Est-il réellement impossible de trancher la bataille ?
Par Ghaleb Kandil
De nombreuses analyses sur la Syrie évoquent l’impossibilité de trancher la bataille dans le conflit opposant l’État et les bandes terroristes menées par le Front al-Nosra d’obédience qaïdiste, et qui regroupent un cocktail composé des Frères musulmans, des takfiristes internationaux "venus de 29 pays", comme le reconnait un rapport rédigés par des enquêteurs de l’Onu, sans oublier les coupeurs de routes et les brigands sans foi ni loi.
Le facteur déterminant permettant de dire qu’il est impossible de trancher la bataille est, en premier lieu, l’équilibre des forces au sein de la société syrienne et ses répercussions sur les protagonistes : l’État et l’armée arabe syrienne d’une part, les bandes terroristes à la solde de l’Otan de l’autre.
Tout observateur honnête sait pertinemment qu’une majorité populaire, constituée d’un noyau solide transcommunautaire, a, dès le début, exprimé son soutien au président Bachar al-Assad, à toutes les initiatives qu’il a prise et à l’armée, dans leur combat contre les terroristes et la rébellion. La taille de ce courant populaire a pris de l’ampleur au fil des événements après que deux autres blocs se soient joints à lui : le bloc "gris", qui était resté à l’écart, exprime désormais un soutien sans faille à l’armée, après que les pratiques terroristes des bandes armées et leurs pulsions destructrices se soient clairement manifestées. Ce bloc refuse le chaos, recherche la stabilité et regarde avec aversion la destruction systématique de l’État syrien, de ses institutions et de ses infrastructures. Une autre partie des Syriens, qui étaient influencés par les slogans des réformes, a réalisé que le président Bachar al-Assad et l’État étaient crédibles et sincères dans leur volonté de changement, alors que l’opposition, en refusant tout dialogue, ne cherche que le pouvoir à n’importe quel prix, surtout celle qui est liée organiquement à l’Occident et aux pétromonarchies.
Une majorité de la société syrienne, conscience et éveillée, se tient aux côtés de l’État, de l’armée et du président, alors qu’une petite partie appuie les Frères musulmans et d’autres groupes de l’opposition qui manifestent une hostilité maladive et irrationnelle à l’égard de l’État. Tous les jours, la taille de ces groupes rétrécie et ils perdent leur soutien populaire, surtout dans les régions où se trouve le Front al-Nosra, extrêmement sanglant et violent.
C’est ce rapport de force dans la société qui détermine l’issue du combat. Et il ne fait pas de doute que cette frange majoritaire au sein de la société exerce des pressions sur l’État et sur l’armée afin qu’ils tranchent la bataille et qu’ils refusent tout dialogue ou compromis avec les bandes takfiristes et autres groupes manipulés par l’Otan et les pays du Golfe.
Si ceux qui assurent qu’il est impossible de trancher la bataille se basent sur les rapports de forces militaires, il est clair que cette lecture repose sur des données fausses. bien qu’il ne faille pas minimiser la capacité de nuisance de dizaines de milliers de terroristes, dont des milliers d’étrangers, autant de tueurs professionnels qui commettent de nombreux massacres sur le sol syrien. Ces groupes reçoivent d’énormes quantités d’armes et des sommes astronomiques pour poursuivre leur guerre d’usure contre l’État et son armée.
Mais malgré cela, les rapports de force restent de loin favorables à l’armée, toutefois, les données précitées montrent que la lutte de l’État, du peuple et de l’armée syrienne va être longue. Tous les compromis politiques, pour le moment suspendus, ne pourront pas mettre un terme au terrorisme. Pas plus que les démarches entreprises pour juguler l’hémorragie, sauf si elles se basent sur la nécessité de soutenir l’État et d’adopter des mesures contre ceux qui financent, arment, entrainement et abritent les tueurs en série multinationaux, qui se font appeler jihadistes. Ces bandes armées sont appuyées par les États-Unis, l’Otan, la Turquie, le Qatar et l’Arabie saoudite.
Déclarations et prises de positions
Béchara Raï, Patriarche et cardinal maronite
« Les hommes politiques font la sourde oreille aux doléances de la population et qui s’enlisent dans leurs divergences et leurs conflits. Je ne veux pas mettre de l’huile sur le feu, mais nous refusons que l’action politique au Liban devienne synonyme de blocage du tourisme, de l’industrie, de l’agriculture et de l’économie. Face aux événements qui secouent le monde arabe, le Liban doit rester un facteur de stabilité et de paix et non pas de provocation, d’implication dans le brasier syrien ou encore un couloir. »
Saad Hariri, ancien Premier ministre (14-Mars)
« Sayyed Hassan (Nasrallah) accuse le 14-Mars de vouloir mettre le pays devant un choix également difficile : soit organiser les élections législatives selon la loi de 1960, soit les reporter. Nous ne tenons pas à la loi de 1960, la vérité est que Hassan Nasrallah ne veut pas d’élections. Il tente de contourner les institutions étatiques en appelant à la formation d’un groupe de travail chargé de résoudre les problèmes économiques du pays. Quel sera le rôle du Conseil des ministres dans ce cas là ? Il semble que Hassan Nasrallah ne veut pas assumer les responsabilités. La situation actuelle est la responsabilité du gouvernement qu’il a formé lui même. »
Fayez Ghosn, ministre libanais de la Défense (8-Mars)
« Il faut rendre hommage aux grandes réalisations de l’armée, dans des circonstances internes difficiles et de développements régionaux qui s’accélèrent et qui ne manquent pas d’avoir un impact sur le Liban. L’armée restera vigilante pour lutter contre le terrorisme sous toutes ses formes et protéger la frontière nord, d’une part, et défendre une frontière sud derrière laquelle se cache un ennemi criminel qui parie sur nos divisions et l’effritement de notre société, d’autre part. L’Armée libanaise constitue l’instance de recours sûre et unique de tous les Libanais, quelles que soient leurs appartenances et leurs confessions, et plus particulièrement durant les périodes critiques telles que celle que traverse en ce moment la patrie. Il n’y a pas de lignes rouges pour l’armée, ni de place pour la discorde interne. Celle-ci sera étouffée dans l’œuf. Il n’y aura pas non plus de refuge pour le terrorisme, qui ne pourra pas ronger notre tissu national qui est solide. »
Mouïn Merhebi, député islamiste du Coutant du futur
« Les bombardements syriens contre le Akkar visent à faire fuir les réfugiés syriens se trouvant dans la région. L’Armée libanaise n’a pas porté secours aux familles. Que l’armée, Najib Mikati et Jean Kahwagi (le commandant en chef de l’Armée libanaise, ndlr) aillent au diable. »
Jeffrey Feltman, secrétaire général adjoint de l’ONU chargé des affaires politiques
« Les informations sur la participation de combattants libanais dans les affrontements entre les deux parties en conflit en Syrie constituent une violation de la politique du Liban de ne pas se mêler de la guerre civile dans ce pays. L’implication de Libanais dans ces combats risque de provoquer des problèmes au Liban même, qui reste très influencé par les événements en Syrie. De nombreux rapports indiquent la présence de combattants libanais aux côtés du régime de Bachar al-Assad et de l’opposition. »
Événement
• Le fondateur du site WikiLeaks Julian Assange a promis de publier un million de nouveaux documents confidentiels en 2013. « WikiLeaks prépare la publication d’un million de documents, des documents qui concernent tous les pays dans le monde », a déclaré M. Assange s’adressant au public depuis le balcon de l’ambassade de l’Équateur à Londres où il s’est réfugié depuis six mois et dont il ne peut sortir au risque d’être immédiatement arrêté et extradé vers la Suède, où la justice souhaite l’entendre pour deux affaires de viol. Selon les médias britanniques, le discours de M. Assange a été suivi par près de 80 manifestants rassemblés devant l’ambassade, ainsi que par des journalistes. Les mesures de sécurité ont été renforcées dans le quartier. « Tant que mon gouvernement ne protège pas le journalisme et les publications de WikiLeaks, je suis contraint de rester ici. Toutefois, la porte reste ouverte à toute personne qui souhaite me parler en vue de régler la situation », a déclaré M. Assange.
• Le président iranien Mahmoud Ahmadinejad a annulé une visite officielle en Turquie prévue lundi, au lendemain d’un avertissement de Téhéran à Ankara sur le déploiement prochain de missiles Patriot le long de la frontière syrienne. M. Ahmadinejad avait été invité par la Turquie à participer à la commémoration de la mort du poète et théologien persan du 13e siècle, Jalal al-Din Roumi, à Konya. En marge des cérémonies, il devait également s’entretenir avec le Premier ministre Recep Tayyip Erdogan, selon les médias iraniens. La visite a été annulée en raison d’un « agenda chargé » de M. Ahmadinejad, a précisé l’agence Mehr, citant le chef de la section des Affaires internationales de la présidence, Mohammad Reza Forghani.
Revue de presse
As Safir (Quotidien libanais proche de la majorité, 12 décembre 2012)
Paris, Mohammad Ballout
Le verdict au sujet de l’appel du Parquet contre la libération conditionnelle de Georges Ibrahim Abdallah sera rendu public le 10 janvier prochain. Il s’agit d’un signe positif dans le sens d’une remise en liberté. En effet, cette date intervient avant l’expiration, le 14 janvier, du délai fixé par le ministère de l’Intérieur pour son expulsion au Liban une fois libéré. Ce qui revient à dire que la cour a décidé de ne pas faire obstruction à la procédure d’expulsion du territoire français dès la publication du verdict. La date du 10 janvier permet d’affirmer également que la justice s’en tient implicitement au premier verdict rendu le mois dernier, par lequel elle avait donné son accord à la demande de libération conditionnelle de Georges Abdallah. Dans le cas contraire, la cour aurait remis à après le 14 janvier la publication de son jugement concernant l’appel du parquet.
As Safir (21 décembre 2012)
Daoud Rammal
Les divergences interlibanaises s’articulent autour du nom du futur Premier ministre et de la formule d’entente sur une nouvelle loi électorale comme condition à la mise en place d’un cabinet qui supervisera les élections. Les mêmes sources s’interrogent si un choc plus fort que celui de l’assassinat du général Wissam el-Hassan sera nécessaire pour le chef du gouvernement Najib Mikati démissionne et pour que toutes les formations libanaises, sans exception, décident enfin à se retrouver autour de la table de dialogue. Cette question se pose dans la foulée des démarches entreprises par le président François Hollande, à l’égard du Liban, face à l’intransigeance de l’Arabie saoudite. Le royaume est la seule partie à pouvoir amener l’opposition à retourner à la table de dialogue. Les expériences du passé montrent que Riyad, Paris et Damas sont les principaux acteurs sur la scène libanaise. La Syrie n’est pas aujourd’hui en mesure de prendre une initiative en faveur du Liban. L’Arabie saoudite campe sur sa position et refuse de bouger d’un iota. Quant à la France, elle est incapable pour le moment de lancer une initiative. Elle se contente d’engager des contacts avec les différentes parties concernées. Les mêmes sources estiment qu’il est possible de faire passer la période actuelle sans secousses sécuritaires, mais la meilleure solution résiderait dans la formation d’un nouveau gouvernement et l’adoption d’une nouvelle loi électorale. Comment parvenir à cet objectif ? Le seul moyen serait le retour au dialogue. Le règlement de la crise est-il tributaire uniquement des acteurs locaux ? Les sources précitées reconnaissent que des divergences existent entre l’Arabie saoudite, le Qatar et les États-Unis au niveau de l’approche à la crise syrienne, ce qui se répercute négativement sur la situation au Liban. Les dernières attaques de Saad Hariri contre sayyed Hassan Nasrallah dénotent l’intention des pays de la région de maintenir la pression sur le 8-Mars. Les sources ajoutent que le député Walid Joumblatt a essayé d’ouvrir une brèche lors de la visite qu’il a effectuée en France, où il a rencontré le ministre des Affaires étrangères, Laurent Fabius. Mais il s’est avéré que le Qatar et l’Arabie saoudite ont barré la route à la France, empêchant ainsi une solution à la crise.
As Safir (20 décembre 2012)
Nabil Haïtham
Dans le méli-mélo interne, quelques points de repère fixes semblent s’imposer. D’abord, la communauté internationale continue d’insister sur deux choses : la poursuite de la politique de distanciation suivie par le gouvernement, ensuite l’organisation des élections législatives à la date prévue. Ces deux constantes ont été notamment au centre de la dernière en date des réunions mensuelles des ambassadeurs des pays de l’Union européenne.
Une seconde constante se dégage par ailleurs du cours des événements. En dépit des apparences et malgré l’insuffisance de son équipement, l’armée continue de s’imposer sur le terrain. Ni les flambées à Tripoli, ni la tension dans les camps, ni les gesticulations des salafistes ne sont parvenues à déstabiliser complètement le pays ou l’entraîner à la discorde. Ce qui ne veut pas dire que la situation est idéale. En fait, elle est loin de l’être. Ainsi, une nouvelle source d’inquiétude est venue s’ajouter à celles qui existent déjà, avec l’afflux de réfugiés syriens et palestiniens fuyant la furie de Bachar el-Assad. C’est au point que certains, en Conseil des ministres, ont préconisé la fermeture des frontières, à l’exemple de ce qu’ont fait la Turquie ou la Jordanie. Toutefois, pour des raisons humanitaires, le Liban refuse d’adopter une mesure aussi radicale. La stabilité relative de la situation sur le terrain est, d’une certaine façon, inespérée. Car sur le plan politique, aucune démarche ne semble pouvoir décrisper la situation. Même Walid Joumblatt, avec sa sagacité proverbiale, n’est pas parvenu à assouplir le 14-Mars et l’amener à la table de dialogue. C’est au point même que le prochain rendez-vous fixé pour ce dialogue, le 7 janvier, pourrait bien être, une fois de plus, reporté au mois de février. Ce qui pourrait faire bouger la situation, toutefois, c’est peut-être les développements attendus en Syrie, dans les prochains mois. Selon des sources diplomatiques, en effet, l’émissaire de l’Onu, Lakhdar Brahimi, aurait mis au point un plan de règlement à la manière de l’accord de Taëf (1990), qui a mis fin à la guerre au Liban. L’émissaire onusien, qui doit être reçu prochainement par le président Assad, semble avoir l’aval de toutes les parties régionales et internationales à son plan. Toutefois, une source diplomatique européenne révèle que le point de ce règlement portant sur l’avenir politique du chef de l’État syrien ne fait pas l’unanimité, notamment entre la Russie et l’Iran. La République islamique insiste, en effet, pour que Bachar el-Assad trouve sa place dans la Syrie émergente et reste en fonctions jusqu’à la fin de son mandat en 2014, alors que la Russie semble avoir fait son deuil de la dynastie assadienne, tout en étant d’accord avec l’Iran sur le fait qu’un règlement militaire de la crise syrienne est impossible, et qu’il faudra tôt ou tard recourir à la négociation, ce que le vice-président Farouk el-Chareh propose.
La scène libanaise pourrait-elle de nouveau servir de levier politique aux uns et aux autres, pour faire prévaloir leur point de vue et montrer qu’ils ont encore des cartes en main ? C’est fort probable. L’une des cartes jouables porterait sur les prochaines législatives, et le Hezbollah, par exemple, pourrait enrayer le processus électoral avec un package deal incluant l’avenir de la Syrie et la loi électorale, un marché dans lequel, selon certaines sources, il abandonnerait ses armes, en échange d’un nouveau Taëf qui lui permettrait de grignoter un peu plus de pouvoir pour la communauté chiite.
Ainsi, le Liban aurait-il devant lui quelques mois de tempête politique à traverser, encore qu’en définitive tout le monde s’accorde à dire que le prochain gouvernement sera forcément d’entente nationale.
An Nahar (Quotidien libanais proche du 14-Mars)
Sarkis Naoum (21 décembre 2012)
Les détracteurs les Libanais du président Bachar el-Assad assurent que la « chute imminente » du régime syrien aura des répercussions sur le Liban, qui se caractériseront pas une confusion au sein des alliés de la Syrie, la la tête desquels figure le Hezbollah, véritable chef de file militaire et politique des partis pro-syriens au Liban. Cette éventualité entraînera par conséquent son affaiblissement au sein de ses assises populaires et sur la scène libanaise.
Ces observations sont-elles pertinentes ? Les dirigeants du Hezbollah répondent d’un ton moqueur que la « chute imminente » d’Assad ne relève qu’une hypothèse, soulignant que l’armée syrienne a toujours la supériorité militaire sur le terrain. Cependant, ils révèlent avoir élaborés des plans afin de faire face aux conséquences d’une éventuelle chute du régime, qui aboutira, selon le Hezbollah, aux possibilités suivantes : l’émergence en Syrie d’un pouvoir hostile au Hezbollah, stable et capable de redresser la Syrie en vue de l’instauration d’un nouveau régime, grâce au soutien des rebelles et d’un appui arabe, islamique et international ; la propagation du chaos en Syrie en raison de la désorganisation et la division des rebelles entre islamistes, takfiristes, libéraux, laïc ; le dérapage vers une guerre fratricide sunnite ; extension du chaos et des violences près du Golan occupé. Les responsables du Hezbollah estiment que la chute partielle du régime d’Assad pourrait conduire à l’établissement d’un mini-Etat alaouite qui aura une continuité territoriale avec l’Irak et l’Iran.
Lequel des scénarios précédents serait-il le plus proche à la réalité ? Les responsables du Hezbollah se gardent de répondre à cette question. Toutefois, des personnalités proches de l’Iran disent que le Hezbollah n’attendra pas que la situation soit tranchée, même relativement, en Syrie contre ses intérêts pour agir.
An Nahar (19 décembre 2012)
Radwan Akil
Des sources de sécurité libanaises assurent que la partie syrienne se montre coopérative dans l’affaire du rapatriement des corps des Libanais qui sont tombés à Tal Kalakh et que le retard dans cette affaire est dû à l’existence de nombreux corps de syriens tués lors de cette même confrontation. De plus, un des membres du groupe est encore en vie. Dans les jours qui viennent, trois autres corps seront remis à leurs familles. Les mêmes sources indiquent que les autorités syriennes ont apprécié le cri de douleur du père d’une des victime de la famille Alameddine, qui a dit que si son fils avait voulu combattre Israël ; il l’aurait lui-même accompagné ». Les sources sécuritaires indiquent que le contact a été établi en Syrie avec le général Ali Mamlouk, qui occupe le plus haut poste sécuritaire dans ce pays, avec l’accord du président de la République et du Premier ministre libanais. Les mêmes sources n’apportent ni confirmation ni démenti aux informations sur l’existence au Liban de camps d’entrainement de l’Armée syrienne libre, tout en précisant que les officiers et les soldats de cette armée sont présents dans plus d’une région libanaise aux côtés des réfugiés. « L’opposition syrienne fait travailler avec elle des Libanais et les têtes brûlées doivent se calmer », ajoutent les sources précitées.
Al Akhbar (Quotidien libanais proche de la majorité, 21 décembre 2012)
Nasser Charara
Des sources du 8-Mars n’ont aucun doute : le chef du gouvernement Najib Mikati ne se présentera pas aux élections au cas où elles devraient se dérouler sur la base de la loi de 1960, parce qu’il considère qu’il aura alors très peu de chances de les remporter. Mais ces sources sont persuadées que le chef du gouvernement est en mesure d’infliger une défaite électorale au camp du président Saad Hariri à Tripoli, s’il décide de se porter candidat, aux côtés du président Omar Karamé, du ministre Mohammed Safadi et des alaouites.
Ces sources précisent toutefois que Mikati n’est pas en train d’éviter une bataille électorale par peur d’en sortir perdant, mais plutôt pour ne pas avoir à s’engager dans un bras de fer politique qui pourrait lui valoir les foudres de Washington. En effet, les élections de 2013 n’intéressent les États-Unis que parce qu’elles leur attribuent un objectif primordial : favoriser l’arrivée au pouvoir d’une majorité parlementaire du 14-Mars qui fera en sorte, dès la fin des élections, que le Liban joue le rôle qui lui est demandé en contribuant au blocus politique de la Syrie.
D’autres sources du 8 Mars défendent la thèse contraire en assurant que Mikati ne se dérobera pas à la bataille. Le chef du gouvernement lui-même le confirme : il annonce qu’il entend maintenir sa candidature jusqu’au bout, indépendamment de la loi mise en œuvre. Mais ajoute que les élections ne sont pas son premier souci à l’heure qu’il est.
Le 8-Mars est en tout cas convaincu que le camp adverse, sous la houlette du Courant du Futur et des Forces libanaises, fait feu de tout bois pour que la loi de 1960 devienne un état de fait, à l’orée des élections de 2013. A cette fin, selon les sources précitées, le 14-Mars, avec le concours des États-Unis, met tout en œuvre pour s’assurer que le 8-Mars sera pris en étau : d’une part, des pressions internes, sous forme de boycott parlementaire, pour maintenir la loi de 1960, et de l’autre, des pressions externes pour que le 8-Mars se retrouve acculé à participer aux élections afin que la communauté internationale ne l’accuse pas de saboter cette échéance constitutionnelle.
Une question demeure : quelle sera l’attitude du député Walid Joumblatt ? En effet, selon certaines figures de proue de la majorité, si le 14-Mars insiste pour que les élections se déroulent sur la base de la loi de 1960, c’est pour garantir l’arrivée au pouvoir d’une majorité parlementaire monochrome qui partage les mêmes vues en matière de politique intérieure et étrangère. Pour le 14-Mars, selon les mêmes sources, cet objectif ne pourra pas être atteint en écartant du pouvoir le 8-Mars uniquement : il lui faut, aussi, rafler la majorité sans que le député Walid Joumblatt n’en fasse partie. Le tout sera donc de savoir comment Joumblatt compte faire face au scénario du 14-Mars visant à le tenir à l’écart de la sorte.
Al Akhbar (20 décembre 2012)
Nasser Charara
Trois visites de responsables libanais sont prévues à Moscou dans la période à venir. La première, celle du Premier ministre, dont la date n’a pas encore été fixée. Celle du président de la Chambre attend la résolution de questions protocolaires. En effet, Nabih Berry souhaite être reçu par le président Vladimir Poutine, ce qui constitue une entorse au protocole de la Russie, qui est cependant très enthousiaste à l’idée d’accueillir le chef du Législatif. La troisième visite est celle du président de la République, Michel Sleiman, qui doit recevoir le prix de la Fondation internationale de l’unité des peuples orthodoxes, attribué ces douze dernières années à des personnalités chrétiennes importantes. Le voyage du chef de l’État devrait intervenir les 21 et 22 janvier. Des sources russes affirment que le choix du président Sleiman est étroitement lié aux événements qui secouent la Syrie et à la situation des chrétiens d’Orient. L’invitation a été remise à Sleiman par le président de la Fondation, Valery Alexeev, qui a accompagné le patriarche orthodoxe de Russie, Cyril II, aux obsèques du patriarche Ignace IV Hazim. Selon des personnalités libanaises qui l’ont rencontré, M. Alexeev a récemment effectué une tournée dans des pays occidentaux pour les sonder au sujet de ce dont sont victimes les chrétiens d’Orient. Le responsable russe affirme avoir été surpris par ce qu’il a entendu à Paris en réponse à ses questions : « Il faut encourager les chrétiens d’Orient à émigrer en Europe ». Ces mêmes sources ajoutent que les deux personnalités russes ont entrepris, lors de leur présence à Beyrouth, une tournée auprès de responsables religieux libanais pour recueillir leur avis sur les moyens de faire face à ce que Moscou appelle « un plan occidental pour pousser les chrétiens à l’exode ». Interrogé à ce propos, le patriarche maronite, le cardinal Béchara Raï, aurait répondu : « Nous autres chrétiens n’avons pas besoin de protection mais de droits ».
Moscou place en tête de son agenda diplomatique au Moyen-Orient un objectif stratégique à long terme : comment faire échouer ce plan. A plus court terme, son souci est de trouver des mécanismes susceptibles de juguler l’hémorragie qui frappe la démographie chrétienne, sérieusement menacée ces dernières années : 100 000 Coptes ont quitté l’Égypte ; des deux millions de chrétiens irakiens, il n’en reste que 800 000 ; en Syrie, l’exode des chrétiens s’amplifie, de même qu’au Liban et en Palestine. Dans ce contexte, Moscou et des organisations arabes qui sont proches de la Russie commencent à préparer, loin des projecteurs, un congrès des minorités au Moyen-Orient, consacré essentiellement aux chrétiens, qui devrait se tenir en mars prochain.
Al Akhbar (19 décembre 2012)
Hassan Olleik
Le chemin de la prorogation du mandat du directeur général des FSI, Achraf Rifi, n’est pas pavé de roses. Certains officiers candidats potentiels à sa succession ont très mal pris les propos attribués à Rifi dans Al Akhbar par ceux qui le rencontrent régulièrement. Ils se sont surtout sentis offensés par la phrase adressée par Saad Hariri au directeur des FSI : « La période actuelle exige que vous assumez les responsabilités en prorogeant votre mandat d’une ou deux ans, le temps de préparer quelqu’un pour vous succéder ». Les officiers concernés estiment que « M. Hariri veut que les officiers des FSI soient diplômés du palais de Koreytem et non pas de l’École militaire et qu’ils brandissent le fanion bleu et non pas le drapeau libanais. »
Une autre explication est fournie selon laquelle M. Hariri souhaite proroger le mandat de Rifi jusqu’à ce que le chef p.i. des renseignements des FSI, Imad Othman, soit promu au grade de général, ce qui lui permettrait de succéder à Rifi.
Au-delà des objections soulevées par les officiers des FSI, des milieux politiques hauts placés du 8-Mars assurent que la prorogation du mandat de Rifi ne passera pas, car le Courant patriotique libre et le Hezbollah y sont catégoriquement opposés. Ces deux partis séparent le cas de Rifi du projet de prorogation du mandat du commandant en chef de l’Armée, le général Jean Kahwaji. Le président de la Chambre, Nabih Berry, a également lancé une flèche qui a atteint la même cible et il partage l’opinion de ses deux alliés. Un député de son bloc parlementaire a d’ailleurs présenté une proposition de loi visant à proroger le mandat de Jean Kahwaji, en proposant de relever l’âge de la retraite du grade de général de division, ce qui ne concerne pas Achraf Rifi qui n’a pas ce grade.
Des personnes qui ont rencontré le député Walid Joumblatt assurent que le chef du Parti socialiste progressiste refuse de proroger le mandat de ceux qui doivent passer à la retraite, sauf s’il y a unanimité. Achraf Rifi passe à la retraite le 1er avril, et Jean Kahwaji en septembre prochain.
L’Orient-Le Jour (Quotidien libanais francophone proche du 14-Mars)
Philippe Abi Akl (21 décembre 2012)
Dans le méli-mélo interne, quelques points de repère fixes semblent s’imposer. D’abord, la communauté internationale continue d’insister sur deux choses : la poursuite de la politique de distanciation suivie par le gouvernement, ensuite l’organisation des élections législatives à la date prévue. Ces deux constantes ont été notamment au centre de la dernière en date des réunions mensuelles des ambassadeurs des pays de l’Union européenne.
Une seconde constante se dégage par ailleurs du cours des événements. En dépit des apparences et malgré l’insuffisance de son équipement, l’armée continue de s’imposer sur le terrain. Ni les flambées à Tripoli, ni la tension dans les camps, ni les gesticulations des salafistes ne sont parvenues à déstabiliser complètement le pays ou l’entraîner à la discorde.
Ce qui ne veut pas dire que la situation est idéale. En fait, elle est loin de l’être. Ainsi, une nouvelle source d’inquiétude est venue s’ajouter à celles qui existent déjà, avec l’afflux de réfugiés syriens et palestiniens fuyant la furie de Bachar el-Assad. C’est au point que certains, en Conseil des ministres, ont préconisé la fermeture des frontières, à l’exemple de ce qu’ont fait la Turquie ou la Jordanie. Toutefois, pour des raisons humanitaires, le Liban refuse d’adopter une mesure aussi radicale. La stabilité relative de la situation sur le terrain est, d’une certaine façon, inespérée. Car sur le plan politique, aucune démarche ne semble pouvoir décrisper la situation. Même Walid Joumblatt, avec sa sagacité proverbiale, n’est pas parvenu à assouplir le 14 Mars et l’amener à la table de dialogue. C’est au point même que le prochain rendez-vous fixé pour ce dialogue, le 7 janvier, pourrait bien être, une fois de plus, reporté au mois de février. Ce qui pourrait faire bouger la situation, toutefois, c’est peut-être les développements attendus en Syrie, dans les prochains mois. Selon des sources diplomatiques, en effet, l’émissaire de l’Onu, Lakhdar Brahimi, aurait mis au point un plan de règlement à la manière de l’accord de Taëf (1990), qui a mis fin à la guerre au Liban. L’émissaire onusien, qui doit être reçu prochainement par le président Assad, semble avoir l’aval de toutes les parties régionales et internationales à son plan. Toutefois, une source diplomatique européenne révèle que le point de ce règlement portant sur l’avenir politique du chef de l’État syrien ne fait pas l’unanimité, notamment entre la Russie et l’Iran. La République islamique insiste, en effet, pour que Bachar el-Assad trouve sa place dans la Syrie émergente et reste en fonctions jusqu’à la fin de son mandat en 2014, alors que la Russie semble avoir fait son deuil de la dynastie assadienne, tout en étant d’accord avec l’Iran sur le fait qu’un règlement militaire de la crise syrienne est impossible, et qu’il faudra tôt ou tard recourir à la négociation, ce que le vice-président Farouk el-Chareh propose.
La scène libanaise pourrait-elle de nouveau servir de levier politique aux uns et aux autres, pour faire prévaloir leur point de vue et montrer qu’ils ont encore des cartes en main ? C’est fort probable. L’une des cartes jouables porterait sur les prochaines législatives, et le Hezbollah, par exemple, pourrait enrayer le processus électoral avec un package deal incluant l’avenir de la Syrie et la loi électorale, un marché dans lequel, selon certaines sources, il abandonnerait ses armes, en échange d’un nouveau Taëf qui lui permettrait de grignoter un peu plus de pouvoir pour la communauté chiite.
Ainsi, le Liban aurait-il devant lui quelques mois de tempête politique à traverser, encore qu’en définitive tout le monde s’accorde à dire que le prochain gouvernement sera forcément d’entente nationale.
Al Thabat (hebdomadaire libanais proche du 8-Mars, 20 décembre 2012)
Hassan el-Hassan
Les informations sur la fondation à Tripoli d’un « émirat wahhabite » ne viennent pas de nulle part. Effectivement, le chef-lieu du Liban-Nord était à deux doigts d’être proclamé « Emirat wahhabite de Bilad el-Cham » si l’Armée libanaise n’avait pas procédé à un déploiement massif conformément au plan établi par le Conseil supérieur de défense, convoqué d’urgence par le Premier ministre Najib Mikati –le président Michel Sleiman était en voyage- en raison de la gravité de la situation. M. Mikati a pu mesurer l’ampleur du danger après avoir pris connaissance d’une série de rapports et avoir été contacté par deux ambassades occidentales qui ont confirmé les informations sur la volonté de proclamer un émirat wahhabite à Tripoli.
Des sources bien informées rapportent que trois services de sécurité, officiels et non officiels, ont informé M. Mikati que des groupes islamistes extrémistes avaient achevé les préparatifs pour fonder un « émirat », profitant de l’exacerbation des tensions sectaires provoquées par le Courant du futur dans la rue sunnite.
En plus du discours sectaire du Courant du futur, les extrémistes ont profité du laxisme et du laisser-aller des services de sécurité libanais. Aussi, un grand nombre d’hommes armés takfiristes de différentes nationalités se sont infiltrés à Tripoli pour participer à ce projet d’inspiration wahhabite et Frères musulmans, visant à prendre le contrôle de tout le Moyen-Orient.
Aux yeux de cette mouvance, Tripoli constitue une base essentielle au service de ce projet pour les raisons suivantes : sa situation géographique, proche de la Syrie ; l’appartenance confessionnelle de la majorité de ses habitants (sunnites) ; sa situation sociologique : il existe de forts liens entre les habitants de Tripoli et les régions syriennes frontalières.
Selon les informations disponibles, les takfiristes comptaient, en cas de réussite de leur projet, placer les chrétiens devant trois choix : se convertir à l’islam, payer la jezia (impôt) ou quitter la ville. Les alaouites, eux, étaient voués à la mort et à l’exode.
Haaretz (quotidien israélien, 18 décembre 2012)
Les États-Unis ont récemment proposé au Liban et à Israël une carte des sous-sols marins dans une tentative de régler le différend entre les deux pays sur les champs gaziers découverts en Méditerranée. Mais « les deux pays n’ont pas répondu à la proposition américaine ». Cette carte aurait été transmise aux deux pays il y a quatre mois, selon des responsables dans les ministères américain et israélien des Affaires étrangères.
Le secrétaire d’État adjoint américain à la diplomatie de l’énergie, Amos Hochstein, précise que « les États-Unis ont voulu agir comme un médiateur et proposer une délimitation des frontières maritimes qui se fonde sur la loi internationale et les conventions mondiales ». Toujours selon Hochstein, Washington estime qu’il veut contribuer à un accord entre le Liban, Israël et Chypre autour des zones économiques de chaque pays ».
Un responsable américain a précisé que l’initiative de transmettre la carte aux deux pays vient du fait qu’Israël et le Liban ne peuvent avoir de contacts directs pour parvenir à un compromis. Cette carte, selon cette source, « se fonde sur les recherches d’experts américains, et ne vise pas à délimiter des frontières maritimes, mais tout simplement à proposer un compromis pour départager de façon équitable les eaux internationales et leurs champs gaziers ».
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