La vraie question avec les Russes est de savoir s’ils vont tirer les bonnes leçons de la crise ukrainienne, comprendre qu’ils ne peuvent plus dominer, qu’un retour en arrière n’est plus possible. Le problème est que l’on ne sait pas où ils en sont et nous ne sommes pas fixés sur leurs motivations profondes. Si c’était le cas, nous pourrions négocier. Il y a des phases où je suis pessimiste, où je pense qu’ils ne changeront jamais, d’autres où j’ai l’impression, au contraire, qu’ils bougent. J’ai l’espoir que l’Ukraine va déclencher une réflexion. Nous avons un problème analogue avec les Européens et nous n’arrivons pas à savoir si les Européens sont prêts à s’engager en Ukraine et dans le Caucase. Ils semblent craindre une confrontation avec la Russie alors qu’on ils peuvent s’engager sans en arriver à l’affrontement.
La situation en Ukraine change tout pour la Géorgie car cela fait progresser la démocratie dans la région alors qu’avant nous étions seuls. C’est une tout autre situation que d’avoir à nos côtés un deuxième pays démocratique de 50 millions d’habitants. Cela veut dire, par exemple, que la mer Noire devient un bassin démocratique. Face à cette situation, l’Union européenne doit construire une nouvelle stratégie et négocier avec la Russie concernant l’avenir de la région. Si on a seulement les Russes et les Américains face à face, cela risque de se transformer à tout moment en confrontation. L’arrivée d’un troisième acteur peut changer cette perception pour Moscou.
« Entretien avec Salomé Zourabichvili », par Salomé Zourabichvili, Le Monde, 8 décembre 2004. Ce texte est adapté d’une interview.
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