outre, le département juridique du Ministère a participé au contrôle de la situation des femmes incarcérées ; son intervention a aidé à obtenir la libération de 23 détenues à Kaboul, en novembre.
G. Développement des médias
48. Au cours des 12 derniers mois, les médias afghans, qui étaient pratiquement inexistants, sont devenus un secteur dynamique, malgré l’insuffisance des ressources et les limitations occasionnelles imposées par les agents de l’État. D’après le Ministère de l’information et de la culture, il existe maintenant plus de 170 publications dans le pays. Les médias électroniques se développent également peu à peu. La plus récente illustration de cette tendance a été le lancement, le 8 mars 2003, d’une station de radio indépendante, en modulation de fréquence, intitulée Voice of Afghan Women. La radio et la télévision afghanes, qui, il y a un an, ne comptaient que trois ou quatre stations en service (contre 18 stations de télévision et 21 stations de radio avant la guerre) exploitent maintenant 11 stations de télévision et 14 stations de radio, malgré les nombreuses limitations entravant leurs programmes, leur champ d’émission et la coordination avec le siège à Kaboul. Divers donateurs, organisations non gouvernementales, institutions, comme le BBC World Service Trust, et programmes des Nations Unies, en particulier la MANUA et l’UNESCO fournissent un appui au développement des médias afghans.
III. Assistance humanitaire, relèvement et reconstruction
A. Assistance pendant la période d’hiver
49. La composante assistance humanitaire, relèvement et reconstruction de la MANUA s’est efforcée d’atténuer les rigueurs de l’hiver pour les groupes les plus vulnérables. Une commission gouvernementale chargée des préparatifs pour l’hiver a été créée sous la direction du Ministère de la reconstruction rurale et du développement ; elle a travaillé en étroite collaboration avec une équipe spéciale pour la préparation de l’hiver, qui réunit des représentants du Gouvernement, des organismes des Nations Unies et des organisations internationales, ainsi que des ONG. En outre, des groupes d’action sous-nationaux ont été créés dans huit secteurs sur l’ensemble du territoire et des membres du personnel des Nations Unies ont été détachés pour travailler avec les autorités provinciales. Cette équipe a aidé à coordonner les efforts visant à répondre aux besoins d’environ 2,2 millions d’Afghans, parmi les plus vulnérables, vivant principalement dans le nord et l’ouest et les hauts plateaux du centre. Grâce au soutien de généreux donateurs, cette population continue de recevoir une aide alimentaire d’urgence et des secours en matière d’abris et d’articles pour lutter contre le froid.
50. Les difficultés initiales en matière de communications ont été atténuées grâce à la fourniture de matériel et d’une formation aux autorités provinciales du Ministère de la reconstruction rurale et du développement. Dans l’ensemble, les besoins non alimentaires ont été satisfaits et environ 95 % des disponibilités alimentaires requises ont été prépositionnés dans l’ensemble du pays, en février 2003. Des réparations d’urgence ont permis de maintenir ouverte, pendant une grande partie de l’hiver, la route empruntant le tunnel de Salang, dans la région nord, grâce aux efforts coordonnés du Ministère de la reconstruction rurale et du développement et d’organisations non gouvernementales partenaires, tandis que la Cellule conjointe de logistique et l’UNOPS ont aidé à maintenir ouvertes d’autres routes d’accès. Des projets concernant la rémunération en espèces du travail ont également créé des revenus pour plus de 30 000 familles et des contrats à forte intensité de main-d’oeuvre ont permis de recruter plus de 2 000 travailleurs, ce qui a contribué à injecter des fonds dans l’économie locale.
B. Réfugiés et personnes déplacées
51. Il existe environ 480 000 personnes déplacées en Afghanistan, dont la plupart dans le sud. Les familles se sentent généralement contraintes de partir pour des raisons de discrimination, d’extorsion de fonds, d’imposition, de sécheresse ou pour des motifs purement économiques. La situation des déplacés s’est quelque peu stabilisée, mais les familles quittent encore la région nord et d’autres familles déjà déplacées continuent d’avancer en quête d’assistance. Le retour des déplacés dans leur communauté d’origine dépendra de l’amélioration de la situation dans les secteurs touchés par la sécheresse, du règlement des conflits fonciers et de l’évolution de la situation politique dans le nord.
52. Certains faits positifs se sont produits dans le cadre des efforts visant à faciliter le retour des déplacés, principalement des Pachtounes, qui ont fui les tensions et l’oppression dans le nord après la chute des Taliban. Le 17 octobre 2002, une " commission du retour pour le nord " a été créée afin de préparer et de superviser le retour de ces déplacés dans la dignité et la sécurité. La Commission est composée de chefs traditionnels, de factions locales, de représentants du Ministère du retour et du rapatriement, de la Commission indépendante des droits de l’homme en Afghanistan, du HCR et de la MANUA. Le Haut Commissaire des Nations Unies aux réfugiés a assisté à une réunion plénière de la Commission le 27 février, lors de laquelle ont été exposées les conclusions d’une enquête visant à déterminer les obstacles entravant le retour des déplacés. Les participants ont adopté une série de recommandations précises visant à faciliter les retours, y compris le désarmement et des mesures en vue de remédier aux conflits fonciers, de lutter contre le recrutement forcé des soldats, de mettre fin à la taxation par des groupes armés et d’exécuter des projets de développement, afin de régler les conflits nés de la pénurie de ressources.
53. En ce qui concerne le retour des réfugiés, le Pakistan, l’Afghanistan et le HCR ont annoncé leur intention de signer, le 17 mars, un accord définissant un cadre triennal pour le retour librement consenti des réfugiés en provenance du Pakistan. Les négociations se poursuivent entre la République islamique d’Iran, l’Afghanistan et le HCR en vue de la prorogation du programme commun concernant le retour librement consenti des réfugiés en République islamique d’Iran. L’ONU continuera de rechercher des solutions mutuellement acceptables avec les pays d’accueil afin d’assurer le retour librement consenti et progressif des rapatriés, compte tenu de la capacité d’absorption de l’Afghanistan. Afin de renforcer cette capacité, le HCR et le PNUD ont signé des accords de coopération bilatéraux, ainsi qu’avec le Ministère de la reconstruction rurale et du développement, afin de coordonner l’appui et l’assistance au retour et à la réinsertion des réfugiés et des déplacés.
C. Santé et nutrition
54. La dernière série de vaccinations contre la poliomyélite a été effectuée en décembre 2002 (voir A/57/487-S/2002/1173, par. 42). Des efforts supplémentaires sont faits dans les secteurs à forte concentration de réfugiés, rapatriés afin d’assurer la vaccination des enfants. En décembre 2002, la campagne contre la rougeole a permis de protéger 8,8 millions d’enfants de 6 mois à 12 ans contre cette maladie pendant toute leur vie. La première série d’une campagne triennale de vaccination antitétanique s’est déroulée en février 2003 ; elle visait 740 000 femmes en âge de procréer. Ces campagnes de vaccination constituent des exemples notables de la coordination et de la planification entre le Gouvernement, les organismes des Nations Unies et les organisations non gouvernementales.
D. Éducation
55. Le Ministère de l’éducation a utilisé les trois mois de vacances scolaires d’hiver pour dispenser une formation intensive aux enseignants. Environ 18 000 instituteurs, dans 29 des 32 provinces, ont été formés à l’enseignement des langues et en ce qui concerne la sensibilisation au danger des mines, et 30 000 enseignants à Kaboul suivent actuellement un stage sur les méthodes d’enseignement général. Des cours accélérés ont été dispensés à 18 000 filles d’un âge supérieur à la normale dans les écoles primaires à Kaboul pendant les mois d’hiver. Sous la direction du Ministère de l’éducation, on prépare actuellement la nouvelle année scolaire qui commence le 22 mars 2003. Les achats et la distribution de fournitures scolaires pour 4,5 millions d’élèves et 80 000 enseignants se poursuivent.
IV. Appui à la Mission
56. La responsabilité principale de la MANUA a été transférée sans heurt du Département des affaires politiques au Département des opérations de maintien de la paix le 1er novembre 2002. La Mission a achevé d’assimiler le personnel et le matériel de la Mission spéciale des Nations Unies en Afghanistan et du Bureau des Nations Unies pour la coordination de l’assistance humanitaire à l’Afghanistan. Elle a établi un inventaire du matériel transféré du Bureau et prépare un plan en vue de sa répartition.
57. Afin de faciliter l’intégration, la MANUA a pris à bail un terrain de 18 hectares à la périphérie de Kaboul, qui servira pour le Centre d’opérations des Nations Unies en Afghanistan, appuyant les fonctions logistiques, administratives et autres des bureaux des Nations Unies qui y partagent des locaux. Les bureaux administratifs de la Mission seront transférés dans le complexe d’ici le 31 mars 2003. Les autres entités des Nations Unies qui doivent transférer, en totalité ou en partie, leurs activités au Centre sont l’UNOPS, le Centre de coordination pour l’action antimines de l’ONU en Afghanistan et le Fonds des Nations Unies pour l’enfance. Le PNUD, le FNUAP, le Programme alimentaire mondial et l’OIM examinent actuellement la question. Le Centre améliorera la sécurité du personnel et permettra de réaliser des économies de loyer substantielles, les locaux communs devant abriter les services de sécurité, les installations de conférence et de formation, le service médical et la cafétéria, les installations de distribution d’eau et les services de maintenance des véhicules.
58. L’un des principaux objectifs de la Mission consiste à réduire les effectifs du personnel international tout en renforçant la capacité du personnel national. La MANUA continue de déterminer les postes d’agent international qui seront remplacés et renforcés par des postes d’agent recruté sur le plan national. Elle met également au point une vaste gamme de programmes de formation du personnel afin de faciliter ce processus.
59. L’infrastructure en Afghanistan demeure rudimentaire ; de ce fait, l’appui concernant l’établissement des listes électorales, les programmes d’éducation civique et l’organisation du scrutin proprement dit représentera une tâche considérable exigeant des ressources substantielles. La Mission s’efforce de déterminer, en consultation avec la Division de l’assistance électorale et le Département des opérations de maintien de la paix à New York, le personnel, le matériel et les ressources matérielles et financières supplémentaires qui seront nécessaires.
V. Mandat et structure de la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan
A. Mandat
60. Le mandat donné à la MANUA par la résolution 1401 (2002) du Conseil de sécurité arrivera à expiration le 28 mars 2003. Si le Conseil décide de le proroger, je propose de le conserver dans les termes définis par cette résolution, selon des modalités qui sont analysées au paragraphe 97 de mon rapport du 18 mars 2002 (A/56/875-S/2002/278).
B. Structure générale de la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan
61. Je propose de maintenir la structure de la MANUA, telle qu’elle est présentée dans mon rapport du 18 mars 2002 : elle comprend un bureau du Représentant spécial du Secrétaire général, un pilier " affaires politiques ", un pilier " secours, relèvement et reconstruction " et un élément d’appui à la Mission. Grâce à l’expérience acquise durant la première année de fonctionnement, et en raison de nouvelles demandes auxquelles il faut s’attendre durant l’année qui vient, je propose d’apporter diverses modifications à cette structure dans quelques domaines essentiels, comme il est indiqué plus bas.
C. Bureau du Représentant spécial du Secrétaire général
62. Les fonctions et la structure du bureau du Représentant spécial resteraient essentiellement celles que j’ai décrites dans mon rapport du 18 mars 2002, à l’exception d’une légère augmentation des effectifs de conseillers militaires et de police civile. Étant donné la complexité grandissante et l’importance nouvelle de la réforme du secteur de la sécurité, je propose de porter à huit officiers au total le Groupe de conseillers militaires. Il pourrait ainsi couvrir une proportion plus grande du pays. Les fonctions du Groupe resteraient inchangées et consisteraient à fournir des avis au Représentant spécial du Secrétaire général et aux dirigeants de la MANUA, et à assurer la liaison, sur le plan militaire, avec les diverses administrations afghanes, les autorités militaires régionales, la coalition menée par les États-Unis et la FIAS.
63. De même, en raison de l’importance de la réforme de la police pour la situation d’ensemble au regard de la sécurité en Afghanistan, il faut revoir la fonction des conseillers en matière de police civile. En février 2002, la MANUA a réalisé un examen exhaustif de la façon dont la composante " police civile " de l’ONU pourrait concourir à la réforme en cours de la police afghane. Sur la base de cet examen, j’estime que les conseillers des Nations Unies en matière de police civile pourraient, en étroite collaboration avec le groupe allemand chargé de la formation des policiers, fournir plus fréquemment des avis au Représentant spécial ainsi qu’aux autorités afghanes au sujet de la réforme de la police à Kaboul et dans les provinces. Je recommande donc de porter à huit le nombre total de conseillers en matière de police civile.
64. La réforme du système pénitentiaire est également un aspect essentiel de l’avènement de la légalité en Afghanistan. En 2002, le Gouvernement finlandais a détaché un spécialiste des questions pénitentiaires pour aider mon Représentant spécial à mesurer les besoins du système pénitentiaire de l’Afghanistan. Cette fonction consultative a joué un rôle majeur dans l’augmentation de l’aide apportée aux établissements pénitentiaires du pays. Je recommande donc l’adjonction aux effectifs de la MANUA d’un spécialiste des questions pénitentiaires, qui dépendrait du bureau du Représentant spécial.
65. Pour mieux intégrer les politiques et l’action menées par les Nations Unies sur les questions complexes du désarmement, de la démobilisation et de la réinsertion des ex-combattants et le contrôle des drogues, je tiens à indiquer aux États Membres que le conseiller principal du PNUD pour les opérations de désarmement, démobilisation et réinsertion a également été désigné comme Conseiller principal du Représentant spécial sur les mêmes questions, et que le représentant de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime dans le pays a de même été désigné Conseiller principal du Représentant spécial pour le contrôle des drogues. Comme ces fonctions sont financées hors budget de la MANUA, cette intégration n’entraînera pas de ponction supplémentaire dans les ressources de la Mission.
D. Premier pilier : affaires politiques
66. Le premier pilier continuera d’être dirigé par un Représentant spécial adjoint pour les affaires politiques, avec les attributions et les moyens décrits dans mon rapport du 18 mars 2002 (par. 104 et 105), à l’exception des tâches liées à la convocation de la Loya Jirga d’urgence, qui sont désormais achevées. La mise en oeuvre de l’Accord de Bonn et le processus de paix amèneront le premier pilier à effectuer un certain nombre de tâches qui ne sont pas expressément mentionnées dans mon rapport du 18 mars 2002, mais qui sont parfaitement dans l’esprit du mandat confié à la Mission. Ces tâches sont les suivantes : a) Donner des conseils politiques et en matière d’orientations au bureau du Représentant spécial au sujet de la réforme du secteur de la sécurité, de la coordination des activités de réforme de ce secteur entreprises par la MANUA et des organismes des Nations Unies, et de la liaison avec les autorités afghanes et avec les acteurs locaux et internationaux intervenant dans cette réforme ; b) Fournir des conseils et une assistance à la Commission constitutionnelle, coordonner l’assistance internationale fournie à cette commission, donner des avis et coordonner l’assistance fournie à l’assemblée constituante (Loya Jirga constituante). On a vu au paragraphe 14 que cela nécessitera l’adjonction d’au moins un spécialiste du droit constitutionnel ; c) Aider le Gouvernement afghan à préparer les élections nationales, à établir les listes électorales et à coordonner l’aide internationale. Comme il est indiqué au paragraphe 16 ci-dessus, cette tâche appellera la création d’une section électorale, ayant à sa tête un expert chevronné, internationalement reconnu, secondé, à Kaboul et dans les provinces, par des effectifs suffisants.
E. Deuxième pilier : assistance humanitaire, relèvement et reconstruction
67. Le deuxième pilier, dirigé par le Représentant spécial adjoint chargé de l’assistance humanitaire, du relèvement et de la reconstruction, aurait les attributions indiquées dans mon rapport du 18 mars 2002. Son action, en 2003, serait conforme aux principes suivants : a) Aider à élaborer des institutions nationales, provinciales et locales de plus en plus autonomes et responsables, capables de diriger, coordonner et suivre l’action de reconstruction nationale et la réaction à une crise humanitaire prolongée ; b) Aider les Afghans à reconstruire leur pays, dans la paix, la sécurité et la stabilité ; faciliter la fourniture de l’aide internationale de façon qu’elle contribue à l’édification de l’État, aux opérations de reconstruction nationale et à la recherche de solutions viables à terme aux besoins immédiats de survie et de protection, dans le respect des droits de l’homme et des principes d’égalité des sexes.
68. Conformément à son mandat actuel, et sur la base de l’expérience acquise durant l’année écoulée, le deuxième pilier de la Mission s’emploierait aux tâches suivantes, dans la période qui vient : a) Assurer la cohérence des priorités de programme des Nations Unies et des priorités nationales ; b) Assurer des relations de complète transparence avec les homologues nationaux, par des travaux communs de planification, d’application et d’examen des programmes ; c) Assurer une maîtrise, par les autorités gouvernementales, de l’information grâce à un concours accéléré à la création de capacités publiques de gestion de l’information, à des protocoles et procédures d’évaluation, et, dans l’intervalle, s’assurer que les examens et évaluations sont bien menés en commun ; d) Au niveau central, accélérer la fourniture d’une aide technique aux différents ministères ; e) Au niveau provincial, soutenir les mécanismes de coordination administratifs afin de renforcer les liens entre l’administration centrale et les provinces ; f) Examiner les procédures opérationnelles des Nations Unies, pour trouver les moyens concrets d’en accroître l’efficacité ; et g) Accélérer le processus de " régularisation " de la programmation interorganisations au niveau du pays, chaque fois que possible, grâce à l’établissement d’un cadre de développement commun au Gouvernement afghan et au système des Nations Unies, de façon que l’Appel global interinstitutions (qui est actuellement le principal moyen d’assurer la transition) soit consacré uniquement à la satisfaction des besoins humanitaires.
VI. Observations
69. Le présent rapport est publié au moment où s’achève le premier mandat d’un an de la Mission. L’Administration afghane de transition et la communauté internationale, aux côtés de la MANUA, peuvent se targuer d’avoir à leur actif un certain nombre de réalisations notables. Parmi celles-ci, il faut indiquer que le calendrier prévu par l’Accord de Bonn a, pour l’essentiel, été respecté jusqu’à présent, que 1,5 million de réfugiés et 500 000 déplacés ont regagné leurs foyers, que 3 millions d’enfants afghans vont maintenant à l’école, qu’une nouvelle monnaie a été émise, que le Gouvernement s’est doté d’un budget national détaillé et qu’aucune reprise majeure des combats n’a eu lieu.
70. En même temps, le processus de paix demeure fragile. L’insécurité et les lacunes de l’ordre public continuent à affecter la vie quotidienne des Afghans, ce qui peut les amener à retirer leur adhésion au processus de transition. Trop nombreux en effet sont les Afghans qui déplorent la lenteur de la reconstruction et du développement économique, et attendent avec impatience le " dividende de la paix ". En outre, de trop nombreux Afghans sont encore amenés à se demander si le processus de transition est authentiquement national, si la vie politique va reprendre et si, quelle que soit leur appartenance politique ou ethnique, les Afghans auront bien tous les mêmes chances. Après 23 années de guerre, les progrès accomplis en 2002 ont seulement commencé à affermir les bases encore fragiles de la paix, mais la stabilité et la réconciliation nationale sont encore loin d’être définitivement assurées.
71. Cet objectif suppose que des progrès soient accomplis sur plusieurs fronts en 2003. Les principales institutions étatiques doivent être affermies et il faut mieux contrôler les problèmes persistants posés par l’insécurité et les défaillances de l’ordre public. L’armée et la police sont à cet égard des institutions essentielles, et la progression des opérations de désarmement, démobilisation et réinsertion et la réforme du secteur de la sécurité (voir par. 27 ci-dessus) contribueront à améliorer la situation au regard des droits de l’homme et à accélérer le développement économique et aideront le Gouvernement à renforcer son autorité et sa légitimité. Je salue le travail soigneusement coordonné qu’accomplissent les autorités afghanes et la communauté internationale dans cette direction et j’engage le Gouvernement afghan à prendre les mesures nécessaires pour poursuivre la réforme des institutions chargées de la sécurité ; je compte que la communauté internationale continuera à soutenir la réforme du secteur de la sécurité.
72. L’adoption d’une constitution, en 2003, est un autre élément du processus de Bonn indispensable à l’édification de l’État. Le succès permettra de poser les bases juridiques des institutions d’un Afghanistan paisible et démocratique. Le débat sur les questions constitutionnelles, en Afghanistan, abordera nécessairement les valeurs essentielles et la souveraineté de ce pays. Il est donc capital que la rédaction de la constitution, les consultations, le débat, la décision ultime, soient toujours le fait des Afghans eux-mêmes, qui, seuls, peuvent apprécier vraiment les aspirations du peuple afghan et les refléter dans la constitution, tout en garantissant qu’elle aidera un Afghanistan moderne à prendre la place qui lui revient dans la communauté internationale.
73. Il faudra aussi avancer en 2003 la préparation des élections prévues en juin 2004, comme indiqué au paragraphe 17 ci-dessus. La MANUA et les organismes des Nations Unies sont disposés, sous réserve de l’approbation du Conseil de sécurité, à répondre à la demande d’aide du Président Karzai. Certaines entités internationales non gouvernementales ayant une connaissance propre des questions électorales ont également indiqué leur intention, qui est bien venue, d’apporter leur aide. Un programme bien coordonné d’assistance électorale sera nécessaire, et il faut avant tout s’assurer que la commission électorale afghane, qui n’a pas encore été constituée, le sera d’une manière qui lui permette d’organiser les élections et qu’elle deviendra une institution viable pour les futures consultations électorales.
74. À mesure que se dérouleront en 2003 les processus politiques complexes liés à la constitution et la préparation des élections, les Afghans doivent être assurés que ces processus, et l’effort de création d’institutions dans son ensemble, les serviront tous de la même façon. À l’heure actuelle, il demeure des indices clairs que, en dépit du comportement d’homme d’État du Président Karzai, qui dirige le pays, certains éléments de l’administration de transition continuent à être perçus, par les Afghans, comme servant uniquement un segment ou un autre du peuple afghan. Le processus politique doit donc être large, et assez ouvert pour que tous les Afghans qui souhaitent participer de bonne foi à la vie politique puissent le faire et ne soient pas laissés sur la touche, ce qui, de plus en plus, les inciterait à rejoindre les rangs de ceux qui contrecarrent activement le processus de paix. Il y a déjà trop de fauteurs de troubles qui auraient, croit-on savoir, l’intention de compromettre le processus de paix en Afghanistan ; ceux-ci ne doivent pas douter un instant que les autorités constituées en Afghanistan et la communauté internationale seront prêtes à protéger le processus de paix, et à s’assurer qu’il sera mené à bonne fin.
75. Pour de nombreux Afghans, une amélioration dans la lutte quotidienne pour la survie, plutôt que la politique, sera la pierre de touche du succès du processus de paix. À ce sujet, le succès de l’effort de reconstruction sera décisif, car, sans celui-ci, le citoyen ordinaire risque de perdre patience, et la légitimité du Gouvernement risque d’être entamée. La volonté généreuse de la communauté internationale d’aider l’Afghanistan devra être préservée et les grands projets d’équipement et de création d’emplois devront être progressivement mis en oeuvre, pour faire en sorte que les tâches élémentaires de reconstruction actuellement prévues soient bien réalisées. Aussi longtemps qu’ils verront cette reconstruction progresser de façon tangible, les Afghans, dans tout le pays, se trouveront encouragés à assumer progressivement la responsabilité de la reconstruction de leur pays.
76. L’Afghanistan continuera à avoir besoin du soutien politique et financier de la communauté internationale pendant quelque temps encore. En l’absence d’un tel engagement, les progrès accomplis jusqu’à présent risquent non seulement de s’essouffler, mais même d’être dangereusement mis en mal. Plusieurs États Membres ont assuré à nouveau le Président Karzai et moi-même qu’ils avaient l’intention d’honorer les engagements qu’ils ont pris, attentifs aux périls qui ne manqueraient pas de se faire jour à nouveau si l’Afghanistan était une fois de plus oublié. Ces assurances sont tout à fait bienvenues, avant tout aux yeux des Afghans eux-mêmes, qui demeurent inquiets de voir que d’autres tensions, dans la région, risquent, à ce moment critique, de détourner de l’Afghanistan l’attention et l’aide de la communauté internationale. Je demande instamment aux donateurs de continuer à honorer les engagements qu’ils ont pris à l’égard de l’Afghanistan et à participer au processus de paix et de reconstruction au cours de l’année à venir, comme ils l’ont fait pendant l’année écoulée.
77. Je tiens à remercier le Gouvernement turc pour la compétence et le dévouement de ses officiers et de ses soldats durant les huit mois pendant lesquels ce pays a dirigé la FIAS, ainsi que chacun des 29 États Membres qui fournissent du personnel à la Force. J’exprime également ma gratitude aux Gouvernement allemand et néerlandais, qui assument maintenant la responsabilité de la FIAS.
78. Enfin, je saisis cette occasion de remercier mon Représentant spécial, Lakhdar Brahimi, ainsi que tout le personnel de la MANUA, pour leur volonté constante de contribuer au processus de paix en Afghanistan.
Restez en contact
Suivez-nous sur les réseaux sociaux
Subscribe to weekly newsletter