Monsieur le Président
Mesdames, Messieurs les Ministres
Madame, Messieurs les Ambassadeurs,
Permettez-moi d’abord, de remercier le gouvernement tunisien d’avoir aujourd’hui réuni à Tunis, les amis du peuple syrien.
Il y a un an, le peuple tunisien prenait son destin en main, et donnait naissance au printemps arabe qui a depuis bouleversé la région. Les échos de ce mouvement se sont fait sentir jusqu’en Syrie, où Bachar Al-Assad a pris la terrible décision de noyer les aspirations de son propre peuple dans le sang. Il assume ainsi une responsabilité très lourde devant l’histoire.
Nous sommes ici pour rendre hommage à l’admirable peuple syrien qui lutte avec courage pour sa liberté, jour après jour, face à une répression barbare. Je pense avec émotion à la détermination de la jeunesse syrienne qui se bat pour une Syrie unie, séculière et démocratique. Je pense à Ghiath Matar, ce jeune militant pacifiste mort sous la torture à l’âge de 26 ans. Il incarne ce combat pour des valeurs universelles qui est aussi le nôtre. C’est au nom de ces valeurs que nos ambassadeurs en Syrie lui ont rendu hommage à l’occasion de ses obsèques. Je pense aussi à l’abnégation des médecins syriens qui travaillent dans la clandestinité au risque d’être arrêtés, comme des centaines de leurs confrères l’ont déjà été, par les services du régime.
Je pense notamment à la ville martyre de Homs, bombardée depuis trois semaines, à la terreur dans laquelle vivent ses habitants. Je veux aussi rendre hommage aux journalistes qui, au péril de leur vie, informent le monde de la tragédie syrienne. Je salue la mémoire de Gilles Jacquier et de Rémi Ochlik, journalistes français, morts à Homs alors qu’ils faisaient courageusement leur métier. Des journalistes français et étrangers sont encore bloqués à Homs, sous les bombardements. Certains d’entre eux sont blessés. Une jeune journaliste française a besoin d’une intervention chirurgicale. J’appelle une nouvelle fois les autorités syriennes à autoriser la mise en place rapide d’un accès humanitaire adéquat pour permettre leur évacuation. La France tient les autorités syriennes comptables du sort de ces journalistes.
Face aux crimes contre l’humanité qu’il commet, il est du devoir de la communauté internationale de renforcer la pression sur le régime syrien. C’est tout le sens de notre réunion aujourd’hui.
Nous avons déjà beaucoup fait pour tenter d’enrayer cette tragédie. Après avoir attendu en vain des réformes promises à maintes reprises, nous nous sommes mobilisés aux Nations unies, au Conseil de sécurité, au Conseil des droits de l’Homme, à l’Assemblée générale. La Ligue arabe, dans un élan sans précédent, a proposé un plan de sortie de crise que le régime syrien a accepté sans jamais l’appliquer. Elle s’est engagée sur le terrain en déployant une mission d’observation dans l’espoir de faire cesser les violences, en vain. Elle a élaboré un plan de transition politique et a appelé les Nations unies à venir en aide au peuple syrien. Je tiens à rendre hommage à l’action déterminée de la Ligue arabe, qui s’impose comme la voix de la conscience arabe. C’est pour la soutenir que nous, représentants de l’immense majorité de la communauté internationale, sommes rassemblés ici.
Unis face à la détresse et contre la barbarie, face à l’urgence, que pouvons-nous faire ? Nous pouvons certes témoigner notre solidarité en faveur du peuple syrien mais celui-ci attend plus. Les paroles comptent, elles ne suffisent pas. Nous devons nous mobiliser de manière utile. Je discerne quatre grandes actions que le groupe des amis se doit de poursuivre.
Une action diplomatique, d’abord, en affirmant le soutien de la communauté internationale au plan de la Ligue arabe et en discutant de la meilleure marche à suivre aux Nations unies. Au Conseil de sécurité, le double veto russe et chinois a empêché une action décisive. C’est un scandale. Le vote à l’AGNU est une victoire morale et a relancé une dynamique, il faut en profiter. Nous devons tout faire pour permettre la mise en œuvre du plan de la Ligue arabe et revenir le moment venu au conseil de sécurité. La nomination de Kofi Annan comme Envoyé spécial du Secrétaire général des Nations unies et de la Ligue arabe est une bonne nouvelle pour mettre en œuvre le plan de sortie politique préparé par la Ligue arabe. Il a tout notre soutien. Nous exhortons Bachar. Al Assad à saisir cette opportunité de mettre un terme aux souffrances de son peuple.
Une action politique, aussi, en encourageant toutes les composantes de l’opposition syrienne à se rassembler autour du Conseil national syrien. Je salue l’intervention de son président qui pose les premiers jalons de la Syrie de demain : une Syrie démocratique, pluraliste, respectueuse des droits de l’Homme et de la femme et des minorités notamment chrétiennes. Nous soutenons cette démarche fondée sur des valeurs que nous partageons et qui doit pouvoir rassembler tous les Syriens.
Troisièmement : une action et même un impératif humanitaire. Devant l’urgence, j’appelle les autorités syriennes à respecter leurs obligations internationales s’agissant de l’accès humanitaire. J’encourage aussi tous nos partenaires à joindre leurs efforts pour mobiliser l’aide humanitaire et faire en sorte qu’elle parvienne à la population. À cette fin, la France a décidé de créer un fonds humanitaire d’urgence à destination du peuple syrien. Nous appelons tous les États à contribuer financièrement pour aider les organisations et ONG actives en Syrie. Nous saluons l’annonce d’une visite prochaine en Syrie de Valérie Amos, Secrétaire général adjointe aux affaires humanitaires et coordinatrice des secours d’urgence : nous souhaitons que cette visite produise des résultats immédiats.
L’accroissement des sanctions constitue la dernière action que nous devons approfondir parallèlement aux autres, compte tenu du refus obstiné du gouvernement syrien de faire mouvement : l’Union européenne a adopté plusieurs trains de sanctions. Dès lundi, nous prendrons de nouvelles mesures fortes, notamment un gel des avoirs de la Banque centrale syrienne. La Ligue arabe a également annoncé des sanctions. Nous souhaitons qu’elles soient pleinement mises en œuvre. Nous devons enfin réfléchir aux mesures diplomatiques que nous devons prendre face au comportement inadmissible du régime syrien : je sais que certains États ont fermé leurs ambassades à Damas. D’autres ont expulsé les ambassadeurs syriens. Je souhaite une réponse collective. La France est prête à y prendre part. De même, nous devons rappeler que les responsables de ces crimes devront rendre compte de leurs actes, notamment devant la cour pénale internationale.
Mesdames, Messieurs,
Nous constituons aujourd’hui le Groupe des Amis du peuple syrien. Il doit aller de l’avant. Je remercie mon homologue turc pour son invitation à une deuxième réunion du groupe en Turquie. Et je serai très heureux d’accueillir la rencontre suivante en France.
Avec courage et détermination, le peuple syrien, comme le peuple tunisien avant lui, poursuivra jusqu’au bout son aspiration à la liberté. Jusqu’en Syrie, les vers du poète tunisien Abou Qassem Chebbi résonnent aujourd’hui comme une prophétie : « Lorsqu’un jour le peuple aspire à vivre, le destin se doit de répondre ». Chers amis du peuple syrien, Chers amis de la Syrie, nous sommes déterminés à unir nos efforts pour faire cesser ce cauchemar qui n’a que trop duré.
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