Il est difficile de ne pas être pessimiste en observant la situation en Irak. Le manque de sécurité élémentaire et la peur que ressentent les Irakiens nourrit l’antiaméricanisme. L’Irakien moyen a peu de chance d’être victime de la violence, mais la peur empoisonne le débat politique. En outre, les Arabes irakiens ont tendance à avoir une faible estime des politiciens irakiens qui travaillent avec les États-Unis.
Les Sunnites s’inquiètent de leur perte de domination, même ceux qui sont favorables à la démocratie. Le nouveau président irakien, le Sheikh Ghazi Ajil al-Yawar, une figure sunnite de Mossoul, issu d’une tribu mêlant sunnite et chiite, pourra aider le gouvernement par intérim. Mais il ne fait pas de doute que sa légitimité sera bientôt remise en cause par ceux qui ne veulent pas d’un nouvel Irak. Si les sunnites du nouveau gouvernement perdent leur légitimité avant janvier, il sera difficile d’organiser des élections dans le triangle sunnite à cette date. Le clergé sunnite pourrait aider à calmer la situation, mais il est divisé entre une partie modérée et une partie radicale d’inspiration wahhabite et on ignore encore qui l’emportera.
La position du clergé chiite dans cette lutte interne du clergé sunnite est utile car il pousse à la modération. Les chiites sont beaucoup moins réticents face à la démocratie et le grand ayatollah Sistani n’a pas exprimé de réserves sur la sélection de M. Allaoui comme Premier ministre. Il sait que ce dernier n’a pas de base solide en Irak et qu’il devra s’appuyer sur les chiites. Sistani continue donc de contrôler la destinée d’un Irak démocratique. Il ne fait cependant pas de doute que Sistani se méfiera du gouvernement par intérim tant qu’il n’aura pas fait la preuve qu’il organisera des élections.
Les Kurdes de leur côté donnent des migraines à tous car ils veulent une autonomie que les chiites refusent, tout comme ils refusent un droit de veto sur la constitution aux Kurdes que ces derniers exigent.
En dépit de toutes ces mauvaises nouvelles, il faut garder l’espoir car une majorité d’Irakiens souhaite avoir un gouvernement représentatif.
« Democratic Revolution ? », par Reuel Marc Gerecht, Wall Street Journal, 15 juin 2004.
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