Les résultats des élections étaient prévisibles, nous n’attendions pas autre chose que la victoire du porte-monnaie. Dans notre pays, le pouvoir politique et économique appartient à un seul clan familial et comme le pays est petit, tout se sait. A l’approche des présidentielles de cet automne, il n’était pas souhaitable pour le gouvernement corrompu en place de voir entrer au parlement des députés plutôt indépendants et d’humeur oppositionnelle. Le pouvoir préfère cyniquement faire rentrer des criminels au Parlement que des gens honnêtes qui représentent un danger mortel. Dans de nombreuses régions, la campagne électorale se déroule selon le principe : " ce que l’on ne peut pas acheter pour une grosse somme, on peut l’acheter pour une très grosse somme ". Même certaines personnes, qui étaient encore proches du président il y a peu, sont de cet avis.
Certaines informations portent à croire qu’un des plans du gouvernement actuel pour garder le pouvoir c’est de créer une situation d’instabilité artificielle dans le pays. Cela permettrait éventuellement à Askar Akaïev de reporter les élections " selon la volonté du peuple ". Dans le sud du pays, le chef de l’administration a recruté 500 Ouzbeks pour s’opposer aux Kirghizes, dans mon village aussi des inconnus ont essayé de provoquer des conflits interethniques. La peur de perdre le pouvoir pousse le gouvernement à des actions des plus dangereuses. C’est pour cela que j’ai demandé à la Russie d’assurer la sécurité du président s’il acceptait de quitter volontairement le pouvoir, conformément à la constitution, car plus personne n’a confiance en lui, même son entourage. Les régimes corrompus et les gens qu’ils soutiennent sont le plus grand danger pour la Russie dans la région. Ils ne pensent qu’à leurs intérêts et peuvent donc être achetés par la narcomafia, les terroristes, les organisations religieuses et politiques extrémistes. Ce n’est pas un hasard si beaucoup de ces gens arrêtés à l’étranger avaient des passeports kirghizes.
Nous ne tomberons pas dans le piège des provocations. Nous allons chercher des gouvernements susceptibles d’utiliser leur influence sur Akaïev pour empêcher la destruction du pays et la dérive définitive vers l’autoritarisme. Nous allons créer un front d’opposition politique uni ; je dois signaler qu’il y a actuellement un mouvement qui demande l’annulation des résultats et la démission d’Akaïev, cela ne fait que commencer. Je suis en prison mais toujours présent en politique. Une plainte de mes avocats concernant la violation de mes droits est examinée en ce moment par le comité au Droits de l’homme de l’ONU à Genève. De l’avis de juristes internationaux, il y a 100% de chances que le jugement à mon encontre soit invalidé. Si c’est le cas avant l’été, je pourrai me présenter aux élections présidentielles d’octobre.
« Феликс Кулов готовится к участию в президентских выборах », par Félix Koulov, Vremya Novostyey, 15 mars 2005. Ce texte est adapté d’une interview.
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