Après avoir plongé l’Irak dans le chaos pour interdire aux autres puissances industrielles d’exploiter son pétrole, le Pentagone étudie les moyens d’étendre son action à l’Iran. Ainsi que nous l’avons souvent expliqué, le but n’est pas de pomper le pétrole aujourd’hui, mais de s’approprier des réserves pour demain. Vu du point de vue de la population états-unienne cette stratégie des majors est incompréhensible et se solde par la mort d’enfants du pays partis sous les drapeaux.
D’après un article paru dans le journal britannique Sunday Times du 2 septembre, le Pentagone a mis sur pied un plan d’attaques aériennes massives visant la destruction de 1 200 cibles stratégiques en Iran en trois jours. La semaine dernière, Alexis Debat, directeur du département « terrorisme et sécurité nationale » du Nixon Centre, a expliqué lors d’une conférence du journal conservateur de politique étrangère National Interest que l’armée n’avait pas l’intention d’« attaquer de manière ponctuelle » les centrales nucléaires iraniennes mais « qu’ils étaient en train d’éliminer l’armée iranienne entière ».
Bush a déjà tout mis en œuvre. Suivant le modèle de Karl Rove (ancien conseiller du Président), on a bien prévu le timing de la démission d’Alberto Gonzalez en le plaçant entre deux longs discours du Président, l’un assurant le soutien du Congrès pour d’autres 50 milliards de dollars destinés à l’occupation de l’Irak, l’autre nous faisant peur pour que nous soutenions une guerre contre l’Iran. Gonzalez ayant pris la clé des champs, il nous reste de savoir qui se trouvera à sa place et dans quelle mesure ce nouveau candidat facilitera l’occupation de l’Irak et l’attaque contre l’Iran.
Un nom mis en avant comme troisième ministre de la Justice sous Bush, est Joe Lieberman, sénateur « indépendant » de Connecticut. Lieberman, qui soutient le recours aux moyens militaires contre l’Iran, était la seule personne que Bush avait citée dans son discours du 28 août devant l’American Legion. Appelant l’Iran le « plus important sponsor étatique mondial du terrorisme », Bush a promis « de s’opposer aux activités meurtrières de Téhéran ».
Espionnant des États-uniens par des moyens illégaux et se débarrassant de « Bushies illoyaux », Gonzalez a huilé les rouages de la torture de Bush et Cheney enfreignant les Conventions de Genève.
Il est à craindre que Lieberman fasse de même en convainquant le ministère de la Justice de se prononcer clairement en faveur d’une attaque contre l’Iran. Bush en sortirait deux fois gagnant : le gouverneur républicain de Connecticut nommerait un Républicain comme successeur de Lieberman et le contrôle du Sénat serait rendu au « Grand Old Party », aux Républicains. Un Sénat contrôlé par les Républicains réaliserait l’agenda et ferait avancer le plan de Bush et Cheney.
Lieberman est étroitement lié à l’American Israeli Public Affairs Committee (AIPAC). Selon Juan Cole, professeur à l’université de Michigan, « l’AIPAC exerce un pouvoir important grâce à une alliance avec la droite chrétienne qui a adopté une idéologie bizarre, celle du ‹zionisme chrétien› selon lequel Jésus Christ réaparaîtra dès que l’épuration éthnique des Palestiniens sera accomplie. » Et d’ajouter : « Sans ces millions d’alliés chrétiens des Zionistes l’AIPAC aurait beaucoup moins d’influence et serait moins efficace ».
Mis à l’épreuve en tant que candidat aux présidentielles en 2004, Liebermann a atteint 100% des voix de l’AIPAC. Quand la Chambre des Représentants était en train de voter une résolution, exigeant du Président qu’il demande l’approbation du Congrès avant d’attaquer l’Iran, le lobby de l’AIPAC a fait échouer cette initiative.
Le fait que Bush gonfle l’existence prétendue d’armes de destruction massive en Iran, rappelle le temps avant l’opération « Iraqi disaster » où Bush avait dupé le monde entier en déclarant que l’Irak était en possession d’armes de destruction massive. Sa déclaration qu’une force nucléaire iranienne provoquerait « un holocauste nucléaire » dans toute la région, rappelle l’image du « champignon atomique » que Bush avait évoquée quand il voulait convaincre le monde du « danger irakien » avant la guerre d’Irak.
Mais quel dommage pour Bush, que l’Agence internationale de l’énergie atomique de l’ONU (AIEA) vienne de constater que le programme iranien d’enrichissement d’uranium travaille bien en dessous des capacités et que l’Irak est donc loin de produire des quantités significantes de combustible nucléaire. D’après le rapport de l’AIEA, « les autorités iraniennes ont autorisé l’accès aux matériaux nucléaires en question et prouvé l’acquisition et l’emploi des matériaux nucléaires ».
L’Iran et l’AIEA se sont mis d’accord sur un plan de coopération afin de résoudre pas par pas toutes les questions restées ouvertes. L’accord souligne « qu’il ne reste plus d’autres problèmes à résoudre concernant le programme nucléaire et les activités respectives de l’Iran dans le passé ». L’accord est considéré comme « un grand pas en avant ».
« C’est la première fois que l’Iran est prêt à discuter toutes les questions ouvertes qui ont provoqué cette crise de confiance », a déclaré le directeur général de l’AIEA Mohamed ElBaradei. « En ce moment pour moi c’est tout à fait clair qu’il faut donner à l’Iran la chance de montrer sa bonne volonté. Des sanctions seules ne contribueront pas à une solution durable, j’en suis sûr. »
En 2003, quand Mohamed ElBaradei avait rapporté qu’il n’y avait pas de preuves que l’Iran avait relancé son programme nucléaire, la Maison Blanche n’avait pas été contente. Et quand Saddam Hussein avait commencé à coopérer avec les inspecteurs d’armes, Bush s’était « fâché » selon Bob Woodward, co-éditeur du Washington Post.
Le serment de Bush « nous allons faire face à ce danger avant qu’il soit trop tard », représente la réalisation de sa doctrine illégale d’une guerre préemptive contre l’Iran, une doctrine qu’il a inaugurée en Irak. En exigeant « un Iran dont le gouvernement est responsable envers ces citoyens, au lieu de leaders qui encouragent le terrorisme et qui poursuivent une technologie qui pourrait être utilisée pour développer des armes nucléaires », Bush a fait savoir qu’il désire un changement de régime en Iran.
Selon Barnett Rubin dans le Global Affairs Blog, une des plus importantes organisations néo-conservatrices a reçu des « instructions » du bureau de Dick Cheney « de lancer une campagne en faveur d’une guerre contre l’Iran, la semaine après le Labor Day ; elle sera coordonnée avec l’American Enterprise Institute, le Wall Street Journal, le Weekly Standard, Commentary, Fox News et les suspects usuels. Il s’agira d’une attaque médiatique largement soutenue, qu’on fera passer sur les ondes afin d’influencer l’opinion publique en faveur de la guerre. Apparemment, ils ne croient pas qu’ils obtiennent le soutien d’une majorité – ils veulent un soutient autour de 35 à 40 % de la population, à leurs yeux c’est ‹beaucoup›. »
Bush et Cheney on créé le White House Iraq Group (WHIG), afin de mener une campagne de propagande, avec le but d’augmenter le soutien pour une guerre contre l’Irak. La Maison Blanche a décidé d’attendre jusqu’après le Labor Day 2002 pour lancer la mission du WHIG. Le chef de cabinet Andrew Card explique que « du point de vue du marketing, on n’introduit pas de nouveau produit en août ». Cinq ans plus tard, ils lancent un nouveau et encore plus dangereux produit – la guerre contre l’Iran. Selon l’historien militaire britannique Corelli Barnett « une attaque contre l’Iran déclenchera sans doute la Troisième Guerre mondiale ».
Nos dépenses militaires ont atteint un montant d’un milliard de dollars tous les 2,5 jours et nous empruntons 2,5 milliards de dollars par jour. Bush charge la sécurité et la prospérité de nos enfants avec des hypothèques. Nous avons perdu plus de 3 700 soldats en Irak, et des centaines de milliers d’Irakiens sont morts.
Nous avons déjà vu à quel point le Congrès cède à l’AIPAC. C’est aux citoyens d’agir. Comme Noam Chomsky a déclaré « le blocus le plus efficace contre une décision de la Maison Blanche de mener une guerre [contre l’Iran], est l’organisation d’une opposition populaire, qui a tellement choqué les dirigeants politico-militaires en 1968, qu’ils ont refusé d’envoyer davantage de troupes au Vietnam ».
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