« Ces morts, nous les avons tous en commun »

J’ai été invité aux commémorations du 6 juin 2004 en tant que représentant d’une Allemagne démocratique et membre de la communauté des nations, désireuse avec la France d’offrir une perspective à l’Europe. Il ne s’agit pas de nier la responsabilité et la culpabilité de l’Allemagne, mais il faut moins parler de culpabilité et plus de responsabilité à l’égard des générations futures. Un débat est né en Allemagne concernant ma présence dans un cimetière britannique plutôt que dans un cimetière allemand, mais le cimetière où je me suis rendu était un cimetière international où reposent 300 Allemands et je voulais rendre hommage à tout ceux qui sont tombés à cause de la cruauté d’Hitler.
L’Amérique du 6 juin 1944 est la même que celle qui est intervenue en Irak, mais nous avons eu raison avec la France de critiquer cette intervention. Cette critique est une étape dans le processus d’émancipation de l’Allemagne qui s’est amorcé avec la réunification. Les États-Unis et l’Europe ont des visions différentes, mais les États-Unis ont compris qu’ils ne pourraient pas gagner la paix sans l’aide de l’Europe. L’Allemagne n’enverra pas de troupes en Irak, mais aidera à l’entraînement des forces irakiennes et aidera financièrement le futur gouvernement irakien. L’Allemagne veut un Irak stable. La France et l’Allemagne sont par ailleurs en train d’étudier la proposition de résolution anglo-américaine.
L’ONU est en train de se réformer sous l’impulsion de Kofi Annan. L’Allemagne souhaite avoir un siège permanent au Conseil de sécurité car elle est une démocratie qui a désormais une politique étrangère souveraine. Je ne pense pas, quoi qu’on en dise, sacrifier la politique intérieure à la politique étrangère et je considère d’ailleurs que la politique européenne est de la politique intérieure. En ce qui concerne l’Union européenne, je suis favorable à l’entrée de la Turquie dans l’Europe si elle répond aux critères d’adhésion définis en 1993, tout comme Jacques Chirac. Au sommet de l’OTAN à Istanbul, je soutiendrai le projet de « Grand Moyen-Orient » pourvu qu’il n’impose rien aux pays arabes. Je pense également qu’il est peu souhaitable que l’OTAN intervienne en Irak, mais quelle peut jouer un rôle dans la résolution du confit israélo-palestinien même si, comte tenu de son histoire, l’Allemagne ne pourrait pas participer à une force internationale dans ce pays. L’arrestation de Ben Laden ne mettra pas fin au terrorisme, tant que les conflits qui font naître le terrorisme n’auront pas pris fin.