La tendance générale
Éditorial : Partenariat entre Washington et les Frères musulmans
Les troubles qui secouent la région arabe véhiculent des éléments du plan états-unien élaboré pour contenir l’échec stratégique de Washington ces dix dernières années et pour protéger Israël avant la fin du retrait des GI’s d’Irak, en décembre. Il est clair qu’une partie des fils qui sont tirés actuellement ont été tissés ces deux dernières années, en coordination entre l’Administration Obama et ses principaux partenaires internationaux et régionaux.
Une des principales idées étudiées ces deux dernières années s’articule sur le principe de la normalisation des relations entre les États-Unis et les Frères musulmans. L’expérience turque a proposé un modèle de coexistence entre l’adhésion à l’Otan et les relations avec Israël et l’Amérique, tout en prenant en considération les sentiments pro-palestiniens de la rue turque. Ankara a su trouver le juste milieu entre l’appréhension de sa base populaire à l’égard de l’État hébreu et les considérations stratégiques liés à ses relations avec l’Otan et les États-Unis. Mais sans aller jusqu’à prendre des initiatives qui modifieraient radicalement les rapports de forces régionaux au profit de l’axe de la Résistance, incarné par la Syrie, l’Iran, le Hezbollah et le Hamas.
Il semble que la direction internationale suprême de la Confrérie des Frères musulmans ait établi un partenariat avec les États-Unis pour redéfinir son influence politique et économique dans la région arabe. L’Égypte post-révolutionnaire sera le terrain pour tester ce partenariat et tenter de reproduire le modèle turc basé sur la coexistence entre l’institution militaire et un mouvement islamiste, et sur l’engagement de la confrérie à respecter les constantes liées à la sécurité de l’État hébreu et l’accord de camp David après les élections présidentielles et législatives. L’alliance entre les Frères musulmans et les débris de l’ancien parti au pouvoir lors du référendum sur les amendements constitutionnels constitue une preuve de ce nouveau schéma.
Concernant le conflit israélo-arabe, il semble que le « plan de paix », que les États-Unis vont imposer, repose sur l’initiative de Brezinski, basée sur l’abolition du droit au retour des réfugiés l’échange de territoires entre les Palestiniens et l’État hébreu, et un État palestinien démilitarisé. Tout dépend de la réélection d’Obama pour un second mandat.
La réussite de ce plan repose sur plusieurs facteurs. Son acceptation par le Hamas est essentielle. La Turquie et les Européens s’occuperont de convaincre le mouvement palestinien en utilisant la carotte et le bâton.
Mais la Syrie reste le principal obstacle au plan états-unien qui consiste à liquider la cause palestinienne. Affaiblir Damas et noyer la Syrie dans ses problèmes internes devient alors une condition nécessaire. On comprend mieux, dès lors, la convergence des rôles entre l’Arabie saoudite, le Qatar et la Turquie dans la crise syrienne. Que les dirigeants des Frères musulmans syriens fassent la navette entre ces trois pays et appellent à la révolte contre le régime de Bachar el-Assad à partir d’Istanbul, de Riyad ou de Doha devient, alors, compréhensible.
Même le Premier ministre sortant du Liban joue un rôle dans ce plan. Un document révélé par Wikileaks montre la position de Saad Hariri vis-à-vis du régime syrien et des Frères musulmans. Dans un câble publié par le quotidien libanais Al-Akhbar, Hariri affirme : « Il faut en finir définitivement avec le régime syrien ». Il propose un partenariat entre les Frères musulmans et d’anciens responsables du régime et ajoute que la branche syrienne de la confrérie « ressemble dans ses caractéristiques aux musulmans modérés de Turquie. Ils acceptent un gouvernement civil et ils appuient même la paix avec Israël ». Saad Hariri raconte à ses interlocuteurs états-uniens qu’il maintient une relation solide avec le guide spirituel des Frères musulmans en Syrie (aujourd’hui remplacé) Ali Al-Bayanouni. Il insiste auprès des États-uniens pour qu’ils « discutent avec Bayanouni. Observez son comportement et vous verrez des miracles ».
Tous les moyens sont bons pour faire passer ce plan, même s’il faut, pour cela, menacer l’unité interne de la Syrie au risque de plonger le pays dans la guerre civile. En faisant échec au complot visant à la déstabiliser, sous les prétextes des droits de l’homme et de la liberté, la Syrie aura encore une fois torpillé un plan destiné à liquider la cause palestinienne et à pérenniser l’hégémonie.
Pour gagner son pari, Bachar el-Assad doit relever le défi sécuritaire posé par les groupes extrémistes qui sévissent dans son pays. Mais il doit, aussi, lancer impérativement le chantier des véritables réformes politiques, économiques, judiciaires et administratives, pour renforcer la cohésion interne et moderniser son pays.
La tendance en Syrie
Éditorial : de la révolte à l’insurrection armée
Dès le début du mouvement de contestation en Syrie, les prémices d’une insurrection armée sont clairement apparues. Les insurgés se sont faufilés parmi les manifestants qui réclament des réformes, dans le but évident de provoquer les forces de l’ordre qui avaient reçu des ordres présidentiels stricts de ne pas tirer sur les manifestants pacifiques. Souvent, les policiers étaient envoyés sur le terrain sans munitions, justement pour éviter des frictions avec les manifestants qui pourraient conduire à un bain de sang.
Le fait de transformer un mouvement de contestation pacifique en insurrection armée illustre l’impasse dans laquelle se trouvent les forces politiques qui organisent les manifestations en Syrie, et qui sont en grande partie contrôlées, financées ou couvées par les États-Unis, certains pays européens, le prince saoudien Bandar Ben Sultan, le Qatar, la coalition libanaise du 14-Mars, ainsi que de la Turquie, dont la position se balance entre la confusion et l’ambiguïté.
Cette impasse s’explique par l’impossibilité des organisateurs à transformer la contestation en mouvement réellement populaire, en dépit des moyens financiers et médiatiques gigantesques mis à leur disposition. Les villes d’Alep, Raqua, Idlib et leurs régions, ainsi que la capitale Damas, et, dans une moindre mesure, Hassaka et Hama, restent à l’écart du mouvement. Et malgré tous les appels, les habitants de ces régions refusent d’organiser des manifestations hostiles au président Bachar el-Assad. Ailleurs, la mobilisation reste faible et ne rassemble que quelques centaines ou des milliers de personnes tout au plus. Par ailleurs, le rôle central des Frères musulmans et des groupes islamistes extrémistes est clairement apparu, d’autant que les mosquées sont utilisées comme point de ralliement et de mobilisation. Ce qui a poussé le célèbre poète Adonis, connu pour son peu de sympathie envers le régime syrien, à dire que ce qui se passe aujourd’hui en Syrie n’est pas une révolution.
Ce tableau montre les limites de l’alliance arabo-occidentale, incapable d’initier un vaste mouvement de contestation, qui reste confiné aux régions rurales et agricoles syriennes. Pourtant, l’énorme machine médiatique tourne à plein régime tous les jours de la semaine pour mobiliser la population, et les Frères musulmans ont dû directement appeler à manifester, vendredi 29 avril, sans oublier les sermons à connotation confessionnelle prononcés toutes les semaines par le prédicateur égypto-qatari, Youssef al-Qardaoui.
Les forces qui fomentent les troubles se sont immédiatement tournées vers l’insurrection militaire. Armes et argent ont commencé à affluer à travers les frontières de Jordanie, d’Irak et du Liban, et les services de sécurité syriens en ont saisi d’importantes quantités. Ensuite, les groupes extrémistes takfiristes [1] sont directement entrés en lice dans les mosquées de Deraa, Homs, Banias et Lattaquié, appelant au Jihad et brandissant des slogans sectaires dans le but clair d’exacerber les dissensions communautaires pour provoquer une guerre civile. Quelque 80 officiers et soldats ont été tués et des centaines blessés depuis le début des troubles, ainsi qu’un grand nombre de manifestants tués par des inconnus armés dans l’objectif de provoquer des heurts avec les forces de l’ordre. De la sorte, un cercle vicieux morts-funérailles-violences-morts, s’installe et devient infranchissable.
Les puissances occidentales, avec à leur tête les États-Unis, ignorent complètement cette dimension essentielle de la crise qui secoue la Syrie. Elles concentrent leur intervention sur la nécessité des réformes, à travers lesquelles elles espèrent pousser le régime syrien à partager le pouvoir avec les forces syriennes qu’elles financent et contrôlent, comme les Frères musulmans, Abdel Halim Khaddam et quelques forces libérales marginales. Leur ultime objectif étant d’influencer les choix stratégiques de la Syrie basés, depuis des décennies, sur le soutien aux mouvements de Résistance anti-américains et anti-israéliens.
La réalité de ce qui se passe en Syrie est que les extrémistes musulmans takfiristes, que l’Occident lui-même combat avec acharnement depuis dix ans, disposent de cellules actives et bien organisées dans le pays. Mais dans la politique des deux poids deux mesures, le terrorisme est parfois considéré comme un fléau à abattre, et d’autres fois comme une force de changement !
Aucun être sensé ne peut croire les déclarations occidentales concernant le respect des droits de l’homme et la nécessité de réformes, alors que l’exemple de ce qui se passe à Bahreïn est vivant. Dans ce petit royaume, l’Occident a couvert politiquement et diplomatiquement l’écrasement d’une révolution pacifique et l’occupation militaire de l’ile par les pays du Golfe. Les États-Unis et leurs alliés arabes et européens instrumentalisent les Frères musulmans et les groupes takfiristes pour faire plier la Syrie. Et lorsqu’ils parlent de réformes en public, ils soumettent sous la table une liste de demandes semblables à celles qu’avait proposées en 2003 le secrétaire d’État Colin Powell et qui s’articulent autour des points suivants : rompre l’alliance avec l’Iran, cesser tout soutien aux mouvements de résistance et accepter une paix déséquilibrée avec Israël.
Ce que Bachar el-Assad a refusé il y a huit ans, alors que 250 000 GI’s étaient massés à sa frontière, il ne l’acceptera certainement pas aujourd’hui en raison de l’agitation interne. Cela ne l’empêchera pas de poursuivre les réformes politiques, judiciaires et économiques, avec de nouvelles décisions dans les prochains jours.
Déclarations et prises de positions
Michel Sleiman, président de la République libanaise
« La Constitution ne donne de part à personne, mais organise la procédure de formation du gouvernement et accorde aux autorités en charge des institutions la responsabilité de ce processus. Le Premier ministre désigné n’a pas posé de délai. Il n’y a pas d’obstacles extérieurs qui empêchent la formation. Les obstacles, s’il faut les appeler ainsi, proviennent des demandes formulées par les blocs parlementaires. Il faut discuter de ces demandes dans le cadre des dispositions constitutionnelles qui organisent la procédure de formation du gouvernement. La loi accorde au chef de l’État la responsabilité de respecter toutes les dispositions de la Constitution et affirme que le chef de l’État est le commandant suprême des forces armées et que c’est lui qui, avec le chef du gouvernement, négocie et ratifie les traités internationaux. Il faut davantage de concertations en ce qui concerne le ministère de l’Intérieur (…) Je ne crains pas que les troubles qui secouent certains pays arabes gagnent le Liban. Le Liban est un pays démocratique. Il pourrait cependant y avoir des brèches que nous devons colmater. Nous sommes immunisés, ce qui n’exclut pas qu’il faut prévenir d’éventuels dérapages. Je suis en contact permanent avec le président Bachar el-Assad. Le Liban est en faveur de la stabilité de la Syrie et du monde arabe, mais surtout de la Syrie, car tout le monde sait que la sécurité de la Syrie et du Liban sont interdépendantes. Le Liban reconnaît enfin la légitimité des réformes réclamées par les Syriens, à condition que cette volonté de réforme soit sincère, et non pas un prétexte pour la discorde confessionnelle. »
Nabih Berry, président du Parlement libanais
« Tous les Libanais devraient être plus attachés que les Syriens eux-mêmes à la stabilité et à la sécurité de la Syrie. Cette stabilité est une nécessité pour le Moyen-Orient et une réalité qui profite autant à la Syrie qu’au Liban. Je mets en garde contre les parties libanaises qui contribuent à la déstabilisation de la situation en Syrie au risque d’allumer un feu dans la région qu’il serait extrêmement difficile d’éteindre. La justice libanaise doit se pencher sur l’éventuelle implication de certains Libanais dans les troubles qui secouent la Syrie. La Syrie est plus lésée que le Liban dans le retard dans la formation du gouvernement. Le retard est un complot, non intentionnel peut-être, ourdi contre les deux pays frères. (…) Attention à la réactivation du complot de l’implantation des réfugiés palestiniens dans le cadre d’un compromis en cours d’élaboration dans la région. Le plus dangereux dans ce compromis est de tourner la page de la résolution 194 portant sur le droit au retour des Palestiniens. Le Liban s’opposera à un tel complot. Nous devons être attentifs et responsables face à la tempête qui vise le Liban et tous les Libanais. »
Walid Joumblatt, leader druze libanais
« L’intérêt de tous les Libanais quelles que soient leur politique et leur appartenance communautaire est que le régime du président Bachar el-Assad dépasse le défi auquel il est confronté avec le moins de pertes possibles. La chute du régime syrien ouvrira les portes à tous les scénarios dont le plus dangereux est le démembrement de la Syrie dans le cadre du projet israélo-américain ayant pour objectif la division de la région. Je mets en garde contre les répercussions d’un tel scénario sur la situation fragile au Liban. Les druzes des deux pays seront les premières victimes de cette équation. Les États-Unis et Israël sont les plus grands bénéficiaires des troubles en Syrie. Washington et Tel-Aviv veulent que le Syrie se noie dans le chaos pour réaliser deux objectifs : le premier, celui d’affaiblir son rôle dans la région qui les a de tout temps dérangés, et le deuxième consiste à réparer le déséquilibre dans la région dû à la chute du régime égyptien en jouant sur les faiblesses de la scène syrienne. Certains adolescents du 14-Mars agissent face aux événements en Syrie conformément à de faux calculs et font parfois des paris destructeurs. J’étais avec eux, je les connais bien et je sais comment ils réfléchissent. C’est pour cela que je leur conseille d’être réalistes, car quelles que soient leurs lectures erronées, ils finiront par retourner à la réalité où les sunnites et chiites vivent ensemble. Il est toujours temps de poursuivre les réformes profondes et le président syrien ne manque pas de courage pour aller jusqu’au bout dans cette affaire qui renforce le régime et protège ses choix stratégiques et nationaux face au projet israélo-américain (…) Le slogan du 14- Mars appelant à la chute des armes de la Résistance est arrivé à une impasse. La bataille absurde contre les armes est vaine car nul au Liban ou ailleurs ne peut les prendre, pas même Israël. Je suis prêt à me réconcilier avec Saad Hariri même s’il est allé trop loin dans ses positions. »
Mgr Béchara Raï, patriarche maronite
« Les quatre leaders chrétiens sont parvenus à dire que chacun a des options différentes de l’autre dont il est convaincu. Tous partagent le même point de vue concernant le maintien de la présence, de la décision et de la pensée chrétiennes, ainsi que de l’entité libanaise. Il faut que nous nous complétions, car la chute et le succès de l’un amèneront à la chute et au succès de l’autre. »
Bernard Valéro, porte-parole du Quai d’Orsay
« Il n’y a pas d’évolution dans notre position au sujet de la formation du gouvernement au Liban. Nous avons un principe et une attente : le principe est que c’est aux Libanais de décider. Notre attente, c’est que cette constitution du gouvernement puisse intervenir sans qu’il y ait trop de temps perdu pour le Liban. »
Presse
As Safir (Quotidien arabophone proche de la nouvelle majorité, 28 avril 2011)
Paris, Mohammad Ballout
Il y a clairement une confusion française et européenne à l’égard du dossier syrien. Le recours à la violence pour réprimer les manifestations syriennes n’est pas suffisant pour garantir l’adoption d’une position internationale unifiée dans le cadre d’une déclaration présidentielle au Conseil de sécurité de l’Onu ; concernant la réunion de l’Union européenne à Bruxelles pour discuter des mesures envisageables à l’égard de la Syrie, la France insiste sur le terme « mesures », alors que l’Allemagne évoque les « sanctions ».
Le président Nicolas Sarkozy, et la diplomatie française en général, évitent encore non seulement de parler de sanctions, mais d’évoquer nommément le président Bachar el-Assad dans toute condamnation de la violence contre les manifestants pacifiques. De plus, Paris évite encore de mettre en doute la légitimité du président Assad, et continue d’ignorer les appels d’organisations de défense des droits de l’homme à saisir la Cour Pénale Internationale afin de poursuivre en justice des responsables syriens pour crimes contre l’humanité.
Un ambassadeur français évoque l’inquiétude des diplomates concernés par le dossier syrien, non seulement parce qu’il est imbriqué avec des dossiers régionaux explosifs comme le Liban et l’Irak, mais en raison du risque de réédition du scénario irakien, si les évènements se précipitaient à Damas. De plus, il y a de sérieuses craintes que l’incendie ne s’étende au Liban.
Une autre source estime qu’il y a une majorité silencieuse dans les grandes villes comme Damas et Alep. Cette majorité est la clé de l’avenir de la Syrie. Pour l’instant, elle opte pour l’attentisme, mais, si elle sort de son silence, cela pourrait changer le cours des évènements internes et des positions internationales.
Certains sont réticents à l’idée d’imposer des sanctions ou d’isoler le régime syrien parce qu’ils craignent que cela n’encourage les faucons en Syrie à aller de l’avant dans l’option militaire.
Le cercle des amis de la Syrie se rétrécit et elle ne trouvera personne pour la défendre avec le départ de Claude Guéant, l’artisan de la normalisation des relations franco-syriennes, du secrétariat général de l’Élysée. Si la violence se poursuit à Deraa et dans d’autres villes, Alain Juppé pourrait changer d’avis : après avoir affirmé, il y a deux semaines, que l’on ne pouvait pas reproduire la résolution 1973 pour la Syrie, il pourrait être amené à faire preuve de plus de fermeté.
As Safir (28 avril 2011)
Sateh Noureddine
L’Occident accentue ses pressions politico-diplomatiques pour convaincre la direction syrienne de satisfaire rapidement les revendications populaires. Les puissances occidentales utilisent l’instrument turc pour influencer les choix de Damas. La colère qui caractérise l’attitude turque et occidentale vis-à-vis de la Syrie est toujours bridée par un fort attachement au maintien du régime actuel, dont on entend dire à Ankara, à Washington, à Paris et à Londres qu’il n’a pas la maturité politique nécessaire et qu’il a besoin de la sagesse politique, qui évitera à la Syrie la guerre civile et permettra à tous ses voisins d’éviter à leur tour de gigantesques incendies.
As Safir (28 avril 2011)
Nabil Haitham
Damas a décidé de trancher après avoir ressenti les dangers qui menacent le régime. Ces dangers sont l’élargissement soudain du front hostile au régime syrien, notamment l’attitude du Qatar, de la chaîne Al-Jazeera et celle de la Turquie et son discours vis-à-vis de Damas, ainsi que les pressions américano-européennes croissantes sur la Syrie.
As Safir (27 avril 2011)
Daoud Rammal
Les observateurs se sont arrêtés sur le fait que le Qatar s’est retourné contre l’ami, l’allié et le frère syrien et a mené une virulente campagne contre le régime en Syrie. Les médias qataris ont joué un rôle suspect pendant les événements en Syrie en inventant même de toutes pièces des incidents qui n’ont jamais eu lieu. Tout en exagérant ces événements, ils ont décidé de faire le black-out sur d’autres incidents, plus précisément sur ce qui se passe à Bahreïn. Selon une source diplomatique arabe, l’État du Qatar a débloqué un grand budget pour faire chuter le régime syrien.
Al Hayat (Quotidien saoudien édité à Londres, 29 avril 2011)
Walid Choucair
Le Hezbollah craint qu’une longue crise en Syrie ne creuse les dissensions entre sunnites et chiites au Liban et qu’un affaiblissement du régime syrien n’affecte le précieux soutien politique et militaire que Damas lui apporte depuis des années. Les adversaires politiques libanais du Hezbollah pourraient profiter de la situation actuelle pour l’attaquer. De même, Israël pourrait saisir l’opportunité pour lancer une guerre contre le Liban. Si le cœur des dirigeants du Hezbollah est avec le régime syrien, leur raison, elle, souhaite que le pouvoir cède d’une certaine manière aux revendications populaires, pour garantir sa pérennité.
Le 14-Mars aussi redoute les répercussions d’une confrontation prolongée en Syrie qui pourrait exacerber les sensibilités confessionnelles au Liban.
Al Hayat (28 avril 2011)
Hassan Haidar
Pour tenir bon, l’opposition syrienne jeune et spontanée a urgemment besoin d’un puissant soutien moral que le monde ne lui a pas encore assuré comme ce fut le cas dans les révolutions en Tunisie et en Égypte et dans l’intifada libyenne. En effet, l’hésitation et la réserve caractérisent l’attitude des grandes puissances, qui invoquent deux raisons pour justifier leur position : les grandes puissances ont peur de l’inconnu parce qu’elles ne connaissent ni les dirigeants de l’opposition, ni la structure ni les orientations de cette dernière ; elles sont soucieuses d’éviter un chaos dans la région, conséquence d’une déstabilisation de la Syrie. Sur le premier point, une telle donnée n’a pas été déterminante dans les révolutions tunisienne et égyptienne, où les jeunes ont dépassé le leadership traditionnel de l’opposition. Sur le second, le discours sur la stabilité du Moyen-Orient de sont de vieux refrains qui ne convainquent plus personne. Car les pays occidentaux, et les Etats-Unis en particulier, ont toujours accusé le régime syrien de déstabiliser la région et l’ont rendu responsable des guerres par procuration dont le Liban et les Palestiniens ont connu la destruction et les drames pendant des décennies.
An Nahar (Quotidien libanais proche du 14-Mars, édition du 28 avril 2011)
Rosanna Bou Mounsef
Les conseils pleuvent toujours sur le président Bachar el-Assad pour renoncer à la violence et accélérer les réformes qui éviteront au régime l’effondrement. Les pays occidentaux, y compris les États-Unis, se sont retrouvés dans une situation fort embarrassante après un bilan faisant état de dizaines, et probablement de centaines, de morts sans qu’ils ne s’activent aux niveaux médiatique, politique et diplomatique. Les derniers développements en Syrie ont balayé l’illusion selon laquelle les États-Unis souhaitent la chute du régime syrien : les prises de position américaines ont révélé que Washington n’est pas moins attaché au régime syrien que les pays considérés amis de la Syrie. Si le bilan des victimes de la répression s’alourdit, ceci pourrait pousser les pays occidentaux à se montrer plus intransigeants à l’égard du régime syrien.
L’Orient-Le Jour (Quotidien libanais francophone proche du 14-Mars, édition du 29 avril 2011)
Scarlett Haddad
Depuis le début des émeutes en Syrie et le lancement de la contre-attaque du régime, le Liban retient son souffle. La grande majorité des Libanais restent convaincus qu’une détérioration de la situation en Syrie aura forcément des répercussions sur la scène locale. S’ils ne sont pas d’accord sur les scénarios du futur, ils commencent déjà à craindre deux choses : un afflux de réfugiés syriens au Liban, et une éventuelle fermeture des frontières avec la Syrie qui aggraverait la crise économique. Sans parler des possibilités de déstabilisation interne, si le chaos devait régner en Syrie. D’ailleurs, il semblerait que la situation en Syrie aurait constitué un point d’accord entre les quatre leaders chrétiens réunis à Bkerké sous la houlette du patriarche Mgr Béchara Raï. Alors que l’attitude envers ce pays voisin a longtemps divisé les Libanais et en particulier les chrétiens, les leaders quatre leaders seraient désormais d’accord pour estimer qu’un changement de régime ou un chaos en Syrie pourrait constituer une menace pour les chrétiens de la région. C’est sans doute le seul point d’accord concernant le dossier syrien. Car pour tout le reste, les divergences restent fondamentales : il y a ceux qui croient à la thèse du complot contre le régime syrien et ceux qui restent convaincus qu’il s’agit d’un régime répressif qui est en train de rater le coche de la démocratisation.
Les partisans de la thèse du complot rappellent que depuis 2004, le secrétaire d’État américain de l’époque, Colin Powell, avait rencontré Bachar el-Assad pour lui soumettre les conditions internationales pour un retour en grâce de la Syrie et cela avant l’adoption de la résolution 1559, qui avait abouti au retrait des troupes syriennes du Liban. Les conditions seraient encore les mêmes aujourd’hui : rompre les liens de la Syrie avec l’Iran et avec le Hezbollah et le Hamas et revenir aux négociations avec Israël. Ce serait en gros le discours tenu par une délégation saoudienne venue en Syrie vers la mi-mars, c’est-à-dire peu avant le début des émeutes à Deraa. Les mêmes thèmes auraient été repris par le ministre turc des AE qui s’est rendu à Damas récemment et par le ministre émirati des AE qui a rencontré Bachar el-Assad il y a une quinzaine de jours.
Complot ou pas, le régime syrien campe encore sur ses positions, rappelant que son alliance avec l’Iran est stratégique. Pour rétablir l’ordre, il a choisi de mener à la fois un processus de réformes et une contre-attaque militaire. Ses partisans rappellent que depuis le début des manifestations, des hommes en cagoule ont commencé à dresser les différentes communautés les unes contre les autres à Lattaquié, avant de recourir carrément aux armes en tendant une embuscade à une unité de l’armée à Banias. Le choix de cette ville ne serait d’ailleurs pas innocent, car il s’agit d’une agglomération sunnite en milieu alaouite. Même chose à Deraa, qui avait depuis des années un contentieux avec le régime. De plus, après avoir hésité sur l’identité des opposants, le régime est arrivé à la conclusion suivante : à part les militants de la société civile, qui veulent réellement des réformes et qui les obtiendront puisque le président a déjà levé la loi martiale et qu’il compte remettre bientôt en question la loi sur les partis politiques qui, pour l’instant, laisse le monopole au Baas, la principale force d’opposition est constituée des Frères musulmans, lesquels sont puissants à Deraa, mais aussi à Homs, à Alep et dans plusieurs bourgades environnantes. Les Frères musulmans de Syrie, qui sont liés à ceux de Jordanie et qui ont établi leur quartier général en Turquie, sont apparus très organisés, possédant des moyens financiers importants et maniant avec habileté les nouvelles technologies modernes. Le coup de force contre eux n’est pas facile et le régime est convaincu de mener une guerre totale. Mais il n’est pas non plus dépourvu de moyens.
Al Akhbar (Quotidien libanais proche de la nouvelle majorité, 29 avril 2011)
Paris, Bassam Tayyara
La position diplomatique française est caractérisée par une certaine confusion à l’égard des événements en Syrie. D’aucuns se demandent dans quelle mesure le président Nicolas Sarkozy accepterait l’idée de couper les ponts avec son homologue syrien Bachar el-Assad, et comparent le rapprochement entre Paris et Damas avec le rapprochement franco-libyen avant la campagne occidentale contre le colonel Kadhafi.
Des sources françaises proches du dossier expliquent l’hésitation française sur le dossier syrien par trois raisons : La contestation en Syrie n’englobe pas jusqu’à présent toutes les composantes de la société syrienne. Un grand nombre de Syriens ne participent pas au mouvement de contestation, ce qui lui confère un caractère partiel ; la diversité religieuse qui existe en Syrie pousse la France à être prudente, d’autant plus que certaines communautés ne sont pas représentées dans le mouvement de contestation ; la France ne croit pas du tout que des parties islamistes radicales se trouvent parmi les manifestants comme l’affirment les autorités syriennes.
Des observateurs signalent que les réactions françaises ne dépassent pas encore le cadre des généralités et de ce qui est diplomatiquement acceptable. Jusqu’à présent, Paris n’a pas contesté la légitimité d’Assad. Les condamnations françaises peuvent être lues sous un angle diplomatique qui ne coupe pas les ponts entre les deux capitales. Le langage utilisé dans les déclarations officielles françaises ne reflète pas un rejet du régime et laisse la porte ouverte à un retour des relations, même froides.
Cela ne veut pas dire pour autant que Paris n’envisage pas sérieusement, avec Londres et Washington, des mesures plus strictes si le régime ne parvient pas à régler la situation d’ici quelques jours. Des sources dignes de foi signalent que les responsables chargés d’étudier les mesures envisageables veillent surtout à ne pas montrer de similitudes entre ce qui a été adopté pour la Libye, et ce qui peut être adopté pour la Syrie, afin d’éviter un scénario proche du scénario libyen. Les sources reconnaissent toutefois que l’Europe a un rôle efficace en l’absence de tout impact de sanctions états-uniennes sur le régime syrien. Les sanctions doivent comprendre des points désormais routiniers, comme l’interdiction de voyager pour les personnes responsables de la répression, ou le gel des actifs. Les sources citent deux noms incontournables en ce qui concerne l’interdiction de voyager : Maher el- Assad et Ali Mamlouk. Quant au gel des actifs, il concernerait en premier lieu Rami Makhlouf. Les sources reconnaissent cependant qu’il n’y a pas de preuves concluantes sur l’implication active de ce groupe dans les opérations de répression.
Al Akhbar (28 avril 2011)
Ibrahim el-Amine
Le gouvernement syrien possède de nombreuses preuves politiques et sécuritaires sur les ingérences étrangères en Syrie. Parmi les preuves politiques, il y a le deal proposé à Damas par des émissaires arabes et occidentaux. Ces pays invitent la Syrie à revoir son alliance avec l’Iran et les forces de la résistance en Palestine et au Liban, et à adhérer à une nouvelle stratégie arabe. En contrepartie, Damas obtiendrait de meilleures relations avec d’importants pays arabes et étrangers, une aide des pétromonarchies pour régler la crise socio-économique en Syrie et lancer un chantier de réformes, et un soutien face aux tentatives de sabotage ou de déstabilisation. La réponse syrienne a été que les autorités font la distinction entre les citoyens qui ont des revendications connues, et les membres de courants extrémistes, financés et aidés logistiquement par des capitales arabes, qui cherchent à récupérer les mouvements populaires à leurs propres fins.
Des sources signalent que si la Syrie rejette le deal qui lui est proposé, il faudra s’attendre bientôt à une escalade diplomatique et médiatique pour transformer le dossier en une affaire internationale pavant la voie à diverses formes d’interventions. La plus dangereuse s’illustre dans la disposition de pays occidentaux et de Washington à retourner à la politique des aventures militaires, directes ou indirectes -à travers leurs alliés.
Al Akhbar (27 avril 2011)
Thaer Ghandour
À la question de savoir si le Liban traverse une crise du régime, le leader druze Walid Joumblatt répond : « Le régime est en crise depuis le début, mais il est impossible de le changer aujourd’hui. Nous devons former le gouvernement ». La formation du gouvernement pourrait contribuer à freiner le dérapage, mais le plus important reste le dialogue qu’il prône inlassablement, plus particulièrement entre les sunnites et les chiites.
Time Magazine (Hebdomadaire états-unien, 25 avril 2011)
Nicholas Blanford
Wadi Khaled, sur la frontière nord entre le Liban et la Syrie. Dans ce petit hameau à cheval sur deux collines, on voit à quel point il serait facile de passer d’un pays à l’autre. La frontière suit la rivière Kabir. « Oui, il est très facile de traverser, surtout en été lorsque la rivière est basse », explique Mohammad, tenancier d’un magasin de matériel électrique. Il explique également que des passeurs font payer 1 000 dollars à chaque personne voulant passer la frontière. Ceux qui traversent sont pour la plupart des travailleurs africains qui espèrent trouver du travail au Liban. Dans l’autre sens, on trouve des criminels libanais qui cherchent un refuge provisoire. Est-ce que des Libanais traversent pour fomenter des coups en Syrie ? Jusqu’à présent, le circuit politique montre l’inverse. Ce sont les opposants syriens au régime de Damas qui viennent au Liban.
Les activités de contrebande ont ralenti depuis le départ de la contestation, il y a plus d’un mois. Les autorités syriennes ont renforcé leurs dispositifs à la frontière. Wadi Khaled et les villages aux alentours sont principalement peuplés de sunnites pro-Hariri, une bonne raison pour eux de garder leurs deux yeux ouverts. « Notre sang appartient à Saad Hariri et nous sommes avec l’insurrection syrienne à 100 % », dit Ali, un jeune homme assis à califourchon sur un scooter, mode de transport privilégié dans la région de Wadi Khaled pour ceux qui veulent traverser la frontière. Les résidents locaux disent qu’ils surveillent la frontière syrienne possible ciblant d’éventuels infiltrés syriens qui pourraient être tentés de créer des conflits au Liban.
La Presse (Quotidien canadien, 25 avril 2011)
On aura remarqué le mutisme de la rue libanaise par rapport au tumulte syrien. C’est là peut-être le moins trompeur des signaux sur la suite des choses. Pourquoi cette insistance sur le Liban ? Le Syrie se veut la grande sœur du Liban. Elle se sent chez elle au pays du Cèdre, avec ou sans forces armées pour illustrer ou soutenir cette parenté. C’est au Liban que le pouvoir syrien a, si l’on peut dire, heurté son roc de Gibraltar. En 2005, sous la pression de la rue, mais aussi de la communauté internationale il est vrai, Damas a dû retirer du Liban ses 35 000 soldats censés y apporter paix et stabilité. Là, au Liban, s’exprimait en tout temps l’opposition au pouvoir syrien. Pourquoi ce mutisme de la rue libanaise ? Tout se passe un peu comme si l’on craignait, tôt ou tard, des retombées redoutables au Liban même, d’un durcissement éventuel du régime Assad. Inversement, la chute de ce même régime, dans le contexte de ce « réveil sunnite », et non dans celui d’une « revendication démocratique » analogue à ce qui s’est passé en Égypte ou en Tunisie, aurait un effet redoutable sur l’équilibre confessionnel, sans cesse à rétablir, au Liban même.
Evénements
Arabie saoudite
• La police saoudienne a arrêté des dizaines des citoyens, dont deux blogueurs, accusés d’avoir participé à des manifestations dans l’Est du royaume. Sur leur site web, les activistes ont annoncé que « les manifestants ont été arrêtés à Qatif et dans d’autres villes où des manifestations ont été organisées pour réclamer la libération des détenus et en signe de solidarité avec le peuple bahreïni. Les activistes ont souligné détenir une liste de 25 noms de manifestants arrêtés, âgés de 16 à 60 ans.
• Lors d’une interview, un activiste a déclaré, sous le sceau de l’anonymat, que « le nombre de manifestants arrêtés depuis le début des protestations a atteint les 140 ». Des sources informées ont rapporté que l’écrivain et activiste Hussein el-Youssef et son fils ont été appréhendés pour avoir participé à des manifestations à Qatif. Les deux blogueurs Moustafa el-Moubarak et Hussein el-Hachem ont également été arrêtés.
Bahreïn
• Depuis le 14 février, des manifestations ont lieu à Bahreïn pour demander une constitution démocratique et un changement de la monarchie en monarchie constitutionnelle. Le pouvoir bahreïni a ensuite poussé le conflit vers une dimension confessionnelle dans un royaume où la dynastie est sunnite mais la majorité des habitants sont chiites. Quatre chiites ont été condamnés à mort, jeudi 28 avril, par un tribunal militaire. Ils ont été reconnus coupables d’avoir tué deux policiers lors de manifestations en mars 2011. Trois autres contestataires ont été condamnés à la détention à perpétuité dans le même procès.
• Selon Amnesty International, 500 personnes ont été arrêtées ces dernières semaines à Bahreïn. Certains détenus auraient été torturés après leur arrestation. 312 d’entre eux ont été libérés pour « raisons médicales ».
Libye
• L’Otan a tué samedi soir le plus jeune fils du leader libyen Mouammar Kadhafi, Seif al-Arab Kadhafi, et trois de ses petits-enfants.
D’après le porte-parole du gouvernement libyen, Moussa Ibrahim, Mouammar Kadhafi et son épouse se trouvaient chez le plus jeune fils du dirigeant libyen quand sa demeure a été touchée par au moins une bombe larguée par un avion de l’Otan.
Seif al-Arab, 29 ans, a été tué ainsi que trois de ses neveux et nièces, âgés de moins de 12 ans, selon Moussa Ibrahim. Mais le dirigeant libyen n’a pas été blessé et son épouse Safiya Farkash va bien, a-t-il ajouté, dénonçant une tentative d’assassinat du dirigeant libyen violant le droit international.
Le porte-parole du gouvernement a estimé que l’Otan avait dû probablement bénéficier de renseignements sur la localisation de Mouammar Kadhafi. « Il semble qu’il y a eu des fuites », a ajouté Moussa Ibrahim. « Ils savaient quelque chose. La cible était très claire, très, très claire ».
L’Otan a seulement reconnu avoir frappé samedi soir « un bâtiment de contrôle et de commandement dans le quartier de Bab Azizia ».
Refusant de commenter une « information non confirmée », le Premier ministre britannique David Cameron avait assuré que les frappes de l’Otan étaient « en ligne avec la résolution 1973 de l’Onu » et servaient « à empêcher la perte de vies civiles en visant la machine de guerre de Kadhafi ».
• Mais le ministère russe des Affaires étrangères a de nouveau critiqué les frappes de l’Otan, dénonçant un usage disproportionné de la force qui outrepasse selon Moscou le mandat fixé par l’Onu. De « plus en plus de faits indiquent que l’objectif de la coalition anti-libyenne est la destruction physique de Kadhafi », a même accusé le député russe Constantin Kosachev, qui exprime souvent les positions du Kremlin en matière de politique étrangère.
• Le bombardement est intervenu quelques heures après une intervention télévisée de Mouammar Kadhafi, qui appelait à un cessez-le-feu et invitait les puissances de l’Otan à négocier. L’insurrection avait dénoncé un nouveau leurre médiatique.
• Dimanche matin, les troupes fidèles au dirigeant libyen ont bombardé le port de Misrata alors qu’un navire d’aide humanitaire maltais déchargeait de la nourriture et des médicaments, a rapporté Ahmed al-Misarati, un chauffeur routier qui participait au déchargement.
• À Tripoli, tôt dimanche matin, des dizaines de personnes sont venue danser, et applaudir à l’unisson devant le complexe gouvernemental de Bab el-Azizia en soutien au régime. Les journalistes conduits sur le site de la frappe dans le quartier de Garghour ont vu plusieurs bâtiments endommagés. Le toit de l’un d’eux s’était effondré.
[1] En islam, le « Takfirisme » est une forme d’intolérance extrêmement violente qui se caractérise par sa propension à jeter l’anathème non seulement contre des non-musulmans, mais aussi —voire prioritairement— contre d’autres musulmans. En Syrie, le takfirisme s’est cristallisé contre les Allaouites (qui sont sur-représentés dans les instances politiques et militaires) et contre les Chiites, particulièrement contre le cheikh Mohammad Hussein Fadlallah (1935-2010) leader spirituel du Hezbollah, assimilant son humanisme et son ouverture d’esprit en matière de démocratie ou de mœurs à de l’apostasie. Ndlr.
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