Il ne fait aucun doute que les poursuites judiciaires actuelles en Ukraine ont un caractère politique. Il ne fait pas de doute non-plus que le ministre de l’Intérieur a des raisons d’affirmer qu’il n’a donné aucun ordre car tous les figurants ont à un moment ou à un autre enfreint la loi. La situation n’a pas changé après la révolution, 18 000 fonctionnaires ont été congédiés et cette vague de destitution est à caractère répressif. Le régime essaye aujourd’hui de remplacer les gens qui ne lui sont pas favorables par des gens loyaux. Les falsifications et manipulations des élections ont aussi profité a Yushchenko, mais personne n’a jamais entendu qu’un responsable ait été inquiété à ce sujet. On peut dire la même chose pour les recteurs d’universités et les enseignants. Il est évident aujourd’hui que de nombreuses personnes dans l’administration sont incompétentes et cela va poser un problème de fonctionnement de l’appareil administratif. Malheureusement la corruption risque de noyer ce nouvel appareil plus vite que l’ancien. De forte tensions sont à prévoir, d’autant plus que la situation économique de l’Ukraine n’est pas aussi bonne que ces dernières années.
Le transfert de propriété n’est pas très important. On voudrait bien re-privatiser, mais il n’y a pas en Ukraine une poignée de milliardaires qu’il suffirait de déposséder. C’est une des difficultés. À un autre niveau, les gens loyaux sont récompensés, mais pas autant que ne l’avaient promis les révolutionnaires oranges. Ce processus peut rendre sceptiques les investisseurs étrangers. Pour l’instant, en dehors des investissements états-uniens, motivés politiquement, pratiquement aucun capital n’est entré dans le pays.
Les méthodes dures du gouvernement tendent à unifier l’opposition, dirigée de fait par Yanukovic, mais elles peuvent aussi amener une scission dans le camp des vainqueurs. D’après moi, l’équipe actuelle ne peut qu’exploser. Il y a de fortes tensions entre Tymoshenko et Porochenko et entre Tymoshenko et l’équipe de Yushchenko. Les élections législatives seront presque plus importantes que la bataille pour le fauteuil présidentiel. L’opposition est multiple et diverse, elle n’a pas de leader, elle risque de voir ses voix se perdre. Je pense que le gouvernement va trouver un compromis dans les affaires Rizak et Kolesnikov [1], l’exemple de Yukos a servi. La réputation de la Russie est entachée et bien que l’Union européenne et plus encore les États-Unis appliquent la loi des deux poids, deux mesures, je ne pense pas qu’ils pardonneraient que l’on s’en prenne à leurs hommes.
« Существует очень серьезное напряжение между Тимошенко и командой Ющенко », par Viatcheslav Irgounov, Gazeta SNG, 19 mai 2005. Ce texte est adapté d’une interview.
[1] Le premier est ancien gouverneur de TransCarpathie, le deuxième est président du conseil de la région de Donetsk, tous deux arrêtés.
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