Le Bipartisan Policy Center a organisé, le 16 février 2010, un exercice simulant une cyber-attaque contre les Etats-Unis. Il s’agissait de démontrer la vulnérabilité du pays et de mobiliser l’opinion publique, dans la continuité des déclarations alarmistes du directeur national du Renseignement, Dennis Blair au Congrès.
Outre CNN, General Dynamics, SMobile Systems, Southern Company, PayPal, Symantec et l’université de Georgetown ont apporté leur concours logistique. Le scénario a été rédigé par Michael Hyden (ancien directeur de la CIA) et la simulation elle-même a été co-dirigée par Thomas Kean et Lee Hamilton (qui avaient co-présidé la Commission présidentielle sur le 11-Septembre).
La salle de commandement de la Maison-Blanche a été reconstituée à l’hôtel Mandarin de Washington. Les rôles des membres du cabinet ont été joués par :
Rôle | Joueur |
---|---|
Conseiller de sécurité nationale | Michael Chertoff |
Secrétaire d’Etat | John Negroponte |
Secrétaire à la Sécurité de la Patrie | Fran Townsend |
Directeur national du Renseignement | John McLaughlin |
Secrétaire à l’Energie | Bennett Johnson |
Secrétaire au Trésor | Stephen Friedman |
Conseiller du président | Joe Lockhart |
Cyber coordinateur | Stewart Baker |
Secrétaire à la Défense | général Charles Wald |
Selon le scénario, une application gratuite pour téléphone mobile destinée aux fans d’une équipe de basket-ball s’avère être un logiciel espion développé par des islamistes au Soudan et propagé via un serveur russe. En 45 minutes, il infecte les mobiles US, capture les mots de passe et les carnets d’adresse. Bientôt les attaquants peuvent intercepter tous les mails qu’ils souhaitent et intervenir dans les transactions financières. La bourse de Wall Street doit fermer et les contrôleurs aériens doivent annuler la plupart des vols. Les consommateurs abandonnent les téléphones portables et le trafic se reporte sur le réseau Internet qu’il sature…
L’exercice est sensé se dérouler à l’été 2011. Celui-ci est particulièrement chaud en raison des changements climatiques. Le réseau électrique est incapable de répondre à la demande accrue due à l’usage généralisé de la climatisation…
C’est le moment que les terroristes choisissent pour faire sauter une centrale électrique. De nombreux ordinateurs ne sont plus alimentés…
Non seulement la Maison-Blanche est débordée, mais elle ne sait pas contre qui elle doit riposter, ni de quelle manière…
Ah, tout cela ne serait pas arrivé si les Etats-uniens avaient acheté les anti-virus de SMobile Systems et de Symantec, si le département de la Défense avait acheté les derniers gadgets de General Dynamics, et si le pays s’était équipé avec les centrales nucléaires Exelon et les réseaux électriques de la Southern Company !
La simulation visait à démontrer une préparation insuffisante des services de sécurité états-unien et la nécessité de modifier la législation pour attribuer des pouvoirs d’exception à la Maison-Blanche en matière informatique. Des débats télévisés sont programmés pour discuter du nouveau concept de « cyber-hygiène ». Un projet de Loi martiale informatique devrait être prochainement présenté au Congrès qui permettra à l’exécutif de prendre instantanément le contrôle des grandes compagnies privées de téléphonie et d’internet en cas de nécessité de sécurité nationale.
Le Bipartisan Policy Center est un think tank créé en deux ètapes (2004 et 2007) par de grandes entreprises pour faire pression sur le gouvernement US qu’il soit démocrate ou républicain. Il sert de paravent à plusieurs multinationales dont Exelon (centrales nucléaires), Lockheed-Martin (avions), Johnson and Johnson (pharmacie), Ford (automobiles) et ConocoPhilips (pétrochimie). Ses lobbyistes se sont avérés particulièrement bien introduits dans l’administration Obama (notamment Thomas Daschle et George Mitchell).
En 2005, 2006, 2007 et 2008, le Bipartisan Policy Center avait confié au cabinet de relations publiques Downey McGrath le soin d’organiser deux exercices simulant un choc pétrolier (Oil Shockwave). Pour masquer les sponsors, une association ad hoc avait été créée, l’Energy Security Leadership Council, sous la houlette du général John Abizaid et de l’amiral Dennis Blair. Des personnalités de premier plan avaient participé à ces simulations, dont Richard Armitage, Carol Browner, Robert Gates, Robert Rubin, James Woolsey ou encore Philip Zelikov.
L’opération de propagande se terminera samedi et dimanche avec la diffusion par CNN d’un reportage de deux heures sur cet exercice (3 diffusions prévues à 8h, 11h et 14h Eastern Time), les samedi 20 et dimanche 21 février, sous le titre « Nous étions prévenus » (We Were Warned).
Restez en contact
Suivez-nous sur les réseaux sociaux
Subscribe to weekly newsletter