Les médias occidentaux présentent la résolution 1731 du Conseil de sécurité comme sanctionnant l’activité nucléaire de l’Iran. Au contraire, selon la presse russe, les sanctions prises visent uniquement à geler l’achat par l’Iran de matériels à possible usage militaire tant qu’un protocole de surveillance n’est pas conclu avec les inspecteurs de l’AIEA. Piotr Gontcharov souligne que Moscou, loin de s’opposer à Téhéran, poursuit la construction de la centrale de Bushehr. Les Russes utilisent cette situation pour contraindre les Iraniens à payer des factures en retard.
Moscou entend accélérer les travaux sur le chantier de la centrale nucléaire de Bushehr. La visite effectuée dans la capitale iranienne à la mi-décembre par Serguéï Kirienko,le patron de Rosatom (Agence fédérale de l’énergie nucléaire), a permis une percée à ce égard. Son équipe a littéralement exhorté Téhéran à répondre aux desiderata du maître d’œuvre russe Atomstroyexport concernant le règlement de plusieurs problèmes pressants.
La rencontre entre Serguéï Kirienko et Gholamreza Aghazadeh, vice-président iranien et responsable de l’Organisation iranienne de l’énergie atomique, a été le moment fort de cette visite.
Au cours de la conférence de presse tenue à l’issue des pourparlers, la partie iranienne a tenté de maintenir la discussion dans le cadre de la rhétorique traditionnelle. « La volonté politique des deux pays est que la date de la mise en service de la centrale nucléaire soit conforme à celle qui a été fixée », a déclaré avec emphase Aghazadeh. Cependant, le patron de Rosatom s’est montré inflexible. « Moscou, lui non plus, ne voit pas d’obstacles politiques de nature à empêcher le lancement de la centrale nucléaire de Bushehr dans les délais prévus. Mais la Russie ne pourra achever rapidement le chantier de Bushehr que si elle en a les moyens sur le plan technique », a martelé Kirienko, en mettant les points sur les « i ».
En d’autres termes, le directeur de Rosatom a adressé un ultimatum à Téhéran : soit nous nous débarrassons de ce qui nous empêche de travailler, soit nous reportons les délais. Et Sergueï Kirienko a indiqué, concrètement, ce qui entrave le travail : le sous-financement chronique, qui dure depuis longtemps, ainsi que les retards dans les livraisons de matériels, surtout en provenance de pays tiers.
Ce sont là des problèmes qui ne datent pas d’hier et qui sont bien connus. Téhéran a pris l’habitude d’effectuer ses paiements mensuels en plusieurs fois, bien souvent en versant une partie de la somme due le mois suivant. La confusion comptable qui s’ensuit se traduit finalement par un sous-financement.
En ce qui concerne les livraisons d’équipements en provenance de pays tiers, le problème réside dans le fait qu’à une époque, l’Iran avait préféré à certains types de matériels russes leurs équivalents occidentaux, sans prendre aucune assurance. Il s’avère aujourd’hui que certaines de ces sociétés préfèrent se tenir à l’écart du chantier de Bushehr, craignant des sanctions états-uniennes.
Après un deuxième round de négociations mené par le directeur d’Atomstroyexport, Serguéï Chmatko, les deux parties semblent avoir trouvé les moyens de se comprendre. Pour ce qui concerne les retards éventuels dans les livraisons d’équipements en provenance de pays tiers, elles ont convenu, pour les principaux équipements, de conclure plusieurs contrats « parallèles », de manière à ne pas risquer d’être dépendantes d’un fournisseur unique.
Les deux parties sont parvenues à s’entendre aussi sur la régularité du financement dans le cadre du contrat en vigueur. L’Iran s’est rallié à la position russe, après avoir exposé la sienne. Maintenant que le problème de la régularité du financement est réglé, Atomstroyexport « ne voit plus de risques importants à même de retarder le démarrage physique de la centrale. Mais le projet est très ambitieux et requiert des efforts substantiels des deux parties », a souligné Serguéï Chmatko.
La centrale de Bushehr est depuis longtemps sortie du cadre des rapports bilatéraux et du business pur. Pour Le Monde, l’obstination de la Russie est à l’origine de toutes les difficultés auxquelles les « Six » se sont hurtés dans l’élaboration de la résolution du Conseil de sécurité 1731 sur l’Iran. Pour le quotidien parisien, les pourparlers ont buté principalement sur l’opposition de la Russie à des mesures punitives contre l’Iran, mesures qui uaraient pu lui être préjudiciables dans le cadre de la construction de la centrale nucléaire de Bushehr.
Se référant à des diplomates occidentaux, le journal écrit que les représentants russes se sont catégoriquement opposés à la demande des pays occidentaux de ne pas accorder de visas aux responsables des programmes iraniens sensibles. Moscou a accepté d’interdire les virements aux structures iraniennes liées aux programmes nucléaires et balistiques, mais a refusé de geler les comptes bancaires de ces structures à l’étranger, poursuit Le Monde.
Selon l’auteur de l’article, cette position s’explique par le fait que l’Organisation de l’énergie atomique de l’Iran possède en Russie des comptes bancaires liés au contrat concernant la construction de la centrale nucléaire de Bushehr. Le journaliste en conclut que la Russie est parvenue à édulcorer la résolution préparée par les Européens de ses éléments essentiels, tout en revenant sur ce qu’elle avait accepté en octobre.
Même si des sanctions contre l’Iran étaient introduites dans les semaines à venir, il est d’ores et déjà évident que, dans le meilleur des cas, elles ne seraient que symboliques, regrette l’auteur de l’article.
Les dirigeants d’Atomstroyexport qualifient pour leur part ces affirmations de purement gratuites. Ils se disent certains que le combustible nucléaire commencera à être livré en mars 2007, que le démarrage physique de la centrale aura lieu en septembre et que du courant sera produit en novembre.
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