Alors que le président Fidel Castro s’est provisoirement démis de ses pouvoirs, pour raison de santé, et que la Maison-Blanche a planifié une intervention paramilitaire pour prendre le contrôle de Cuba, les médias dominant donnent la parole aux dirigeants de la Fondation nationale cubano-américaine. Or, celle-ci, loin d’être représentative des exilés cubains, est une organisation d’extrême droite, richement dotée, dont l’activité principale est de fomenter des attentats terroristes sur l’île avec le soutien logistique de la CIA.
Le 22 juillet 2006, la Fondation nationale cubano américaine (FNCA) a célébré le 25ème anniversaire de sa création à l’Hotel Biltmore de Coral Gables. Cependant, la plus puissante organisation de l’extrême droite cubaine des États-Unis, touchée par un nouveau scandale, n’a pas réellement pu profiter de ces festivités.
En effet, un mois plus tôt, le 22 juin 2006, M. José Antonio Llama, ancien directeur de la FNCA, a révélé au grand jour ce que tout le monde savait déjà depuis longtemps : la FNCA est une organisation terroriste. M. Llama a reconnu avoir créé, avec des membres de sa hiérarchie, un groupe paramilitaire afin de réaliser des attentats contre Cuba et d’assassiner son président Fidel Castro [1].
Selon « Toñin », ainsi est-il surnommé par ses proches, la FNCA a disposé d’un hélicoptère de charge, 10 avions ultralégers dirigeables à distance, 7 embarcations, une vedette rapide Midnight Express et une quantité infinie de matériel explosif. « Nous étions impatients face à la survie du régime de Castro suite à l’effondrement de l’Union soviétique et le camp socialiste. Nous voulions accélérer la démocratisation de Cuba en employant n’importe quel moyen pour y parvenir », a-t-il confessé [2].
L’ancien directeur, âgé désormais de 75 ans, a expliqué dans les moindres détails sa trajectoire terroriste. Par exemple, il a souligné que le plan d’assassinat contre M. Fidel Castro, planifié en 1997 avec quatre de ses complices, durant le Sommet ibéro-américain de l’Île Marguerite au Venezuela, a été déjoué suite à l’intervention des autorités portoricaines alors qu’il se trouvait sur son bateau La Esperanza. Mis en examen, il a été acquitté avec tous ses acolytes en décembre 1999 pour… manque de preuves [3].
Suite à ce procès, M. Llama a pris ses distances avec la FNCA, car cette dernière avait refusé de prendre en charge ses frais de justice, ainsi que ceux de ses compères. Les révélations de ce personnage sont dues à un différent financier avec l’organisation extrémiste de Floride. En effet, M. Llama accuse les dirigeants de la FNCA d’avoir détourné les 1,4 millions de dollars qu’il a personnellement apportés pour la création de l’aile paramilitaire. « Où sont les bateaux et les avions que j’ai financés avec mon argent ? Que sont-ils devenus ? Qui dispose des titres [de propriété] originaux ? », s’est-il plaint [4].
M. Llama raconte que le projet d’organisation d’attentats terroristes contre Cuba a été élaboré durant le congrès annuel de la FNCA de juin 1992. L’idée avait été lancée par l’homme d’affaires M. Miguel Angel Martínez, qui avait déclaré qu’il fallait « faire plus que du lobbying à Washington » pour renverser le gouvernement cubain. Deux présidents de l’organisation, M. José « Pepe » Hernández et Jorge Mas Canosa, ont été désignés par les autres membres pour former le groupe terroriste. « Nous avons alors commencé à nous réunir et lister tout ce qu’il fallait acheter », s’est-il souvenu [5].
D’après M. Llama, d’autres exilés cubains ont fait partie du groupe paramilitaire, tels que MM. Elpidio Núñez, Horacio García et Luis Zúñiga, qui ont quitté la FNCA en 2001 pour fonder le Conseil pour la liberté de Cuba (CLC), Erelio Peña, Raúl Martínez, Fernando Ojeda, Domingo Sadurní, Arnaldo Monzón Plasencia et Angel Alfonso Alemán [6].
L’acquisition de matériel explosif se faisait par le biais de l’homme d’affaires Raúl López, qui avait déjà participé à des activités terroristes contre Cuba dans les années 1960. Étant propriétaire d’une entreprise autorisée à acheter des explosifs pour ouvrir des canaux d’écoulement dans l’industrie sucrière du Sud de la Floride, M. López pouvait ainsi fournir de la dynamite au groupe criminel [7].
M. José « Pepín » Pujol, âgé de 76 ans et ami intime du terroriste notoire M. Luis Posada Carriles, était chargé de l’acquisition des embarcations depuis 1993. « Le [bateau] Pélican a été enregistré à mon nom. Le procédure était la suivante : je cherchais les bateaux, Toñin effectuait le paiement initial, et le garant était Elpidio Núñez », a-t-il précisé [8].
Concernant M. Pujol, il est actuellement accusé d’avoir fait entré illégalement M. Posada Carriles aux États-Unis à bord du bateau Santrina, le 18 mars 2005. Il avait bénéficié de la complicité MM. Ernesto Abreu, Santiago Alvarez, Gilberto Abascal et Ruben López Castro [9].
M. Luis Posada Carriles est ancien agent de la CIA comme le révèlent des documents déclassifiés de l’Agence. Il a officiellement travaillé pour ce service du 26 mars 1965 au 11 juillet 1967. Il est responsable, entres autres, de l’explosion de l’avion commercial de Cubana qui avait coûté la vie à 73 personnes le 6 octobre 1976 [10].
Le 12 juillet 1998, il avait déclaré au New York Times qu’il était l’auteur de nombreux attentats terroristes, y compris la vague sanglante qui a frappé l’industrie touristique cubaine en 1997 [11]. Il avait affirmé que l’ancien président de la FNCA, Jorge Mas Canosa, finançait directement ses activités criminelles : « Jorge contrôlait tout. A chaque fois que j’avais besoin d’argent, il demandait à ce que l’on me fasse parvenir 5 000 dollars, que l’on me fasse parvenir 10 000 dollars, 15 000 dollars ». Au total, la FNCA a fourni plus de 200 000 dollars au pire terroriste du continent américain [12].
Par ailleurs, M. Posada Carriles, actuellement détenu à El Paso, Texas, a affirmé que Washington était au courant de toutes ses activités terroristes y compris ses plus hauts fonctionnaires, tels que le vice-président de l’époque George H. W. Bush. Il a justifié ses actes en soulignant qu’il les avait entrepris en défense de la sécurité nationale des États-Unis. Son avocat, Eduardo Soto, a déclaré à la presse que son client avait montré « une loyauté absolue aux États-Unis et qu’il ne chercherait jamais à faire du mal à ce pays ou à son peuple » [13] ».
Les services d’immigration étasuniens ne partagent pas cet avis et ont déclaré que M. Posada Carriles constituait une « menace pour la sécurité nationale » du pays. « Au vu de sa longue trajectoire d’actions criminelles et de violence qui impliquent des civils innocents, sa libération représenterait un danger tant pour la sécurité de la communauté que celle de la nation », affirme le document officiel. Le gouvernement étasunien refuse cependant de le juger pour activités terroristes ou de l’extrader vers le Venezuela ou Cuba [14].
Depuis les révélations fracassantes de M. Llama, les autorités judiciaires étasuniennes n’ont pas donné signe de vie. Ni le FBI, ni la police de Miami n’a daigné ouvrir une enquête au sujet de l’existence de ce groupe paramilitaire, destiné à lancer des attaques contre la population cubaine. L’impunité dont jouissent les terroristes d’origine cubaine s’explique en grande partie par les relations qu’ils entretiennent avec les plus hautes sphères du pouvoir.
Par exemple, M. Luis Zúñiga Rey, l’un des personnages accusés de terrorisme par M. Llama, est un intime du président étasunien George W. Bush. Le 10 octobre 2003, il a été invité à la Maison-Blanche où il a reçu une accolade chaleureuse de M. Bush, en présence des caméras de télévision. Deux années auparavant, le 10 octobre 2001, M. Mel Martínez, aujourd’hui sénateur mais qui à l’époque était un haut fonctionnaire du gouvernement étasunien, avait participé à la création du Cuban Liberty Council lors d’une réunion tenue au Biltmore Hotel de Coral Gables. Ainsi, à peine un mois après les terrifiants attentats du 11 septembre, l’administration Bush apportait son soutien à des terroristes [15].
Le 17 février 2006, des groupuscules d’extrême droite d’origine cubaine qui promeuvent la violence terroriste contre l’Île ont tenu une conférence de presse. Dans une déclaration commune, ils ont annoncé la création d’un comité d’aide à « l’insurrection à Cuba ». « Nous somme convaincus que la seule manière de mettre un terme à la tyrannie est de l’affronter et ainsi le comprennent beaucoup de Cubains de l’Île avec lesquels nous travaillerons de manière secrète et discrète », affirme la déclaration, signée par huit organisations déjà impliquées dans le terrorisme contre Cuba (Movimiento de Recuperación Revolucionaria (MRR), Congreso Nacional Cubano, Comandos F-4, Comando Nazario Sargén, Fundación Caribe, Junta Militar, Municipio Bayamo, Cubanos Combatientes No Afiliados) [16].
M. Rodolfo Frómeta, chef des Comandos F-4 a clairement indiqué le chemin à suivre : « Fidel Castro est le plus grand terroriste de ce continent et il faut le liquider à coups de bombes. Quel autre moyen peut-on utiliser contre Fidel Castro si ce n’est les armes ? ». Aucun des participants n’a été inquiété par la justice, alors que la déclaration commune ouvertement terroriste viole la loi de Neutralité des États-Unis [17].
Le 20 avril 2006, M. Roberto Ferro, exilé cubain de 61 ans, a été arrêté par le FBI, à San Bernardino, en Californie, pour la possession d’un impressionnant arsenal de plus de 1 000 armes et d’explosifs, caché dans sa propre maison. M. Ferro a déclaré aux autorités qu’il était membre de l’organisation terroriste de Miami Alpha 66, et que cette dernière avait financé l’acquisition du matériel belliqueux. Il a été mis en examen uniquement pour possession illégale d’armes et non pas en vertu des nouvelles lois anti-terroristes. Pourtant, l’exilé cubain est un multirécidiviste, car il avait déjà été condamné à deux ans de prison pour détention de 5 livres de C-4, un puissant explosif [18].
Quant à Alpha 66, elle n’a pas été mise en cause, car son directeur, Ernesto Díaz Rodríguez, est un ami intime du président Bush. En effet, il avait été invité à la Maison-Blanche le 20 mai 2003, en compagnie de 10 autres représentants de l’extrême droite cubaine de Floride. Le 2 juin 2005, M. George W. Bush avait même envoyé un courrier de remerciement à Alpha 66 pour leur soutien. D’ailleurs, l’organisation dispose d’un camp d’entraînement militaire en Floride, toléré par les autorités [19].
Près de 3 478 Cubains ont perdu la vie à cause du terrorisme orchestré par l’extrême droite de Floride, avec la complicité des États-Unis. Les victimes du terrorisme n’ont que peu de valeur aux yeux de Washington si celles-ci résultent d’actions menées par des alliés – officiels ou non – de l’administration Bush. Ainsi l’a affirmé M. John Bolton, ambassadeur étasunien auprès des Nations unies au sujet de l’agression israélienne contre le Liban. Interrogé aux sujet des victimes civiles, M. Bolton a souligné que l’on ne pouvait pas condamner de la même manière les responsables de pertes civiles si ces derniers étaient israéliens. « Je pense que ce serait une erreur d’établir une équivalence morale entre les victimes d’actes terroristes et les morts de civils qui sont la conséquence tragique et malheureuse d’actions militaires dictées par l’autodéfense. Dans notre système moral et juridique, il y a une énorme différence entre différents actes en fonction des intentions qui les motivent et on ne peut comparer l’acte de prendre pour cible délibérément des civils […] et les conséquences très malheureuses de l’autodéfense », a-t-il précisé [20].
Les célébrissimes « dissidents » cubains, tels que MM. Oswaldo Payá, Vladimiro Roca et Mme Martha Beatriz Roque entretiennent des liens très étroits avec la FNCA, ce qui constitue juridiquement une association mafieuse en lien avec une entreprise terroriste. Jusqu’à présent, la justice cubaine a montré une infinie patience envers eux au vu de ces rapports permanents avec les groupuscules criminels de Floride, car n’importe quel autre pays du monde aurait agi avec vigueur et une extrême sévérité. Mais les « opposants » cubains, liés à la FNCA, doivent savoir que la tolérance du gouvernement de La Havane atteindra un jour ses limites [21].
[1] Wilfredo Cancio Isla, « Revelan un plan para atentar contra Castro », El Nuevo Herald, 22 juin 2006.
[2] Ibid.
[3] Ibid.
[4] Ibid.
[5] Ibid.
[6] Ibid.
[7] Ibid.
[8] Ibid.
[9] Oscar Corral, « Friend Refuses to Say How Posada Arrived in Miami », The Miami Herald, 13 juillet 2006.
[10] Alfonso Cardy & Oscar Corral, « Posada’s CIA Ties Uncovered in Papers », The Miami Herald, 26 juin 2006.
[11] « Les confessions de Luis Posada Carriles », Voltaire, 14 juin 2006.
[12] Ann Louise Bardach & Larry Rohter, « Key Cuba Foe Claims Exiles’ Backing », New York Times, 12 juillet 1998,
[13] Wilfredo Cancio Isla, « Posada afirma que Washington conocía sus labores clandestinas », El Nuevo Herald, 24 juin 2006.
[14] Wilfredo Cancio Isla, « Washington califica a Posada de peligro para la seguridad », El Nuevo Herald, 30 mars 2006.
[15] Jean-Guy Allard, « Escándado entre terroristas en Miami », Granma, 23 juin 2006.
[16] Wilfredo Cancio Isla, « Buscan ayudar a la insurrección contra Castro », El Nuevo Herald, 18 février 2006.
[17] Ibid.
[18] Wilfredo Cancio Isla, « Hallan arsenal en casa de exiliado cubano », El Nuevo Herald, 20 avril 2006 ; Wilfredo Cancio Isla, « Alpha 66 rechaza vínculos con el preso en California », El Nuevo Herald, 21 avril 2006.
[19] Ibid.
[20] Agence France Presse, « Bolton : pas d’équivalence morale dans les pertes civiles », 17 juillet 2006.
[21] Fundación Nacional Cubano Americana, « Mensaje de Vladimiro Roca », « Mensaje de Raúl Rivero », « Mensaje de Oswaldo Payá Sardiñas”, « Mensaje de Marta Beatriz Roque Cabello », www.canfnet.org (site consulté le 10 mars 2005).
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