La décision de l’Autorité provisoire de la Coalition de lever l’interdiction faite aux membres du parti Ba’as d’accéder à des postes gouvernementaux a soulevé l’indignation d’une partie des cercles politiques irakiens. Amhed Chalabi a affirmé que cela équivalait à autoriser les nazis à revenir dans le gouvernement allemand après la Seconde Guerre mondiale. C’est précisément ce dont il s’agit.
Historiquement, les pays qui ont essayé de mener une transition démocratique ont toujours dû ramener au pouvoir au moins certains des membres de l’ancien régime. Les États-Unis avaient réalisé après la Seconde Guerre mondiale qu’ils ne pourraient pas reconstruire l’Allemagne sans l’aide d’au moins certains nazis. De même au japon, ils avaient dû s’appuyer sur certains responsables du régime qui avait mené la guerre, en commençant par l’empereur Hiro Hito. Bien sûr, ces mesures ont été prises dans le contexte de la Guerre froide et pour combattre l’URSS mais cela avait également comme objectif de redresser les pays en bénéficiant de l’expertise d’anciens membres du régime. On organisa donc les procès des pires criminels puis on amnistia la plupart des autres. Ce procédé s’est répété partout ces 50 dernières années même si dans certains cas cela s’accompagnait de la création de commission vérité.
Il existe toutefois des différences entre les situations en Europe ou en Amérique latine et celle aujourd’hui en Irak. Dans les premiers pays, les dirigeants des anciens régimes ont presque toujours abandonné volontairement le pouvoir en échange d’une amnistie et de l’impunité, les Ba’asistes ont été chassés du pouvoir par une armée étrangère même s’ils gardent de l’influence. L’autre différence c’est que beaucoup d’irakiens affirment être des opposants à Saddam Hussein de longue date et qu’ils ne supportent pas un retour des oppresseurs. Ils doivent cependant admettre que le plus important est un retour de l’ordre et de la souveraineté. L’Autorité provisoire de la Coalition semble l’avoir réalisé et devrait donc réintégrer les ba’asistes.

Source
New York Times (États-Unis)
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« Bring Back the Baathists », par Eric Posner, New York Times, 28 avril 2004.