À toutes les époques, des hommes politiques ont rêvé d’une Europe puissance pesant d’un bloc sur la marche du monde. Surgit-il une difficulté sur la voie impériale de l’intégration européenne, la réponse consiste à invoquer plus d’Europe et à réfuter les contre-arguments en les présentant comme opposés au sens de l’Histoire. Toutefois, avec la réunification du continent, alors que prévaut un monde globalisé et multipolaire, il convient de réfléchir à la construction européenne.
L’Union européenne est fondée sur l’idée que des pays géographiquement proches doivent avoir de bonnes relations, mais même s’il faut se féliciter de la paix dans le continent et du développement des échanges, on ne peut en déduire que ces États doivent fusionner. En outre, la globalisation a relativisé la notion de proximité. Il faut admettre qu’en Europe, chaque État veut conserver des mains nationales sur des secteurs clés qu’il considère comme vitaux et défend son identité et ses objectifs propres en politique étrangère.
On nous dit que les pays européens partagent des valeurs communes, mais les Droits de l’homme sont désormais universels. L’Europe serait le seul moyen de peser sur le plan international, mais le conflit irakien a démontré que la politique extérieure et de défense commune était une gageure. Laisser la place du Royaume-Uni et de la France au Conseil de sécurité à l’Union européenne est une chimère et même le front commun dans les négociations de l’OMC se brise sur les intérêts des États. En réalité, l’Europe de papa est morte et elle doit se refonder sur les nations.
Il faut refonder une union qui sera une union d’États souverains qui contrôlera un marché unique simplifié et davantage déréglementé. La Commission européenne devra veiller au respect des règles de concurrence, à la sauvegarde des services publics et aux politiques communes dans le domaine de l’environnement, des normes sanitaires et de la coordination des transports. La Banque centrale devra passer sous contrôle du Conseil européen. La défense et les litiges entre États devront être assurés par la coopération entre États dans un Conseil européen de sécurité. L’instance suprême de la nouvelle Europe sera le Conseil européen des chefs d’État et de gouvernements. La présidence sera tournante, de deux ans, entre les 6 Grands : Allemagne, Grande-Bretagne, Italie, Espagne, Pologne et France, les autres détenant les présidences de la Commission. Le Conseil des ministres assiste le Conseil européen et contrôle la Commission. Le Parlement européen devient une émanation des Parlements nationaux, le Congrès des nations.
« L’Europe de papa est morte », par Jacques Myard, Le Monde, 2 juin 2004.
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