Depuis 1967, les partisans de la paix entretiennent la sacro-sainte formule " paix contre territoire ", mais l’annonce d’un retrait unilatéral de Gaza par Ariel Sharon est une tentative de sortir de ce schéma. Contrairement à la " feuille de route " de George W. Bush, il ne s’agit pas d’un moyen de relancer le processus de paix israélo-palestinien, mais de prendre des mesures préventives visant à obtenir non pas à une paix avec les Palestiniens, mais à une paix de la part des Palestiniens.
L’objectif est de se séparer du problème palestinien en réactivant le vieux mythe sioniste de la forteresse assiégée et le vieux cliché sioniste de la Palestine, sans les Palestiniens, accrédités par la construction du Mur. Israéliens et Palestiniens nient la peine que l’autre camp éprouve et veulent que la leur soit seule reconnue. Le plan de Sharon est dans cette logique. Il vise à réduire les souffrances israéliennes sans se soucier de celles des Palestiniens. Sharon n’a d’ailleurs même pas consulté l’Autorité palestinienne avant de l’annoncer. Il agit comme Begin qui avait abandonné le Sinaï à l’Égypte en espérant qu’elle n’aborderait pas la question palestinienne en échange. Rabin s’était fait élire avec le slogan " mettre Gaza hors de Tel-Aviv ", tandis que Sharon veut conserver Israël et la Cisjordanie en lâchant Gaza. Il n’a d’ailleurs pas fait mystère qu’il n’accepterait pas d’abandonner plus de 55 % de la Cisjordanie.
Quoi qu’il en soit, les déclarations de Sharon ont brisé le tabou de l’abandon des colonies et offrent donc une opportunité qu’il faut saisir. Il est important de s’appuyer sur ce précédent pour que la communauté internationale contraigne Sharon à effectivement quitter les territoires.

Source
International Herald Tribune (France)
L’International Herald Tribune est une version du New York Times adaptée au public européen. Il travaille directement en partenarait avec Haaretz (Israël), Kathimerini (Grèce), Frankfurter Allgemeine Zeitung (Allemagne), JoongAng Daily (Corée du Sud), Asahi Shimbun (Japon), The Daily Star (Liban) et El País (Espagne). En outre, via sa maison-mère, il travaille indirectement en partenarait avec Le Monde (France).

« Not a peace plan, but not to be dismissed », par Jerrold Kessel et Pierre Klochendler, International Herald Tribune, 18 février 2004.