L’OSCE vient de conclure une conférence à Berlin sur l’antisémitisme en présence des représentants de 55 pays. Bien que cette conférence ait été organisée en fanfare pour faire face à l’antisémitisme, elle n’a produit qu’une déclaration faible qui ne parvient pas à créer les institutions nécessaires pour combattre ce problème. On assiste à une nouvelle poussée de l’antisémitisme ces dernières années et un sondage dans dix pays européens a démontré que dans huit d’entre eux, 40 à 60 % de la population pensait que leurs concitoyens juifs avaient avant tout une loyauté envers Israël.
Cette croissance de l’antisémitisme passe souvent par des codes et par la critique d’Israël. Ce nouvel antisémitisme a poussé les institutions juives à adopter une mentalité d’assiégé. En France, le nombre d’incidents antisémites moyen est passé de dix dans les années 90 à cent vingt entre 2000 et 2002. Beaucoup de juifs n’osent plus affirmer leur judaïté en public et, sans la protection continuelle de la police, les juifs seraient intolérablement vulnérables. 33 à 45 % des juifs français songent à émigrer. Les causes de la résurgence de l’antisémitisme sont variées selon les pays : affaiblissement du tabou de l’expression antisémite, existence d’une large population islamique définissant les juifs comme leurs ennemis, résurgence de la droite politique (en Allemagne spécifiquement, c’est la lassitude des évocations de l’holocauste), la capacité du conflit au Proche-Orient à inciter aux actions contre les juifs et la permissivité européenne face à ce discours.
La reconnaissance du phénomène lors de la conférence de l’OSCE est en soi un progrès, il reflète la reconnaissance par Jacques Chirac de l’antisémitisme dans son pays. Toutefois c’est insuffisant, il faut que les gouvernements européens soient décidés à combattre à tout prix les agressions contre les juifs et mettent en place une conférence permanente sur l’antisémitisme.

Source
Los Angeles Times (États-Unis)

« Europe’s Toothless Reply to Anti-Semitism », par Daniel Jonah Goldhagen, Los Angeles Times, 30 avril 2004.