Le 6 novembre, neuf soldats français ont été tués par les avions de Laurent Gbagbo et en représailles pratiquement toute l’aviation ivoirienne a été détruite. Cela a conduit à une escalade de la violence. La France est en train d’organiser l’évacuation de ses ressortissants alors que l’affrontement entre les forces gouvernementales et l’opposition semble inéluctable. En définitive, la France est prise au piège de sa propre politique africaine. Encore qu’il soit difficile de savoir si la France a une politique africaine. En effet, les intérêts de la France en Côte d’Ivoire sont minimes et les coûts sont plus importants que les gains. On ne peut pas non plus parler d’un positionnement stratégique car il n’y a rien à défendre.
En Côte d’Ivoire comme dans toute l’Afrique, la démocratie est une façade. Les Ivoiriens musulmans ou d’origine burkinabaise n’ont pas accès au pouvoir. Cela fait cinq ans, depuis le coup d’État de 1999, que la Côte d’Ivoire est en état de guerre civile. Même les accords de Marcoussis imposés par la France n’ont rien réglés car Gbagbo joue un double jeu. Tout en faisant mine d’accepter la position française, il continue sa lutte contre l’opposition et il organise des milices racistes. Dans ces conditions, la France n’a pas beaucoup d’options. Soit elle travaille avec l’ONU pour rétablir la sécurité dans le pays et on arrive à une situation à la chypriote, soit elle quitte le pays ce qui risque de provoquer un bain de sang, mais c’est aux Ivoiriens de régler la question.
La gauche française, quand elle était au pouvoir, voulait désengager la France d’Afrique car elle avait compris que la France n’avait plus les moyens d’être un État néo-colonial. La droite ne partage pas ce point de vue car elle a des intérêts privés en Afrique. La seule façon de régler la situation est une intervention forte de l’ONU et un départ de la France, mais il y a un risque qu’un régime fasciste se construise dans le pays.
« La trampa marfilena », par Sami Naïr, El Periodico, 16 novembre 2004.
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