Condoleezza Rice a commencé une opération séduction en Europe : présentation élégante, discours plus nuancé, bref une musique plus douce que ce à quoi l’administration Bush avait habitué les Européens ces quatre dernières années. Toutefois, cette attitude mérite d’être étudiée attentivement.
D’abord notons qu’elle a de la chance, son discours conciliant à paris a coïncidé avec la poignée de main entre Ariel Sharon et Mahmoud Abbas qui n’est pas seulement le fait de l’action des États-Unis. En fait, le président que sert Rice, George W. Bush, est inspiré par Ronald Reagan et, comme lui, il veut que son premier mandat où il a été diabolisé et présenté comme un président belliqueux soit suivi par un mandat qui l’inscrira dans l’histoire, comme un président qui a fait la paix et un défenseur de la liberté. Toutefois, Si Reagan a pu apparaître ainsi, c’est parce qu’en face il y avait Mikhail Gorbatchev, un homme disposé à faire la paix. Il est possible que le Gorbatchev de Bush s’appelle Abbas.
Bien sûr ce n’est absolument pas comparable mais commençons au moins par les bonnes nouvelles, non ? On note un développement dans la politique états-unienne et un moment d’opportunité au Moyen-Orient et ces deux évènements sont liés.
L’argument central de Rice est que le grand défi de notre époque trouve son centre au Moyen-Orient et ne sera résolu qu’avec la libéralisation de la région. Après le 11 septembre, cette politique s’est traduite par une opération de police, mais aujourd’hui Rice met en avant les moyens politiques, économiques et culturels. On est passé d’une guerre au terrorisme à court terme à une " guerre à la tyrannie " à long terme, ce qui marque à la fois une transformation de la politique états-unienne, et de l’analyse de Mlle Rice qui est entrée dans l’administration Bush comme une réaliste et qui y a ajouté une dose d’idéalisme.
Toutefois, cette politique, contrairement au second mandat Reagan se heurte à un problème important : Abbas n’est pas Gorbatchev, il n’est pas le dirigeant d’un pays post-totalitaire puissant mais le dirigeant d’un proto-État, et Bush n’est pas son principal interlocuteur : c’est Sharon. Bush et Rice vont également devoir faire face aux tensions avec l’Europe concernant l’Iran. Le second mandat Bush pourrait donc être celui de la fin de l’occident si les liens transatlantiques ne sont pas réparés.
« Seize this moment », par Timothy Garton Ash, The Guardian, 10 février 2005.
« Rice’s EU Charm Offensive », Los Angeles Times, 10 février 2005.
« Dr Rice goes on a charm offensive », The Age, 14 février 2005.
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