Il est frappant de voir que les deux candidats offrent les mêmes solutions concernant l’Irak : plus d’implication des Irakiens et davantage d’aide extérieure. Malheureusement, cela ne risque pas de fonctionner. Les deux candidats ont perdu de vue le défi central de notre temps. La « guerre au terrorisme » de George W. Bush est un slogan vide de sens qui perd de vue qu’une guerre civile secoue l’islam et oppose des fanatiques à des modérés de plus en plus intimidés. Par leurs actions menées sans distinction, les États-Unis rendent de plus en plus probable une union des modérés et des islamistes pour affronter l’Amérique.
En Irak, l’occupation est rejetée et le nationalisme s’allie au fanatisme contre l’occupant. Le taux de désertion dans les camps d’entraînement irakien est dangereusement élevé et les actions contre les insurgés donnent de nouvelles recrues aux rebelles. Les choses ne vont pas s’arranger si M. Bush, qui a perdu toute crédibilité, est réélu. Les pays étrangers ne donneront pas plus de fonds et n’enverront pas plus de troupes. Nos alliés pensent déjà à retirer les leurs. Dans le monde islamique, la politique de Bush se confond avec celle d’Ariel Sharon. Elle caricaturée en une politique semi-coloniale. Isolé, Bush pourrait être tenté de se rapprocher de certains pays dans une forme de « sainte alliance » anti-musulmane rassemblant la Russie, l’Inde et Israël. Il est possible de constituer une telle alliance, mais les États-Unis seraient toujours plus isolés en dehors de ce groupe.
John Kerry bénéficie pour sa part d’une meilleure image, mais elle ne suffira pas à motiver la France ou l’Allemagne pour nous aider en Irak. Pour les convaincre, il faut que les États-Unis ne forment pas une « sainte alliance », mais une alliance large qui sera destinée à traiter de fonds trois questions essentielles : le conflit israélo-palestinien, le chaos en Irak et la menace potentielle iranienne. Les États-Unis et l’Europe devront soutenir un plan de résolution du conflit israélo-palestinien fondé sur un retour à des frontières proches de celles de 1967 et constituant un État palestinien démilitarisé. En échange, les pays européens et musulmans devront contribuer au financement de la reconstruction en Irak. Enfin, les États-Unis et l’Union européenne entameront des discussions avec l’Iran sur l’Afghanistan, l’Irak et son programme nucléaire. Avec un tel programme, l’Europe nous suivra sous peine de repousser les États-Unis dans l’unilatéralisme.

Source
International Herald Tribune (France)
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New York Times (États-Unis)
Le New York Times ambitionne d’être le premier quotidien global au travers de ses éditions étrangères.
Clarin (Argentine)
El Mundo (Espagne)

« How to Make New Enemies », par Zbigniew Brzezinski, New York Times, 25 octobre 2004.
« A grand U.S.-European Mideast strategy », International Herald Tribune, 26 octobre 2004.
« Ni Bush ni Kerry entienden la naturaleza del conflicto global », Clarin, 26 octobre 2004.
« Cómo hacer enemigos », El Mundo, 26 octobre 2004.