Le problème irakien des États-Unis doit être traité par moins de généraux et plus de sociologues comprenant comment les sociétés fonctionnent.
Le plan néo-wilsonien consistant à transformer l’Irak en démocratie et à rapatrier nos troupes rapidement ne fonctionne pas. Cela n’a jamais fonctionné ainsi dans les pays qui était moins préparés à la démocratie que l’Allemagne et le Japon. Il faut aussi tenir compte du fait que les Irakiens sont très patriotes et s’opposent presque tous à la présence états-unienne. Les États-Unis essayent en vain d’obtenir le soutien de la population en reconstruisant le pays à grands frais (en raison de difficultés locales et du mercantilisme des entreprises US). En outre, les premières phases des démocraties (qui durent des décennies) sont marqués par une explosion des comportements antisociaux. Aujourd’hui en Irak, les crimes et viols augmentent , ce qui va développer plus de cas de séropositivité, la destruction des familles, l’abandon des enfants et l’accroissement de l’abus de drogue et d’alcool. La Russie a connu un phénomène semblable avec la démocratisation et les Irakiens, scandalisés par ces pratiques se chercheront donc vite un Vladimir Poutine.
Affirmer que les États-Unis ne partiront d’Irak qu’une fois le développement économique et politique bien amorcé n’a donc pas de sens. Les Américains ne sont pas prêts à payer une longue occupation. Toutefois, partir vite après avoir déclaré la victoire n’est pas non plus souhaitable car cela pourrait déboucher sur une guerre civile. Il faut donc adopter une position médiane qui consiste à laisser à un gouvernement élu les rennes du pouvoir, tout en continuant à le conseiller et conserver trois grandes bases en Irak : une dans le Kurdistan près de l’Iran, une à Bassora avec un accès au port et un grand aéroport dans le nord-ouest du pays.
Cela permettra d’empêcher le pays de développer des armes de destruction massive, d’éviter une guerre civile, de conserver une capacité de projection dans la région et de maintenir la pression sur l’Iran et la Syrie.
« A sociologist’s Iraqi exit strategy », par Amitai Etzioni, Christian Science Monitor, le 18 novembre 2003.
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