Les démarches françaises au Liban et en Irak ont constitué un des principaux sujets traités par les médias libanais et régionaux. Après la visite à Beyrouth de l’émissaire français Jean-Claude Cousseran, le chef de la diplomatie française, Bernard Kouchner, n’a pas écarté une ouverture en direction de la Syrie à condition qu’elle respecte la souveraineté du Liban et s’abstienne d’interférer dans l’élection présidentielle.
Tendances et événements au Proche-Orient
Des sources politiques et diplomatiques concordantes affirment que l’administration Bush a mis les dernières touches à son nouveau plan d’action en Irak à la veille de son bras de fer avec le Congrès à la lumière du rapport qui sera présenté par le chef des troupes d’occupation états-uniennes, le général David Petraeus.
Le coup d’envoi de cette nouvelle approche a été donné avec le vote au Conseil de sécurité, à l’initiative de Washington et de Londres, d’une résolution élargissant le rôle des Nations unies en Irak. On assiste en même temps à un retour de la France sur la scène irakienne avec la visite-surprise à Bagdad du ministre des Affaires étrangères, Bernard Kouchner. Bien que le Quai d’Orsay ait tenté de rectifier ses propos au Parisien demandant le remplacement du Premier ministre irakien, Nouri al-Maliki, il est clair que le chef de la diplomatie française inaugure une page nouvelle dans l’engagement de son pays en Irak après une absence de plusieurs années.
Soumis à de fortes pressions de la part des Occidentaux qui souhaitent son départ, M. al-Maliki a enregistré un point, dimanche, en parrainant un accord entre cinq grandes formations politiques, dont le Parti islamique irakien (sunnite), pour jeter les bases de la réconciliation nationale.
Selon des sources fiables, les États-Unis pourraient confier à la France le soin d’organiser une nouvelle conférence régionale et internationale sur l’Irak qui serait accompagnée de l’annonce d’une réduction des GI’s après une vaste campagne médiatique louant la « réussite » de la nouvelle stratégie de Bush dans le pays des deux fleuves. Des allégations démenties par le bilan élevé des pertes US et la poursuite des opérations de la Résistance qui n’ont pu être enrayées malgré l’augmentation des effectifs, décidée en février dernier. Bien au contraire, confrontés à de graves difficultés, les États-Unis assistent avec impuissance au renforcement des relations entre le gouvernement d’al-Maliki d’un côté, l’Iran et la Syrie de l’autre.
Dans ce tableau surréaliste, les journalistes états-uniens ressortent, avec une pointe d’ironie, les articles et les études des analystes néo-conservateurs qui avaient affirmé que Washington projetait d’utiliser l’Irak comme tremplin afin de renverser les régimes iraniens et syriens.
Presse et agences arabes et internationales
WASHINGTON POST (QUOTIDIEN ÉTATS-UNIEN)
L’administration Bush a achevé l’élaboration du plan de confrontation avec l’Iran, basé sur le principe de l’escalade graduelle dans les prochains mois. Première étape, le vote de nouvelles sanctions internationales le mois prochain. La Maison-Blanche a décidé d’ignorer le rapport de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEI) qui affirme que l’Iran a ralenti les opérations d’enrichissement d’uranium. Deuxième étape du plan, mettre sur pied un embargo contre le corps des Gardiens de la révolution pour l’affaiblir et le détruire, parallèlement à l’intensification des tentatives visant à isoler le président Mahmoud Ahmadinejad de son peuple. Robert Baer, ancien officier de la CIA, a estimé que la frappe militaire contre l’Iran aura lieu les six prochains mois.
Une source du Département d’État précise que la colère de l’administration Bush contre le Premier ministre irakien Nouri al-Maliki est surtout due à ses liens étroits avec l’Iran. Des milieux proches de l’ambassadeur à Bagdad, Ryan Crocker, assurent que l’ouverture des États-Unis en direction des sunnites et les timides progrès réalisés sur ce plan s’inscrivent dans le cadre de la préparation de la scène interne irakienne à la confrontation militaire avec l’Iran.
SUNDAY TELEGRAPH (QUOTIDIEN BRITANNIQUE)
La décision de l’administration Bush d’inscrire les Gardiens de la révolution sur la liste des organisations terroristes vise à fournir aux États-Unis une couverture et un argument pour attaquer militairement l’Iran. Le corps d’élite iranien sera intégré à cette liste dans les semaines qui viennent. Il est accusé de soutenir les mouvements qui attaquent les troupes anglo-saxonnes en Irak, le Hezbollah au Liban et le Hamas en Palestine. Un vif débat a lieu entre les conseillers de George Bush sur l’action militaire prévue contre l’Iran. L’entourage du président se demande si les États-Unis doivent lancer une attaque unilatérale contre l’Iran ou sous le couvert du Conseil de sécurité de l’Onu.
L’escalade états-unienne contre Téhéran est en contradiction avec l’évaluation de diplomates européens et de l’AIEA du programme nucléaire iranien. Des diplomates européens soulignent que Téhéran a ralenti ces derniers temps son programme d’enrichissement d’uranium sur le site de Natanz. Cela reflèterait un changement d’attitude de la part du gouvernement iranien après les négociations avec le coordinateur de la politique extérieures de l’Union européenne, Javier Solana.
• Les journaux arabes et internationaux ont commenté la décision du gouvernement israélien de recourir à l’escalade contre Gaza en raison de la poursuite des tirs de roquettes sur des localités israéliennes. De nombreux analystes se sont interrogés sur la pertinence de cette escalade, appelant à d’autres solutions plus réalistes et pragmatiques après les résultats médiocres de la théorie de la sécurité en Cisjordanie et dans la Bande de Gaza.
Dans ce contexte, les ministres Avi Dikhter, Elie Yachay, Jacob Adry et Méïr Shatrit ont appelé à la liquidation des chefs des organisations palestiniennes en raison de la poursuite des tirs de roquettes à partir de Gaza. Dikhter a même défendu l’idée de l’occupation des régions d’où sont lancées les roquettes dans le nord de la Bande. Il n’a pas exclu l’évacuation forcée des habitants de ces secteurs afin que le Hamas réalise les conséquences des tirs de missiles.
• Le ministre israélien du Tourisme, le colonel Yitzhak Aharonovitch, s’est inquiété de la « libanisation » de la Bande de Gaza et a mis l’accent sur la nécessité de régler le problème au plus vite, avant que le Hamas ne se renforce et ne devienne comme le Hezbollah au Liban. Selon lui, les résistants du Hamas clonent le Hezbollah, prennent l’initiative d’attaquer et poursuivent les tirs de roquettes. Israël doit agir vite et avec fermeté. Il doit revenir au point de passage de Rafah et mettre un terme au trafic d’armes.
HAARETZ (QUOTIDIEN ISRAELIEN)
Aucun progrès concret n’a encore eu lieu entre les Israéliens et les Palestiniens pour l’élaboration d’un accord-cadre qui serait soumis aux participants à la conférence de paix internationale convoquée par George Bush en novembre prochain. Le président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, et le Premier ministre israélien, Ehud Olmert, vont examiner lors de leur prochaine rencontre à Jérusalem les principes sur lesquels doit reposer un tel accord. MM. Olmert et Abbas se rencontreront une seconde fois après la visite dans la région de la secrétaire d’État Condoleezza Rice à la mi-septembre. Ils devront se voir deux autres fois avant la date de la conférence de paix.
YEDIOT AHARONOT (QUOTIDIEN ISRAELIEN)
L’ancien directeur général du ministère des Affaires étrangères, Eytan Ben-Tsur, a estimé que la conférence de paix internationale doit briser le cercle vicieux de la fainéantise de la diplomatie israélienne qui fait du surplace. La diplomatie doit préparer cette conférence avec précision et minutie. Elle doit adopter des positions apaisantes et calmes.
AL-CHARK AL-AWSAT (QUOTIDIEN SAOUDIEN)
Une crise diplomatique a éclaté entre Bagdad et Paris après des déclarations du ministre français des Affaires étrangères, Bernard Kouchner, appelant au remplacement du Premier ministre irakien Nouri al-Maliki. M. Kouchner a évoqué cette question avec la secrétaire d’État Condoleezza Rice, affirmant que le gouvernement d’al-Maliki ne fonctionne pas. Mais le chef de la diplomatie française a exclu le remplacement du Premier ministre irakien auquel George Bush reste attaché. .
Nouri al-Maliki a demandé des excuses à la France après les propos de Kouchner.
« Récemment nous avons reçu le ministre français. Nous étions heureux de sa venue et nous étions optimistes sur le fait que cette visite marque le début d’une nouvelle relation », a déclaré M. Maliki devant la presse. « D’un coup, nous avons été surpris que le ministre fasse une déclaration qui en aucune manière ne peut être qualifiée de diplomatie, quand il a appelé au remplacement du gouvernement », a-t-il ajouté.
Le Premier ministre irakien s’est aussi lancé dans une critique générale de la politique de la France en Irak, l’accusant de se ranger du côté des partisans de l’ancien dictateur Saddam Hussein. « Par le passé, vous avez soutenu l’ancien régime (de Saddam Hussein, ndlr). Aujourd’hui, nous étions satisfaits et c’est le moment que vous choisissez pour apporter votre soutien aux partisans de l’ancien régime. Nous exigeons des excuses du gouvernement français », a-t-il clamé.
M. Kouchner a ajouté, avec une franchise rare pour un haut responsable : « Il y a un fort soutien pour Adel Abdel Mahdi (un des vice-présidents irakiens) qui est quelqu’un de remarquable. Et pas seulement parce qu’il a étudié en France. Il est solide. De tous les gens disponibles, il est celui qui devrait être désigné comme Premier ministre ».
CLARINS (QUOTIDIEN ARGENTIN)
Le prochain président états-unien devra faire face à trois défis en matière de politique étrangère. Premièrement, il devra définir une voie vers la victoire dans la guerre contre le terrorisme dans le cadre d’un système international. Deuxièmement, il devra renforcer ce système international que les terroristes tentent de détruire. Enfin, il devra élargir la base de ce système afin qu’elle englobe la planète toute entière.
Les moyens pour réussir passent par l’édification d’un système de défense plus solide et plus efficace et le développement d’une diplomatie ferme qui devra étendre son influence économique et culturelle. Répandre et sauvegarder les « valeurs américaines » dans le monde doit rester le but de la politique états-unienne à l’intérieur comme à l’extérieur du pays. Mais si nous ne parvenons pas à mettre en œuvre nos idéaux par des moyens pragmatiques, la paix sera difficile à atteindre. .
Tendances et événements au Liban
Après l’évacuation des familles de Fatah al-Islam du camp de Nahr el-Bared, des négociations sont actuellement en cours pour assurer la sortie des combattants intégristes blessés. Seule une trentaine de miliciens, dont le chef du groupe Chaker al-Absi, continuent de résister.
L’interrogatoire des combattants arrêtés et des familles évacuées a permis à l’armée de collecter une masse d’informations sur les secrets d’une guerre qui est entrée dans son centième jour. Se basant sur toutes ces données, le commandant en chef de l’armée, le général Michel Sleimane, a assuré que les services de renseignement syriens n’ont rien à voir avec ce groupe qui est une des branches d’al-Qaida.
Certains journaux libanais ont publié des informations attribuées à des sources militaires affirmant que l’enquête a permis de dévoiler l’implication de certains services de renseignement arabes (non syriens) dans le recrutement, le rassemblement, le financement et l’entraînement des membres de Fatah al-Islam. Certains miliciens étaient même équipés de lignes téléphoniques rechargeables à partir de l’étranger. Ces mêmes sources ont assuré que l’armée ne fera preuve d’aucune indulgence dans la poursuite des investigations et montrera du doigt sans hésitation les parties impliquées et responsables.
Les propos des sources militaires libanaises rejoignent les informations publiées dans de prestigieux journaux anglo-saxons, ainsi que les déclarations de l’ancien chef de la Finul au Liban-Sud, Alain Pellegrini. Le général français avait assuré dans Al-Intikad et sur le site du Réseau Voltaire que ceux qui financent Fatah al-Islam sont les mêmes que ceux qui soutiennent Jund al-Cham, un autre mouvement salafiste basé dans le camp palestinien d’Aïn el-Héloué. Or la député Bahia Hariri, sœur du Premier ministre assassiné Rafic Hairir, avait ouvertement reconnu avoir apporté un soutien financier « à titre humanitaire » à Jund al-Cham.
Le célèbre journaliste états-unien Seymour Hersh, avait de son côté accusé des milieux saoudiens conduits par le prince Bandar Ben Sultan d’avoir financé des groupes extrémistes sunnites, dans le cadre d’une réorientation de la stratégie US opérée sous l’égide du vice-président Dick Cheney. Des milieux pro-gouvernementaux libanais sont impliqués dans cette affaire, selon M. Hersh.
Tandis que de rares figures loyalistes persistent à dire que Fatah al-Islam est un instrument syrien, une source dirigeante de l’opposition libanaise affirme : « Le nombre de Saoudiens et de Libanais impliqués dans ces combats est très important. Ils ont provoqué une bataille qui va se terminer dans les semaines qui viennent, mais qui a saigné l’armée libanaise pendant trois mois. Ces groupes ont été créés dans le cadre d’une stratégie visant à provoquer un conflit sectaire au Liban (entre sunnite et chiites). Toutefois, le Hezbollah ne s’est pas laissé entraîner dans une sale guerre qui aurait dû se dérouler dans les rues de Beyrouth et des autres villes. Les incidents à caractère sectaire du 25 janvier en sont l’illustration la plus vivante ».
Manchettes des journaux libanais
• Le porte-parole du ministère iranien des Affaires étrangères, Mohammad Ali Husseini, a déclaré que Téhéran appuyait toute proposition susceptible de sortir le Liban de la crise. Il a affirmé que le règlement de la crise doit venir de l’intérieur même du Liban.
• L’émissaire français Jean-Claude Cousseran a achevé une mission de trois jours à Beyrouth en soulignant la nécessité que l’élection présidentielle de l’automne au Liban ait lieu comme prévu, mais sans aucun signe d’un déblocage de la crise.
« J’ai insisté auprès de toutes les parties sur la nécessité que l’élection présidentielle ait lieu dans les délais fixés par la Constitution », a déclaré M. Cousseran à la presse, avant de quitter le Liban. Il a ajouté qu’une date serait fixée « très prochainement » pour une nouvelle visite du chef de la diplomatie française Bernard Kouchner.
M. Kouchner s’était rendu fin juillet au Liban, dans le cadre des efforts entrepris par Paris pour sortir ce pays de la crise politique qui bloque depuis novembre 2006 le fonctionnement des institutions. Cette mission n’avait débouché sur aucun résultat concret. La crise s’est encore envenimée à l’approche de l’élection par le Parlement du chef de l’État, prévue, aux termes de la Constitution, entre le 25 septembre et le 24 novembre.
M. Cousseran a rencontré les principaux dirigeants de la majorité comme de l’opposition, dont M. Siniora, le président du Parlement Nabih Berri (opposition) ainsi que des représentants du Hezbollah.
• L’ambassadeur d’Arabie saoudite au Liban, Abdel Aziz Khoja, a quitté Beyrouth le 17 août après avoir informé les autorités libanaises de menaces d’attentats contre sa résidence ou les locaux de l’ambassade.
L’ambassade saoudienne a envoyé une lettre au ministère libanais des Affaires étrangères l’informant de l’existence de menaces d’attentats contre la résidence de l’ambassadeur, la chancellerie ou d’autres intérêts saoudiens au Liban. L’information a été confirmée par une source diplomatique arabe.
Le document précise qu’une voiture volée de marque BMW était en train d’être équipée en vue d’un « acte terroriste contre les intérêts saoudiens au Liban, la résidence de l’ambassadeur ou la chancellerie », a-t-on ajouté sous couvert de l’anonymat.
La lettre envoyée au ministère des Affaires étrangères précise que ces informations ont été obtenues par « les services de renseignement saoudiens ».
M. Khoja a confirmé samedi au quotidien saoudien Al-Chark Al-Awsat l’existence de menaces « contre les intérêts saoudiens et contre ma propre personne ».
Ce journal, proche des cercles dirigeants saoudiens, ajoute que l’ambassadeur Khoja a reçu récemment des menaces, précisant qu’il a déjà été menacé quatre ou cinq fois par le passé.
M. Khoja, qui participait aux efforts de médiation entre le pouvoir et l’opposition, avait été reçu par le président du Parlement Nabih Berri, en début de semaine dernière.
Audiovisuel libanais
NTV (INDEPENDANTE, SENSIBLE AUX THESES DE L’OPPOSITION)
Émission : La semaine en une heure
– Invité : Nassib Lahoud, candidat à l’élection présidentielle (14-Mars)
Quel que soit le nom du prochain président, il devra respecter la résolution 1701 et s’engager à mettre en œuvre toutes les résolutions internationales.
Certains des sept points du plan Siniora (proposé à Rome en juillet 2006 pour mettre un terme à l’agression israélienne) doivent être amendés. Cela doit se faire autour d’une table du dialogue.
La nature des relations entre le Liban et la Syrie a été définie à la table du dialogue nationale : établissement de relations diplomatiques et définition des frontières.
La Syrie doit coopérer et accepter les décisions du tribunal international chargé de juger les assassins de l’ancien Premier ministre Rafic Hariri.
Damas doit reconnaître l’indépendance et la souveraineté du Liban.
Tendances est un bulletin quotidien de veille politique sur le Proche-Orient, réalisé par l’agence New Orient News à Beyrouth. Retrouvez-le sur Voltairenet.org, en versions arabe, anglaise et française. Consultez également Indicators, le bulletin quotidien de veille économique sur le Proche-Orient, disponible en versions anglaise et arabe.
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