Après les évènements en Géorgie, j’ai écrit un livre ou j’analysais la technique de la révolution des roses. Cette technique fonctionne quand le terrain est déjà favorable au développement de la démocratie. Elle serait applicable chez nous car il n’y a pas de censure, de nombreux médias d’opposition existent et il y a plus de 5000 ONG. Il est aussi important de comprendre que les spécificités de l’Asie centrale font que la tentative d’y exporter une révolution de velours peut déclencher une guerre civile. Nous avons déjà l’exemple du Tadjikistan où l’opposition et le pouvoir ont provoqué une guerre qui a duré 7 ans. Nous ne sommes pas de culture européenne comme la Géorgie ou l’Ukraine, et le danger pour nous serait une alliance entre la partie radicale de l’opposition et les partis islamistes radicaux.
L’entente a toujours été cordiale avec la Russie ; ce n’est pas un hasard si presque toutes les chaînes de télévision russes sont retransmises chez nous et si on y imprime plus d’une dizaine de journaux dans cette langue.
Il n’y a aucun malentendu entre le Kirghizistan et la Russie concernant la présence des Américains sur la base de Manas. J’avais en 2001 consulté les présidents russe et kazakh, et cela allait dans le sens de leurs intérêts. Le statut de cette base de Manas est défini dans une résolution du Conseil de Sécurité de l’ONU, cette base demeurera tant que la stabilité n’est pas assurée en Afghanistan. Les forces armées américaines présentes au Kirghizistan quitteront le territoire dès que le mandat de l’ONU expirera. La base russe de Kant sera suffisante pour assurer la sécurité de la région. Pour l’instant ces deux bases sont complémentaires, car elles ont des objectifs différents : la base américaine est là pour soutenir l’opération anti-terroriste en Afghanistan, tandis que la base russe assure la sécurité de toute la région d’Asie Centrale.
La Russie a toujours été, est, et restera notre principal partenaire stratégique ; les États-Unis devront définir leur attitude vis à vis de notre pays en fonction de ce facteur. Dans un futur proche, nous allons mettre en œuvre avec les Russes la construction d’une énorme centrale hydro-électrique sur le fleuve Naryn, le montant de l’investissement devrait être de 2 milliards de dollars. La construction va être assurée par la société russe " RUSAL " [1], c’est très important pour nous car nous projetons aussi de construire une nouvelle usine d’aluminium. Nous avons toutes les ressources nécessaires à notre disposition, de l’énergie bon marché et des réserves importantes de bauxite.
« В ПРЕДДВЕРИИ ЕЩЕ ОДНОЙ "БАРХАТНОЙ РЕВОЛЮЦИИ" », par Askar Akaïev, Nezavissimaïa Gazeta. le 28 Janvier 2005. Ce texte est adapté d’une interview.
[1] acronyme pour Russie-Aluminium
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