Rencontre du président russe Vladimir Poutine avec le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov et le ministre russe de la Défense Sergueï Choïgou
Le président russe Vladimir Poutine s’est entretenu avec le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov et le ministre russe de la Défense Sergueï Choïgou pour évoquer le règlement du conflit syrien. Le président a ordonné le retrait de la majeure partie du contingent militaire russe de Syrie dès le mardi 15 mars.
Le chef de l’État russe a également chargé le ministère des Affaires étrangères d’intensifier la participation de la Russie à la mise en œuvre du processus de paix en Syrie.
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Vladimir Poutine : Chers collègues, je vous ai invités pour étudier de nouveau le règlement de la crise syrienne. Je propose d’abord au ministre de la Défense de présenter son évaluation des faits. S’il vous plaît.
Sergueï Choïgou : Monsieur le président !
Conformément à vos ordres, nous avons entamé le 30 septembre dernier notre opération en Syrie. Depuis, nous avons effectué plus de 9 000 vols, lancé pour la première fois des tirs massifs avec des armes dispersées à une distance de plus de 1 500 kilomètres utilisant des missiles air-sol et mer-sol.
Nos frappes ont permis de freiner considérablement voire d’arrêter dans certaines régions l’approvisionnement des terroristes, qui s’adonnaient à un trafic d’hydrocarbures. Nous avons coupé les voies principales de transit des hydrocarbures vers la Turquie, ainsi que les canaux essentiels d’approvisionnement des terroristes en armes et en munitions.
Les terroristes ont été repoussés de la ville de Lattaquié, la communication avec la ville d’Alep a été rétablie, Palmyre est actuellement en blocus : sa libération des groupes armés illégaux qui l’occupent est toujours en cours. On a libéré la plus grande partie des provinces de Hama et de Homs, levé le blocus de la base aérienne de Kuweires — assiégée pendant plus de trois ans — et pris le contrôle de champs pétroliers et gaziers près de Palmyre : ces trois gisements importants ont repris leur fonctionnement normal.
Nous avons également éliminé plus de 2 000 djihadistes sur le territoire syrien, y compris des ressortissants russes, et 17 chefs de guerre. Notre aviation a détruit 209 sites d’extraction, de traitement et de transfert du pétrole, ainsi que 2 912 moyens de transport des hydrocarbures et camions-citernes.
Le soutien de notre aviation a permis aux troupes syriennes de libérer 400 villes et villages, ainsi que plus de 10 000 kilomètres carrés de territoire. Il s’agit d’une percée dans la lutte contre le terrorisme.
Les organisations qui ont accepté le cessez-le-feu grâce aux négociations — il en existe aujourd’hui 42 — ainsi que les villes qui ont rejoint le camp de la paix — plus de 40 — agissent pour garantir cette trêve.
Nous avons assuré le respect du cessez-le-feu en impliquant un groupe important de drones — plus de 70 appareils — ainsi que tous les moyens de renseignement, y compris des radars et notre groupe de satellites.
Je pourrais poursuivre mon rapport, monsieur le président, mais je pense avoir mentionné les résultats principaux pour cette période.
Vladimir Poutine : Merci.
Monsieur Lavrov, qu’en est-il du règlement du conflit par la voie pacifique ?
Sergueï Lavrov : Monsieur le président, l’opération de nos forces aérospatiales a non seulement permis d’obtenir des résultats militaires substantiels sur le terrain et de repousser les terroristes, mais a aussi contribué à réunir les conditions nécessaires pour lancer un processus politique.
Nous avons soutenu de manière cohérente le développement du dialogue entre les différentes parties syriennes conformément aux décisions adoptées dès 2012. Nos propositions se sont heurtées à l’absence de volonté de nos collègues sur cette question mais quoi qu’il en soit, la situation a commencé à changer dès le début des opérations de nos forces aérospatiales.
Tout d’abord, nous avons lancé des initiatives en nous basant sur les résultats de vos entretiens avec le président états-unien Barack Obama : le couple russo-US a lancé les préparatifs d’une aide plus large aux négociations syriennes. Cela concerne notamment la création du Groupe international de soutien à la Syrie incluant tous les acteurs-clés du dossier, y compris les puissances régionales. Les accords sur les conditions du processus de paix en Syrie, concertées au sein de ce groupe, ont été ensuite adoptés par deux résolutions du Conseil de sécurité de l’Onu fixant un processus qui s’appuie sur trois facteurs : l’arrêt des hostilités, l’élargissement de l’accès de l’aide humanitaires aux régions bloquées par le passé, et le lancement des négociations intra-syriennes.
Toutes ces décisions, y compris votre dernier accord avec le président Obama, ont permis de relancer aujourd’hui à Genève les négociations intra-syriennes entre les délégations du gouvernement et les groupes d’opposition. Il s’agit d’un travail difficile et on ne sait toujours pas comment tous ces mouvements pourront se réunir à la même table pour négocier. Pour le moment, les responsables de l’Onu travaillent avec tous ces groupes de manière individuelle, mais le processus a déjà débuté et nous avons intérêt à le rendre stable et irréversible.
Vladimir Poutine : La Russie a créé très rapidement en Syrie un groupe militaire réduit mais très efficace, qui allie des forces et des équipements diversifiés - le renseignement spatial, les drones, l’aviation de chasse et d’assaut ou encore les forces de la marine qui ont utilisé des armes très modernes lancées par des navires de surface et des sous-marins depuis la Méditerranée et la mer Caspienne. Nous avons créé un système antiaérien puissant basé sur les systèmes de missiles sophistiqués S-400.
Le travail efficace de nos militaires a permis de réunir les conditions pour lancer le processus de paix. A mon avis, le ministère de la Défense et les forces armées russes ont rempli leurs objectifs en République arabe syrienne.
La participation des militaires russes, du groupe militaire russe, a permis aux troupes syriennes et aux forces patriotiques du pays de changer radicalement la situation dans la lutte contre le terrorisme international, de reprendre l’initiative pratiquement sur tous les fronts, et de réunir — comme je l’ai déjà dit — les conditions nécessaires pour le lancement du processus de paix.
Nos militaires, nos soldats et officiers ont fait preuve de professionnalisme, d’esprit d’équipe, de capacité à organiser ce travail militaire loin de leur pays — puisque nous n’avons pas de frontière commune avec ce théâtre d’opérations. Ils ont travaillé efficacement pendant près de six mois, en assurant l’approvisionnement nécessaire et le commandement des opérations.
A mon avis, le ministère de la Défense et les forces armées russes ont rempli leurs objectifs. C’est pourquoi j’ordonne au ministre de la Défense de lancer demain le retrait du groupement principal de notre contingent en République arabe syrienne. Et je demande également au ministère des Affaires étrangères d’intensifier la participation de la Fédération de Russie à la mise en œuvre du processus de paix visant à résoudre le problème syrien.
Notre base navale de Tartous et la base aérienne russe de Khmeimim conserveront leur régime actuel de fonctionnement. Il faut assurer leur protection sur terre, en mer et dans les airs.
Cette partie de notre armée se trouve en Syrie depuis des années. Aujourd’hui elle sera chargée d’une mission cruciale : assurer le respect du cessez-le-feu et réunir les conditions nécessaires pour lancer le processus de paix.
J’espère que cette décision sera un bon signal pour tous les belligérants, permettra de renforcer considérablement la confiance entre tous les participants aux processus de paix en Syrie et contribuera au règlement pacifique de la question syrienne.
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