Les trotskistes ont pris la Maison Blanche.
_Les gens qui ne sont pas des américanistes expérimentés s’étonnent quand on leur dit que les penseurs de l’administration Bush sont des trotskistes. Il s’agit de membres du gouvernement, de politologues et de publicistes emmenés par le vice-secrétaire à la défense Paul Wolfowitz. Ils appliquent la théorie de la révolution permanente de Trotsky à la politique du président George W. Bush, contre ce qu’ils appellent " les forces du mal ". Cette doctrine, masquée sous l’appellation respectable de " combat contre le terrorisme international " doit mener à l’hégémonie de la Washington impériale.
A une époque, Washington a reproché au Kremlin, alors soviétique, d’être à l’origine de la théorie des dominos. La politique extérieure de Bush et sa ligne géopolitique tiennent aussi de la théorie des dominos et se font aussi " au nom de la liberté ". A la question de quelqu’un qui lui demandait pourquoi il soutenait certains " fils de putes " de généraux dictateurs en Amérique latine, Franklin Roosevelt répondit " parce que ce sont nos fils de putes ". Bush procède de même, il évince celui qui ne lui convient pas et ménage ceux qui font son affaire. Il est prêt à apporter la démocratie en Iran, mais pas en Arabie Saoudite ; en Syrie mais pas au Koweït. Il est inacceptable que l’Iran fabrique une bombe atomique mais pour le Pakistan, c’est d’accord. On pourrait dire que ce qui caractérise cette conduite, c’est qu’elle part du principe qu’il n’y a aucun principe.
Il y a une autre de ces forces du mal que les Américains n’osent pas nommer, c’est la Russie. Il ne peut pas y avoir d’attaque directe contre elle comme en Irak, c’est pourquoi on a ressorti cette vieille stratégie d’isolement qui sent bon la naphtaline. Les pays de l’aire post-traité de Varsovie vont être incorporés à l’OTAN, les pays de l’aire post-soviétique sont confrontés à des " révolutions colorées ". Tout cela pour provoquer une désintégration de la Russie à la manière de l’URSS, ou sa capitulation inconditionnelle. La théorie de l’ingérence permanente des États-Unis dans les affaires internes de pays tiers est portée par la destiné messianique de Bush : il se pose en libérateur des peuples terrorisés. La prochaine cible est le potentiel nucléaire iranien, puis vient le changement de régime à Cuba, soit par la mort de Fidel Castro, soit par une variante cubaine de la " révolution orange ".
Napoléon lui aussi voulait libérer l’Europe de l’absolutisme même si c’était par la guerre. Il a provoqué une ère durable d’intenses réactions. Si on regarde l’Irak, la pratique de l’ingérence armée n’y affaiblit pas le terrorisme, elle l’y nourrit. La politique à l’égard de la Russie est tout aussi myope et contre-productive. Mettre la Russie à genoux, c’est provoquer les conditions d’une réaction dangereuse en générant des forces et mouvements nationalistes qui transformeraient le pays en un état-garnison. Seule une Russie forte peut se démocratiser. Ceux qui la rejettent ou la dénigrent affaiblissent sa position et donne du grain à moudre aux forces les plus réactionnaires au sein des organes de pouvoir qui sont à la recherche de tels arguments pour faire avancer leur contre-révolution.
« Большая дубинка Буша », par Melor Sturua, Moskovski Komsomolets, 11 Février 2005.
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